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Qui sait ?

Qui sait si Dieu viendra à se repentir et s’il se détournera de l’ardeur de sa colère, en sorte que nous ne périssions point ?

(Jonas 3.9)

C’était là le dernier rayon d’espérance des Ninivites : « Qui sait si Dieu viendra à se repentir de sa colère, en sorte que nous ne périssions point ? Le livre de Jonas devrait apporter de puissantes consolations à ceux qui désespèrent de leur siècle. Ninive était aussi grande par sa dépravation que par son étendue. Si l’un d’entre nous, gens de petite foi, était allé se promener dans ses environs, pour examiner ses tours et considérer ses retranchements ; si on nous avait commandé de parcourir ses rues, soit sous les feux du soleil, soit la nuit, aux clartés de la lune, pendant que ses habitants se livraient à leurs vices, nous nous serions écriés : « Hélas ! hélas ! la ville est tout entière adonnée à l’idolâtrie ; elle s’est ceinte d’une muraille de péché plus épaisse que ses murailles de pierre. » Supposez qu’on nous eût donné à résoudre ce problème : Comment amener cette ville à se repentir ? Comment lui faire abandonner sa corruption et persuader à tous ses habitants, depuis le plus grand jusqu’au plus petit, d’adorer l’Éternel, le Dieu d’Israël ? — En admettant que cette proposition ne nous eût pas plongés dans le désespoir, ce qui est le plus probable, nous nous serions assis pour méditer mûrement sur les moyens à mettre en œuvre. Nous l’aurions divisée en circonscriptions missionnaires. Il nous aurait fallu plusieurs centaines, si ce n’est même plusieurs milliers de prédicateurs habiles ; aussitôt il eût fallu des dépenses énormes, et nous nous serions crus obligés, entre autres, d’ériger un nombre considérable d’édifices où la Parole de Dieu pût être prêchée. Les rouages d’une pareille machine se seraient multipliés au point qu’à moins de disposer des ressources d’un empire, nous n’eussions pas même tenté l’entreprise.

Mais que fait le Seigneur ? Il met de côté toutes les données de notre faible raison, ainsi que tous les projets que la chair et le sang sont si prompts à suivre, et Il suscite un homme. Par des événements providentiels et étranges, Il qualifie cet homme pour la mission qu’il veut lui confier. Il l’envoie jusque dans les profondeurs de la mer, où les herbes marines l’enveloppent ; puis Il le fait remonter du grand abîme. Cette descente a trempé son âme et elle en ressort couverte de l’armure d’une foi intrépide. — Qui est-ce qui, après avoir été dans les entrailles d’un poisson et en être sorti vivant, peut craindre quoi que ce soit sur la terre ferme ? — Il arrive dans la grande ville, les yeux sortant de leurs orbites et tout frémissant encore au souvenir du terrible jugement qui vient de passer sur sa tête ; et, d’une voix stridente et ferme, il se met à crier : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! » — Est-ce donc là ta méthode, ô Dieu ? est-ce là le moyen que tu as choisi pour accomplir ce grand événement ? Amènerais-tu toute cette ville à se repentir sur l’invitation d’un seul homme ? Cet homme, encore tout imprégné des eaux salées de la mer, pourra-t-il avec son cri monotone remuer cette immense cité ? O Dieu ! si tu sortais sur ton chariot de feu, si tu lui parlais avec ton tonnerre, si tu ébranlais la terre et les cieux, alors peut-être Ninive comprendrait ; mais, certainement, cet homme seul est insuffisant pour une telle œuvre. Mais, autant les cieux sont au-dessus de la terre, autant les pensées de l’Éternel sont au-dessus de nos pensées et ses voies différentes des nôtres. Il est tellement habile qu’il peut accomplir l’ouvrage le plus étonnant avec l’instrument le plus faible.

Cet homme seul commence donc son voyage. Déjà les habitants se pressent autour de lui pour l’entendre. Il marche toujours ; la foule augmente. Au moment où il s’arrête dans les places ou au coin des rues, toutes les fenêtres s’ouvrent pour écouter, et les multitudes suivent ses pas. Il marche toujours, et toujours, jusqu’à ce que la ville entière s’ébranle à son cri funèbre. Voici : le roi l’appelle à comparaître en sa présence, et le prophète lui explique d’une voix imperturbable la menaçante déclaration de Dieu. — Maintenant contemplez les effets ? Ninive se revêt de sac et de cendre. Un grand et lamentable cri de douleur s’élève vers le ciel. Honneur est rendu à Jéhovah, et Ninive se repent. Ah ! mes frères, quel sujet d’espérance dans ce fait ! Qu’est-ce que Dieu ne peut faire ? Ne pensez pas qu’il ait besoin de nous. Il peut accomplir les plus grands événements par les moyens les plus faibles. Un homme lui suffirait, s’il le voulait, pour transformer cette immense cité. Un homme suffirait, s’il le voulait, pour convertir toute une nation et même tout un continent. Il n’y aurait pas de palais assez élevé pour échapper à la voix de cet homme, et il n’y aurait pas de retraite assez profonde pour que son cri ne s’y fît entendre. Il suffirait pour cela que Dieu étendît son bras, et qui pourrait lui résister ? Ne prît-il en sa main que la mâchoire d’un âne, il serait encore plus fort que Samson et il entasserait non seulement les cadavres par monceaux, mais aussi les villes et les empires. Avec le moindre instrument, il tuerait des milliers et il abattrait des dix milliers. — O Église de Dieu ! ne crains jamais ; souviens-toi des hommes que l’Éternel te donna au temps jadis ; souviens-toi de Paul, d’Augustin, de Luther, de Calvin ; souviens-toi de Whitefield et de Wesley ; considère que ces hommes étaient seuls et isolés, et que néanmoins Dieu a, par leur main, fait des œuvres dont les conséquences durent encore et dureront jusqu’à la fin des temps !

