Saint en Christ

DIXIÈME JOUR
Sainteté et séparation

Je suis l’Eternel votre Dieu, qui vous ai séparés des peuples. Vous serez saints pour moi, car je suis saint, moi, l’Eternel : je vous ai séparés des peuples afin que vous soyez à moi. {Le 20.24,26}

Jusqu’à l’accomplissement des jours pour lesquels le nazaréen s’est consacré à l’Eternel, il sera saint. Pendant tout le temps de son naziréat, il sera consacré à l’Eternel. {No 6.5,8}

C’est pour cela que Jésus aussi, afin de sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte. Sortons donc pour aller à lui, hors du camp, en portant son opprobre. {Heb 13.12,13}

La séparation n’est pas la sainteté, mais c’est le chemin qui y conduit. Quoi qu’il ne puisse y avoir de sainteté sans séparation, il peut y avoir une séparation qui ne conduit pas à la sainteté. Il est de la plus haute importance ici de comprendre et la différence et la relation, afin d’être préservés de l’erreur grossière de compter la séparation seule comme sainteté, aussi bien que de cette autre erreur, non moins grossière, de chercher la sainteté sans la séparation.

Le mot hébreu employé pour désigner la sainteté vient très probablement d’une racine qui signifie séparation, mis à part, ou séparer. Mais là où, dans nos traductions, nous avons « séparé » ou a « retranché », « ou mis à part », nous avons des mots tout à fait différents. {4} Le mot employé pour « saint » l’est exclusivement pour exprimer cette idée spéciale. Et quoique l’idée de saint renferme toujours celle de séparation, la sainteté renferme en réalité quelque chose d’infiniment plus élevé ; il est d’une très grande importance de bien comprendre ceci, parce que le fait d’être mis a part pour Dieu, l’abandon de tout notre être aux droits qu’il a sur nous, la consécration à son service, sont trop souvent considérés comme si c’était cela qui constitue la sainteté. Nous ne pouvons assez insister sur ce point, c’est que tout cela n’en est que le commencement, la présupposition: la sainteté elle-même est infiniment plus que cela; ce n’est ni ce que je suis, ni ce que je fais, ni ce que je donne qui est la sainteté, mais ce que Dieu est, ce qu’il donne et ce qu’il fait pour moi, en moi. C’est Dieu prenant possession de moi qui me sanctifie; c’est la présence et la gloire de Dieu qui me rend réellement saint. Une étude attentive des paroles de l’Eternel à son peuple nous le rendra évident. Huit fois nous trouvons dans le livre du Lévitique cette expression : « Vous serez saints, car je suis saint ».

La sainteté est l’attribut le plus élevé de Dieu, non seulement comme expression de ses rapports avec Israël, mais de son être même, de son essence, de sa perfection infinie. Et quoique ce ne soit qu’à pas lents et gradués qu’il peut faire comprendre à notre esprit charnel ce que cela signifie, cependant, dès l’origine il dit à son peuple que son but est qu’ils soient faits semblables à lui, saints parce que et comme il est saint. Me dire que Dieu sépare, met à part des hommes pour lui-même, afin qu’ils soient siens, comme lui-même se donne pour être leur Dieu, me parle bien d’une relation qui existe, mais ne me dit encore rien de la vraie nature de cet Etre saint, ou de la valeur essentielle de la sainteté qu’il veut me communiquer. La séparation, ce n’est que la mise à part, la prise de possession du vase, pour être purifié et utilisé ; ce qui lui donne sa réelle valeur c’est l’action de le remplir du précieux contenu. La sainteté, c’est le divin remplissage, sans lequel la séparation nous laisse vides. La séparation n’est donc pas la sainteté. Mais la séparation est essentielle à la sainteté. « Je vous ai séparés des autres peuples, vous serez saints pour moi ». Jusqu’à ce que j’aie choisi un vase et que je l’aie séparé de ceux qui l’entourent, et, si c’est nécessaire, purifié, je ne puis ni le remplir, ni l’employer. Je dois l’avoir en mains, à mon entière disposition, sinon je ne pourrai le remplir de lait ou de vin précieux.

