Comme Christ

VINGT-SEPTIÈME JOUR
Demeurant dans l'amour de Dieu

« Comme mon père m'a aimé, je vous ai aussi aimés... demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour ; comme j'ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour. » Jean 15.9, 10.

Notre Seigneur ne s'est pas borné à nous dire : « Demeurez en moi », il nous dit encore : « Demeurez dans mon amour ». Pour demeurer en lui, il faut d'abord entrer, se plonger, s'immerger dans cet amour admirable dont il nous a aimés jusqu'à se donner pour nous. « L'amour ne cherche point son intérêt » (1 Cor. 13.5). Il sort de lui-même pour se donner à ceux qu'il veut aimer. Demeurer en Christ, c'est nous perdre dans l'Amour Infini, c'est éprouver qu'il nous aime, c'est ne pouvoir être heureux que dans son amour.

Peur nous révéler toute la divine excellence de son amour pour nous, Jésus, en nous invitant à demeurer dans son amour, nous dit qu'il est le même que l'amour du Père pour lui. Rien pourrait-il nous faire désirer davantage de demeurer dans son amour ? « Comme mon Père m'a aimé, je vous ai aussi aimés ; demeurez dans mon amour ». Notre vie peut donc être, comme celle de Christ, indiciblement heureuse de la certitude que l'Amour Infini nous enveloppe et se complait à nous aimer.

Nous savons que ce fut là le secret de la vie admirable de Christ, le secret aussi de sa force à l'approche de la mort. A son baptême s'était fait entendre ce divin message apporté par le Saint-Esprit, et confirmé plus tard par le même Esprit : « C'est ici mon Fils bien-aimé en qui j'ai pris plaisir » (Mat. 3.16). Plus d'une fois nous lisons : « Le Père aime le Fils » (Jean 3.35 ; 5.20) ; et Christ en parle comme de son plus grand bonheur : « Que le monde connaisse que tu les aimes comme tu m'as aimé. Tu m'as aimé avant la fondation du monde. Que l’amour dont tu m'as aimé soit en eux » (Jean 17.19-26). Ainsi que nous marchons ici-bas à la lumière du soleil qui nous entoure, Jésus marchait continuellement à la lumière de l'amour du Père. C'est comme le Bien-aimé du Père qu'il put faire la volonté de Dieu et accomplir son œuvre. Il demeurait dans l'amour du Père.

Nous sommes de même les bien-aimés de Jésus. Comme le Père l'a aimé, il nous aime aussi. Pour le savoir nous n'avons qu'à prendre le temps de fermer les yeux à tout ce qui nous entoure, et d'adorer, et d'attendre jusqu'à ce que l'amour infini de Dieu, dans toute sa puissance et sa gloire, se répande sur nous en passant par le cœur de Jésus, qu'il se fasse connaître à nous, et qu'il prenne entièrement possession de nous. Oh, si le chrétien voulait bien prendre le temps de se pénétrer de cette pensée : « Je suis le Bien-aimé du Seigneur, Jésus m'aime d'instant en instant précisément comme le Père l'aimait », avec quelle foi croissante il pourrait se dire qu'étant aimé comme Christ l'était, il doit aussi marcher comme Christ a marché !

Voici encore ce que cette comparaison offre à notre examen. Ce n'est pas seulement l'amour dans lequel nous devons demeurer qui est semblable à celui dans lequel Jésus demeurait, c'est encore le moyen d'y parvenir qui est pour nous le même que pour lui. Comme Fils, Christ possédait déjà l'amour du Père quand il vint dans le monde, mais ce n'est que par son obéissance qu'il pouvait s'assurer la continuation de cet amour, qu'il pouvait y demeurer. Et il ne s'agissait pas d'une obéissance qui ne lui coûtât rien, loin de là ; c'était en renonçant à sa propre volonté, en apprenant à obéir dans tout ce qu'il avait à souffrir, en se rendant obéissant jusqu'à la mort de la croix, qu'il gardait les commandements du Père et demeurait dans son amour. « Voici pourquoi mon Père m'aime, c'est parce que je donne ma vie... J'ai reçu cet ordre de mon Père ». « Le Père ne m'a point laissé seul parce que je fais toujours ce qui lui est agréable » (Jean 10.17, 18 ; 8.20). Après nous avoir donné cet exemple et nous avoir montré par là que la voie de l'obéissance nous assure l'amour de Dieu, il nous invite à le suivre, « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour ».