Après ces quelques réflexions comme préface, je vais en quelque sorte mettre de côté le récit du texte, pour m’adresser à ceux que le péché fait trembler et qui sont dans la position des hommes de Ninive, désirant ardemment, comme eux, de trouver grâce devant Dieu. Trois points attireront brièvement notre attention :

la triste position des gens de Ninive ;le peu de raisons qu’ils avaient d’espérer ;combien notre situation est meilleure vu que nous avons les plus fortes raisons possibles pour demander grâce et pour espérer en Dieu.

I

Je vais donc considérer d’abord les Ninivites comme représentant une classe d’auditeurs assez nombreuse qui se croient dans une position tout aussi triste que la leur.

Ces gens de Ninive étaient comme ceux qui vivaient au temps de Noé : ils prenaient et donnaient en mariage ; ils mangeaient et ils buvaient ; ils bâtissaient et ils plantaient. Le monde entier leur servait de grenier, et les royaumes de la terre étaient leurs parcs réservés. Ils étaient le peuple le plus riche et le plus puissant, car Dieu avait extrêmement accru leur prospérité, et ils étaient la plus grande des nations de la terre. Gorgés de biens et plongés dans la sécurité, ils s’étaient livrés à tous les vices ; leurs crimes devaient rivaliser d’horreur avec ceux de Sodome. En supposant qu’ils n’aient pas été pires que ceux des villes maudites de l’Orient, ils ont dû être abominables au-delà de toute conception. Mais aussi, comme ils s’éveillèrent promptement de leur torpeur et comme ils furent subitement convaincus de péché ! La prédication de cet homme étrange les avait précipités des hauteurs de leur gloire dans la plus profonde affliction. Où était maintenant leur orgueil ? Les chants joyeux avaient cessé ; ce n’était plus de toutes parts que pleurs et lamentations. Et qu’est-ce qui les effrayait ? C’était la découverte de trois choses : 1° celle de leur grande iniquité ;celle du peu de temps qu’il leur restait à vivre ;celle de l’effroyable destruction qui allait fondre sur eux. Ah ! plût à Dieu que vous pussiez faire cette triple découverte, pécheurs insouciants, qui ne craignez point Dieu et qui ne vous détournez pas de votre mauvais train ! Plût à Dieu, je le répète, qu’une voix de prophète pût vous épouvanter en vous montrant vos péchés, qui sont grands et nombreux ! Que chacun de nous jette un regard sur sa vie, et quel est celui qui n’aura pas à rougir ? Quelques-uns sans doute ont respecté les lois de la morale. Les habitudes d’une première éducation et le frein de la grâce divine nous ont préservés de certaines souillures ; mais, malgré cela, nous sommes obligés de fermer la bouche et de cacher notre front dans la poussière. En regardant à notre cœur, nous trouvons qu’il ressemble à un nid rempli d’oiseaux immondes et qu’il regorge de toute sorte de malice et d’impuretés. Nous avons été aussi vicieux dans notre for intérieur que les pires d’entre les hommes l’ont été dans leur conduite. Et combien, d’ailleurs, qui n’oseraient pas même se vanter d’avoir vécu moralement, quoique cet avantage ne puisse point les excuser de n’avoir pas aimé Dieu ! Hommes frères, considérez votre vie, Je le répète : qui de nous n’a jamais murmuré contre Dieu ? qui de nous a aimé son prochain comme lui-même ? qui de nous ne s’est jamais mis en colère sans cause ? qui de nous n’a jamais blasphémé Dieu dans son cœur, à supposer qu’il ne l’ait jamais fait avec ses lèvres ? qui de nous a toujours scrupuleusement gardé ses yeux de concupiscence et son cœur de convoitise ? N’avons-nous pas tous péché ? Si, en ce moment, nos iniquités pouvaient être révélées ; si chacun, tout-à-coup, devait porter ses péchés écrits sur son front, qui de nous aussitôt ne porterait pas ses mains sur son visage, afin de les cacher à ses semblables ? Quelle bénédiction plusieurs d’entre vous retireraient d’un scrupuleux examen de leur vie ! Je vous en conjure donc, feuilletez les pages de vos souvenirs, et que les plus noires et les plus humiliantes soient relues de vous avec attention.

Ne pensez pas qu’ici je ne m’adresse qu’à ceux du dehors. Il est de mode, de nos jours, que le prédicateur considère ses auditeurs comme étant tous excellents et de bon aloi. Est-il quelque chose de plus faux, — de mensonge plus coupable devant Dieu ? N’y en a-t-il pas ici même qui s’adonnent secrètement à des vices que je ne puis pas nommer ? N’en est-il pas qui, dans leurs rapports commerciaux, font aux autres ce qu’ils regarderaient comme digne de mépris, si on se le permettait à leur égard ? Quoi ! aucun de vous ne serait-il envieux ? aucun de vous ne trompe-t-il son prochain ? aucun de vous ne pratique-t-il les fraudes et les ruses ordinaires du commerce ? N’y a-t-il ici personne de menteur, personne de trompeur, personne de médisant ou qui porte de faux témoignages contre son prochain ? Suis-je donc tellement privilégié que de parler à une congrégation d’hommes purs et sans tache ? Je ne saurais m’en flatter. Non, non, nos péchés sont grands et nos iniquités sont hideuses. Oh ! si chacun de nous était disposé à confesser les transgressions qu’il a faites ! Certainement, si l’Esprit de Dieu venait briller dans nos cœurs et nous montrer la culpabilité de notre vie, nous nous trouverions dans une bien douloureuse et lamentable situation, et nous crierions à l’Éternel, comme Ninive au temps jadis.