C’est précisément ainsi que Dieu sépara son peuple quand il le transporta d’Egypte, le mettant à part pour lui-même lorsqu’il leur donna son alliance et sa loi, afin de les avoir sous son contrôle et sous sa puissante main pour exécuter son dessein qui était de les rendre saints. Il ne pouvait arriver à ce résultat qu’en les mettant à part, et en éveillant en eux le sentiment qu’ils étaient son peuple particulier, entièrement et uniquement siens, jusqu’à ce qu’enfin il leur eût enseigné à se séparer eux-mêmes pour lui. La séparation est essentielle à la sainteté.

L’institution du naziréat {No 6} confirme ce que je viens de dire, et montre aussi jusqu’à l’évidence ce que signifie la séparation. Israël devait être dans la pensée de Dieu une nation sainte. Sa sainteté était tout particulièrement typifiée dans ses prêtres. Quant à l’Israélite, comme individu, il ne nous en est jamais parlé dans les livres de Moïse comme d’un homme qui soit saint. Mais il y avait des ordonnances par le moyen desquelles l’Israélite qui voulait montrer son désir d’être entièrement saint pouvait le faire. Il pouvait se séparer de la vie ordinaire de son peuple et vivre de la vie d’un naziréen, une vie séparée. Cette vie-là était considérée dans ces temps d’ombres et de types, comme la sainteté : « Pendant tout le temps de son naziréat, il sera saint (consacré) à l’Eternel ». {No 6.5,8} La séparation consistait spécialement en trois choses: Sa tempérance, ou plutôt l’abstinence de fruits et de vin ; la pénitence ou l’humiliation : le ciseau ni le rasoir ne devaient toucher la barbe ou les cheveux du naziréen « c’est une honte pour l’homme de porter de longs cheveux » ; {1Co 11.14} le renoncement à soi-même, en ne se souillant ni pour un père, ni pour une mère à l’occasion de leur mort. Remarquons particulièrement ceci, c’est que la séparation ne concernait pas les choses illégitimes, mais les choses légitimes. Il n’y avait rien de criminel en soi dans le fait qu’Abraham vivait dans la maison de son père, ou qu’Israël vivait en Egypte. C’est en abandonnant, non seulement ce qui peut être prouvé comme péché, mais tout ce qui pourrait empêcher la plénitude de l’abandon de nous-mêmes entre les mains de Dieu afin qu’il nous sanctifie, que l’esprit de séparation se manifeste.

Recueillons les leçons que cette vérité nous enseigne. Et d’abord nous devons connaître la nécessité de la séparation. Ce n’est pas une exigence arbitraire de notre Dieu, mais c’est dans la nature des choses que cette exigence a son fondement. Séparer une chose, c’est l’affranchir en vue d’une utilité spéciale ou d’un but, tellement qu’elle puisse avec une «énergie entière accomplir la volonté de celui qui la choisit, et réaliser ainsi sa destinée. C’est le principe qui se trouve à la base de toute la division du travail ; une séparation, complète en vue d’une branche d’études ou de travail est la condition indispensable du succès et de la perfection. On voit souvent à la lisière d’un bois un arbre qui est séparé de tous ses compagnons de la forêt ; son tronc énorme, ses branches puissantes et étendues prouvent évidemment combien il lui a été utile d’être séparé, d’avoir pour lui tout seul une large étendue de terrain dans lequel ses racines puissent pousser sans obstacles, et ses branches s’étendre à volonté ; là est le secret de sa croissance et de sa grandeur remarquables. Nos capacités, comme hommes, sont limitées. Si Dieu doit prendre pleinement possession de nous ; si nous voulons jouir pleinement de lui, la séparation pour lui n’est que la simple et naturelle condition requise. Dieu nous veut tout entiers pour lui afin qu’il puisse se donner tout entier à nous.