Obéir comme Christ, amène à jouir comme lui de l'amour divin. Oh ! quelle assurance nous en recevons pour compter sur la présence de Dieu. « Aimons en effet et en vérité, car c'est en cela que nous assurerons nos cœurs devant lui... Bien-aimés, si notre cœur ne nous condamne point, nous avons de l'assurance devant Dieu. Et quoi que nous demandions, nous le recevons de lui, parce que nous gardons ses commandements et que nous faisons ce qui lui est agréable » (1 Jean 3.18-23). Quelle hardiesse nous puisons là pour affronter l'opinion des hommes, quelle indépendance de leur approbation ou de leur désapprobation, car nous n'agissons plus alors que selon l'ordre de Dieu, Nous n'avons plus qu'à obéir à ses ordres. Et quelle hardiesse aussi en face des difficultés et des dangers ! Puisque nous faisons la volonté de Dieu, nous osons lui laisser toute responsabilité de réussite ou de non-réussite. Le cœur, préoccupé d'obéir à Dieu seul, s'élève alors au-dessus du monde pour ne vouloir que ce que Dieu veut, et il sent que l'amour de Dieu repose sur lui. Comme Christ, il demeure alors dans l'amour de Dieu.

Cherchons à apprendre de Christ ce que c'est qu'une vie réglée par cet esprit d'obéissance. C'est d'abord un esprit de dépendance, c'est reconnaître que nous n'avons plus aucun droit à faire en rien notre propre volonté et que nous y renonçons. C'est encore un esprit docile. Convaincu de l'influence trompeuse de la tradition, des préjugés et des habitudes, il ne tire plus ses préceptes des hommes, mais il les reçoit de Dieu lui-même. Convaincu aussi de l'insuffisance de l'intelligence humaine pour comprendre la Parole de Dieu, pour en recevoir force et vie spirituelle, il sent le besoin de recourir au Saint-Esprit pour l'étudier à sa lumière. Il sait que ses propres vues sur la vérité et sur le devoir sont très partielles et défectueuses, et il compte sur Dieu lui-même pour lui donner des vues plus claires, pour ouvrir des horizons plus élevés.

Il a remarqué cette parole de Dieu : « Si tu écoutes attentivement la voix de l'Eternel ton Dieu, si tu fais ce qui est droit à ses yeux » (Exo. 15.26), il a compris que l'obéissance n'est acceptable et possible que lorsque le commandement ne lui vient pas seulement de la conscience, de la mémoire ou de la Bible, mais qu'il sort de la bouche de Dieu, qu'il est la voix de Dieu lui parlant par l'Esprit. Il sait que l'obéissance n'a toute sa valeur et qu'elle n'est pleinement bénie que si elle exécute les ordres du Père, directement pour lui-même. Il a grand soin de rester sur l'autel où il s'est consacré à Dieu, d'avoir l'œil et l'oreille au guet pour saisir chaque indication de la volonté de Dieu. Il ne se contente pas de faire le bien pour sa propre satisfaction, mais il met toutes choses sous le contrôle de son Dieu, faisant toutes choses « comme pour le Seigneur » (Col. 3.23). Il veut que chaque heure de la journée et chaque pas dans la vie le mette en relation avec Dieu. Il s'applique donc à obéir consciencieusement au Père dans les petites choses de chaque jour, voyant là la seule manière de se préparer à un travail plus étendu. Tout son désir est de glorifier Dieu en accomplissant sa sainte volonté, et pour réaliser ce désir, il travaille de tout son cœur et de toutes ses forces à exécuter cette volonté divine à chaque instant du jour. Pour tout cela, sa seule récompense, mais récompense amplement suffisante, est de savoir qu'en faisant la volonté de Dieu, il suit la voie ouverte par Christ lui-même, la voie qui fait entrer plus avant dans l'amour de Dieu. « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour ».

