Demeurez en Christ

Seizième jour

DEMEUREZ EN CHRIST
EN ABANDONNANT TOUT POUR LUI

« ... j'ai accepté de tout perdre, et je considère tout comme des ordures, afin de gagner Christ et d'être trouvé EN LUI. » Phil 3.8-9

Partout où il y a vie, il y a échange continuel. Vivre c'est prendre et donner, recevoir et rendre. La nourriture que je prends se retrouve dans le travail que je fournis, les impressions que je reçois dans les pensées et les sentiments que j'exprime. L'un dépend de l'autre — le fait de donner augmente la faculté de s'approprier. Toute la joie de la vie est dans ce sain équilibre : donner et recevoir.

Il en est de même dans la vie spirituelle. Certains chrétiens considèrent que la bénédiction consiste dans le privilège de recevoir sans cesse ; ils ne savent pas que la capacité de recevoir ne se conserve et ne s'élargit qu'en donnant et abandonnant continuellement — que le fait de partager ce que nous possédons crée un vide qui permet à la divine plénitude de nous envahir. C'est une vérité sur laquelle le Sauveur a insisté souvent. Quand il parlait de tout vendre pour s'acquérir un trésor, de perdre notre vie pour la retrouver, de retrouver au centuple tout ce qui avait été perdu à cause de lui, il faisait comprendre que la nécessité du sacrifice de soi-même est une loi du Royaume pour lui comme pour ses disciples. Si nous désirons vraiment demeurer en Christ et être trouvés en lui, il faut que chacun de nous, selon notre mesure, nous disions avec Paul : « Je considère tout comme une perte à cause de l'excellence de la connaissance de Christ-Jésus, mon Seigneur, ... afin de gagner Christ et d'être TROUVE EN LUI ».

Essayons de voir à quoi il faut renoncer, ce qu'il faut abandonner. Avant tout, le péché. Il ne peut y avoir de vraie conversion sans abandon du péché. Cependant, parce que le nouveau converti ignore ce qu'est réellement le péché, ce que sont les exigences de la sainteté de Dieu, et à quel point la puissance de Jésus peut le rendre vainqueur, son renoncement au péché n'est que partiel et superficiel. Quand il croît dans la vie chrétienne, il éprouve le besoin d'être débarrassé plus profondément et plus complètement de tout ce qui n'est pas saint. Et c'est précisément quand s'affermit le désir de demeurer en Christ de façon continue, d'être toujours trouvé en Lui, que l'âme est amenée à découvrir la nécessité d'un nouvel acte de renoncement. Par là, elle accepte tout à nouveau et ratifie sa mort au péché en Christ et se sépare véritablement de tout ce qui est péché. Elle se saisit, par la puissance de l'Esprit de Dieu, de la merveilleuse faculté que nous possédons de disposer de l'ensemble de notre avenir par un acte de volonté : ne plus être asservi au péché, mais être toujours et en toutes choses un esclave de la justice (Ro. 6.17-18). Il le fait joyeusement car il est convaincu que l'abandon de chaque péché est réellement un gain et ouvre une possibilité pour que coulent en nous la présence et l'amour de Christ.

Quand nous nous sommes séparés de toute injustice, il faut ensuite renoncer à notre propre justice. Tout en combattant très sincèrement l'idée de valeur personnelle ou d'œuvres  méritoires, il nous faut souvent beaucoup de temps pour comprendre réellement ce que signifie refuser au moi la moindre place ou le moindre droit dans l'œuvre de Dieu. Inconsciemment, nous laissons libre cours à l'action de nos pensées, de nos sentiments, de notre volonté propre, dans la présence de Dieu. Dans la prière et l'adoration, la lecture de la Bible, le travail pour Dieu, au lieu de dépendre totalement de la conduite du Saint-Esprit, on compte sur le moi pour réaliser un travail qu'il ne peut pas faire. Nous sommes lents à apprendre cette leçon : « Ce qui est bon, n'habite pas en moi, c'est à dire dans ma chair » (Ro. 7.18). Quand elle est apprise et que nous voyons à quel point la corruption s'étend à tout ce qui est naturel, nous voyons en même temps qu'il ne peut y avoir entière habitation en Christ sans abandon total de tout ce qui vient du moi dans notre piété. Il faut l'abandonner à la mort et s'attendre au souffle de l'Esprit, seul capable de produire en nous ce qui est agréable au regard de Dieu.

Puis, à nouveau, voici qu'intervient notre vie naturelle, avec toutes les possibilités et les dons qui nous ont été accordés par le Créateur, avec toutes les choses utiles et intéressantes dont la Providence nous a entourés. Quand nous nous sommes vraiment convertis, nous avons eu le désir profond de consacrer tout cela au Seigneur. Mais ce n'est pas suffisant. Le désir est bon, mais il ne peut ni nous montrer la manière, ni nous donner la force de le faire correctement. On pense souvent que, du moment que nous sommes enfants de Dieu, il s'ensuit tout naturellement que nos dons vont être utilisés à son service. C'est faux et cette idée a fait un tort considérable à l'approfondissement spirituel de l'Eglise. Il nous faut pour cela une grâce toute particulière. Et le chemin par lequel cette grâce nous parvient est encore celui du sacrifice et de la reddition. Bien que je sois un enfant de Dieu, je peux constater combien mes dons et mes possibilités sont encore souillés par le péché et dominés par la chair. Je dois me rendre compte qu'il m'est impossible de les utiliser immédiatement à la gloire de Dieu. Il faut que je les dépose d'abord aux pieds de Christ afin qu'il les accepte et les purifie. Je dois me sentir absolument incapable de les utiliser correctement. Je dois discerner qu'ils présentent pour moi un grand danger car, au travers d'eux, la chair, la vieille nature, le moi, pourraient facilement exercer leur puissance. Convaincu de cela, je dois me séparer d'eux, les remettre entièrement au Seigneur. Quand il les aura acceptés, qu'il aura mis son sceau sur eux, je les recevrai à nouveau mais comme étant sa propriété. Je pourrai compter sur lui pour me donner la grâce de m'en servir correctement jour après jour, de ne les employer que sous sa conduite. Et là encore, l'expérience prouve que le sentier de l'entière consécration est aussi le sentier du plein salut. Non seulement ce que nous avons abandonné ainsi nous est rendu pour nous appartenir doublement mais après avoir renoncé à tout, nous recevons tout ! Nous demeurons en Christ d'autant plus totalement que nous renonçons à tout pour le suivre. Dans la mesure où je regarde toute chose comme une perte pour l'amour de Christ, je suis trouvé EN LUI.

