Ignace et Polycarpe

Martyre de Polycarpe

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Ἡ ἐκκλησία τοῦ θεοῦ ἡ παροικοῦσα Σμύρναν τῇ ἐκκλησίᾳ τοῦ θεοῦ τῇ παροικούσῃ ἐν Φιλομηλίῳ καὶ πάσαις ταῖς κατὰ πάντα τόπον τῆς ἁγίας καὶ καθολικῆς ἐκκλησίας παροικίαις· ἔλεος, εἰρήνη καὶ ἀγάπη θεοῦ πατρὸς καὶ κυρίου ἡμῶν Ἰησοῦ Χριστοῦ πληθυνθείη.

L’église de Dieu qui séjourne à Smyrne, à l’église de Dieu qui séjourne à Philomélium, et à toutes les chrétientés du monde appartenant à la sainte église universelle : Que la miséricorde, la paix, la charité de Dieu le Père et de notre Seigneur Jésus-Christ surabondent en vous !

Notes

Φιλομηλίῳ : ville de Phrygie, aujourd’hui Akschéher, à plus de 400 km de Smyrne. Les Philoméliens avaient demandé aux Smyrniotes des détails sur le martyre de Polycarpe.

Chapitre 1

1.1 Ἐγράψαμεν ὑμῖν, ἀδελφοί, τὰ κατὰ τοὺς μαρτυρήσαντας καὶ τὸν μακάριον Πολύκαρπον, ὅστις ὥσπερ ἐπισφραγίσας διὰ τῆς μαρτυρίας αὐτοῦ κατέπαυσεν τὸν διωγμόν. σχεδὸν γὰρ πάντα τὰ προάγοντα ἐγένετο, ἵνα ἡμῖν ὁ κύριος ἄνωθεν ἐπιδείξῃ τὸ κατὰ τὸ εὐαγγέλιον μαρτύριον.

Frères, nous vous écrivons au sujet des confesseurs de la foi et du bienheureux Polycarpe, dont le martyre a pour ainsi dire mis le sceau à la persécution, et l’a fait cesser. Presque tous les événements qui l’ont précédé sont arrivés pour que le Seigneur nous donnât une fois de plus le spectacle d’un martyre conforme à l’Évangile.

1.2 περιέμενεν γάρ, ἵνα παραδοθῇ, ὡς καὶ ὁ κύριος, ἵνα μιμηταὶ καὶ ἡμεῖς αὐτοῦ γενώμεθα, μὴ μόνον σκοποῦντες τὸ καθ’ ἑαυτούς, ἀλλὰ καὶ τὸ κατὰ τοὺς πέλας. ἀγάπης γὰρ ἀληθοῦς καὶ βεβαίας ἐστίν, μὴ μόνον ἑαυτὸν θέλειν σώζεσθαι, ἀλλὰ καὶ πάντας τοὺς ἀδελφούς.

Polycarpe, en effet, comme le Seigneur lui-même, a patiemment attendu d’être livré, voulant ainsi, par cet exemple, nous apprendre à ne pas songer seulement à nos propres intérêts, mais aussi à ceux du prochain. Car la marque d’une vraie et solide charité, c’est de ne pas chercher seulement son propre salut, mais encore celui de tous ses frères.

Notes

1.1 ἄνωθεν, signifie ici une fois de plus, comme dans Gal.4.9. κατὰ τὸ εὐαγγέλιον : c-à-d un martyre ressemblant à la Passion que nous raconte l’Évangile. L’auteur ne manque aucune occasion de rapprocher le martyre de Polycarpe de la passion du Sauveur.

Chapitre 2

2.1 Μακάρια μὲν οὖν καὶ γενναῖα τὰ μαρτύρια πάντα τὰ κατὰ τὸ θέλημα τοῦ θεοῦ γεγονότα. δεῖ γὰρ εὐλαβεστέρους ἡμᾶς ὑπάρχοντας τῷ θεῷ τὴν κατὰ πάντων ἐξουσίαν ἀνατιθέναι.

Glorieux et généreux furent tous ces martyres qui arrivèrent par la volonté de Dieu : car la piété nous fait un devoir de tout rapporter à la puissance de Dieu.

2.2 τὸ γὰρ γενναῖον αὐτῶν καὶ ὑπομονητικὸν καὶ φιλοδέσποτον τίς οὐκ ἂν θαυμάσειεν; οἱ μάστιξιν μὲν καταξανθέντες, ὥστε μέχρι τῶν ἔσω φλεβῶν καὶ ἀρτηριῶν τὴν τῆς σαρκὸς οἰκονομίαν θεωρεῖσθαι, ὑπέμειναν, ὡς καὶ τοὺς δὲ καὶ εἰς τοσοῦτον γενναιότητος ἐλθεῖν, ὥστε μήτε γρύξαι μήτε στενάξαι τινὰ αὐτῶν, ἐπιδεικνυμένους ἅπασιν ἡμῖν, ὅτι ἐκείνῃ τῇ ὥρᾳ βασανιζόμενοι τῆς σαρκὸς ἀπεδήμουν οἱ γενναιότατοι μάρτυρες τοῦ Χριστοῦ, μᾶλλον δέ, ὅτι παρεστὼς ὁ κύριος ὡμίλει αὐτοῖς.

Qui n’admirerait en effet la générosité de ces héros, leur patience, leur amour pour leur maître ? Déchirés par les fouets, au point qu’on voyait la structure intime de leur corps jusqu’aux veines et aux artères intérieures, ils supportaient tout avec patience. Les spectateurs eux-mêmes, saisis de pitié, versaient des larmes ; mais eux, ils déployèrent un tel courage, que pas un ne poussa un cri ni un soupir. Ils nous firent voir à tous, ces généreux confesseurs du Christ, qu’à l’heure du supplice ils étaient absents de leur corps, ou plutôt que le Seigneur se tenait à leurs côtés et s’entretenait avec eux.

2.3 καὶ προσέχοντες τῇ τοῦ Χριστοῦ χάριτι τῶν κοσμικῶν κατεφρόνουν βασάνων, διὰ μιᾶς ὥρας τὴν αἰώνιον ζωὴν ἐξαγοραζόμενοι. καὶ τὸ πῦρ ἦ αὐτοῖς ψυχρὸν τὸ τῶν ἀπηνῶν βασανιστῶν. πρὸ ὀφθαλμῶν γὰρ εἶχον φυγεῖν τὸ αἰώνιον καὶ μηδέποτε σβεννύμενον, καὶ τοῖς τῆς καρδίας ὀφθαλμοῖς ἀνέβλεπον τὰ τηρούμενα οὔτε ὀφθαλμὸς εἶδεν οὔτε ἐπὶ καρδίαν ἀνθρώπου ἀνέβη, ἐκείνοις δὲ ὑπεδείκνυτο ὑπὸ τοῦ κυρίου, οἵπερ μηκέτι ἄνθρωποι, ἀλλ’ ἤδη ἄγγελοι ἦσαν.

Uniquement attentifs à la grâce du Christ, ils méprisaient les tourments de ce monde, et se rachetaient, par une heure de souffrances, de l’éternel châtiment. Le feu même des cruels tortionnaires leur paraissait froid : car ils n’avaient qu’une seule pensée, celle d’échapper au feu éternel et inextinguible ; ils tenaient les yeux de leurs cœurs fixés sur les biens réservés à ceux qui triomphent des tourments, sur ces biens que l’oreille n’a point entendus, que l’œil n’a point vus, que le cœur de l’homme n’a jamais conçus, mais que le Seigneur leur faisait entrevoir, à eux, à cette heure où ils avaient déjà cessé d’être des hommes pour devenir des anges.

2.4 ὁμοίως δὲ καὶ οἱ εἰς τὰ θηρία κατακριθέντες ὑπέμειναν δεινὰς κολάσεις, κήρυκας ὑποστρωννύμενοι καὶ ἄλλαις ποικίλων βασάνων ἰδέαις κολαζόμενοι, ἵνα, εἰ δυνηθείη, ὁ τύραννος διὰ τῆς ἐπιμόνου κολάσεως εἰς ἄρνησιν αὐτοὺς τρέψῃ.

Condamnés aux bêtes, ils supportèrent avec le même courage d’atroces supplices : on les étendit sur des coquillages marins, on leur fit subir toute espèce d’autres tortures ; le tyran prolongeait leurs souffrances pour les amener, si possible, à renier (le Christ).

Notes

2.4 κήρυκαςΚῆρυξ, un grand coquillage marin dont on servait comme de trompe pour convoquer les assemblées. Plusieurs commentateurs entendent par là un instrument de supplice manufacturé, garni de pointes de fer ; et, de fait, le latin murex a quelquefois cette dernière signification. Mais il n’y a aucune raison pour ne pas entendre ici κήρυκας dans le sens de coquillages naturels, car on retrouve ces coquillages marins dans beaucoup de récits de martyres, et d’ailleurs Eusèbe, paraphrasant ce mot, écrit expressément : τοὺς ἀπὸ θαλάττης κήρυκας.

