Saint en Christ

TREIZIÈME JOUR
Sainteté et humilité

Ainsi parle le Très-Haut dont la demeure est éternelle et dont le nom est saint: J’habite dans les lieux élevés et dans la sainteté ; mais je suis avec l’homme contrit et humilié, afin de ranimer les esprits humiliés, afin de ranimer les cœurs contrits. {Esa 57.15}

La révélation que nous avons en Esaïe, le Saint, comme Rédempteur et Sauveur de son peuple est bien admirable. Dieu veut, en tant que Saint, habiter au milieu du peuple qu’il a créé et qu’il s’est formé pour lui-même, manifestant sa puissance et sa gloire, et les remplissant de joie et d’allégresse. Cependant toutes ces promesses sont relatives au peuple dans son ensemble. Notre texte de ce jour nous révèle un trait nouveau et tout particulièrement beau de la sainteté divine dans ses relations avec l’individu. Le Très-Haut, dont le nom est saint, et dont la demeure est éternelle, regarde à l’homme contrit et humilié; il est avec cet homme ; il veut demeurer auprès de lui. La sainteté de Dieu se montre dans son amour plein de condescendance. De même qu’il est un feu consumant pour tous ceux qui s’enorgueillissent et qui s’exaltent eux-mêmes devant lui, il est pour l’esprit des humbles semblable à un soleil brillant, faisant revivre le cœur, et donnant la vie. La profonde signification de cette promesse apparaît clairement lorsque nous la rapprochons des autres promesses des temps de la nouvelle Alliance. Le trait caractéristique de la nouvelle Alliance, dans ce qui la rend supérieure à l’ancienne, c’est que, tandis que dans la loi et ses institutions tout était extérieur, tout dans le royaume de Dieu inauguré par la nouvelle Alliance veut être intérieur. La loi de Dieu donnée et écrite dans le cœur, un nouvel esprit mis au dedans de nous, l’Esprit même de Dieu donné pour demeurer avec notre esprit, tellement que le cœur et la vie intérieure soient rendus capables de devenir le temple, la demeure de Dieu, voilà ce qui constitue le privilège particulier du ministère de l’Esprit. Notre texte est peut-être le seul dans l’Ancien Testament, où cette habitation du Dieu saint, non seulement au milieu du peuple, mais dans le cœur du croyant, est clairement révélée. C’est en ceci que les deux aspects de la sainteté divine devaient atteindre leur complète manifestation : « J’habite dans les lieux élevés et dans la sainteté ; je suis avec l’homme contrit et humilié ». Dans son ciel, dans ces lieux hauts et saints, et dans notre « cœur, contrit et humilié, Dieu a sa demeure »

La sainteté de Dieu, c’est sa gloire qui, par une distance infinie, se sépare non seulement du péché, mais même de la créature, cette gloire l’élevant bien au-dessus de cette dernière. La sainteté de Dieu, c’est son amour qui l’attire en bas vers le pécheur, afin de l’élever à sa communion et à sa ressemblance, et de le rendre saint comme lui est saint. Le Dieu saint cherche celui qui est humble; celui qui est humble trouve le Dieu saint: voilà les deux leçons que nous avons à apprendre aujourd’hui.

Le Dieu saint cherche celui qui est humble. Rien n’a tant d’attraits pour Dieu qu’un cœur humilié, contrit. La raison en est évidente. Il n’y a pas, dans le monde de la nature, comme dans le monde spirituel, une loi plus simple, que celle-ci, c’est que deux corps ne peuvent en même temps occuper le même espace. Le nouvel occupant ne peut réellement posséder que l’espace qu’il a fait évacuer par l’ancien. Dans l’homme, le moi est maître de la place, la volonté propre possède tout ; il n’y a pas de place pour Dieu. Il est absolument impossible que Dieu vienne régner dans un cœur lorsque le moi en occupe encore le trône. Aussi longtemps que sous l’influence aveuglante du péché et de l’amour de soi-même, le croyant lui-même n’est pas vraiment conscient de l’étendue du règne de la volonté propre, il ne peut y avoir ni contrition, ni humilité véritable.

Mais lorsque l’Esprit de Dieu nous a révélé, et que notre âme voit enfin que c’est bien le moi qui a tenu secrètement Dieu à distance, oh! avec quelle confusion elle est brisée, et combien elle soupire après une rupture complète avec ce moi égoïste, afin que Dieu puisse avoir la place à laquelle il a droit ! C’est cette rupture voulue et entretenue qui est exprimée par ce mot contrition. Et lorsque l’âme voit quelle a été sa folie et sa culpabilité en honorant secrètement le moi et en empêchant le Dieu saint d’occuper la place que son droit de Créateur lui avait donnée en nous, et qu’il aurait remplie avec tant de bénédictions pour notre âme, cette dernière se jette dans la poussière, n’ayant qu’un seul désir: donner à Dieu la place et la louange qui lui sont dues.

