L'Humilité

12. L'humilité et l'élévation

Quiconque s'élève sera abaissé, et quiconque s'abaisse sera élevé. (Luc 14.11 ; 18.14).

Dieu fait grâce aux humbles. Humiliez-vous devant le Seigneur, et il vous élèvera. (Jacques 4.6-10).

Humiliez-vous donc sous la puissante main de Dieu, afin qu'il vous élève au temps convenable. (1Pi 5.6).

On me posait naguère cette question : Com­ment vaincre mon orgueil ? Je répondis tout simplement : deux choses sont nécessaires. Tout d'abord, faire ce que Dieu dit être notre œuvre : « Humiliez-vous. » Puis se confier en Dieu, pour qu'il fasse ce qu'il dit Lui-même être son œuvre : Il nous élèvera.

Le commandement est clair : « Humiliez-vous ». Cela ne veut pas dire que c'est votre œuvre de vaincre et de chasser l'orgueil de votre nature, et de former en vous l'humilité de Jésus. Non, c'est l'œuvre de Dieu : Lui seul peut créer en vous cette soif de n'être rien qui est l'essence même de l'élévation par laquelle il vous rendra réellement semblables à son Fils bien-aimé. Ce que Tordre de Dieu signifie, c'est qu'il faut saisir chaque occasion de vous humilier devant Dieu et devant les hommes. Dans la foi et dans la grâce qui travaillent déjà en vous, dans l'assu­rance d'une grâce plus abondante pour la vic­toire qui vient, conformément à la lumière qui darde ses rayons sur l'orgueil du cœur et sur ses œuvres, malgré tout ce qu'il peut y avoir d'échecs et de chutes, obéissez inébranlablement au commandement du Seigneur : « Humiliez-vous ». Acceptez avec reconnaissance tout ce que Dieu permet, intérieurement et extérieure­ment, de la part d'amis ou d'ennemis, dans la nature ou dans la grâce, pour vous rappeler votre besoin de vous humilier et pour vous aider à le réaliser. Regardez l'humilité comme la ver­tu-mère, comme votre premier devoir devant Dieu, comme la perpétuelle sauvegarde de l'âme, et mettez tout votre cœur en elle, comme dans la source de toute bénédiction. La promesse est divine et sûre : celui qui s'humilie sera exalté. Veillez à faire la seule chose que Dieu demande : « Humiliez-vous ». Dieu sera fidèle pour faire ce qu'il a promis. Il vous augmentera Sa grâce ; Il vous élèvera au temps convenable.

Dans toute Sa façon d'agir envers nous, Dieu emploie deux moyens, ou plutôt il nous fait passer par deux classes : il y a un temps de pré­paration, quand nous luttons pour obéir aux commandements et pour voir se réaliser les promesses. Nos expériences sont alors un mélange d'efforts et d'impuissance, d'échecs et de succès partiels, qui éveillent en nous le besoin toujours plus grand d'une vie de victoire. Ensuite vient le temps de l'accomplissement, quand la foi entre en possession des grâces qu'elle a si longtemps cherché à obtenir. L'attente d'abord, l'accom­plissement ensuite : nous voyons invariablement cette loi à l'œuvre dans la vie chrétienne prise dans son ensemble comme aussi dans la recher­che de chaque vertu envisagée séparément. Cette loi est nécessaire, elle est fondée sur la nature même des choses. Dans tout ce qui concerne notre rédemption, Dieu doit nécessairement prendre l'initiative ; ensuite, il faut que l'homme agisse. En s'efforçant d'être agréable à Dieu, il apprend à connaître son impuissance, à déses­pérer de lui-même, à mourir à tout ce qui est charnel, et ainsi il se place volontairement et intelligemment dans les conditions voulues pour recevoir de Dieu cette plénitude de grâce qu'il ne pouvait recevoir tant qu'il n'avait pas appris à désespérer de lui-même. C'est ainsi que Dieu, qui avait été le commencement avant que l'homme le connût convenablement ou comprît pleinement quel était Son but, se trouve être maintenant désiré avec ardeur comme Celui qui doit être Tout en tous.

Il en est ainsi dans la poursuite de l'humilité. A chaque chrétien, l'ordre de s'humilier se fait entendre du trône même de Dieu. Si nous nous efforçons sérieusement d'écouter et d'obéir, nous serons récompensés — oui, récompensés — par une double et pénible découverte : nous dé­couvrirons d'abord quelle profondeur d'orgueil il y a en nous et combien nous avons peu le désir de nous compter et d'être comptés comme n'étant rien pour nous soumettre absolument à Dieu. Ce sera une découverte très douloureuse, car nous sommes loin de soupçonner tout ce que nos cœurs; renferment d'orgueil La seconde découverte que nous ferons est celle de l'impuis­sance de tous nos efforts et de toutes nos prières, encore chapelles, à obtenir le secours de Dieu, qui détruira le monstre hideux. Heureux l'hom­me qui apprend alors à mettre son espérance en Dieu et à persévérer dans des actes d'humilia­tion devant Dieu et devant les hommes, en dépit de toutes les puissances d'orgueil qui sont en lui. Nous savons que la loi de la nature humaine, c'est que les actions produisent des habitudes, les habitudes engendrent les dispositions, les dis­positions créent la volonté, et la volonté conve­nablement formée donne à l'individu son carac­tère. Il n'en est pas autrement dans l'œuvre de la grâce. Comme les actes, répétés avec persé­vérance, engendrent des habitudes et des dispo­sitions et que celles-ci fortifient la volonté, ainsi la foi ferme du croyant permet à Celui qui produit en nous le vouloir et le faire (Phi 2.13) de manifester en nous Sa force toute-puissante.

