1. Démétrius avec son armée, grossie de ceux qui l'avaient appelé, vint camper aux environs de la ville de Sichem. Alexandre, à la tête de dix mille deux cents mercenaires et d'environ vingt mille Juifs de son parti[1], vint à sa rencontre. Démétrius avait trois mille hommes de cavalerie et quarante mille d'infanterie. Les deux adversaires firent chacun des tentatives pour essayer de provoquer la défection, l'un, des mercenaires d'Alexandre en leur qualité de Grecs, l'autre, des Juifs qui s'étaient joints à Démétrius. Ils ne purent réussir ni l'un ni l'autre, et durent engager le combat. Démétrius fut vainqueur ; tous les mercenaires d'Alexandre périrent, donnant un bel exemple de fidélité et de courage ; beaucoup de soldats de Démétrius furent aussi tués.
[1] Guerre, I, § 93 compte 1.000 cavaliers, 8.000 fantassins mercenaires, 10.000 Juifs pour Alexandre, 3.000 chevaux et 14.000 hommes de pied pour Démétrius.
2. Alexandre s'enfuit dans la montagne, et dix mille Juifs environ se réunirent autour de lui par compassion pour ce changement de fortune. Démétrius alors prit peur et se retira. Les Juifs, après son départ, continuèrent la lutte contre Alexandre, mais furent vaincus et périrent en grand nombre dans les combats. Alexandre enferma les plus puissants d'entre eux dans la ville de Béthomé[2] et l'assiégea. Devenu maître de la ville et de ses ennemis, il les ramena à Jérusalem ou il les traita de la manière la plus cruelle : dans un banquet qu'il donna à la vue de tous, avec ses concubines, il fit mettre en croix environ huit cents d'entre eux, puis, pendant qu'ils vivaient encore, fit égorger sous leurs yeux leurs femmes et leurs enfants. C'était se venger de tout le mal qu'on lui avait fait, mais une vengeance trop inhumaine, même pour un homme qui avait été poussé à bout par les guerres qu'il avait soutenues et qui avait couru les plus grands dangers de perdre la vie et son royaume ; car ses ennemis, non contents de le combattre avec leurs propres forces, avaient fait appel à l'étranger et l'avaient finalement réduit à la nécessité d'abandonner au roi des Arabes, pour qu'il ne s'alliât pas à eux dans la guerre dirigée contre lui, ses conquêtes de Galaad et de Moab et les places fortes de cette région ; en outre, ils l'avaient abreuvé d'outrages et de calomnies de toute sorte. Il semble bien cependant qu'il n'agit pas en ceci conformément à ses intérêts, et l'excès de sa cruauté lui valut de la part des Juifs le surnom de Thracidas[3]. La masse des rebelles, au nombre d'environ huit mille, s'enfuirent dans la nuit et restèrent en exil tant que vécut Alexandre. Celui-ci, délivré de tout souci de leur côté, termina son règne en paix.
[2] Βεμέσελις d'après Guerre, I, § 96. Aucune des deux villes n'est connue.
[3] Le sens de ce surnom n'est pas clair. Les Thraces étaient célèbres par leur férocité.
3. Démétrius, ayant quitté la Judée pour Béroia, y assiégea son frère Philippe, à la tête de dix mille hommes d'infanterie et mille de cavalerie. Straton, tyran de Béroia et allié de Philippe, appela à son aide Azizos[4], chef d'une tribu arabe, et Mithridate Sinacès, gouverneur parthe[5]. Ils arrivèrent avec des forces considérables et assiégèrent Démétrius dans ses retranchements, où ils le continrent par une pluie de flèches ; enfin, par la soif, ils forcèrent son armée à se rendre. Après avoir pillé la région et pris Démétrius, ils envoyèrent leur prisonnier à Mithridate, alors roi des Parthes, et rendirent sans rançon aux habitants d'Antioche tous les captifs qui se trouvaient être leurs concitoyens. Mithridate, roi des Parthes, témoigna à Démétrius les plus grands égards, jusqu’au jour ou celui-ci mourut, emporté par une maladie. Philippe, aussitôt après le combat, marcha sur Antioche, s'en empara, et régna sur la Syrie.
[4] Conjecture de Niese. Les mss. ont Ζίζον.
[5] De la Mésopotamie.