Ézéchiel en parle également dans son Ἐξαγωγῇ, n’ayant fait le récit d’un songe qui était apparu à Moïse, et dont son beau-père lui donne l’explication. Moïse s’exprime ainsi dans son dialogue avec son beau-père :
« Je crus voir sur le sommet d’une montagne un trône élevé jusqu’au ciel, sur lequel était assis un noble personnage, avec le diadème sur la tête et le sceptre dans sa main gauche ; de la droite il me fit un signe de bienveillance et je me tins devant son trône ; il me donna un sceptre, me dit de m’asseoir sur un grand trône, me plaçant le diadème sur la tête, en descendant lui-même de son trône. Alors je vis autour de moi tout le globe terrestre, la terre sous mes pieds et le ciel au-dessus de moi ; aussitôt une foule d’astres vinrent se précipiter à mes genoux et je les comptai tous, ils se rangeaient autour de moi comme une armée de mortels : c’est alors que je m’éveillai de mon rêve. »
Raguel son beau-père explique ainsi ce songe,
« O étranger, Dieu vous a montré en cela une destinée glorieuse. Puisse-je vivre encore lorsque ces choses vous arriveront ; certes, vous devez relever un grand trône, vous serez l’arbitre des mortels, que vous conduirez sous vos lois ; c’est ce que signifie la vision que vous avez eue de l’univers entier. Quant à la séparation de la terre en bas et du ciel de Dieu, cela veut dire que vous connaîtrez les choses présentes, passées et futures. »
Ézéchiel parle aussi du buisson ardent, de sa mission vers Pharaon, et dans cette scène, le colloque a lieu entre Dieu et Moïse. C’est Moïse qui parle :
Moïse. – « Mais quel signe dois-je tirer de ce buisson merveilleux, prodige incroyable pour les mortels : un buisson brûle avec force dans la partie supérieure, et toutes les plantes qui l’environnent conservent leur verdure. En m’approchant, j’observerai mieux cette merveille la plus étonnante, à laquelle les hommes ne voudront pas croire. »
Alors Dieu lui adresse la parole :
Dieu – « Arrête, ô Moïse, et ne t’approche pas avant d’avoir quitté tes chaussures. Cette terre que tu foules est sainte, et c’est le Verbe divin qui brille devant toi dans ce buisson. Prends courage, ô mon fils, et entends ce que je vais te dire ; quant à me voir, cela est interdit à tout être mortel ; il ne t’est permis que d’entendre de moi les causes pour lesquelles je suis venu. Je suis le Dieu de ceux que tu nommes tes pères, d’Abraham, d’Isaac, et en troisième, lieu de Jacob : rappelle leur souvenir à ta mémoire, et celui des bienfaits dont je les ni comblés. Je viens pour sauver le peuple hébreu qui m’appartient, en voyant les afflictions et les tourments qu’endurent mes serviteurs. Mets-toi en route, et va rendre témoignage à mes paroles, d’abord auprès des Hébreux que tu convoqueras, puis auprès du roi auquel tu communiqueras mes ordres, pour que tu conduises mon peuple hors de cette terre. »
Ensuite, ayant fait succéder quelques interlocutions, Moïse s’exprime ainsi :
« Je ne suis pas éloquent, ma langue a peine à articuler, je bégaye, en sorte que je n’oserai jamais adresser la parole au roi. »
A quoi Dieu répond :
« Envoyé Aaron ton frère au plus tôt, après lui avoir rapporté tout ce que tu sais de moi. C’est lu ! qui parlera devant le roi, il tiendra de toi ce que tu as appris de ma voix. »
Quant à la verge et aux autres prodiges, voici comme il en parle dans ce dialogue :
Dieu. – « Que tiens-tu à la main ? dis-le moi sans retard. »
Moïse – « C’est un bâton avec lequel je corrige les animaux et les hommes. »
Dieu. – « Jette-le par terre, et fuis au plus vite ; car il deviendra un dragon formidable, au point de t’étonner. »
Moïse – « Voici, je l’ai jeté. Oh ! ayez compassion de moi ! qu’il est effrayant, qu’il est monstrueux ! Ayez pitié de moi, je frémis en le voyant : tous mes membres sont saisis de tremblement. »
Dieu. – « Ne crains rien : étends la main et saisis sa queue, il redeviendra un bâton tel qu’il était auparavant. Mets ta main dans ton sein, puis retire-la. »
Moïse. – « J’ai fait ce que vous m’avez ordonné ; ma main est blanche comme la neige. »
Dieu. – « Remets-la dans ton sein, elle redeviendra comme elle était auparavant. »
Après avoir cité ces choses et plusieurs autres, Alexandre continue :
