[1] Ce qui concerne Denys, je le rapporterai d'après sa lettre à Germain, où parlant de lui-même il fait ce récit : « Moi aussi je parle en présence de Dieu et il sait si je mens. Ce n'est pas du tout d'après mon propre jugement ni sans l'assistance de Dieu que j'ai pris la fuite. [2] Au reste, dans une occasion précédente, quand sévissait la persécution de Dèce, Sabinus, à ce moment, a envoyé un frumentaire à ma recherche, et moi je suis resté quatre jours à la maison à attendre son arrivée ; mais lui, il parcourait tous les lieux d'alentour, explorant les routes, les fleuves et les champs où il soupçonnait que je me cachais et que j'allais ; il était frappé d'aveuglement et ne trouvait pas ma demeure ; il ne croyait pas, en effet, qu'étant poursuivi, je restais chez moi. [3] Ce ne fut pas sans peine que, le quatrième jour, Dieu m'ordonnant de partir et m'ouvrant le chemin d'une façon miraculeuse, nous nous en allâmes ensemble, moi, les serviteurs et beaucoup de frères. Que cela fût l'œuvre de la providence de Dieu, les événements qui suivirent l'ont montré ; dans ceux-ci nous avons peut-être été utiles à certains. »
[4] Puis, ayant parlé de diverses choses, il montre plus loin ce qui lui est arrivé après la fuite et il ajoute ceci : « Vers l'heure du coucher du soleil, j'étais en effet pris par les soldats ainsi que ceux qui étaient avec moi et conduit à Taposiris ; mais Timothée, par un dessein de Dieu, se trouvait à ne pas être là et il ne fut pas arrêté ; il vint plus tard et vit la maison vide et gardée par des gens de service, mais nous, nous étions emmenés captifs. »
[5] Un peu plus loin il dit : « Quelle fut la conduite de l'admirable providence de Dieu ? La vérité le dira. Un paysan rencontra Timothée qui fuyait et était bouleversé ; il lui demanda la cause de son empressement. [6] Celui-ci raconta ce qui était la vérité, et son interlocuteur l'ayant entendu — il allait dîner à la noce et c'était pour eux une coutume de passer toute la nuit dans de pareilles réunions — il l'annonça, en arrivant, aux convives. Ceux-ci d'un seul bond se levèrent tous comme à un signal convenu et, prenant leur course, ils arrivèrent très vite et tombèrent sur nous en poussant des cris ; les soldats qui nous gardaient détalèrent prestement et les assaillants vinrent à nous qui étions étendus sur des lits sans couvertures. [7] Je crus moi aussi tout d'abord, Dieu le sait, que c'étaient des brigands qui étaient venus pour le vol et le pillage ; je restai sur ma couche, j'étais couvert seulement d'un habit de lin, et je leur offris le reste de mes vêtements qui étaient près de moi ; mais eux m'ordonnaient de me lever et de décamper au plus vite. [8] Alors, sachant pourquoi ils étaient là, je les suppliais à grands cris et leur demandais de s'en aller, de nous laisser et, s'ils voulaient faire quelque chose de mieux, j'estimais que c'était de prévenir ceux qui m'emmenaient et de me couper la tête. Tandis que je leur criais cela, comme le savent mes compagnons qui ont eu leur part dans toutes ces choses, ils me firent lever de force. Et moi je me jetai à terre à la renverse, mais eux me prirent par les mains, me tirèrent par les pieds et me traînèrent dehors. [9] Les témoins de tout ceci, Caius, Faustus, Pierre, Paul, me suivirent ; ils me portèrent même à bras et me firent sortir de la petite ville, puis, me faisant monter à poil sur un âne, ils m'emmenèrent. »
Voilà ce que dit Denys de lui-même.