Chapitre 3

3.1 πολλὰ γὰρ ἐμηχανᾶτο κατ’ αὐτῶν ὁ διάβολος. Ἀλλὰ χάρις τῷ θεῷ· κατὰ πάντων γὰρ οὐκ ἴσχυσεν. ὁ γὰρ γενναιότατος Γερμανικὸς ἐπερρώννυεν αὐτῶν τὴν δειλίαν διὰ τῆς ἐν αὐτῷ ὑπομονῆς· ὃς καὶ ἐπισήμως ἐθηριομάχησεν. βουλομένου γὰρ τοῦ ἀνθυπάτου πείθειν αὐτὸν καὶ λέγοντος, τὴν ἡλικίαν αὐτοῦ κατοικτεῖραι, ἑαυτῷ ἐπεσπάσατο τὸ θηρίον προσβιασάμενος, τάχιον βουλόμενος.

Le diable déploya contre eux tous ses artifices ; mais, grâces soient rendues à Dieu, il n’en put vaincre aucun. Le vaillant Germanicus soutint leur faiblesse par sa constance. Sa lutte contre les bêtes fut admirable : le proconsul cherchait à le séduire, et l’engageait à prendre en pitié sa propre jeunesse ; mais Germanicus attira sur lui-même la bête féroce en lui faisant violence, désireux de sortir au plus vite de ce monde injuste et pervers.

3.2 ἐκ τούτου οὖν πᾶν τὸ πλῆθος, θαυμάσαν τὴν γενναιότητα τοῦ θεοφιλοῦς καὶ θεοσεβοῦς γένου τῶν Χριστιανῶν, ἐπεβόησεν· Αἶρε τοὺς ἀθέους· ζητείσθω Πολύκαρπος.

Alors toute la multitude, stupéfaite à la vue du courage de la pieuse et religieuse race des Chrétiens, s’écria : « Mort aux athées ! Qu’on cherche Polycarpe ! »

Notes

3.1 κατὰ πάντων γὰρ οὐκ ἴσχυσεν — Il y a deux sens possibles, dont aucun n’est satisfaisant. 1° Le démon ne put pas vaincre tous les martyrs, ce qui laisserait entendre qu’il en a vaincu le plus grand nombre. Ce n’est certainement pas ce qu’a voulu dire l’auteur. 2° Le démon n’en put vaincre aucun, ce qui est faux, puisque nous allons voir Quintus succomber aux tourments.

Chapitre 4

4.1 Εἶς δέ, ὀνόματι Κόϊντος, Φρύξ προσφάτως ἐληλυθὼς ἀπὸ τῆς Φρυγίας, ἰδὼν τὰ θηρία ἐδειλίασεν. οὗτος δὲ ἦν ὁ παραβιασάμενος ἑαυτόν τε καί τινας προσελθεῖν ἑκόντας. τοῦτον ὁ ἀνθύπατος πολλὰ ἐκλιπαρήσας ἔπεισεν ὀμόσαι καὶ ἐπιθῦσαι. διὰ τοῦτο οὖν, ἀδελφοί, οὐκ ἐπαινοῦμεν τοὺς προδιδόντας ἑαυτούς, ἐπειδὴ οὐχ οὕτως διδάσκει τὸ εὐαγγέλιον.

Un seul chrétien, un Phrygien nommé Quintus, récemment arrivé de Phrygie, fut pris de peur à la vue des bêtes. C’était justement celui qui s’était présenté de lui-même au tribunal et en avait entraîné plusieurs autres à sa suite. A force d’instances, le proconsul l’amena à prêter serment et à offrir de l’encens. Aussi frères, n’approuvons-nous pas ceux qui se livrent d’eux-mêmes : ce n’est d’ailleurs pas là ce qu’enseigne l’Évangile.

Chapitre 5

5.1 Ὁ δὲ θαυμασιώτατος Πολύκαρπος τὸ μὲν πρῶτον ἀκούσας οὐκ ἐταράχθη, ἀλλ’ ἐβούλετο κατὰ πόλιν μένειν· οἱ δὲ πλείους ἔπειθον αὐτὸν ὑπεξελθεῖν. καὶ ὑπεξῆλθεν εἰς ἀγρίδιον οὐ μακρὰν ἀπέχον ἀπὸ τῆς πόλεως καὶ διέτριβεν μετ’ ὀλίγων, νύκτα καὶ ἡμέραν οὐδὲν ἕτερον ποιῶν ἢ προσευχόμενος περὶ πάντων καὶ τῶν κατὰ τὴν οἰκουμένην ἐκκλησιῶν, ὅπερ ἦν σύνηθες αὐτῷ.

Quant à Polycarpe, il fut le plus admirable. Tout d’abord, loin de se troubler au récit de ces scènes, il voulait rester à Smyrne ; mais ses conseillers, pour la plupart, l’engageaient à en sortir secrètement. Il se retira donc dans une petite maison de campagne, à peu de distance de la ville, et il y demeura avec quelques personnes seulement : nuit et jour, il ne faisait que prier pour tous les hommes et pour les églises du monde entier, selon son habitude.

5.2 καὶ προσευχόμενος ἐν ὀπτασίᾳ γέγονεν πρὸ τριῶν ἡμερῶν τοῦ συλληφθῆναι αὐτόν, καὶ εἶδεν τὸ προσκεφάλαιον αὐτοῦ ὑπὸ πυρὸς κατακαιόμενον· καὶ στραφεὶς εἶπεν πρὸς τοὺς σὺν αὐτῷ· Δεῖ με ζῶντα καυθῆναι.

Trois jours avant son arrestation, pendant qu’il priait, il eut une vision : il vit son oreiller consumé par le feu. Se tournant vers ses compagnons il leur dit : « Je dois être brûlé vif. »

Chapitre 6

6.1 Καὶ ἐπιμενόντων τῶν ζητούντων αὐτὸν μετέβη εἰς ἕτερον ἀγρίδιον, καὶ εὐθέως ἐπέστησαν οἱ ζητοῦντες αὐτόν· καὶ μὴ εὑρόντες συνελάβοντο παιδάρια δύο, ὧν τὸ ἕτερον βασανιζόμενον ὡμολόγησεν. Ἠν γὰρ καὶ ἀδύνατον λαθεῖν αὐτόν, ἐπεὶ καὶ οἱ προδιδόντες αὐτὸν οἰκεῖοι ὑπῆρχον.

Devant l’insistance des recherches dont il était l’objet, Polycarpe se retira dans une autre villa. Aussitôt les agents à sa poursuite arrivaient (dans celle qu’il venait de quitter). Ne le trouvant pas, ils se saisirent de deux jeunes esclaves, dont l’un mis à la question, révéla le lieu de sa retraite). Il était bien impossible à Polycarpe d’échapper, du moment que c’étaient des gens de sa propre maison qui le trahissaient.

6.2 Καὶ ὁ εἰρήναρχος, ὁ κεκληρωμένος τὸ αὐτὸ ὄνομα, Ἡρώδης ἐπιλεγόμενος, ἔσπευδεν εἰς τὸ στάδιον αὐτὸν εἰσαγαγεῖν, ἵνα ἐκεῖνος μὲν τὸν ἴδιον κλῆρον ἀπαρτίσῃ Χριστοῦ κοινωνὸς γενόμενος, οἱ δὲ προδόντες αὐτὸν τὴν αὐτοῦ τοῦ Ἰούδα ὑπόσχοιεν τιμωρίαν.

L’irénarque, qui s’appelait justement Hérode, avait hâte de le conduire au stade : c’est ainsi que l’évêque devait accomplir sa destinée, en devenant l’associé du Christ, pendant que les traîtres qui l’avaient livré subiraient le châtiment de Judas.

Notes

6.1 ἐπέστησαν : Ce n’est pas dans la nouvelle villa que survient la police, mais dans celle que Polycarpe venait de quitter, comme il ressort du chapitre suivant. οἰκεῖοι, cf. Matt.10.36 Polycarpe, comme le Christ, est trahi par l’un des siens : en ce point encore son martyre est κατὰ τὸ εὐαγγέλιον.

6.2 εἰρήναρχοςὁ ἐπὶ τῆς εἰρήνης, comme il était encore appelé, celui qui était chargé d’assurer là paix publique, le chef de la police.

κεκληρωμένος… qui avait reçu (par une disposition providentielle) le même nom que le tétrarque de l’Évangile, c-à-d qu’Hérode.

Chapitre 7

7.1 Ἔχοντες οὖν τὸ παιδάριον, τῇ παρασκευῇ περὶ δείπνου ὥραν ἐξῆλθον διωγμῖται καὶ ἱππεῖς μετὰ τῶν συνήθων αὐτοῖς ὅπλων ὡς ἐπὶ λῃστὴν τρέχοντες. καὶ ὀψὲ τῆς ὥρας συνεπελθόντες ἐκεῖνον μὲν εὗρον ἐν ὑπερῴῳ κατακείμενον· κἀκεῖθεν δὲ ἠδύνατο εἰς ἕτερον χωρίον ἀπελθεῖν, ἀλλ’ οὐκ ἠβουλήθη εἰπών· Τὸ θέλημα τοῦ θεοῦ γενέσθω.