Nous devons ensuite connaître le but de la séparation. C’est afin que nous soyons trouvés dans cette situation que Dieu a décrite en ces mots: «Vous serez saints pour moi, car je suis saint, moi, l’Eternel; je vous ai séparés des peuples afin que vous soyez à moi». Dieu nous a séparés pour lui-même, dans toute l’étendue du sens de cette parole, et cela afin de pouvoir entrer en nous et se montrer lui-même à nous. Sa sainteté est la somme et le centre de toutes ses perfections ; c’est afin de nous rendre saints comme lui qu’il nous a séparés. La séparation n’a jamais de valeur en elle-même; elle peut être un grand mal et nous devenir nuisible ; tout dépend de l’objet qu’elle a en vue. C’est dans la mesure où Dieu obtient et prend pleine possession de nous, dans la mesure où la vie de Christ se rend maîtresse de notre être tout entier, dans la mesure où le Saint-Esprit nous pénètre entièrement et nous remplit tellement que nous demeurons en Dieu et qu’il demeure en nous, que la séparation sera non une chose d’observances, d’ordonnances, mais de réalité spirituelle. Et c’est lorsque ce dessein de Dieu à notre égard sera vu, compris, accepté et suivi que la question difficile de savoir de quoi nous devons nous séparer et quelle est la somme de sacrifices que la séparation demande de nous, trouvera une solution facile. Dieu nous sépare de tout ce qui ne nous conduit pas à sa sainteté et à sa communion.

Nous avons besoin surtout de connaître la puissance de la séparation, la puissance qui nous y fait entrer dans un esprit d’ardeur, de joie, de liberté et d’amour. Le grand mot qui, dans le langage humain, sépare et unit tout à la fois, c’est le mot mien. C’est dans ce mot que nous trouvons le grand ressort de l’effort et du bonheur ; chez l’enfant avec-ses joujoux, dans le travail avec ses gains et sa récompense, chez le patriote qui meurt pour son pays, c’est le mot mien qui met l’accent sur ce qui est séparé de toute autre chose. C’est le grand mot dont l’amour fait usage. Que ce soit l’enfant qui dise à sa mère : «Ma mère », et qui entende la réponse : « Mon fils, mon enfant » ; que ce soit le fiancé qui prenne de la maison de ses parents « celle qui est devenue sienne, ou que ce soit le Dieu saint qui dise : « Je vous ai séparés des peuples afin que vous soyez à moi », c’est toujours avec ce mot mien, que l’amour exerce son pouvoir et attire à lui, pour le séparer de tout le reste, ce qu’il demande. Dieu lui-même ne connaît pas d’arguments plus puissants, n’emploie pas d’attraits plus énergiques que ces paroles : « Afin que vous soyez à moi ». Et la puissance de la séparation, la force nécessaire pour que nous nous séparions pour Dieu, nous sera communiquée, et agira en nous, dans la mesure où nous nous livrerons à l’étude et à la réalisation de ce but saint, que nous écouterons attentivement et apprécierons à sa juste valeur ce mot merveilleux: à moi, et dans la mesure aussi où nous nous laisserons saisir et posséder par l’amour puissant qui nous a faits siens. Etudions pas à pas le chemin merveilleux dans lequel l’amour divin fait son œuvre de séparation. Il nous en prépare la voie par la rédemption. Israël est séparé de l’Egypte par le sang de l’Agneau pascal et par la colonne de nuée et de feu. Dans le commandement que l’Eternel leur donne : « Sortez et séparez-vous », son amour réveille l’homme en vue de l’action; et dans cette promesse : « Je te serai Dieu », l’amour divin stimule le désir de croire et fortifie la foi. Dans tous les saints, dans tous les serviteurs de Dieu, et enfin dans Celui qui était saint, sans tache, séparé des pécheurs, l’amour divin indique le chemin. Par la puissance du Saint-Esprit, de l’Esprit de sainteté, cet amour scelle la séparation par la présence même de Dieu, d’un Dieu qui demeure dans l’âme qui le reçoit. Voilà, en effet, ce qui donne à la séparation une réelle puissance. La puissance sanctifiante de la présence de Dieu, voilà ce qu’il nous importe de connaître. « A quoi connaîtra-t-on que nous avons trouvé grâce devant tes yeux, et moi, et ton peuple ? Ne sera-ce pas quand tu marcheras avec nous, et quand nous serons distingués (separated) moi et ton peuple, de tous les peuples qui sont sur la face de la terre ? ». {Ex 33.16}