Mais, outre cela, les Ninivites apprenaient aussi qu’il leur restait fort peu de temps. Encore quarante jours et Ninive sera détruite. Quelle date terrible, irrévocable ! « Dans moins de six semaines, dit le prophète, il vous faudra mourir d’une mort misérable. » Les moments étaient comptés à une heure près. « Encore quarante jours ! » Avec quelle terreur les Ninivites devaient compter ces jours ! avec quelle angoisse ils devaient voir le soleil se lever et se coucher ! Chaque jour devait leur paraître comme une noire pierre milliaire marquant leurs progrès sur la route de la destruction.

« Ah !dira quelqu’un, vous ne voulez pas nous dire par là qu’il ne nous reste plus que quarante jours de vie ? » Non, hommes frères, je ne suis pas prophète. Je ne puis vous dire exactement le nombre de vos jours ; mais ce que je puis vous dire, c’est que plusieurs ici pourraient n’avoir pas même quarante jours de vie, pas même le sursis accordé aux Ninivites. Supposez que je puisse vous conduire dans cette grande ville, et que je vous montre ses remparts massifs et ses gigantesques forteresses ; supposez qu’en vous les indiquant du doigt je puisse vous dire : « Dans quarante jours, cette ville va être détruite » ; cette prophétie serait-elle plus facile à croire que cette autre : « Dans quarante jours, votre corps sera la proie des vers dans la tombe ? » Laquelle des deux, je le répète, demanderait le plus de foi pour être crue ? ou bien, lequel des deux est le plus facile de vous faire mourir ou de détruire une cité ? — O homme ! qu’es-tu, sinon un vil amas de poussière ? Un ver peut te détruire ; un grain de sable peut arrêter ton souffle. Le fil de ta vie est bien ténu ; la toile de l’araignée est un câble en comparaison. Ce n’est qu’un rêve ; le soupir d’un enfant peut le dissiper et te lancer dans un autre monde. « Quarante jours ! » ce sursis, à coup sûr, est peut-être considérable, en comparaison de celui que Dieu accorde à tel d’entre vous ! J’ai déjà prêché assez longtemps dans ce lieu pour jeter un regard en arrière sur bien des auditeurs qui ont quitté déjà ces bancs pour se rendre au tombeau. Que de visages je ne retrouve plus dans vos rangs, lorsque je promène mes yeux sur cette assemblée ! que de gens dont j’ai gardé le souvenir et qui ont passé de la terre des vivants dans un autre monde ! et avec quelle rapidité — parfois même, avec quelle soudaineté — quelques-uns ont fait ce saut ! J’en ai été bouleversé moi-même. Il en est que j’ai vus ici le dimanche, ou le mardi, ou le jeudi, lorsque tout-à-coup m’est parvenu ce message : « Quel jour pouvez-vous enterrer un tel ? — L’enterrer !… — Oui, Monsieur, l’enterrer ; il est mort ! » — Alors, je me suis pris à dire : « Chose étrange, qu’il me faille enterrer celui qui hier encore était plein de vie !… »

J’ajouterai que quarante jours sont un long délai en comparaison de celui que Dieu peut, selon vous, vous avoir donné. Quand ce serait même quarante ans, quel temps court après tout ! Réfléchissez-y sérieusement. Comme les années passent rapidement ! N’êtes-vous pas tout étonnés aujourd’hui de trouver des feuilles desséchées sous vos pas ? Hier à peine, tout était vert dans la nature ; hier à peine, nous regardions les moissons qui commençaient à montrer leurs jeunes pousses, et déjà les moissons sont faites depuis longtemps ! Bien des oiseaux ont pris leur vol vers de lointaines contrées, et les teintes d’automne succèdent aux riantes couleurs du printemps. Pour nous, les années passent comme des mois, et les mois comme des jours ; quant aux jours, ils disparaissent comme une ombre. O hommes et femmes qui m’écoutez ! si nous pouvions mesurer la vie, nous la trouverions si courte, que la paume de la main pourrait la couvrir. Dans combien peu de temps il nous faudra comparaître, chacun à notre tour, devant le Souverain Juge ! Cette brièveté du temps ne devrait-t-elle pas nous réveiller !…

Ajoutez à cela une troisième circonstance qui épouvantait les Ninivites, savoir : le caractère terrible de leur destruction. Sans doute, l’une des circonstances qui devaient augmenter l’effet produit par la prédication de Jonas, c’était le vague de sa sinistre prophétie. Il disait : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite. » — Par qui ? Il ne le disait pas. — Comment ? Il ne daigne pas l’expliquer. Elle sera détruite, voilà le fait. Quelque nation puissante viendra-t-elle l’envahir ? Un tremblement de terre viendra-t-il l’engloutir ? La peste ou la famine décimera-t-elle, que dis-je ? anéantira-t-elle sa population ? Il n’en dit rien ! Ce vague lui-même ajoutait à l’horreur de cette prédiction. Les spectres grandissent dans les ombres mystérieuses de la nuit et n’effraient que pendant les ténèbres et le silence. La lugubre teneur du message inspirait aux habitants une terreur irrésistible. — Et vous, vous qui n’êtes pas encore réconciliés avec Dieu, vous qui vivez sans religion, sans espérance et sans Dieu dans le monde, combien sera plus effroyable le jugement qui va vous frapper ! Ce jugement, je ne saurais le décrire. L’Écriture ne parle de la vie future qu’en termes couverts et qui n’en sont que plus terribles pour cela. Jésus dit : « Ceux-là iront dans les ténèbres du dehors ; là, il y aura des pleurs, des lamentations et des grincements de dents. » Ailleurs, il parle de ces tourments comme d’un lieu « où leur ver ne meurt point et leur feu ne s’éteint point. » Enfin, il le représente comme un « abîme sans fond. »