« Voici de quelle manière, dans la sortie d’Égypte, Ézéchiel s’exprime sur les signes que Dieu opéra. A l’aide de cette verge, tu leur feras tout le mal possible. D’abord le fleuve, les fontaines et tous les réservoirs d’eau ne rouleront que du sang, j’enverrai sur le terrain solide une multitude de grenouilles et des insectes venimeux, puis des cendres de fourneau qui produiront des ulcères cuisants sur les corps humains. Une espèce de mouche de chien succédera et causera des sensations douloureuses à beaucoup d’hommes de l’Egypte ; ensuite viendra la peste, et tous ceux dont le cœur est endurci, périront. Le ciel se contractera, et une grêle mêlée de feu causera la mort aux mortels, les fruits dessécheront et les corps d’animaux périront. Je ferai naître des ténèbres qui dureront trois jours entiers, j’enverrai des sauterelles qui dévasteront toutes les plantes alimentaires et l’herbe des prairies. Après toutes ces choses, je ferai mourir les premiers nés des humains, et je mettrai un terme à l’arrogance des hommes pervers, quant à Pharaon, il n’éprouvera aucune des afflictions que je viens de dire sinon que son fils premier-né mourra. C’est alors qu’effrayé, il renverra aussitôt le peuple. Vous direz à la multitude des Hébreux : Ce mois est pour vous le premier de l’année, celui dans lequel je guiderai le peuple dans une autre terre, terre que j’ai promise aux pères des Hébreux. Vous direz à tout ce peuple : pendant ce même mois, lorsque la lune aura parcouru la moitié de son cours, dans la nuit qui précédera, vous immolerez à Dieu la Pâque, et vous teindrez du sang de la victime la porte de vos maisons, afin que cela serve de marque à l’ange terrible lorsqu’il passera ; puis vous en mangerez la viande rôtie. Le roi alors se hâtera de vous renvoyer en masse, et lorsque vous serez sur le point de partir, je ferai une chose agréable au peuple, chaque femme recevra de sa voisine les vases et tout ce qui sert à la toilette, en or et en argent, et les vêtements, afin de se payer ainsi du salaire de leurs travaux. Comme enfin vous serez parvenus dans le lieu qui vous est destiné, après avoir marché pendant sept jours depuis celui où vous aurez quitté l’Égypte ayez soin chaque année de manger, pendant un nombre de jours égal, des pains sans levain, et de consacrer ce temps au service de Dieu, offrant à Dieu en sacrifice, les premiers nés des animaux, et lui consacrant dans la race humaine, les premiers fruits mâles conçus dans le sein des épouses. »
Il l’exprime, au sujet de la même fête de la manière dont on la célèbre : ce que le même auteur décrit avec exactitude.
« Au 10e jour de ce mois, prenez par famille d’Hébreux, des moutons et des veaux sans imperfections et conservez-les jusqu’à ce que le 14e jour vienne à luire, et vers le soir, les immolant, vous les mangerez entièrement, rôtis avec tous les membres de la famille. Vous ceindrez vos reins, vous chausserez vos pieds de fortes chaussures, et vous tiendrez un bâton à la main. Car le roi aura la plus grande hâte de vous voir partir tous, et sans en excepter un seul. Lorsque vous aurez immolé la victime, vous devez vous saisir d’une poignée de branches d’hyssope que vous plongerez dans son sang, pour en teindre les deux jambages de votre porte, afin que la mort passe outre aux maisons des Hébreux. Vous conserverez pendant sept jours, où vous ne mangerez que des azymes, l’usage de cette fête consacrée au Seigneur. Aucun levain n’entrera dans vos aliments ; car ce sera le terme de vos maux. Dieu a fixé ce mois pour votre délivrance, il sera donc pour vous le premier des mois et le commencement des années. »
— Voici comment, après d’autres citations. continue Alexandre ; dans son drame intitulé, Ἐξαγωγή, Ézéchiel faisant apparaître un envoyé qui retrace l’inquiétude des Hébreux et la destruction des Égyptiens, dit :
« Lorsque le roi Pharaon se mit en campagne, à la tête d’une multitude formée de plus de 10,000 hommes pesamment armés, de toute sa cavalerie, de chars traînés par quatre chevaux, qu’accompagnaient beaucoup de généraux et d’aides de camp, l’effroi qu’inspirait cette armée régulière était universel. Les fantassins et la phalange occupaient le centre, laissant les flancs aux chars qui se livraient à des évolutions ; quant aux cavaliers, il les avait partagés, une moitié à la droite et l’autre à la gauche de l’armée. Je m’informai du nombre des combattants, et j’appris qu’ils formaient un total d’un million d’hommes dans la fleur de l’âge. Quand nous fûmes en présence de l’armée des Hébreux, ceux qui se trouvaient répandus plus près de nous sur le rivage de la mer Rouge, se hâtèrent de