C’était un vendredi, vers l’heure du souper. Prenant avec eux le jeune esclave, les gendarmes et des cavaliers, avec leurs armes ordinaires, partirent comme pour courir après un voleur. Tard dans la soirée, ils survinrent tous ensemble et trouvèrent Polycarpe à table à l’étage supérieur d’une petite maison. Il eût pu encore s’échapper, et passer dans une autre propriété, mais il ne le voulut pas et dit : « Que la volonté de Dieu soit faite ! »

7.2 ἀκούσας οὖν παρόντας αὐτούς, καταβὰς διελέχθη αὐτοῖς, θαυμαζόντων τῶν παρόντων τὴν ἡλικίαν αὐτοῦ καὶ τὸ εὐσταθές, καὶ εἰ τοσαύτη σπουδὴ ἦν τοῦ συλληφθῆναι τοιοῦτον πρεσβύτην ἄνδρα. εὐθέως οὖν αὐτοῖς ἐκέλευσεν παρατεθῆναι φαγεῖν καὶ πιεῖν ἐν ἐκείνῃ τῇ ὥρα, ὅσον ἂν βούλωνται, ἐξῃτήσατο δὲ αὐτούς, ἵνα δῶσιν αὐτῷ ὥραν πρὸς τὸ προσεύξασθαι ἀδεῶς.

Apprenant l’arrivée des agents (de l’irénarque), il descendit et causa avec eux : son grand âge et son calme les frappèrent d’étonnement, et ils se demandaient pourquoi tant d’acharnement à s’emparer d’un tel vieillard. A l’heure même il leur fit servir à manger et à boire à volonté, et il leur demanda de lui accorder une heure pour prier librement.

7.3 τῶν δὲ ἐπιτρεψάντων, σταθεὶς προσηύξατο πλήρης ὢν τῆς χάριτος τοῦ θεοῦ οὕτως ὥστε ἐπὶ δύο ὥρας μὴ δύνασθαι σιγῆσαι καὶ ἐκπλήττεσθαι τοὺς ἀκούοντας, πολλούς τε μετανοεῖν ἐπὶ τῷ ἐληλυθέναι ἐπὶ τοιοῦτον θεοπρεπῆ πρεσβύτην.

Ils y consentirent ; alors, se tenant debout, Polycarpe se mit en prière, tellement rempli de la grâce de Dieu que deux heures durant, il ne put s’interrompre. (Les agents de la police), qui l’entendaient, étaient saisis d’étonnement, et plusieurs regrettaient d’être allés à la poursuite d’un si auguste vieillard.

Notes

7.1 διωγμῖται, sorte de gendarmes ou d’agents de police placés sous les ordres de l’irénarque. κατακείμενον peut signifier à table ou au lit.

Chapitre 8

8.1 Ἐπεὶ δε ποτε κατέπαυσεν τὴν προσευχήν, μνημονεύσας ἁπάντων καὶ τῶν πώποτε συμβεβληκότων αὐτῷ, μικρῶν τε καὶ μεγάλων, ἐνδόξων τε καὶ ἀδόξων καὶ´πάσης τῆς κατὰ τὴν οἰκουμένην καθολικῆς ἐκκλησίας, τῆς ὥρας ἐλθούσης τοῦ ἐξιέναι, ὄνῳ καθίσαντες αὐτὸν ἤγαγον εἰς τὴν πόλιν, ὄντος σαββάτου μεγάλου.

Polycarpe acheva enfin sa prière, dans laquelle il avait fait mention de tous ceux qu’il avait jamais connus, petits ou grands, illustres ou obscurs, et de toute l’église universelle répandue sur la surface de la terre. L’heure de partir étant venue, on le fit monter sur un âne, et on l’emmena à la ville. C’était un jour de grand sabbat.

8.2 καὶ ὑπήντα αὐτῷ ὁ εἰρήναρχος Ἡρώδης καὶ ὁ πατὴρ αὐτοῦ Νικήτης, οἳ καὶ μεταθέντες αὐτὸν ἐπὶ τὴν καροῦχαν ἔπειθον παρακαθεζόμενοι καὶ λέγοντες· Τί γὰρ κακόν ἐστιν εἰπεῖν· Κύριος καῖσαρ, καὶ ἐπιθῦσαι καὶ τὰ τούτοις ἀκόλουθα καὶ διασώζεσθαι; ὁ δὲ τὰ μὲν πρῶτα οὐκ ἀπεκρίνατο αὐτοῖς, ἐπιμενόντων δὲ αὐτῶν ἔφη· Οὐ μέλλω ποιεῖν, ὃ συμβουλεύετέ μοι.

L’irénarque Hérode et son père Nicète vinrent au-devant de Polycarpe ; ils le prirent dans leur voiture, le firent asseoir entre eux deux, et essayèrent de le gagner ; ils lui disaient : « Quel mal y a-t-il donc à dire : César est seigneur, à offrir de l’encens, et à faire tout ce qui s’ensuit, pour sauver sa vie ? » Tout d’abord, le vieillard ne leur répondit rien. Mais comme ils insistaient, il leur dit : « Je ne puis faire ce que vous me conseillez. »

8.3 οἱ δὲ ἀποτυχόντες τοῦ πεῖσαι αὐτὸν δεινὰ ῥήματα ἔλεγον αὐτῷ καὶ μετὰ σπουδῆς καθῄρουν αὐτόν, ὡς κατιόντα ἀπὸ τῆς καρούχας ἀποσῦραι τὸ ἀντικνήμιον. καὶ μὴ ἐπιστραφείς, ὡς οὐδὲν πεπονθὼς προθύμως μετὰ σπουδῆς ἐπορεύετο, ἀγόμενος εἰς τὸ στάδιον, θορύβου τηλικούτου ὄντος ἐν τῷ σταδίῳ ὡς μηδὲ ἀκουσθῆναί τινα δύνασθαι.

Alors les deux magistrats, voyant qu’ils ne gagnaient rien, l’accablèrent d’injures et le chassèrent avec tant de précipitation que, en descendant de la voiture, il se déchira le devant de la jambe. Sans même se retourner et comme s’il ne lui était rien arrivé, Polycarpe continua allègrement son chemin d’un pas rapide. On le conduisait vers le stade où il régnait un tel tumulte, que personne ne pouvait s’y faire entendre.

Notes

8.1 σαββάτου μεγάλου, ne signifie pas le samedi-saint, car, dans ce sens, il serait accompagné de l’article, et d’ailleurs, à cette époque, le samedi saint tel que nous l’entendons aujourd’hui n’avait pas encore été institué. Il s’agit d’un jour de grand-sabbat : mais quelle est la portée exacte de cette expression ? c’est ce sur quoi l’on est pas d’accord. — Voir les notes de Funk et de Lightfoot sur ce passage, et la dissertation de Lightfoot (Apostolic Fathers).

8.2 καροῦχαν : Mot latin hellénisé. La carruca était une voiture de luxe, couverte, à l’usage des dames et des hauts fonctionnaires.

Κύριος καῖσαρ — Pris dans leur sens naturel, ces mots en effet n’auraient rien eu qui pût choquer la conscience d’un chrétien. Mais, dans l’intention des païens, ils étaient la négation directe de Κύριος Ἱησοῦς, et une sorte de déification de l’empereur. Il était donc impossible à un chrétien de les prononcer. Cf Tertullien, Apolog., 34 : « Auguste ne souffrait pas qu’on le nommât seigneur : ce nom en effet appartient à la divinité. Je consens cependant à donner à l’empereur le nom de seigneur, pourvu que ce ne soit pas dans le même sens que je le donne à Dieu. »

Chapitre 9

9.1 Τῷ δὲ Πολυκάρπῳ εἰσιόντι εἰς τὸ στάδιον φωνὴ ἐξ οὐρανοῦ ἐγένετο· Ἴσχυε, Πολύκαρπε, καὶ ἀνδρίζου. καὶ τὸν μὲν εἰπόντα οὐδεὶς εἶδεν, τὴν δὲ φωνὴν τῶν ἡμετέρων οἱ παρόντες ἤκουσαν. καὶ λοιπὸν προσαχθέντος αὐτοῦ, θόρυβος ἦν μέγας ἀκουσάντων, ὅτι Πολύκαρπος συνείληπται.

Au moment où Polycarpe entrait dans le stade, une voix du ciel lui dit : « Courage, Polycarpe, sois un homme ! » Personne ne vit qui parlait, mais ceux des nôtres qui étaient présents entendirent la voix. Quand Polycarpe fut enfin introduit, le tumulte redoubla à la nouvelle de son arrestation.

