(24 novembre)
Chrysogone fut jeté, par ordre de Dioclétien, dans une prison où sainte Anastasie le nourrissait de ses aumônes. Et lorsque Anastasie se trouva à son tour emprisonnée par son mari, elle écrivit à son maître Chrysogone la lettre suivante : « Anastasie au saint confesseur du Christ Chrysogone. Mariée à un homme sacrilège, j’ai feint une maladie pour me dérober à sa couche ; et, jour et nuit, je reste prosternée devant Notre-Seigneur Jésus-Christ. Et mon mari, non content de dépenser mon patrimoine avec des idolâtres, me tient si étroitement enfermée que je m’attends à mourir d’un instant à l’autre. Et bien que cette mort n’ait rien que de glorieux, je souffre de voir que les richesses que j’avais consacrées à Dieu et aux pauvres se trouvent ainsi gaspillées par ces êtres indignes. Adieu, saint homme, ne m’oublie pas ! » Et Chrysogone lui répondit : « Garde-toi de te laisser troubler par l’adversité ! Bientôt Jésus t’appellera à lui, et, comme après les ténèbres de la nuit, tu verras la lumière éclatante de Dieu ; et à l’hiver succédera pour toi un doux été doré. Adieu et prie pour moi ! »
Cependant, le mari de sainte Anastasie, pour achever de se délivrer d’elle, ne lui faisait plus donner, dans sa prison, qu’un quartier de pain. La sainte écrivit alors à Chrysogone : « La fin de mon corps approche. Puisse mon âme être accueillie par Celui pour l’amour de qui je supporte tout ce que te racontera la vieille femme qui te remettra cette lettre ! » Et Chrysogone lui répondit : « Les bonheurs et les malheurs de ce monde aboutissent à une seule et même fin. C’est sur une seule et même mer que naviguent les misérables bateaux que sont nos corps. Mais certains de ces bateaux, attachés par de fortes chaînes, traversent sans danger les plus cruelles tempêtes, tandis que d’autres, plus fragiles, échouent et se brisent même en pleine bonace. Toi donc, servante du Christ, arme-toi de la croix et prépare-toi à l’œuvre de Dieu ! »
Lorsque Dioclétien vint à Aquilée, pour mettre à mort les chrétiens, il fit venir devant lui saint Chrysogone et lui dit : « Si tu veux sacrifier aux dieux, je te nommerai préfet de ce pays et j’élèverai ta famille au rang consulaire ! » Mais Chrysogone répondit : « Je n’adore qu’un seul Dieu, qui est dans le ciel, et je méprise tes dignités comme de la boue ! » Sur l’ordre de l’empereur, il eut la tête tranchée. Cela se passait en l’an du Seigneur 287. Le prêtre Zèle ensevelit pieusement les deux tronçons de son corps.