Ah ! mes frères, que nous connaissons peu cette colère de Dieu qui doit certainement s’allumer contre les méchants ! Tout ce que nous savons, c’est que ces choses sont trop terribles pour qu’une oreille humaine puisse les entendre. Si, pendant cette vie, l’enfer vous avait été décrit d’une manière précise, cette terre fût devenue pour vous le prélude des éternelles flammes. Je doute qu’aucun œil humain eût pu résister à la lecture d’une pareille description, si Dieu l’avait faite. Nos oreilles en auraient perdu l’ouïe à force de tinter, et nos cœurs se seraient fondus en eau. — O pécheur, il me suffit aujourd’hui de te dire : « Si tu ne te repens, tu périras misérablement. » Le Dieu tout-puissant en personne tirera le glaive contre toi et le plongera dans ton sein. Il te chassera de sa présence, au milieu des éclats de son tonnerre et des éclairs de sa vengeance. Il te frappera de son bras irrésistible et emploiera, sa force te punir. Ton supplice n’aura pas de fin et la fumée en montera aux siècles des siècles.

Je ne m’adresse pas à vous, incrédules de ce monde ; je n’ai rien à vous dire aujourd’hui ; mais je parle à ceux qui croient à la révélation de la Bible, à ceux qui font profession d’être chrétiens. C’est à vous que j’en veux. Ah ! Messieurs, si vous croyez à ce Livre et si vous demeurez dans l’impénitence, combien ne sera pas affreux le sort que vous vous préparez ! comme pour vous la mort sera un moment terrible et le jugement une catastrophe épouvantable ! Et tout cela s’approche d’un pas accéléré. Les roues du chariot de la Justice éternelle sont attachées à des essieux rougis par la vélocité, et les noirs coursiers qu’elle dirige sont tout couverts d’écume. Qui sait, ô mon frère, si pendant que je suis ici à parler, trop faiblement sans doute, de ces réalités qui devraient me rendre fou d’horreur, la mort ne pose pas déjà sa flèche acérée sur son arc, en vous désignant comme sa première victime ? Qui sait si ce sermon ne se terminera pas, comme celui de Saint Paul, par la chute de quelque Eutiche tombant d’une fenêtre sur le pavé ? Dieu veuille qu’il n’en soit pas ainsi ; néanmoins chacun de nous devrait en trembler et se prosterner devant le Dieu d’Israël. Voilà ce que j’avais à dire sur ce premier point. Esprit de Dieu, daigne bénir la Parole ! Les Ninivites, toutefois, prirent courage et se livrèrent à l’espérance. Ils s’écrièrent : « Proclamons un jeûne, et que tous, hommes et bêtes, crient de toute leur force à l’Éternel ; car, qui sait si Dieu viendra à se repentir et s’il se détournera de l’ardeur de sa colère, en sorte que nous ne périssions point ! »

II

Parlons donc maintenant du second point, c’est-à-dire du peu de raisons que les Ninivites avaient d’espérer ; et daignez me prêter toute attention, car je brûle aujourd’hui d’un ardent désir de vous faire embrasser une bien meilleure espérance que la leur et de vous voir imiter leur exemple. Observez d’abord que le message de Jonas n’annonce aucune chance de grâce ; sa parole ne contenait que la déclaration brève et dure d’une destruction complète ; sa voix n’était que le glas funèbre de la cloche qui annonce l’exécution du criminel. Pas un mot de miséricorde ! C’était le son de la trompette du juge, et non celui de la trompette du jubilé. L’œil de Jonas n’était éclairé par aucun rayon d’espérance ; toute pitié était interdite à son cœur. Sa mission était une mission de terreur, et il s’en acquittait d’une manière terrible. « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! » Il me semble voir le roi de Ninive siégeant en conseil au milieu des chefs de son empire. L’un d’eux lui dit : « Il ne nous reste guère d’espoir ; car, vous l’entendez, Jonas ne nous en laisse point. Comme sa parole est effrayante ! Pas une larme ne brille dans ses yeux. Il faut que son Dieu soit un Dieu juste et sévère. Ce Dieu-là ne nous épargnera pas ; nous sommes perdus ! » Mais le roi répond à son conseiller : « Qui sait ? vous le croyez ainsi, vous n’en êtes pas sûr. Espérons encore, car, qui sait ? Chers auditeurs, ce n’est pas un Jonas qui vous parle aujourd’hui, et j’emprunterai plutôt le langage d’Esaïe : « Venez maintenant, et débattons nos droits. Quand vos péchés seraient comme le cramoisi, ils seront blanchis comme la neige, et quand ils seraient rouges comme le vermillon, ils seront blanchis comme la laine. » Et maintenant ne pouvez-vous pas dire avec le roi de Ninive et à bien plus juste titre que lui : « Qui sait ? » Ne vous déciderez-vous pas à aller dans votre chambre et à prier, car « qui sait ? » N’ouvrirez-vous pas votre Bible pour y chercher une promesse, car « qui sait ? » Ne vous jetterez-vous pas au pied de la croix et ne vous confierez-vous pas en ce sang précieux qui en découle, car « qui sait ? » Vous pouvez encore obtenir votre pardon et être reçus en grâce ; vous pouvez encore chanter les louanges de Dieu auprès de son trône dans les cieux !

