De tous les livres de l’Ancien Testament, Job est celui qui s’occupe le plus de l’état de l’homme après la mort. Qu’en pense-t-il ?
Ewald y trouve l’immortalité clairement proclamée. C’est aller un peu loin. Nous nous bornons à dire que ce livre trace des fragments de lignes qui, continuées, aboutissent à l’immortalité de l’âme. L’homme qui a goûté ici-bas les douceurs de la communion avec Dieu, ne peut demeurer à jamais la proie du Schéol.
Au reste, il y a, à cet égard, dans le sein même du livre de Job un progrès remarquable. Rien de plus lamentable que cette complainte sur la mort et le Schéol (Job 7.7 ; 10.20) : « Celui qui descend au sépulcre n’en remontera plus…, c’est pourquoi je parlerai dans l’affliction de mon cœur… Laisse-moi respirer un peu avant que j’aille, pour n’en plus revenir, dans le pays des ténèbres…, où il n’y a que l’horreur des plus épaisses ténèbres… » Au chap. 14, un rayon lumineux se hasarde au milieu de toute cette obscurité. Le séjour dans le Schéol ne sera peut-être que passager ; Dieu soupirera peut-être, si l’on peut ainsi parler, après l’ouvrage de ses mains, et Il se souviendra du juste pour le rappeler à la vie.
Puis, vient Job 16.18-19 : « Terre, ne recouvre pas mon sang et qu’aucun de tes lieux n’arrête mon cri ! Encore à présent voici, j’ai mon témoin dans les cieux, et mon avocat dans les lieux très hauts ! » et enfin Job 19.25-27, où Job, qui a renoncé à l’espoir d’obtenir justice pendant le peu de temps qu’il lui reste à vivre sur la terre, exprime, en revanche, la certitude que Dieu en personne remplira en sa faveur, après sa mort, le rôle de garant du sang, qu’il le réhabilitera aux yeux de ceux qui maintenant se plaisent à le diffamer, et que lui, Job, sera le témoin oculaire de sa propre réhabilitation. La mort ne brisera donc pas complètement les liens qui l’unissent avec son Dieu. Mais il ne faudrait pas faire dire à Job davantage que cela. Sans doute il exprime la conviction qu’il verra encore Dieu après sa mort ; toutefois on sent que ce n’est pas une vue habituelle et continue de la Divinité qu’il compte avoir en partage après sa mort ; il ne s’agit que d’une apparition momentanée de Dieu ; puis, lorsqu’il s’élève à cette consolante pensée, c’est par la force de l’angoisse où il est plongé. Cela ne peut pas s’appeler encore croire en l’immortalité bienheureuse de l’âme, et l’on ne saurait considérer ces quelques éclairs de foi et d’espérance comme la solution du grand problème de la mort. C’est pour ne pas désespérer, pour ne pas se laisser abattre complètement par la triste réalité, que Job se livre à ces pressentiments. Une rémunération dans la vie à venir, tel est le refuge suprême qui se présente à sa foi, puisque tout dans la vie présente lui donne tort. Après qu’il s’est livré à ces pressentiments, Job est plus calme. Mais, chose remarquable, le livre lui-même ne tarde pas à redescendre de ces hautes régions et à se rapprocher du niveau de l’ancienne alliance. Job finit par recouvrer ici-bas tous les biens qu’il’ avait perdus, et nous voilà aussi loin que jamais de la pensée sublime, qu’il n’y a aucune comparaison entre les souffrances du temps présent et la gloire excellente qui sera le partage des enfants de Dieu durant toute l’éternité. Le livre de Job, pas plus que tout le reste de l’A. T., n’a point fait cette bienheureuse découverte. On ne découvre que ce qui existe. Il y a un rapport constant entre ce qu’il plaît à Dieu de faire connaître aux hommes, et le point de développement historique auquel est parvenue la révélation ; il y a une relation bien marquée entre la connaissance de la révélation et les faits qui la constituent. Pour qu’il pût y avoir des hommes qui crussent véritablement à la vie éternelle, il fallait que la vie éternelle elle-même fût acquise aux hommes par Celui qui a vaincu la mort, qui a mis en évidence l’immortalité, et sans l’œuvre duquel les justes de l’ancienne alliance ne seraient jamais parvenus à la perfection (Hébreux 11.40).