Pareille contrition et pareille humiliation sont douloureuses, car l’une et l’autre amènent l’âme à ne voir plus rien en elle-même sur quoi se reposer, ou qui lui permette d’espérer. Et moins que tout cela ; elle ne saurait croire ou s’imaginer qu’elle peut devenir un objet de la bienveillance divine, un vase capable de recevoir une bénédiction venant de Dieu. Et cependant, voilà justement le message que la Parole du Seigneur apporte à notre foi. Elle nous annonce que le Très-Haut, dont le nom est saint, cherche et se prépare une demeure sur la terre. Elle nous, dit précisément ce qu’un cœur humble et contrit ne pouvait imaginer ou penser, et que, même maintenant, ce cœur peut à peine croire, c’est que c’est justement et seulement dans un pareil cœur que Dieu veut habiter. Ce sont ces cœurs-là dans lesquels Dieu peut se glorifier, dans lesquels la place est faite pour lui, afin qu’il occupe la place du moi, et qu’il la remplisse de sa divine présence. Le Saint cherche les humbles. C’est lorsque nous reconnaissons qu’il n’y a rien en nous à admirer, et sur quoi nous puissions nous appuyer, que Dieu voit en nous tout à admirer et sur quoi il peut compter, parce qu’il y a une place libre et toute prête pour lui. Le cœur humilié est la demeure du Dieu saint.

Le cœur humble trouve le Dieu saint. C’est lorsque la conscience de notre péché et de notre faiblesse, et la découverte que nous avons faite de tout ce qui reste en nous du moi nous fait craindre de ne jamais pouvoir arriver à la sainteté, c’est alors, dis-je, que le Dieu saint se donne à nous. Ce n’est point lorsque regardant à vous-même vous cherchez à vous rendre compte si vous êtes suffisamment humble et contrit, non, mais c’est lorsque, cessant de vous contempler vous-même, parce que vous désespérez de voir jamais en vous autre chose que du péché, vous regardez au Dieu saint, alors seulement vous vous apercevez que sa promesse est votre seule espérance. C’est dans la foi et par la foi que le Saint est révélé à l’âme humble et contrite. La foi est toujours le contraire de ce que nous voyons ou sentons; elle regarde à Dieu seul. Et cette foi donne à l’âme cette confiance que, dans le sentiment profond de notre souillure, et avec la crainte que nous avons de ne jamais arriver à la sainteté, Dieu, le Saint, qui nous sanctifie, est près de nous comme Rédempteur et comme Sauveur. De plus, la foi nous rend capables d’être contents dans notre humiliation et dans le sentiment de notre indignité et de notre pauvreté, en même temps qu’elle nous fait nous réjouir dans l’assurance que Dieu lui-même prend possession du cœur contrit et lui rend la vie. Heureuse l’âme qui est prête à apprendre cette leçon, c’est là que, tout le long du chemin, elle aura à faire l’expérience simultanée de la faiblesse et de la puissance, de la pauvreté et de l’abondance, de la profonde et réelle humiliation, comme aussi de la merveilleuse habitation en elle du Dieu saint. Ceci est, en effet, le profond mystère de la vie divine. Pour la raison humaine c’est un paradoxe. Quand Paul dit de lui-même : « Comme mourant, et voici nous vivons ; comme affligés, et cependant nous réjouissant sans cesse ; comme n’ayant rien, et cependant possédant toutes choses », il ne fait qu’exprimer la loi du royaume de Dieu qui est que, dans la mesure où le moi est détrôné et anéanti, Dieu devient tout en nous. A côté du sentiment profond de néant et de faiblesse, le sentiment de richesses infinies et de joies ineffables peut remplir le cœur. Quelque intense et bénie que soit l’expérience de la proximité, de la félicité, de l’amour et de l’habitation actuelle du Saint en nous, ce n’est jamais une habitation qui ait lieu dans ma vieille nature, dans le moi ; c’est toujours, au contraire, la divine présence humiliant le moi, afin de faire place à Dieu et que lui seul soit exalté. La puissance de la mort de Christ, la communion de sa croix agit sans cesse et en même temps avec la puissance et la joie de sa résurrection. « Celui qui s’abaisse sera élevé ». Dans la vie de la foi l’humiliation et l’exaltation sont simultanées, l’une dépendant de l’autre.