Le même principe s'applique à la plupart des occupations et des biens que Dieu nous a confiés. Ainsi en était-il des filets de pêche sur la Mer de Galilée, des obligations domestiques de Marthe à Béthanie — la maison et les amis de bien des disciples de Jésus. Jésus leur a enseigné à tout abandonner véritablement pour lui. Ce n'était pas un commandement arbitraire, mais l'application normale d'une loi naturelle dans le royaume de sa Grâce : l'ancien occupant doit être chassé le plus parfaitement possible afin que le nouvel occupant puisse  prendre  possession  le  plus  complètement possible  et  qu'il  en résulte un total renouvellement intérieur.

Le principe a une application plus profonde encore. Les dons vraiment spirituels, — dira-t-on — œuvre du Saint Esprit de Dieu en nous, ne doivent sûrement pas être abandonnés et livrés ! Mais si ! il le faut. Donner et recevoir est un processus vital qui ne doit jamais s'interrompre. Dès que le croyant commence à se complaire dans la jouissance de ce qu'il a reçu, il retarde l'écoulement d'une grâce nouvelle et il y a menace de stagnation. Le courant des eaux vives ne coule que dans une âme vide et assoiffée. Chaque expérience bénie que nous recevons comme un don de Dieu doit immédiatement être redirigée vers Celui de qui elle vient, sous forme de louange, d'amour, de sacrifice de soi, de service ; alors seulement elle nous sera rendue, rafraîchie et embellie de l'épanouissement céleste. N'est-ce pas la merveilleuse leçon que nous enseigne le sacrifice d'Isaac sur le Morija ? N'est-il pas le fils promis, la vie que Dieu avait donnée ? Le don merveilleux de la toute puissance de Celui qui donne la vie aux morts ? (Ro. 4.17). Et cependant il a fallu renoncer à lui, le sacrifier afin qu'il puisse être rendu, mille fois plus précieux qu'avant, parce qu'il est devenu ainsi un des types du Fils unique du Père, dont la vie pure et sainte devait un jour être livrée, afin qu'il puisse la retrouver dans la puissance de la résurrection et la faire partager à son peuple. Un type aussi de ce qui se produit dans la vie de tout croyant quand, au lieu de se satisfaire des expériences passées ou de la grâce actuelle, il oublie et abandonne ce qui est en arrière et tend vers ce qui est en avant, afin de saisir, aussi pleinement que possible, Christ, notre vie (Ph.3.12-13).

Ce renoncement à tout pour Christ, est-ce un pas unique, l'expérience et le geste d'un instant, ou est-ce un processus qui se renouvelle chaque jour, une approche progressive ? C'est les deux à la fois. Il peut y avoir un moment précis dans la vie du croyant où il découvre pour la première fois, ou redécouvre plus profondément, cette vérité bénie. Alors, par un acte de sa volonté auquel le conduit la puissance de Dieu, il rassemble toute sa vie et décide à ce moment de se placer sur l'autel comme un sacrifice vivant et agréable à Dieu. De tels moments ont souvent été le moyen de passer d'une vie d'errance et de défaite à une vie dans la présence et la puissance de Dieu. Mais, même dans ce cas, il faut, pour lui comme pour tous ceux qui n'ont pas connu une telle expérience, que sa vie devienne une prière incessante pour qu'il comprenne mieux la signification de l'abandon total, de l'offrande toujours renouvelée de tout ce qu'il possède, à Dieu.

Croyant, si tu veux demeurer en Christ, voici la route bénie. La nature recule devant un tel renoncement, devant la croix et tout ce que son application totale entraîne dans notre vie. Mais ce que la nature n'aime pas et ne peut accomplir, la grâce le réalise et il en résulte une vie de joie et de gloire. Il suffit de s'en remettre à Christ, le Seigneur. La puissance victorieuse de sa présence pénétrant en toi va transformer en joie l'abandon de tout ce qui t'était le plus précieux auparavant. « Au centuple, dans cette vie » (Mr. 10.30) : ces paroles du Maître deviennent vraies pour tous ceux qui, le cœur rempli de foi, acceptent son ordre de tout abandonner. La rétribution bénie rendra bientôt l'abandon encore plus béni. Et l'on verra alors que le secret d'une vie dans l'intimité de Dieu est simplement ceci : quand je me donne moi-même entièrement à Christ, je découvre la puissance de le saisir entièrement pour moi ; quand je perds à cause de lui tout ce que je suis et tout ce que j'ai, alors il me prend entièrement pour lui et se donne lui-même entièrement à moi.

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