L'humiliation du cœur orgueilleux, avec laquelle le saint pénitent s'est si souvent jeté aux pieds de Dieu, est récompensée par le don d'un cœur humble, dans lequel l'Esprit de Jésus est vain­queur ; désormais, le Christ doux et humble de cœur habite en nous pour toujours.

« Humiliez-vous devant le Seigneur et Il vous élèvera. » En quoi l'élévation consiste-t-elle ? La plus haute gloire de la créature est d'être uniquement un vase pour recevoir, posséder et manifester la gloire de Dieu. Elle ne peut réaliser cela que pour autant qu'elle est fermement déci­dée à n'être rien en elle-même, afin que Dieu soit tout. L'eau remplit toujours les lieux les plus bas. Plus une créature a un cœur humilié et vide devant Dieu, plus elle sera promptement et abondamment remplie de la gloire divine. L'élévation glorieuse que Dieu promet n'est pas et ne peut pas être une grâce extérieure, sépa­rée de Lui-même : tout ce qu'il a à donner ou tout ce qu'il peut donner, c'est seulement une mesure plus grande de Lui-même. La gloire n'est pas, comme une récompense terrestre, quelque chose d'arbitraire, sans aucun rapport avec la conduite qui doit être récompensée. Non, elle est, dans sa nature même, l'effet et le résultat de l'humiliation de nous-mêmes ; elle est le don que Dieu nous fait de l'humilité céleste et d'une telle conformité avec l'Agneau de Dieu que nous sommes rendus capables de recevoir en nous la plénitude de Dieu.

« Celui qui s'humilie sera élevé. » Jésus n'est-il pas la preuve de la vérité de ces paroles ? N'est-il pas le gage de la certitude qu'elles s'accompliront pour nous ? Prenons son joug sur nous et apprenons de lui, car il est doux et humble de cœur. Si seulement nous voulons nous donner à Lui, comme il s'est donné pour nous et à nous, nous serons un même esprit et un même cœur avec lui et nous nous trouverons sous le même joug. Quand nous entrerons plus pro­fondément dans la communion de son humi­liation, soit en nous humiliant nous-mêmes, soit en prenant sur nous les péchés de nos sem­blables pour nous en humilier, nous aurons alors la pleine assurance que l'Esprit de son élévation, l'Esprit de gloire, reposera sur nous. La présence et la puissance du Christ glorifié descendront dans les croyants qui ont l'esprit humble. Lors­que Dieu pourra de nouveau avoir en nous Sa place légitime, Il nous élèvera. Recherche Sa gloire en t'humiliant, et Il te conduira à la gloire en te remplissant d'humilité. Quand la vie de Dieu aura pris pleine possession de toi, rien ne te sera aussi naturel et aussi doux que de n'être rien ; tu n'auras plus une pensée ou un désir pour le moi, car tout sera occupé par Celui qui remplit tout. « C'est pourquoi je me glorifierai bien plus volontiers dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ repose sur moi. »

Frères, n'avons-nous pas ici la raison pour laquelle notre consécration et notre foi nous ont si peu aidés dans la recherche de la sainteté ? Nous pensions travailler par la foi à notre sanc­tification mais c'était notre moi et sa force qui agissaient ; c'était pour notre moi et pour son bonheur que nous cherchions Dieu ; c'était, inconsciemment sans doute, mais cependant réellement, dans le moi et dans sa sainteté que notre âme se réjouissait. Nous n'avions jamais compris que l'humilité, l'humilité absolue, inté­rieure, qui nous rend semblable à Jésus-Christ et qui fait disparaître notre moi, l'humilité qui nous pénètre de part en part et qui met sur toute notre vie l'empreinte de la vie de Christ, nous n'avions jamais compris que cette humilité-là était l'élément capital de la vie sainte après laquelle nous soupirions.

C'est seulement quand je trouve Dieu que je me perds, quand je possède Dieu que je renonce véritablement à moi-même. Comme c'est dans la hauteur et la largeur de la gloire du soleil que se révèle la petitesse de l'atome jouant dans ses rayons, ainsi l'humilité consiste à pren­dre notre place en la présence de Dieu, pour n'être rien qu'un atome habitant dans la lumière de Son amour.

Puisse Dieu nous enseigner à croire qu'être humble, n'être rien en Sa présence, c'est la gloire la plus élevée, la bénédiction la plus abondante de la vie chrétienne. Il nous dit : « J'habite dans les lieux élevés et dans la sainteté, mais je suis avec l'homme contrit et humi­lié » (Esaïe 57.15).

« Revêtez-vous d'humilité, car Dieu résiste aux orgueilleux, mais Il fait grâce aux hum­bles » (1Pi 5.5).

Le souhait de mon cœur, mes chers lecteurs, c'est que cette grâce suprême soit la part de chacun de vous.

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