9.2 προσαχθέντα οὖν αὐτὸν ἀνηρώτα ὁ ἀνθύπατος, εἰ αὐτὸς εἴη Πολύκαρπος. τοῦ δὲ ὁμολογοῦντος, ἔπειθεν ἀρνεῖσθαι λέγων· Αἰδέσθητί σου τὴν ἡλικίαν, καὶ ἕτερα τούτοις ἀκόλουθα, ὡς ἔθος αὐτοῖς λέγειν· Ὄμοσον τὴν Καίσαρος τύχην, μετανόησον, εἶπον· Αἶρε τοὺς ἀθέους. ὁ δὲ ὄχλον τὸν ἐν τῷ σταδίῳ ἀνόμων ἐθνῶν ἐμβλέψας καὶ ἐπισείσας αὐτοῖς τὴν χεῖρα, στενάξας τε καὶ ἀναβλέψας εἰς τὸν οὐρανὸν εἶπεν· Αἶρε τοὺς ἀθέους.

On l’amena devant le proconsul, qui lui demanda s’il était bien Polycarpe. Sur sa réponse affirmative, le magistrat l’engagea à renier (le Christ) : « Respecte ton grand âge », lui dit-il ; et il ajouta les autres exhortations qu’ils ont coutume d’adresser en pareille circonstance. « Jure par la fortune de César, reviens à de meilleurs sentiments, et crie : Plus d’athées ! » Alors Polycarpe, promenant un regard sévère sur toute cette tourbe de païens sans foi ni loi qui encombrait le stade, et étendant la main vers elle, leva les yeux au ciel avec un profond soupir, et s’écria : « Plus d’athées ! »

9.3 ἐγκειμένου δὲ τοῦ ἀνθυπάτου καὶ λέγοντος· Ὄμοσον, καὶ ἀπολύω σε, λοιδόρησον καὶ ἓξ ἔτη δουλεύω αὐτῷ, καὶ οὐδέν με ἠδίκησεν· καὶ´πῶς δύναμαι βλασφημῆσαι τὸν βασιλέα μου τὸν σώσαντά με;

Le proconsul insista : « Prête serment, dit-il, et je te délivre ; maudis le Christ ! » Mais Polycarpe lui répondit : « Il y a quatre-vingt-six ans que je le sers, et il ne m’a jamais fait aucun mal. Comment pourrais-je blasphémer mon roi et mon sauveur ?

Notes

9.2 Αἶρε τοὺς ἀθέους — Ces athées, aux yeux du proconsul, ce sont les chrétiens : dans la pensée de Polycarpe, ce sont les païens.

Chapitre 10

10.1 Ἐπιμένοντος δὲ´πάλιν αὐτοῦ καὶ λέγοντος· Ὄμοσον τὴν Καίσαρος τύχην, ἀπεκρίνατο· Εἰ κενοδοξεῖς, ἵνα ὀμόσω τὴν καίσαρος τύχην, ὡς σὺ λέγεις, προσποιεῖ δὲ ἀγνοεῖν με, τίς εἰμι, μετὰ παρρησίας ἄκουε· Χριστιανός εἰμι. εἰ δὲ θέλεις τὸν τοῦ Χριστιανισμοῦ μαθεῖν λόγον, δὸς ἡμέραν καὶ ἄκουσον.

Le proconsul redoubla ses instances. « Jure, lui disait-il, par la fortune de César. » Le vieillard lui répondit : « Tu t’imagines peut-être, bien à tort d’ailleurs, me faire jurer par ce que tu appelles la fortune de César, et tu feins d’ignorer qui je suis ; eh bien ! écoute, je vais te le dire franchement : je suis chrétien ! Si tu veux apprendre la doctrine des Chrétiens, accorde-moi un délai d’un jour, et prête-moi ton attention.

10.2 ἔφη ὁ ἀνθύπατος· Πεῖσον τὸν δῆμον. ὁ δὲ Πολύκαρπος εἶπεν· Σὲ μὲν κἂν λόγου ἠξίωσα· δεδιδάγμεθα γὰρ ἀρχαῖς καὶ ἐξουσίαις ὑπὸ τοῦ θεοῦ τεταγμέναις τιμὴν κατὰ τό προσῆκον, τὴν μὴ βλάπτουσαν ἡμᾶς, ἀπονέμειν· ἐκείνους δὲ οὐχ ἡγοῦμαι ἀξίους τοῦ ἀπολογεῖσθαι αὐτοῖς.

Persuade donc cela au peuple », dit le proconsul. — « Avec toi, repartit Polycarpe, il vaut la peine de discuter : on nous a appris à rendre aux puissances et aux autorités établies par Dieu l’honneur qui leur est dû, pourvu qu’il n’ait rien de blessant pour notre foi. Quant à ces gens-là, je ne les juge pas dignes d’entendre ma défense. »

Notes

10.1 κενοδοξεῖςκενοδοξεῖν a deux sens différents : s’imaginer, espérer à tort, ou bien se faire une vaine gloire. Ce passage peut donc se traduire de deux façons : 1° si tu espères, bien à tort d’ailleurs, me faire jurer ; 2° si tu te fais une vaine gloire, un vain point d’honneur de me faire jurer.

Chapitre 11

11.1 Ὁ δὲ ἀνθύπατος εἶπεν· Θηρία ἔχω, τούτοις σε παραβαλῶ, ἐὰν μὴ μετανοήσῃς. ὁ δὲ εἶπεν· Κάλει, ἀμετάθετος γὰρ ἡμῖν ἡ ἀπὸ τῶν κρειττόνων ἐπὶ τὰ χείρω μετάνοια· καλὸν δὲ μετατίθεσθαι πρὸς αὐτόν· Πυρί σε ποιήσω δαπανηθῆναι, εἰ τῶν θηρίων καταφρονεῖς, ἐὰν μὴ μετανοήσῃς. ὁ δὲ Πολύκαρπος εἶπεν· Πῦρ ἀπειλεῖς τὸ πρὸς ὥραν καιόμενον καὶ μετ’ ὀλίγον σβεννύμενον· ἀγνοεῖς γὰρ τὸ τῆς μελλούσης κρίσεως καὶ αἰωνίου κολάσεως τοῖς ἀσεβέσι τηρούμενον πῦρ. ἀλλὰ τί βραδύνεις; φέρε, ὃ βούλει.

Le proconsul reprit : « J’ai là des bêtes, et je vais t’y livrer, si tu ne reviens pas à de meilleurs sentiments. — Fais-les venir », répondit Polycarpe ; « nous ne pouvons pas changer ainsi pour aller du meilleur au pire ; ce qui est beau, au contraire, c’est de renoncer à la méchanceté pour embrasser la justice. Puisque tu méprises les bêtes, reprit le proconsul, je te ferai consumer par le feu, si tu ne changes d’avis. » Polycarpe repartit : « Tu me menaces d’un feu qui brûle un moment et s’éteint bientôt après ; c’est que tu ne connais pas le feu du jugement à venir et du supplice éternel, ce feu réservé aux impies, Mais à quoi bon toutes ces lenteurs ? Fais venir tout ce que tu voudras. »

Notes

11.1 καλὸν δὲ μετατίθεσθαι πρὸς αὐτόν — Ces paroles s’adressent au proconsul : ce n’est pas moi qui ai besoin de revenir à de meilleurs sentiments ; c’est toi qui ferais une belle action en renonçant à la cruauté pour passer à la pratique de la justice.

Chapitre 12

12.1 Ταῦτα δὲ καὶ ἕτερα πλείονα λέγων θάρσους καὶ χαρᾶς ἐνεπίμπλατο, καὶ τὸ πρόσωπον αὐτοῦ χάριτος ἐπληροῦντο, ὥστε οὐ μόνον μὴ συμπεσεῖν ταραχθέντα ὑπὸ τῶν λεγομένων πρὸς αὐτόν, ἀλλὰ τοὐναντίον τὸν ἀνθύπατον ἐκστῆναι, πέμψαι τε τὸν ἑαυτοῦ κήρυκα ἐν μέσῳ τοῦ σταδίου κηρῦξαι τρίς· Πολύκαρπος ὡμολόγησεν ἑαυτὸν Χριστιανὸν εἶναι.

Telles sont, entre beaucoup d’autres, les paroles que prononça Polycarpe. Il était tout débordant de courage et d’allégresse ; la grâce rayonnait sur son visage. Les paroles du magistrat n’avaient produit en lui ni abattement, ni trouble. Le proconsul, au contraire, était tout déconcerté ; il envoya alors son héraut au milieu du stade publier trois fois : « Polycarpe s’est déclaré chrétien ! »

12.2 τούτου λεχθέντος ὑπὸ τοῦ κήρυκος, ἅπαν τὸ πλῆθος ἐθνῶν τε καὶ Ἰουδαίων τῶν τὴν Σμύρναν κατοικούντων ἀκατασχέτῳ θυμῷ καὶ μεγάλῃ φωνῇ ἐπεβόα· Οὗτός ἐστιν ὁ τῆς Ἀσίας διδάσκαλος, ὁ πατὴρ τῶν Χριστιανῶν, ὁ τῶν ἡμετέρων θεῶν καθαιρέτης, ὁ πολλοὺς διδάσκων μὴ θύειν μηδὲ προσκυνεῖν. ταῦτα λέγοντες ἐπεβόων καὶ ἠρώτων τὸν Ἀσιάρχην Φίλιππον, ἵνα ἐπαφῇ τῷ Πολυκάρπῳ λέοντα. ὁ δὲ ἔφη, μὴ εἶναι ἐξὸν αὐτῷ, ἐπειδὴ πεπληρώκει τὰ κυνηγέσια.