Une chose encore était propre à ôter toute espérance aux Ninivites, savoir : qu’ils ne connaissaient le vrai Dieu que par les terribles légendes que l’on racontait sur lui et sur ses actes extraordinaires. Un des conseillers les plus instruits du roi aurait pu dire : « O roi, vis à jamais ! Le Dieu de Jonas est un Dieu effrayant. N’as-tu pas entendu dire ce qu’il a fait en Egypte ? comment il a détruit anciennement Pharaon et son armée dans la Mer Rouge ? et n’as-tu pas appris ce qu’il a fait à Sennachérib, quand il le tailla en pièces, lui et son armée ? N’as-tu pas entendu parler de sa redoutable puissance et de ses jugements terribles ? Certainement, il n’aura pas pitié de nous. » Mais le roi dut alors lui répondre : « Qui sait ? Que sais-tu si ce n’est qu’un délai ? « Qui sait ? » — Mais vous, chers auditeurs, vous êtes bien mieux placés, car vous savez que Dieu est miséricordieux. Nous vous avons répété mille et mille fois les propres paroles de sa bouche, selon qu’elles sont écrites dans ce livre, et vous savez qu’il se plaît à faire grâce. Non seulement Il vous l’a promis, mais Il vous l’a affirmé avec serment. Jéhovah a levé la main et a juré, disant : « Je suis vivant ; je ne prends point plaisir à la mort du pécheur, mais à sa conversion et à sa vie. » Venez donc, pécheurs, car « qui sait ? » Dieu est amour. Faites comme Benhadad, lorsqu’il fut mis en déroute avec son armée et qu’il demeura seul debout avec quelques-uns de ses nobles. Il s’écria : « Mettons des cordes autour de notre cou et allons trouver le roi d’Israël, car nous avons entendu dire que les rois d’Israël étaient miséricordieux. » Faites de même pour aller à Jésus. Vous avez entendu dire qu’il était miséricordieux et plein de compassions ; venez à lui maintenant, croyez à l’efficace de son sang, et « qui sait ? » aujourd’hui même vos péchés seront peut-être lavés. « Qui sait ? » aujourd’hui même le sang de Christ peut blanchir vos transgressions et vous rendre aussi purs que l’était Adam en Eden. « Qui sait ? » aujourd’hui même le Seigneur peut faire bondir votre cœur de joie en murmurant à vos oreilles : « Tu es à moi, et je suis à toi. » « Qui sait ? » l’homme qui se noie s’accroche à tout ce qu’il peut saisir : un rocher, le rocher des siècles est là ; saisissez-le et soyez sauvés ! « Qui sait ? »

Mais, un mot encore. Il manquait aux Ninivites un autre encouragement que nous possédons, vous et moi. Ils n’avaient jamais entendu parler de la Croix. La prédication de Jonas était très puissante, mais Christ en était absent. Il ne disait rien du Messie qui devait venir, rien du sang qui devait être versé, rien du grand sacrifice expiatoire, et par conséquent les hommes qui faisaient partie du conseil du roi auraient pu objecter : « En vérité, nous n’avons jamais entendu dire qu’aucune satisfaction ait été offerte à la justice de ce Dieu offensé. Comment pourrait-il donc demeurer juste en justifiant les impies ? » — « Mais, a pu répondre le roi, « qui sait ? » et sur ce simple « qui sait ? » ils se mirent à crier grâce ! — Quant à toi, pécheur, on te répond aujourd’hui que Dieu n’a pas épargné son propre Fils, qu’il l’a généreusement livré à la mort pour nous tous, « afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle ; — car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit, ne périsse pas, mais ait la vie éternelle ; — car il n’y a maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Christ. » Viens donc, ô pécheur, viens à la croix de Jésus, puisque Dieu peut être juste, tout en justifiant les impies. A l’ouïe de ces déclarations, je pense que tu devrais te dire : « Qui sait ? Il peut me blanchir ; Il peut m’accepter, et je puis encore chanter dans l’éternité :

J’étais le plus grand des pécheurs,
Mais Christ est mort pour moi. »

Et maintenant, vous dirai-je à quoi devaient, au fond, se réduire, selon moi, les espérances du roi de Ninive ? Je viens de vous montrer ses motifs de découragement, et maintenant je vais vous exposer les bases de son espérance. Elles étaient bien chétives, et pourtant elles lui ont suffi. Peut-être le roi se disait en son cœur et disait à ses conseillers : « Il est une chose, toutefois, que vous ne pouvez pas nier ; nous ne saurions être dans une position pire, et si nous nous repentons et crions grâce, en tous cas, cela n’aggravera pas nos crimes. A supposer que ce Dieu ne nous écoute pas, il n’en sera ni plus ni moins. »