Le cœur humble trouve le Dieu saint, et quand il l’a trouvé, la possession qu’il en a l’humilie d’autant plus. Non qu’il n’y ait pas de danger pour la chair de s’exalter dans la possession du Dieu trois fois saint ; mais, le danger connu, le cœur humble recherche la grâce de craindre continuellement Celui qui doit être craint, d’une crainte qui le fait s’attacher toujours plus fermement à Dieu seul. Ne vous imaginez jamais avoir atteint un état dans lequel le moi ou la chair sont absolument morts. Non ; mais par la foi vous entrez et vous demeurez dans une communion avec Jésus, en qui ils sont crucifiés; si vous demeurez en lui, vous êtes affranchi de leur domination, mais seulement en tant que vous habitez en lui, que vous croyez, et qu’en croyant vous êtes sorti de votre moi pour demeurer en Jésus. Par conséquent, plus la grâce de Dieu abonde, plus l’habitation du Saint en nous devient sensible et précieuse, plus aussi le cœur devient humble. Le danger qui vous menace est plus grand, mais le secours sur lequel vous pouvez compter est plus près maintenant; contentez-vous de constater en tremblant le danger, cela vous rendra courageux, plein de hardiesse pour réclamer dans la foi la victoire.

Croyants, qui confessez votre néant, et qui faites profession de n’avoir de confiance que dans la grâce, je vous en prie, écoutez ce merveilleux message. « Le Très-Haut dont la demeure est éternelle, et dont le nom est saint, Celui qui habite dans les lieux élevés et dans la sainteté » cherche une demeure ici-bas. Voulez-vous la lui donner? Ne voulez-vous pas vous prosterner dans la poussière afin qu’il trouve en vous le cœur humble dans lequel il aime à habiter? Ne voulez-vous pas croire maintenant que, même en vous, quelque misérable et brisé que vous vous sentiez, Il se réjouit de faire sa demeure ? « Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux ». Oh ! voilà le chemin de la sainteté ! Soyez humbles, et la sainte proximité, la divine présence de Dieu en vous sera votre sainteté. Lorsque vous entendez le commandement : « Soyez saints comme je suis saint », que la foi réclame ce qui lui est promis, et qu’elle réponde : « Je veux être saint, ô Dieu très saint ! si toi qui es le Saint veux demeurer en moi ».

« Soyez saints comme je suis saint ».

O Seigneur ! tu es le Très-Haut, dont la demeure est éternelle et dont le nom est saint. Et cependant tu dis : « J’habite dans les lieux élevés et saints, et avec celui dont le cœur est contrit et humilié ». Oui, Seigneur, lorsqu’une âme se met à la dernière place, lorsqu’elle a d’elle-même des pensées humbles et qu’elle sent son néant, toi, le Saint, tu aimes à venir et à consoler cette âme, à habiter en elle et à la vivifier.

O mon Dieu ! le néant de mon être m’humilie ; mes nombreuses transgressions m‘humilient ; ma méchanceté innée m’humilie ; mais ce qui m’humilie plus que toute autre-chose c’est ta condescendance infinie et l’ineffable habitation que tu m’accordes de ta personne divine. C’est ta sainteté en Christ portant notre péché et consentant à demeurer en nous, ô Dieu ! c’est ton amour qui surpasse toute intelligence, qui m’humilie. Je t’en supplie que cet amour fasse son œuvre en moi jusqu’à ce que le moi se cache et fuie en la présence de ta gloire et que toi seul tu sois tout en moi. Amen.

1° Humilité et sainteté. Tenez ferme le rapport intime entre ces deux choses. L’humilité me met à la place qui me convient, à moi, pécheur; la sainteté donne à Dieu la place qui seule est digne de lui. Si je consens à n’être rien devant lui, et que Dieu soit tout pour moi, je suis sur la vraie voie de la sainteté. L’humilité est la sainteté parce qu’elle donne toute gloire à Dieu.

2° Plusieurs font effort pour être humbles avec Dieu, mais avec les hommes ils maintiennent leurs droits et nourrissent, entretiennent, le moi. Souvenons-nous que la grande école d’humilité devant Dieu c’est d’accepter l’humiliation qui nous vient de l’homme. Christ s’est sanctifié lui-même pour nous, en acceptant l’humiliation et l’injustice que des hommes méchants ont fait peser sur lui.

3° L’humilité n’aperçoit jamais sa propre beauté, parce qu’elle refuse de se regarder; elle s’étonne seulement d’une chose, c’est de l’infinie condescendance du Dieu saint; et elle se réjouit de l’humilité de Jésus, du Saint de Dieu, notre Saint.

4° Le lien qui relie la sainteté à l’humilité c’est l’habitation de Dieu en nous. Le Très-Haut, dont le nom est saint, habite le cœur-contrit. Et, où Il habite, là est le lieu saint.

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