A ces paroles, la foule entière, composée de païens et de Juifs établis à Smyrne, ne put contenir sa fureur et se mit à pousser de grands cris : « Le voilà, disaient-ils, le docteur de l’Asie, le père des chrétiens, le destructeur de nos dieux, celui qui, par ses enseignements, détourne tant de gens de sacrifier et d’adorer ! » En même temps ils demandaient à grands cris à l’asiarque Philippe de lâcher un lion sur Polycarpe. Mais Philippe leur fit observer qu’il n’en avait pas le droit, les combats de bêtes étant terminés.

12.3 τότε ἔδοξεν αὐτοῖς ὁμοθυμαδὸν ἐπιβοῆσαι, ὥστε τὸν Πολύκαρπον ζῶντα κατακαῦσαι. ἔδει γὰρ τὸ τῆς φανερωθείσης αὐτῷ ἐπὶ τοῦ προσκεφαλαίου ὀπτασίας πληρωθῆναι, εἶπεν ἐπιστραφεὶς τοῖς σὺν αὐτῷ πιστοῖς προφητικῶς· Δεῖ με ζῶντα καῆναι.

Alors un nouveau cri sortit à la fois de toutes les poitrines : « Que Polycarpe soit brûlé vif ! » Ne fallait-il pas en effet que la vision qu’il avait eue s’accomplit ? Étant en prière, il avait vu son oreiller tout en feu et, se tournant vers les fidèles qui l’accompagnaient, il leur avait dit d’un ton prophétique : « Je dois être brûlé vif ! »

Notes

12.2 Ἀσιάρχην — L’Asiarque était le président de la Confédération des villes de l’Asie proconsulaire (Commune Asiæ, κοινόν τῆς Ἀσίας ; en cette qualité, il était grand-prêtre d’Asie, ἀρχιερεύς, et président des jeux. — κυνηγέσια est la traduction littérale de venationes, chasses donné par les Romains à tous les combats de bêtes.

Chapitre 13

13.1 Ταῦτα οὖν μετὰ τοσούτου τάχους ἐγένετο, θάττον ἢ ἐλέγετο, τῶν ὄχλων παραχρῆμα συναγόντων ἔκ τε τῶν ἐργαστηρίων καὶ βαλανείων ξύλα καὶ φρύγανα, μάλιστα Ἰουδαίων προθύμως, ὡς ἔθος αὐτοῖς, εἰς ταῦτα ὑπουργούντων.

La chose fut plus vite faite que dite : la foule se répandit sur-le-champ dans les ateliers et les bains pour y chercher du bois et des fagots. Selon leur habitude, c’étaient les Juifs qui montraient le plus d’ardeur à cette besogne.

13.2 ὅτε δὲ ἡ πυρκαϊὰ ἡτοιμάσθη, ἀποθέμενος ἑαυτὼ πάντα τὰ ἱμάτια καὶ λύσας τὴν ζώην ἐπειρᾶτο καὶ ὑπολύειν ἑαυτόν, μὴ πρότερον τοῦτο ποιῶν διὰ τὸ τοῦ χρωτὸς αὐτοῦ ἅψηται· παντὶ γὰρ καλῷ ἀγαθῆς ἕνεκεν πολιτείας καὶ πρὸ τῆς μαρτυρίας ἐκεκόσμητο.

Quand le bûcher fut prêt, Polycarpe quitta lui-même tous ses vêtements, et détacha sa ceinture ; il essaya aussi de se déchausser, ce à quoi il n’était pas accoutumé ; car, en toute occasion, les fidèles se disputaient l’honneur de toucher son corps : tant était grand le prestige dont l’avait entouré, même avant son martyre, la sainteté de sa vie.

13.3 εὐθέως οὖν αὐτῷ περιετίθετο τὰ πρὸς τὴν πυρὰν ἡρμοσμένα ὄργανα. μελλόντων δὲ αὐτῶν καὶ προσηλοῦν, εἶπεν· Ἄρετέ με οὕτως· ὁ γὰρ δοὺς ὑπομεῖναι τὸ πῦρ δώσει χωρὶς τῆς ὑμετέρας ἐκ τῶν ἥλων ἀσφαλείας ἄσκυλτον ἐπιμεῖναι τῇ πυρᾷ.

On le plaça aussitôt au milieu de l’appareil préparé pour le bûcher, et on allait l’y clouer : « Laissez-moi ainsi, dit-il ; celui qui me donne la force de supporter le feu m’accordera aussi celle de rester immobile sur le bûcher, sans qu’il soit besoin pour cela de vos clous. »

Chapitre 14

14.1 Οἱ δὲ οὐ καθήλωσαν μέν, προσέδησαν δὲ αὐτόν. ὁ δὲ ὀπίσω τὰς χεῖρας ποιήσας καὶ προσδεθείς, ὥσπερ κριὸς ἐπίσημος ἐκ μεγάλου ποιμνίου εἰς προσφοράν, ὁλοκαύτωμα δεκτὸν τῷ θεῷ ἡτοιμασμένον, ἀναβλέψας εἰς τὸν οὐρανὸν εἶπεν· Κύριε ὁ θεὸς ὁ παντοκράτωρ, ὁ τοῦ ἀγαπητοῦ καὶ εὐλογητοῦ παιδός σου Ἰησοῦ Χριστοῦ πατήρ, δι’ οὗ τὴν περὶ σοῦ ἐπίγνωσιν εἰλήφαμεν, ὁ θεὸς ἀγγέλων καὶ δυνάμεων καὶ πάσης τῆς κτίσεως παντός τε τοῦ γένους τῶν δικαίων, οἳ ζῶσιν ἐνώπιόν σου·

On ne le cloua donc pas à l’appareil, mais on l’y lia. Ainsi attaché au poteau les mains derrière le dos, il semblait un bélier de choix pris dans un grand troupeau pour le sacrifice, un holocauste agréable préparé pour Dieu. Alors, levant les yeux au ciel, il dit : « Seigneur, Dieu tout-puissant, père de Jésus-Christ, ton fils bien-aimé et béni, qui nous a appris à te connaître, Dieu des Anges, des Puissances, et de toute la création, (Dieu) de toute la famille des justes qui vivent en ta présence !

14.2 εὐλογῶ σε, ὅτι ἠξίωσάς με τῆς ἡμέρας καὶ ὥρας ταύτης, τοῦ λαβεῖν με μέρος ἐν ἀριθμῷ τῶν μαρτύρων ἐν τῷ ποτηρίῳ τοῦ Χριστοῦ σου εἰς ἀνάστασιν ζωῆς αἰωνίου ψυχῆς τε καὶ σώματος ἐν ἀφθαρσίᾳ πνεύματος ἁγίου· ἐν οἷς προσδεχθείην ἐνώπιόν σου σήμερον ἐν θυσίᾳ πίονι καὶ προσδεκτῇ, καθὼς προητοίμασας καὶ προεφανέρωσας καὶ ἐπλήρωσας, ὁ ἀψευδὴς καὶ ἀληθινὸς θεός.

Je te bénis pour m’avoir jugé digne de ce jour et de cette heure, digne d’être compté au nombre de tes martyrs, et d’avoir part avec eux au calice de ton Christ, pour ressusciter à la vie éternelle de l’âme et du corps dans l’incorruptibilité de l’Esprit-Saint ! Puissé-je aujourd’hui être admis avec eux en ta présence, comme une victime grasse et agréable, de même que le sort que tu m’avais préparé, que tu m’avais fait voir d’avance, tu le réalises maintenant, Dieu de vérité, Dieu exempt de mensonge !

14.3 διὰ τοῦτο καὶ περὶ πάντων σὲ αἰνῶ, σὲ εὐλογῶ, σὲ δοξάζω διὰ τοῦ αἰωνίου καί ἐπουρανίου ἀρχιερέως Ἰησοῦ Χριστοῦ, ἀγαπητοῦ σου παιδός, δι’ οὗ σοὶ σὺν αὐτῷ καὶ πνεύματι ἁγίῳ δόξα καὶ νῦν καὶ εἰς τοὺς μέλλοντας αἰῶνας. ἀμήν.