se rassembler : les uns donnaient la nourriture à de faibles enfants, partageant avec leurs épouses les soins de leur conduite, au milieu de nombreux troupeaux et de l’embarras de leur bagage. Aussitôt tous ces êtres désarmés, prêts à être atteints, jetèrent, en nous voyant, des cris alarmants, s’arrêtèrent en versant des pleurs et levant les mains au ciel pour implorer le Dieu de leurs pères. Cette multitude était considérable. La joie au lieu de cela éclatait dans nos rangs. Nous dressâmes donc nos tentes près d’eux, dans un lieu qui se nomme Béelzéphon. Tandis que Titan, Dieu du jour, demeura dans l’ombre, nous nous tînmes en repos, voulant commencer le combat dès l’aurore, pleins de confiance dans notre nombre et l’effroi de nos armes. C’est alors que Dieu commença à faire voir ses prodiges. D’abord une colonne immense et ténébreuse se plaça entre nous et l’armée des Hébreux. Puis, leur chef Moïse prenant en main la verge qu’il tenait de Dieu, avec laquelle il avait opéré tant de funestes miracles en Égypte, frappa le dos de la mer Rouge dont les flots se divisèrent aussitôt. Les Hébreux se pressèrent en foule sur la ligne que l’onde amère avait abandonnée. Nous voulûmes sans retard nous mettre sur leurs traces ; mais des ténèbres profondes nous enveloppèrent et nous arrêtèrent au milieu de notre course. Les roues des chars cessèrent de tourner sur elles-mêmes, et restèrent comme enchaînées. Une lueur semblable à celle d’un grand feu descendit du firmament à nos regards étonnés ; autant que nous pûmes le conjecturer, c’était Dieu lui-même qui prenait leur défense. Mais à peine avaient-ils atteint la rive opposée, une vague énorme, accompagnée d’un sifflement épouvantable, vint fondre sur nous. A cette vue, chacun s’écria : Fuyons vers nos demeures, pour nous soustraire à la main du Très-Haut ; c’est lui qui s’est chargé de combattre pour eux et qui s’acharne à notre perte, malheureux que nous sommes. Aussitôt le chemin qui traversait la mer Rouge fut submergé et l’armée entière fut engloutie. »
Puis ensuite, après une route de trois journées à partir de ce lieu (comme le rapporte aussi Démétrius, et les livres saints sont en ce point d’accord avec lui), le peuple n’ayant pas d’eau douce, mais de l’eau amère, Dieu ordonna, à Moïse de jeter un certain bois dans la source, ce qui rendit l’eau potable. De là, ils vinrent à Elim, où ils trouvèrent 12 fontaines et 70 palmiers. Ézéchiel fait, ici intervenir un interlocuteur, dans son Ἐξαγωγή ; lequel adressant la parole à Moïse, lui parle de ces choses et d’un oiseau qu’il a vu. Voici d’abord comme il parle des palmiers et des fontaines :
Moïse, prêtez votre attention au lieu que nous avons découvert dans cette vallée fleurie, que vous pouvez apercevoir d’ici. C’est de ce point que brillait cette lumière céleste, qui, comme une colonne de feu, nous dirigeait pendant la nuit. Là nous trouvâmes une prairie ombragée des vallons frais et arrosés ; le sol fertile est enrichi de productions abondantes. Douze sources s’échappent d’un même rocher, d’énormes troncs de palmiers, considérables-en quantité, y regorgent de fruits ; on en compte dix fois sept, et l’herbe qui le tapisse sera pour nos troupeaux un pâturage exquis. »
Un peu plus bas, il en vient à la description de l’oiseau qui lui a apparu.
« Après toutes ces choses, nous y vîmes un animal étrange, merveilleux, tel que personne n’en jamais vu. Il présente un volume à peu près double de celui d’un aigle, le plumage répandu sur son corps brille de couleurs différentes ; son estomac est du plus vif incarnat, ses jambes d’un rouge plu ‘terne, son col éblouissait par des reflets d’or : sa tête est semblable, par la crête à celle des coqs domestiques, et sa pupille d’un jaune pâle est enfermée dans une cornée écarlate. Son chant est le plus noble qu’on puisse entendre ; on aurait pu le prendre pour le roi de tous les autres oiseaux, par la manière craintive dont ceux-ci se pressaient derrière lui. A la tête de cette troupe, semblable à un taureau superbe, il s’avançait d’un pas rapide à notre rencontre. »
Après quelques détails nouveaux, il recherche comment les Israélites étant sortis de l’Égypte sans armes, avaient pu s’en procurer. Il dit qu’après avoir marché pendant trois jours et avoir offert leur sacrifice, ils retournèrent sur leurs pas. Il paraît donc qu’ils s’emparèrent des armes de ceux des Égyptiens qui n’avaient pas été submergés.