Oh ! quelle bénédiction que cette obéissance-là qui nous amène à demeurer comme Christ dans l'amour divin ! Pour l'obtenir, il faut étudier encore mieux ce qu'était Christ. Il avait renoncé à lui-même, il s'était « abaissé lui-même, se rendant obéissant » (Phil. 2.8). Qu'il veuille nous donner à nous aussi ce renoncement et cette humilité ! A l'école de Dieu, « Il a appris l'obéissance, et, ayant été rendu parafait, il est devenu l'auteur d'un salut éternel pour tous ceux qui lui obéissent » (Héb. 5.8, 9). Il faut que nous apprenions aussi de lui l'obéissance, que nous l'écoutions nous dire qu'il ne faisait rien de lui-même, qu'il ne faisait que ce qu'il voyait faire au Père, que ce qu'il apprenait de lui. Nous avons besoin de savoir que son entière dépendance du Père, que son recours continuel au Père était la source de son obéissance habituelle, comme aussi le moyen de pénétrer toujours mieux les secrets du Père. (Jean 5.19, 20). (Voyez : Quinzième jour). L'amour de Dieu et l'obéissance de l'homme vont ensemble comme une serrure et une clef faites l'une pour l'autre. C'est la grâce de Dieu qui met la clef dans la serrure, et c'est l'homme qui se sert de la clef pour ouvrir les trésors de l'amour divin.

A la lumière de l'exemple et des paroles de Christ, quel sens nouveau revêtent ces promesses de Dieu à son peuple : « Je te bénirai certainement et je multiplierai ta postérité parce que tu as obéi à ma voix ». (Gen. 26.4). « Si Vous obéissez à ma voix, vous serez aussi mon plus précieux joyau ». (Exo. 19.5). « L'Eternel ton Dieu te bénira certainement... pourvu seulement que tu obéisses à la voix de l'Eternel ton Dieu » (Deut. 15.4, 5). C'est par l'amour et l'obéissance que s'établissent nos rapports avec Dieu ; d'un côté l'amour de Dieu se donnant lui-même à l'homme avec tout ce qu'il a, de l'autre l'obéissance du croyant, se donnant à Dieu avec tout ce qu'il a.

On a beaucoup parlé, ces dernières années, de renoncement à soi-même et d'entière consécration à Dieu, et des milliers d'âmes louent le Seigneur de tout le bien qu'elles ont reçu de lui par le moyen de ces deux mots : mais prenons garde de ne chercher là qu'une jouissance spirituelle, qu'un état d'âme à conserver, négligeant d'en faire l'application directe et simple, c'est-à-dire d'obéir à la volonté de Dieu. Souvenons-nous dans le courant de notre vie, de ce mot obéissance, que Dieu emploie souvent, « Obéir vaut mieux que sacrifice » (1 Sam. 15.22). Le sacrifice de soi à Dieu n'est rien sans obéissance, car ce mot même implique l'obéissance. C'est l'obéissance douce et humble de Christ, comme fils et serviteur, qui rendait son sacrifice « d'agréable odeur » ; c'est l'obéissance de l’enfant prompt à écouter la voix du Père, puis à faire ce qui est bien à ses yeux, qui témoignera en nous que nous lui sommes agréables.

Cher lecteur, cette vie-là ne sera-t-elle pas la vôtre aussi ? Obéir à Jésus et demeurer dans son amour, n'est-ce pas simple autant que sublime !

O mon Dieu, que dire de cet échange de la vie de la terre contre la vie du ciel que tu viens de placer devant moi ? Ton Fils, notre Seigneur, nous a montré qu'il est possible à l'homme sur la terre de vivre tout enveloppé de l'amour de Dieu, pourvu qu'il veuille se soumettre à ta volonté, obéir à ta voix. Il nous a montré aussi quel bonheur il y a à le faire. Puisque Christ est à nous, puisqu'il est notre Tête et notre Vie, nous savons que nous aussi, nous pouvons, en quelque mesure, vivre et marcher comme lui, et nous réjouir en ton amour, certains que tu acceptes à cause de lui notre faible obéissance à tes commandements. O mon Dieu, quelle grâce insigne que celle d'être appelés à demeurer comme Christ dans ton amour par l'obéissance que ton Esprit opère en nous.

Seigneur Jésus, comment te rendre grâce d'avoir réalisé sur la terre cette vie-là pour m'y faire participer moi-même ? O Seigneur, je n'ai qu'à m'abandonner de nouveau à toi pour que tu me fasses garder tes commandements comme tu as gardé ceux du Père. Seigneur, révèle-moi le secret de ta propre obéissance, de ta promptitude à écouter, de ta vigilance, de ta douceur, de ton humilité et de ta confiance filiale au Père bien-aimé dont tu savais être le Fils bien-aimé. Mon Sauveur, remplis mon cœur de ton amour ; et alors avec foi en ton amour, je pourrai, moi aussi, t'obéir. Oui, Seigneur, que toute ma vie s'emploie à garder tes commandements et à demeurer dans ton amour. Amen.

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