Pour cette grâce et pour toutes choses, je te loue, je te bénis, je te glorifie par l’éternel grand-prêtre du ciel, Jésus-Christ, ton fils bien-aimé. Par lui, gloire soit à toi, avec lui et le Saint-Esprit, maintenant et dans les siècles à venir ! Amen ! »

Chapitre 15

15.1 Ἀναπέμψαντος δὲ αὐτοῦ τὸ ἀμὴν καὶ πληρώσαντος τὴν εὐχήν, οἱ τοῦ πυρὸς ἄνθρωποι ἐξῆψαν τὸ πῦρ. μεγάλης δὲ ἐκλαμψάσης φλογός, θαῦμα εἴδομεν, οἷς ἰδεῖν ἐδόθη· οἳ καὶ ἐτηρήθημεν εἰς τὸ ἀναγγεῖλαι τοῖς λοιποῖς τὰ γενόμενα.

Quand Polycarpe eut fait monter cet Amen vers le ciel, et achevé sa prière, les préposés au bûcher allumèrent le feu, et une grande flamme s’éleva. Il se produisit alors un prodige, qu’il nous fut donné de voir, à nous, qui avons été réservés pour rapporter aux autres ces événements :

15.2 τὸ γὰρ πῦρ καμάρας εἶδος ποιῆσαν ὥσπερ ὀθόνη πλοίου ὑπό πνεύματος πληρουμένη, κύκλῳ περιετείχισεν τὸ σῶμα τοῦ μάρτυρος· καὶ ἦν μέσον οὐχ ὡς σὰρξ καιομένη, ἀλλ’ ὡς ἄρτος ὀπτώμενος ἢ ὡς χρυσὸς καὶ ἄργυρος ἐν καμίνῳ πυρούμενος. καὶ γὰρ εὐωδίας τοσαύτης ἀντελαβόμεθα, ὡς λιβανωτοῦ πνέοντος ἢ ἄλλου τινὸς τῶν τιμίων ἀρωμάτων.

le feu s’arrondit en voûte, comme une voile de navire gonflée par le vent, et entoura le corps du martyr ; celui-ci, placé au centre, faisait l’effet, non d’une chair qui brûle, mais d’un pain qui cuit, ou d’un lingot d’or et d’argent qui se purifie dans la fournaise. Nous sentîmes même une odeur délicieuse, comme celle de l’encens ou de quelque autre parfum précieux.

Chapitre 16

16.1 Πέρας γοῦν ἰδόντες οἰ ἄνομοι μὴ δυνάμενον αὐτοῦ τὸ σῶμα ὑπὸ τοῦ πυρὸς δαπανηθῆναι ἐκέλευσαν προσελθόντα αὐτῷ κομφέκτορα παραβῦσαι ξιφίδιον. καὶ τοῦτο ποιήσαντος, ἐξῆλθεν περιστερὰ καὶ πλῆθος αἵματος, ὥστε κατασβέσαι τὸ πῦρ καὶ θαυμάσαι πάντα τὸν ὄχλον, εἰ τοσαύτη τις διαφορὰ μεταξὺ τῶν τε ἀπίστων καὶ τῶν ἐκλεκτῶν·

A la fin, voyant que les flammes ne pouvaient attaquer le corps de Polycarpe, les impies ordonnèrent au confector d’aller le percer de son poignard. A peine l’eut-il fait, qu’une colombe s’envola du bûcher, et qu’il s’échappa de la blessure un tel flot de sang, que le feu en fut éteint. Aussi la foule entière resta-t-elle stupéfaite, en constatant une telle différence entre les infidèles et les élus.

16.2 ὧν εἷς καὶ οὗτος γεγόνει ὁ θαυμασιώτατος μάρτυς Πολύκαρπος, ἐν τοῖς καθ’ ἡμᾶς χρόνοις διδάσκαλος ἀποστολικὸς καὶ προφητικὸς γενόμενος, ἐπίσκοπος ἀποστολικὸς καὶ προφητικὸς γενόμενος, ἐπίσκοπος τῆς ἐν Σμύρνῃ καθολικῆς ἐκκλησίας. πᾶν γὰρ ῥῆμα, ὃ ἀφῆκεν ἐκ τοῦ στόματος αὐτοῦ, καὶ ἐτελειώθη καὶ τελειωθήσεται.

Au nombre de ceux-ci doit être rangé Polycarpe ce très glorieux martyr, qui, à notre époque, fut par ses enseignements un apôtre et un prophète, et l’évêque de l’église catholique de Smyrne : toute parole sortie de sa bouche a déjà reçu ou recevra son accomplissement.

Notes

16.1 κομφέκτορα — Comme son nom l’indique, le confector était chargé, après les venationes, d’achever les blessés, hommes ou bêtes. παραβῦσαι ξιφίδιον — Nouveau trait de ressemblance avec le Sauveur, dont un soldat perça le côté. — περιστερὰ καὶ — Manque dans Eusèbe et est d’une authenticité douteuse.

Chapitre 17

17.1 Ὁ δὲ ἀντίζηλος καὶ βάσκανος καὶ πονηρός, ὁ ἀντικείμενος τῷ γένει τῶν δικαίων, ἰδὼν τό τε μέγεθος αὐτοῦ τῆς μαρτυρίας καὶ τὴν ἀπ’ ἀρχῆς ἀνεπίληπτον πολιτείαν, ἐστεφανωμένον τε τὸν τῆς ἀφθαρσίας στέφανον καὶ βραβεῖον ἀναντίρρητον ἀπενηνεγμένον, ἐπετήδευσεν, ὡς μηδὲ τὸ σωμάτιον αὐτοῦ ὑφ’ ἡμῶν ληφθῆναι, καίπερ πολλῶν ἐπιθυμούντων τοῦτο ποιῆσαι καί κοινωνῆσαι τῷ ἁγίῳ αὐτοῦ σαρκίῳ.

Mais le jaloux, l’envieux, le méchant, l’adversaire de la famille des justes, voyant Polycarpe, après un éclatant martyre et une vie qui, dès son début, avait toujours été sans tache, ceint de la couronne d’immortalité et en possession désormais incontestée de la récompense, fit tout ce qu’il put pour nous empêcher d’enlever ses pauvres restes, au grand regret de beaucoup de chrétiens qui désiraient posséder sa sainte dépouille.

17.2 ὑπέβαλεν γοῦν Νικήτην τὸν τοῦ Ἡρώδου πατέρα, ἀδελφὸν δὲ Ἄλκης, ἐντυχεῖν τῷ ἄρχοντι, ὥστε μὴ δοῦναι αὐτοῦ τὸ σῶμα· μή, φησίν, ἀφέντες τὸν ἐσταυρωμένον τοῦτον ἄρξωνται σέβεσθαι. καὶ ταῦτα εἶπον ὑποβαλλόντων καὶ ἐνισχυόντων τῶν Ἰουδαίων, οἳ καὶ ἐτήρησαν, μελλόντων ἡμῶν ἐκ τοῦ πυρὸς αὐτὸν λαμβάνειν· ἀγνοοῦντες, ὅτι οὔτε τὸν Χριστόν ποτε καταλιπεῖν δυνησόμεθα, τὸν ὑπὲρ τῆς τοῦ παντὸς κόσμου τῶν σωζομένων σωτηρίας παθόντα ἄμωμον ὑπὲρ ἁμαρτωλῶν, οὔτε ἕτερόν τινα σέβεσθαι.

Il suggéra à Nicète, père d’Hérode et frère d’Alcé, d’intervenir auprès du gouverneur, pour qu’il nous refusât le corps. « Ils seraient capables, dit (Nicète), d’abandonner le crucifié pour rendre un culte à Polycarpe. » Ce langage fut tenu à l’instigation et sur les instances des Juifs, qui nous avaient épiés au moment où nous allions retirer du feu (le corps du martyr). Ils ignoraient que jamais nous ne pourrons ni abandonner le Christ, qui a souffert pour le salut de ceux qui sont sauvés dans le monde entier, (victime) innocente (immolée) pour des pécheurs, ni rendre un culte à un autre :

17.3 τοῦτον μὲν γὰρ υἱὸν ὄντα τοῦ θεοῦ προσκυνοῦμεν, τοὺς δὲ μάρτυρας ὡς μαθητὰς καὶ μιμητὰς τοῦ κυρίου ἀγαπῶμεν ἀξίως ἕνεκα εὐνοίας ἀνυπερβλήτου τῆς εἰς τὸν ἴδιον βασιλέα καὶ διδάσκαλον· ὧν γένοιτο καὶ ἡμᾶς κοινωνούς τε καὶ συμμαθητὰς γενέσθαι.

car lui, nous l’adorons, parce qu’il est le Fils de Dieu ; quant aux martyrs, c’est en leur qualité de disciples et d’imitateurs du Seigneur que nous les aimons ; et ils en sont bien dignes par leur attachement sans bornes à leur roi et maître. Puissions-nous, nous aussi, partager leur sort et suivre comme eux les leçons (du Christ) !