C’est le sentiment de la présence de Dieu qui nous a faits et nous maintient siens, qui produit la vraie séparation du monde et de l’esprit qui y règne, la séparation de nous-mêmes et de notre volonté propre. Et c’est dans la mesure où cette séparation est acceptée et appréciée par nous, et que nous y persévérons, que la sainteté de Dieu entre en nous et prend possession de tout notre être. Et nous ferons cette expérience qu’être la propriété du Seigneur, son peuple particulier, c’est infiniment plus que d’être simplement comptés et reconnus pour siens. Nous comprendrons que cela ne signifie rien moins que ceci, savoir : que Dieu, par l’habitation du Saint-Esprit en nous, remplit notre être, nos affections, notre volonté de sa propre vie et de sa sainteté. Il nous sépare pour lui, et il nous sanctifie pour que nous soyons, nous, le lieu de sa demeure, où il habite. Il vient lui-même pour prendre personnellement possession de notre cœur en y faisant habiter Christ par la foi. Nous sommes alors vraiment séparés, et tenus à part, par la présence de Dieu en nous.

« Soyez saints, car je suis saint ».

O mon Dieu ! qui m’as séparé pour toi, je t’en supplie, fais par ta vertu toute-puissante que cette séparation soit pour moi une vérité, un fait. Qu’en moi, dans les profondeurs de mon propre esprit, et qu’au dehors, dans mes rapports avec mes frères, la tiare sainte qui doit me séparer pour toi soit placée constamment sur mon front. Je te prie surtout, ô mon Dieu ! d’achever cette puissance de séparation pour tout ce qui concerne ma vieille nature. Que ta présence, par l’habitation de Christ en moi, soit le pouvoir qui renverse le MOI de son trône. O mon Père ! révèle pleinement ton Fils en moi. Le fait seul qu’il sera le Roi de mon âme pourra me garder pour toi, comme ta propriété. Et accorde-moi cette grâce, Seigneur, que pour ma vie extérieure j’attende toute sagesse de toi, afin que je puisse rendre témoignage, pour ta gloire et pour les besoins de ton peuple, au bonheur qu’il y a dans un abandon de toutes choses entre tes mains, dans une séparation absolue et sans réserve, et dans le fait d’être à toi, et à toi seulement.

O Dieu saint ! visite ton peuple. Oh ! sépare tes rachetés et éloigne-les de toute conformité avec le monde. Sépare, ô Seigneur ! sépare les tiens pour toi ; sépare-les comme le feu sépare l’or des scories, afin qu’on voie qui sont ceux qui sont au Seigneur, ses saints. Amen.

1° L’amour sépare efficacement. Avec quel amour jaloux un mari réclame sa femme, une mère son enfant, un avare ce qu’il possède ! Demandez à Dieu qu’il vous montre par son Saint-Esprit comment il vous a amenés vers lui pour que vous fussiez siens. « Il est un Dieu saint et jaloux ». L’amour de Dieu répandu dans le cœur rend la séparation facile.

2° La mort sépare efficacement. Si je fais mon compte d’être vraiment mort avec Christ, je suis séparé de mon moi par la puissance de la mort de Christ. La vie sépare encore plus puissamment quand je dis : « Ce n’est pas moi qui vis, mais Christ qui vit en moi ». Je suis élevé d’autant au-dessus de la vie du moi, de toute vie qui me soit personnelle.

3° La séparation commence dans l’amour et finit de même. L’esprit de séparation, c’est l’esprit de renoncement, d’abandon complet de soi-même à l’amour de Dieu ; le chrétien le mieux séparé sera celui qui aime d’un plus grand amour, qui en gagne le plus par l’amour, celui qui est le plus complètement consacré au service de Dieu et de ses frères. L’amour qui se sacrifie, qui se donne, n’est-ce pas là ce qui sépare, ce qui distingue Jésus de tous les autres hommes ? Voilà quelle a été pour lui sa séparation, par laquelle et dans laquelle nous devons lui être faits semblables.

4° La sainteté de Dieu, c’est sa séparation ; entrons dans cette séparation du monde qui est la sienne, ce sera notre sainteté. Unis-toi à ton Dieu, tu seras alors séparé et saint. Dieu sépare pour lui-même, non par un acte venant du dehors, mais lorsque sa volonté et sa présence prennent possession de notre cœur.

{4} Voir la note B à la fin du volume.

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant