Il n’est pas question ici de la nouvelle lune dans le sens astronomique de l’expression, mais de la première apparition du croissant lumineux, vers le couchant, deux ou trois jours après la nouvelle lune astronomique. C’était aussi là ce qu’on entendait par nouvelle lune chez plusieurs peuples de l’antiquité, où ce jour était signalé par des solennités religieuses ; et il n’y a plus aucun doute à avoir quand on sait que plus tard le Sanhédrin se réunissait à Jérusalem à l’approche de la nouvelle lune, pour que le premier Israélite qui apercevait le croissant vint le lui annoncer, et qu’il fit répandre cette nouvelle par tout le pays au moyen de signaux allumés sur les hauteurs.
Les nouvelles lunes ordinaires n’étaient point des fêtes de première importance, bien qu’elles fussent signalées par le retentissement des trompettes, comme les fêtes solennelles (Nombres 10.10), et qu’elles fussent accompagnées d’holocaustes renforcés (Nombres 28.11-15). On peut conclure de 1 Samuel 20.5, qu’elles prenaient souvent le caractère de fêtes de famille. Ce n’étaient pas des jours fériés. Mais il est probable que plus tard, et surtout dans le Royaume des dix tribus (Amos 8.5 et sq.), elles acquirent une plus grande importance.
En revanche, la septième nouvelle lune, celle du mois de Tisri en automne, était un jour férié. On l’appelait le jour des trompettes retentissantes, sans doute parce que les trompettes y jouaient un rôle tout particulier. Le son de la trompette est l’image et l’accompagnement de la prière qui s’élance vers Dieu. « Quand vous marcherez en bataille, lisons-nous en Nombres 10.9, vous sonnerez des trompettes avec un son éclatant et vous ferez que l’Éternel votre Dieu se souviendra de vous ; et dans vos jours de joie, dans vos fêtes solennelles et au commencement de vos mois, vous sonnerez des trompettes auprès de vos holocaustes, en mémorial devant votre Dieu. » Le son de la trompette rappelle donc le peuple au souvenir de son Dieu, ou plutôt rappelle au peuple que Dieu ne l’oublie jamais. C’est pour cela que lorsque David introduisit le chant dans le culte, il chargea les prêtres de sonner tout à coup de la trompette aux endroits les plus émouvants des psaumes, comme pour donner des ailes aux prières de l’assemblée (2 Chroniques 13.14)g.
g – Tel est le sens que je donne avec Sommer et Keil au mot Sélah, qui revient si souvent dans les Psaumes.
Il se peut que la septième lune tirât sa solennité particulière du fait qu’elle précédait immédiatement la fête des expiations. Ce retentissement extraordinaire de trompettes avait peut-être pour but de préparer les esprits à cette grande journée de repentance et de pardon. — C’est à tort qu’on a prétendu que la septième nouvelle lune était en même temps la fête du nouvel-an. Il est vrai qu’il résulte de Exode 12.2, que le mois d’Abib ou de Nisan n’a pas toujours été le premier de l’année, et qu’Israël avait auparavant une autre manière de compter les mois. De même, des passages comme Exode 23.16, prouvent que les Israélites ont toujours eu, à côté de l’année religieuse et historique, une année agricole et civile, laquelle commençait en automne. Mais cette seconde année, cette seconde rotation de mois, ne commençait bien probablement pas à date fixe.
[Voyez encore Exode 34.22, et ce qui est dit en Lévitique 25.9, sur le commencement de l’année de jubilé. Il était de même dans la nature des choses que l’année sabbatique commençât après les semailles, en automne (Lévitique 25.4). Josèphe prétend (Ant. I, 3, 3) qu’avant Moïse l’année commençait avec le mois de Tisri et que le législateur a conservé cette manière de compter les mois pour les affaires de la vie civile. Mais, quelle que fût avant Moïse l’année des Hébreux, les passages que nous venons de citer ne favorisent point l’idée que le 1er Tisri fût le 1er jour de l’année civile. Comment, s’il en eût été ainsi, aurait-on pu dire que la fête des Tabernacles, qui se célébrait du 15 au 21 Tisri avait lieu à la fin de l’année (Exode 23.16) ?]