Notes

17.2 Ἄλκης — Cette Alcé, sœur de Nicète, était évidemment chrétienne. Elle est peut-être la même que l’Alcé chrétienne de Smyrne, à laquelle, quarante ou quarante-cinq ans auparavant, Ignace d’Antioche envoyait ses salutations.

Chapitre 18

18.1 Ἰδὼν οὖν ὁ κεντυρίων τὴν τῶν Ἰουδαίων γενομένην φιλονεικίαν, θεὶς αὐτὸν ἐν μέσῳ, ὡς ἔθος αὐτοῖς, ἔκαυσεν.

Devant l’opposition soulevée par les Juifs, le centurion exposa aux yeux de tous le corps de Polycarpe et le brûla, selon la coutume païenne.

18.2 οὕτως τε ἡμεῖς ὕστερον ἀνελόμενοι τὰ τιμιώτερα λίθων πολυτελῶν καὶ δοκιμώτερα ὑπὲρ χρυσίον ὀστᾶ αὐτοῦ ἀπεθέμεθα, ὅπου καὶ ἀκόλουθον ἦν.

Voilà comment nous pûmes ensuite recueillir ses ossements, d’une plus grande valeur que les pierres précieuses, plus estimables que l’or, pour les déposer dans un lieu convenable.

18.3 ἔνθα ὡς δυνατὸν ἡμῖν συναγομένοις ἐν ἀγαλλιάσει καὶ χαρᾷ παρέξει ὁ κύριος ἐπιτελεῖν τὴν τοῦ μαρτυρίου αὐτοῦ ἡμέραν γενέθλιον, εἴς τε τὴν τῶν προηθληκότων μνήμην καὶ τῶν μελλόντων ἄσκησίν τε καὶ ἑτοιμασίαν.

C’est là que, dans la mesure du possible, nous nous réunirons dans la joie et l’allégresse, pour célébrer, avec l’aide du Seigneur, l’anniversaire du jour où Polycarpe est né (à Dieu) par le martyre : ce sera un hommage à la mémoire de ceux qui ont combattu avant nous, en même temps qu’un entraînement et une préparation aux luttes de l’avenir.

Notes

18.3 ἡμέραν γενέθλιον, jour de naissance à la vie éternelle : c’est ici le plus ancien exemple connu de cette expression dans le sens de jour de la mort ; mais l’idée se trouve déjà dans Ignace, Rom.6.1-2.

Chapitre 19

19.1 Τοιαῦτα τὰ κατὰ τὸν μακάριον Πολύκαρπον, ὃς σὺν τοῖς ἀπὸ Φιλαδελφίας δωδέκατος ἐν Σμύρνῃ μαρτυρήσας, μόνος ὑπὸ πάντων μᾶλλον μνημονεύεται, ὥστε καὶ ὑπὸ τῶν ἐθνῶν ἐν παντὶ τόπῳ λαλεῖσθαι· οὐ μόνον διδάσκαλος γενόμενος ἐπίσημος, ἀλλὰ καὶ μάρτυς ἔξοχος, οὗ τὸ μαρτύριον πάντες ἐπιθυμοῦσιν μιμεῖσθαι κατὰ εὐαγγέλιον Χριστοῦ γενόμενον.

Telle fut la fin du bienheureux Polycarpe. En comptant les chrétiens de Philadelphie, il fut le douzième qui souffrit le martyre à Smyrne ; mais c’est de lui surtout qu’on a gardé le souvenir, au point que partout les gentils eux-mêmes parlent de lui. Il fut remarquable, non seulement par sa doctrine, mais aussi par son éclatant martyre, que tous désirent imiter, à cause de sa ressemblance avec ce que l’évangile (nous raconte de la Passion) du Christ.

19.2 διὰ τῆς ὑπομονῆς καταγωνισάμενος τὸν ἄδικον ἄρχοντα καὶ οὕτως τὸν τῆς ἀφθαρσίας στέφανον ἀπολαβών, σὺν τοῖς ἀποστόλοις καὶ πᾶσιν δικαίοις ἀγαλλιώμενος δοξάζει τὸν θεὸν καὶ πατέρα παντοκράτορα καὶ εὐλογεῖ τὸν κύριον ἡμῶν Ἰησοῦν Χριστόν, τὸν σωτῆρα τῶν ψυχῶν ἡμῶν καὶ κυβερνήτην τῶν σωμάτων ἡμῶν καὶ ποιμένα τῆς κατὰ τὴν οἰκουμένην καθολικῆς ἐκκλησίας.

Par sa patience, Polycarpe triompha du gouverneur inique, et mérita la couronne de l’immortalité ; maintenant, il partage l’allégresse des Apôtres et de tous les justes ; il glorifie Dieu, le Père tout-puissant, et il bénit notre Seigneur Jésus-Christ, le sauveur de nos âmes, le pilote de nos corps, le pasteur de l’église universelle répandue sur toute la terre.

Notes

19.1 σὺν τοῖς ἀπὸ Φιλαδελφίας δωδέκατος — Dans cette circonstance, il y eut en tout douze martyrs à Smyrne, et Polycarpe fut le dernier : voilà qui est certain. Mais les onze autres martyrs étaient-ils tous de Philadelphie ? ou bien y en avait-il d’ailleurs, de Smyrne en particulier ? Le texte est en faveur de la seconde. Il y a donc deux traductions possibles : il souffrit le martyre avec onze autres chrétiens de Philadelphie ; ou bien : il souffrit le martyre avec onze autres chrétiens, y compris ceux de Philadelphie.

Chapitre 20

20.1 Ὑμεῖς μὲν οὖν ἠξιώσατε διὰ πλειόνων δηλωθῆναι ὑμῖν τὰ γενόμενα, ἡμεῖς δὲ κατὰ τὸ παρὸν ἐπὶ κεφαλαίῳ μεμηνύκαμεν διὰ τοῦ ἀδελφοῦ ἡμῶν Μαρκίωνος. μαθόντες οὖν ταῦτα καὶ τοῖς ἐπέκεινα ἀδελφοῖς τὴν ἐπιστολὴν διαπέμψασθε, ἵνα καὶ ἐκεῖνοι δοξάζωσιν τὸν κύριον τὸν ἐκλογὰς ποιοῦντα ἀπὸ τῶν ἰδίων δούλων.

Vous nous avez priés de vous envoyer l’histoire détaillée de ces événements ; mais, en attendant, nous vous en avons fait rédiger un récit sommaire par notre frère Marcion. Quand vous aurez pris connaissance de cette lettre, faites-la passer aux frères qui sont plus éloignés, afin qu’ils glorifient, eux aussi, le Seigneur pour les choix qu’il daigne faire parmi ses serviteurs.

20.2 Τῷ δὲ δυναμένῳ πάντας ἡμᾶς εἰσαγαγεῖν ἐν τῇ αὐτοῦ χάριτι καὶ δωρεᾷ εἰς τὴν ἐπουράνιον αὐτοῦ βασιλείαν διὰ τοῦ μονογενοῦς παιδὸς αὐτοῦ Ἰησοῦ Χριστοῦ, δόξα, τιμή, κράτος, μεγαλωσύνη εἰς τοὺς αἰῶνας. προσαγορεύετε πάντας τοὺς ἁγίους. ὑμᾶς οἱ σὺν ἡμῖν προσαγορεύουσιν καὶ Εὐάρεστος ὁ γράψας πανοικεί.

A celui qui, dans sa grâce et sa libéralité, peut nous faire entrer tous dans son royaume éternel par Jésus-Christ, son Fils unique : à lui soit la gloire, l’honneur, la puissance et la majesté pour les siècles ! Saluez tous les saints. Recevez les salutations de ceux qui sont avec nous, d’Évareste, qui a transcrit cette lettre, et de toute sa maison.

Notes

20.1 Μαρκίωνος — Ce Marcion n’est pas le scribe qui a transcrit la lettre, car ce scribe est Évareste, cité plus bas ; il n’est pas davantage le porteur de la lettre car dans ce cas, au lieu du parfait μεμηνύκαμεν, nous aurions le présent ; il est l’auteur même qui a rédigé cette lettre au nom de l’église entière.

Chapitre 21

21.1 Μαρτυρεῖ δὲ ὁ μακάριος Πολύκαρπος μηνὸς Ξανθικοῦ δευτέρα ἱσταμένου, πρὸ ἑπτὰ καλανδῶν Μαρτίων, σαββάτῳ μεγάλῳ, ὥρα ὀγδόῃ. συνελήφθη δὲ ὑπὸ Ἡρώδου ἐπὶ ἀρχιερέως Φιλίππου Τραλλιανοῦ, ἀνθυπατεύοντος Στατίου Κοδράτου, βασιλεύοντος δὲ εἰς τοὺς αἰῶνας Ἰησοῦ Χριστοῦ· ᾧ ἡ δόξα, τιμή, μεγαλωσύνη, θρόνος αἰώνιος ἀπὸ γενεᾶς εἰς γενεάν. ἀμήν.