Or, j’ai rencontré des pécheurs timorés que cette simple pensée a encouragés et qui se sont dit : « Perdu pour perdu, je veux essayer d’aller à Lui, car une chose est certaine, c’est qu’en n’y allant pas, je péris pour toujours. » Si vous ne cherchez pas le Sauveur, si vous ne vous repentez pas de vos péchés, si vous ne- mettez pas votre confiance en Lui, il vous faudra infailliblement périr ; cela est certain. Si, en recourant à sa grâce, vous êtes rejeté, les choses n’en peuvent aller plus mal. Essayez donc, et vous vous en trouverez bien, car vous ne serez pas rejeté. Souvenez-vous des trois lépreux à la porte de Samarie : ils y étaient assis, sans nourriture, lorsque les angoisses de la faim finirent par les surprendre. L’un d’eux dit à ses confrères : « Allons maintenant vers l’armée des Syriens. S’ils nous tuent, nous n’y perdrons que la vie ; s’ils nous laissent vivre, nous serons sauvés, car si nous restons ici nous périrons infailliblement. » Ils se risquèrent donc, parce qu’il n’y avait rien à perdre et tout à gagner. O pécheur ! puisse le Seigneur t’enseigner à user d’une pareille sagesse. Va à Jésus tel que tu es, et dis-lui : « Seigneur ! mort ou vif, je me saisis de ta croix qui est ma dernière espérance. Si tu ne veux pas me sauver, s’il faut que je tombe dans l’abîme, je veux au moins périr en embrassant le rocher de mon salut, car je n’ai plus que cette ressource. » Si vous pouviez agir ainsi, ah ! vous ne seriez pas déçus.

« D’ailleurs, devait ajouter le roi, il est vrai que Jonas n’a pas dit que Dieu voudrait, pardonner ; mais il n’a pas dit non plus qu’il ne le voudrait pas. Il a crié : Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! mais il n’a pas ajouté que Dieu ne serait jamais ému de pitié. C’est pourquoi, qui sait ? En vérité, si Dieu tenait en réserve des vengeances encore plus terribles, Jonas les aurait dénoncées. Cet homme au regard si farouche n’était pas de trempe à cacher une partie des châtiments de l’Éternel ; sa voix prophétique les aurait proclamés avec la même dureté. S’il s’est donc borné à cette déclaration, et s’il n’a pas ajouté : Je ne ferai grâce à personne, — son silence est un symptôme favorable. Qui sait ? Si Jonas n’en dit rien, nous n’en pouvons rien dire non plus. »

Et maintenant, pécheur, jeté supplie de t’armer du même argument. Toutefois, tu possèdes quelque chose de bien plus fort et de plus encourageant, car aujourd’hui je proclame, toi l’entendant, le pardon du Seigneur. Dieu ne désire pas qu’aucun périsse, mais que tous viennent à repentance. Voici ses propres paroles ; Il t’invite lui-même à venir, Il dit : « Que celui qui veut venir, vienne, et qu’il prenne gratuitement des eaux de la vie. » Et voici sa promesse : « Je ne mettrai dehors aucun de ceux qui viennent à moi. » Pour tout pécheur qui demande grâce, la grâce est accordée librement, libéralement et gratuitement. Si aujourd’hui tu sens le besoin d’un Sauveur, prends Jésus ; Il est à toi, Il est la fontaine ouverte à tous ceux qui sont altérés. La seule préparation dont tu aies besoin, c’est une soif ardente. Si tu as soif, viens et bois, car personne ne peut te le refuser.

De la montagne du Calvaire
Où le Sauveur a daigné mourir,
Quels sons ravissants s’échappent
Et pénètrent mon âme ?
Une voix, me crie : L’œuvre d’amour
Qui a racheté le pécheur est accomplie.
Viens donc, ô pécheur, et sois le bienvenu !

Si donc tu es invité à venir, « qui sait ? » viens, essaie, car, « qui sait ? »

Je crois, toutefois, que ce qui devait le plus encourager le roi de Ninive résultait pour lui de la réflexion suivante : « Oh ! a-t-il pu se dire, si Dieu avait voulu nous détruire sans nous donner de chance de pardon, il n’aurait pas envoyé Jonas quarante jours à l’avance. Il ne nous aurait point donné d’avertissement. Il aurait frappé et il aurait prononcé une seule parole ; mais le coup aurait

précédé la parole. Dans sa colère, il aurait détruit la ville sans lui envoyer un prophète. Comment fit-il pour Sodome ? Il ne lui envoya personne pour la prévenir. Comme le soleil se levait, sa main laissa tomber le feu sur la cité coupable. Mais pour Ninive il a envoyé un messager. Et, toi pécheur, fais encore ton profit de ceci. Tu as reçu un grand nombre d’avertissements ; encore aujourd’hui, tu es averti ; bien plus, tu es tendrement sollicité de venir à Christ. La voix du Crucifié t’appelle : « Viens, pécheur, viens et sois le bienvenu » et chaque goutte de sang qui distille de ses blessures, ajoute : « Amen. »

Si le Seigneur ne voulait pas pardonner, aurait-il commandé à ses serviteurs de t’inviter ? Si ses entrailles n’étaient pas émues de miséricorde, n’aurait-il pas dit plutôt : « Laisse-les, ils se sont alliés aux idoles ; qu’ils périssent ! » Quand Dieu envoie à un homme un de ses fidèles serviteurs, ce seul fait est une éloquente preuve de ses intentions miséricordieuses. O chers auditeurs, je ne puis pas vous parler avec éloquence ; je ne possède pas le langage puissant d’un Whitefield ; mais Dieu m’est témoin que je n’ai pas craint de vous annoncer tout le conseil de Dieu, quel que fût l’accueil que les hommes fissent à mon message. Si vous périssez, ce ne sera pas ma faute, car je ne vous ai rien caché de ce que j’ai reçu de Dieu, qui m’a envoyé. J’ai franchi les barrières des usages et de tous les systèmes pour être net de votre sang. Je ne me suis pas renfermé dans les étroites limites d’une confession de foi, lorsque j’ai senti qu’elle m’empêchait de venir débattre avec vous les droits de mon Maître et vous avertir de fuir la colère à venir. J’ai risqué plus d’une amitié qui m’était chère, et je me suis attiré le blâme d’un grand nombre, parce qu’en cette matière je veux, avant tout, faire le possible pour vous sauver. Ah ! la prédication n’est pas un jeu d’enfant ; ce ne sera pas non plus un jeu d’enfant que de rendre compte au grand et terrible jour de ce qu’on aura prêché. Je vous avertis, je vous conjure au nom du Seigneur, tandis que les portes de la miséricorde sont encore ouvertes pour vous, tandis que vous êtes encore vivants, repentez-vous maintenant — maintenant même ! Puisse en ce moment l’Esprit de Dieu vous faire plier le genou, vous pousser à prier, vous enseigner à croire au sang de l’Agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde ! Souviens-toi, pécheur, que si tu péris, tu te seras tué toi-même. Voici : Dieu ne veut pas ta mort ; Il t’invite au contraire à te jeter entre ses bras en ce moment. Que dis-je ? Il fait plus ; Il te supplie de te tourner vers Lui ; Il dit : « Revenez, enfants rebelles. O Israël, retourne-toi vers moi. » Il dit encore : « Venez maintenant et débattons nos droits ; quand vos péchés seraient écarlates, ils seront blanchis comme la laine ; quand ils seraient rouges comme le vermillon ils seront blanchis comme la neige. » Ah ! si je pouvais vous traîner moi-même jusqu’au pied de la croix ! si je pouvais vous enchaîner par mes paroles et vous tirer avec des cordages d’or jusqu’auprès du Sauveur ! Viens, pécheur, car « qui sait ? » Et même je puis changer ces mots et vous dire : « Moi, je le sais ! » Oui, je sais de science certaine que si tu te tournes vers Christ, Christ se tournera vers toi. Venez à Lui, et Il vous recevra, car Il est un Dieu qui se plaît à pardonner. Aujourd’hui même, à cette heure même, Il est prêt à jeter vos iniquités au fond de la mer et à les ensevelir dans un éternel oubli.

III

Et ceci m’amène enfin à mon troisième point, qui est de vous presser par diverses raisons d’imiter les Ninivites dans leur repentance.

Anciennement, en vertu d’une coutume barbare, quand on pendait un criminel, on le pendait pieds et poings liés de chaînes, afin, pensait-on, qu’en passant sous le gibet, chacun pût apprendre combien la justice est sévère. Cela prouvait plutôt que ces temps étaient ceux de la brutalité. Permettez que je transforme cette horrible image d’un homme pendu avec ses chaînes, en une image qui remplira vos âmes de joie et de bonheur. Dieu, pour montrer sa miséricorde, en a laissé des exemples éclatants, afin qu’en les voyant vous puissiez vous dire : Si tel et tel ont pu être sauvés, pourquoi ne pourrais-je pas l’être aussi ? — Il est inutile que je vous renvoie ici aux Écritures de l’Ancien ou du Nouveau-Testament. Vous vous souvenez du pardon accordé à David ; vous ne sauriez avoir oublié la miséricorde de Dieu envers Manassé, ce pécheur signalé. Quant au Nouveau Testament, depuis le brigand pardonné sur la croix, jusqu’à Saul de Tarse, le plus grand des pécheurs, les exemples fourmillent ; il suffit de les rappeler. Et aujourd’hui encore vous voyez dans ce lieu des pécheurs qui étaient jadis tels que vous êtes encore, mais qui ont reçu miséricorde et qui ont été pardonnés. Parmi les milliers qui se trouvent dans cette enceinte, il en est beaucoup qui ne sont entrés dans cette salle qu’il y a un an ou deux, pour la première fois et par curiosité. Je pourrais vous nommer tel d’entr’eux qui n’avait pas mis les pieds dans un lieu de culte depuis vingt ou trente ans. D’autres étaient des ivrognes consommés, et avaient vécu de la vie la plus misérable. Certaines femmes étaient des prostituées, qui, non contentes de détruire leur corps et de perdre leur âme, travaillaient à en détruire d’autres pour les entraîner dans le même abîme. Un jour, elles entrèrent furtivement pour entendre le prédicateur, dont on disait des choses étranges. Elles devinrent attentives. Dieu décocha une des flèches de son carquois dans leur cœur, et aujourd’hui vous les voyez au milieu de nous. Je le dis sans orgueil, elles sont ma joie et ma couronne, et elles le seront au jour de la venue du Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. Si vous qui, après une vie semblable à la leur, vous repentez aujourd’hui, pouviez entendre, comme moi, le témoignage de leurs lèvres, vous ne pourriez plus douter de la miséricorde de Dieu. Si vous pouviez lire les détails que j’ai conservés sur bon nombre de ces pécheurs convertis, — matelots qui ont péché dans toutes les parties du monde, qui ne sont jamais allés à terre que pour commettre des fornications et des infamies ; si en même temps je pouvais vous raconter les iniquités affreuses dans lesquelles se sont plongés pendant leur incrédulité tels qui sont ici présents, — vous vous écrieriez : « Certainement l’Éternel est un Dieu miséricordieux ! » et peut-être cela vous engagerait à venir à Lui. Oh ! s’il est ici des pécheurs de cette catégorie (et ils sont nombreux), et s’ils se trouvent assis côte à côte avec un pécheur timoré, s’ils aperçoivent des larmes dans ses yeux, qu’ils se hâtent de lui dire : « Je suis de ceux dont M. Spurgeon vient de parler. » Puisque le Seigneur a eu pitié de vous, saisissez avec empressement la main de celui qui se repent et invitez-le à faire comme vous, à chercher la grâce là où vous l’avez trouvée pour vous-même. Et s’il m’est permis de parler de moi ici, j’ajouterai que si vous saviez ce que j’étais autrefois, avant ma conversion, nul d’entre vous ne douterait ni ne craindrait d’être rejeté. Quand j’allai me jeter aux pieds du Seigneur pour lui confesser mes péchés, je me sentais le plus vil de tous les pécheurs de l’enfer. Les autres avaient beau me louer, je ne pouvais trouver un seul mot pour me justifier. Si Dieu m’avait assigné une place dans les flammes les plus ardentes de la géhenne, je n’eusse reçu que ce que je méritais. Mais, grâces en soient rendues à mon Sauveur ! je suis délivré de l’enfer, et je le proclame ici à tous les pécheurs. J’ai été pardonné et accepté. Qui, après cela, pourrait désespérer ? Comment ne pas se dire : « Qui sait ? Courage donc, ô pécheur ! répète en ton cœur ce mot d’espérance : « Qui sait ? Prie le Seigneur, crie à ton Dieu, saisis Jésus-Christ par la foi, en te disant : « Qui sait ? » Les innombrables exemples de sa miséricorde t’autorisent à répéter ce « qui sait ? »