Le martyre du bienheureux Polycarpe eut lieu le deuxième jour de la première décade du mois Xanthicus, le septième jour avant les calendes de mars, un jour de grand sabbat, à la huitième heure. Son arrestation fut opérée par Hérode, sous le pontificat de Philippe de Tralles, le proconsulat de Statius Quadratus, et le règne éternel de notre Seigneur Jésus-Christ, à qui soit la gloire, l’honneur, la majesté, le trône éternel de génération en génération. Amen.

Chapitre 22

22.1 Ἐρρῶσθαι ὑμᾶς εὐχόμεθα, ἀδελφοί, στοιχοῦντας τῷ κατὰ τὸ εὐαγγέλιον λόγῳ Ἰησοῦ Χριστοῦ, μεθ’ οὗ δόξα τῷ θεῷ καὶ πατρὶ καὶ ἁγίῳ πνεύματι, ἐπὶ σωτηρίᾳ τῇ τῶν ἁγίων ἐκλεκτῶν, καθὼς ἐμαρτύρησεν ὁ μακάριος Πολύκαρπος, οὗ γένοιτο ἐν τῇ βασιλείᾳ Ἰησοῦ Χριστοῦ πρὸς τὰ ἴχνη εὑρεθῆναι ἡμᾶς.

Adieu, frères ; continuez de marcher, avec l’évangile pour guide, suivant la doctrine de Jésus-Christ : avec lui, gloire soit à Dieu et au Père et au Saint-Esprit pour le salut des saints élus ! C’est ainsi que le bienheureux Polycarpe a souffert le martyre : puissions-nous, sur ses traces, parvenir au royaume de Jésus-Christ !

22.2 Ταῦτα μετεγράψατο μὲν Γάϊος ἐκ τῶν Εἰρηναίου, μαθητοῦ τοῦ Πολυκάρπου, ὃς καὶ συνεπολιτεύσατο τῷ Εἰρηναίῳ. ἐγὼ δὲ Σωκράτης ἐν Κορίνθῳ ἐκ τῶν Γαΐου ἀντιγράφων ἔγραψα.

Cette lettre a été copiée sur le manuscrit d’Irénée, disciple de Polycarpe, par Caïus, qui vécut lui-même avec lrénée. Et moi, Socrate, je l’ai copiée à Corinthe sur le manuscrit de Caïus. Que la grâce soit avec tous !

22.3 Ἐγὼ δὲ πάλιν Πιόνιος ἐκ τοῦ προγεγραμμένου ἔγραψα ἀναζητήσας αὐτά, κατὰ ἀποκάλυψιν φανερώσω ἐν τῷ καθεξῆς, συναγαγὼν αὐτὰ ἤδη σχεδὸν ἐκ τοῦ χρόνου κεκμηκότα, ἵνα κἀμὲ συναγάγῃ ὁ κύριος Ἰησοῦς Χριστὸς μετὰ τῶν ἐκλεκτῶν αὐτοῦ εἰς τὴν οὐράνιον βασιλείαν αὐτοῦ, ᾧ ἡ δόξα σὺν τῷ πατρὶ καὶ ἁγίῳ πνεύματι εἰς τοὺς αἰῶνας τῶν αἰώνων. ἀμήν.

A mon tour, moi, Pionius, je l’ai copiée sur le manuscrit susmentionné, que je recherchai, après que le bienheureux Polycarpe m’en eut découvert l’existence dans une révélation, comme le le raconterai dans la suite. le temps l’avait presque détruit ; j’en ai réuni les fragments, afin que le Seigneur Jésus-Christ me réunisse moi-même à ses élus dans son céleste royaume. A lui (soit) la gloire avec le Père et le Saint-Esprit pour les siècles des siècles. Amen.

Autre appendice, tiré du manuscrit de Moscou.

23.1 Ταῦτα μετεγράψατο μὲν Γάϊος ἐκ τῶν Εἰρηναίου συγγραμμάτων, ὃς καὶ συνεπολιτεύσατο τῷ Εἰρηναίῳ, μαθητῇ γεγονότι τοῦ ἁγίου Πολυκάρπου.

Cette lettre a été extraite des écrits d’Irénée par Caïus, qui vécut lui-même avec Irénée, disciple de saint Polycarpe.

23.2 οὗτος γὰρ ὁ Εἰρηναῖος, κατὰ τὸν καιρὸν τοῦ μαρτυρίου του ἐπισκόπου Πολυκάρπου γενόμενος ἐν ῾Ρώμῃ, πολλοὺς ἐδίδαξεν· οὗ καὶ πολλὰ συγγράμματα κάλλιστα καὶ ὀρθότατα φέρεται, ἐν οἷς μέμνηται Πολυκάρπου, ὅτι παρ’ αὐτοῦ ἔμαθεν, ἱκανῶς τε πᾶσαν αἵρεσιν ἢλεγξεν και τὸν ἐκκλησιαστικὸν κανόνα καὶ καθολικόν, ὡς παρέλαβεν παρὰ τοῦ ἁγίου, καὶ παρέδωκεν.

Cet Irénée, à l’époque du martyre de l’évêque Polycarpe, était à Rome, où il instruisit beaucoup d’âmes ; on a de lui de nombreux écrits, très beaux et très orthodoxes : il y fait mention de Polycarpe, qui, dit-il, fut son maître. Il a écrit une solide réfutation de toutes les hérésies, et nous a transmis la règle ecclésiastique et catholique, telle qu’il l’avait reçue de notre saint.

23.3 λέγει δὲ καὶ τοῦτο· ὅτι συναντήσαντός ποτε τῷ ἁγίῳ Πολυκάρπῳ Μαρκίωνος, ἀφ’ οὗ οἱ λεγόμενοι Μαρκιωνισταί, καὶ εἰπόντος· Ἐπιγίνωσκε ἡμᾶς, Πολύκαρπε, εἶπεν αὐτὸς τῷ Μαρκίωνι· Ἐπιγινώσω, επιγινώσκω τὸν πρωτότοκον τοῦ σατανᾶ.

Il rapporte aussi le fait suivant : Marcion, le fondateur de la secte des Marcionistes, rencontrant un jour saint Polycarpe, lui dit : « Reconnais-nous, Polycarpe ! — Oui. répondit le saint, je te reconnais, je reconnais le premier-né de Satan. »

23.4 καὶ τοῦτο δὲ φέρεται ἐν τοῖς τοῦ Εἰρηναίου συγγράμμασιν, ὅτι ᾗ ἡμέρᾳ καὶ ὥρᾳ ἐν Σμύρνῃ ἐμαρτύρησεν ὁ Πολύκαρπος, ἤκουσεν φωνὴν ἐν τῇ ῾Ρωμαίων πόλει ὑπάρχων ὁ Εἰρηναῖος ὡς σάλπιγγος λεγούσης· Πολύκαρπος ἐμαρτύρησεν.

Le fait suivant est encore rapporté dans les écrits d’Irénée : au jour et à l’heure mêmes où Polycarpe souffrait le martyre à Smyrne, lrénée, alors à Rome, entendit une voix pareille au son de la trompette, qui disait : « Polycarpe vient d’être martyrisé. »

23.5 Ἐκ τούτων οὖν, ὡς προλέλεκται, τῶν τοῦ Εἰρηναίου συγγραμμάτων Γάϊος μετεγράψατο, ἐκ δὲ τῶν Γαΐου ἀντιγράφων Ἰσοκράτης ἐν Κορίνθῳ. ἐγὼ δὲ πάλιν Πιόνιος ἐκ τῶν Ἰσοκράτους ἀντιγράφων ἔγραψα κατὰ ἀποκάλυψιν τοῦ ἁγίου Πολυκάρπου ζητήσας αὐτά, συναγαγὼν αὐτὰ ἤδη σψεδὸν ἐκ τοῦ χρόνου κεκμηκότα, ἵνα κἀμὲ συναγάγῃ ὁ κύριος Ἰησους Χριστὸς μετὰ τῶν ἐκλεκτῶν αὐτοῦ εἰς τὴν ἐπουράνιον αὐτοῦ βασιλείαν· ᾧ ἡ δόξα σὺν τῷ πατρὶ καὶ τῷ υἱῷ καὶ τῷ ἁγίῳ πνεύματι εἰς τοὺς αἰῶνας τῶν αἰώνων. ἀμήν.

C’est donc, comme nous l’avons déjà dit, dans ces écrits d’Irénée que Caïus copia cette lettre, et c’est sur la copie prise par Caïus qu’Isocrate fit la sienne à Corinthe. Et à mon tour, moi, Pionius, j’ai copié le manuscrit d’Isocrate, après qu’une révélation de saint Polycarpe me l’eut fait rechercher. Le temps l’avait presque détruit ; j’en ai réuni les fragments, afin que le Seigneur Jésus-Christ me réunisse moi-même à ses élus dans son céleste royaume. Gloire à lui avec le Père et le Fils et le Saint-Esprit pour les siècles des siècles. Amen.

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