Permettez aussi que je vous rappelle, ô vous qui sentez votre culpabilité, que votre chance de salut est dans la miséricorde de Dieu. Quand un homme s’aperçoit qu’il ne lui reste plus qu’une chance pour échapper à la mort, avec quelle ténacité il s’y cramponne ! Voyez ce malade qui a essayé de tous les systèmes de médication ; il y a dépensé toute sa fortune, et le voilà réduit à la dernière misère. Il essaie d’un dernier traitement : si celui-ci ne réussit pas, il est perdu. Vous comprenez sans peine avec quel soin il s’en occupe, et avec quel empressement il se conforme aux moindres prescriptions de son médecin. Mais aujourd’hui, pécheur, tu as le choix entre Christ et l’enfer. Si Jésus ne te sauve, tu es un homme perdu. Si la croix n’est pas ton paratonnerre, la foudre te frappera et la gueule de l’abîme se refermera bientôt sur toi. Christ, ou rien ! Que dis-je ? Christ ou la damnation ! Saisis-le donc ; cramponne-toi à Lui ! Il est ta dernière, ton unique espérance. Réfugie-toi dans ses bras ; c’est ta seule chance de vie. Si une bête féroce te poursuivait, et si dans toute la vaste plaine il n’y avait qu’un arbre, avec quelle rapidité tes pieds voleraient de ce côté ! Si, te voyant et me plaçant sur ton chemin, je te criais : « Arrête ! où vas-tu en si grande hâte ? » sans t’arrêter, tu me répondrais : « Je n’ai plus que cette chance ; c’est mon dernier espoir. Si je n’arrive à cet arbre et si je n’y monte, je suis mis en pièces et dévoré vif. » Voilà ta position aujourd’hui. Le lion rugissant s’est élancé hors de son antre ; il est altéré de ton sang et te poursuit. A la croix ! à la croix, pécheur ! Là est ton espérance, là est ton seul refuge. Si tu la manques, tu seras plus que mis en pièces, tu seras perdu éternellement. Mais, pour t’encourager, laisse-moi te dire encore une chose avant de terminer : Pécheur, comprends bien que si ton salut doit être pour toi un bonheur inexprimable, ce sera aussi une gloire pour Dieu que de te sauver. Les hommes ne craignent pas de dépenser de l’argent pour faire quelque chose qui les honore ; s’il s’agit, au contraire, d’une chose qui ne leur rapporte que de la honte et de l’ignominie, ils ne s’abaisseront jamais à la tenter. Or, souviens-toi que le salut d’une âme est pour Dieu une œuvre glorieuse. S’il ne demande donc qu’à effacer tes péchés, ne consentiras-tu pas à lui laisser cet honneur ? Lorsque je cherchais mon pardon, il me semblait que si Dieu voulait condescendre à effacer mes transgressions, je serais capable de tous les sacrifices pour lui plaire. Je me serais laissé couper en deux plutôt que de le renier. Je voulais le servir toute ma vie, quoi qu’il fît de moi dans l’éternité. Et vous ? n’éprouvez-vous pas quelque chose de semblable ? ne vous sentiriez-vous pas disposés, s’il voulait seulement vous sauver, à chanter ses louanges dans les cieux plus haut et plus fort que tous ceux qui y habitent ? Ne l’aimeriez-vous pas ? n’iriez-vous pas, en rampant au pied de son trône, jeter devant Lui votre couronne, et lui dire : « Non pas à moi, Seigneur, non pas à moi, mais à ton Nom seul soit toute la gloire ! » Dieu prend plaisir à sauver les pécheurs, parce que chaque pécheur qu’il sauve est un joyau de plus à sa couronne. Si sa justice le glorifie, sa miséricorde le glorifie encore bien davantage. Lorsqu’il sauve le pécheur, c’est alors qu’il revêt tous les plus resplendissants insignes de son éternelle majesté. Quand Il punit, Il porte une couronne de fer, mais quand Il fait grâce, Il ceint son diadème d’or. Le jugement des rebelles est son œuvre étrange, inaccoutumée, exceptionnelle ; Il ne l’accomplit que de la main gauche. Mais c’est avec la droite qu’il fait grâce et qu’il manifeste son amour. Voilà pourquoi Il met les justes à sa droite, pour être toujours à portée de les bénir et de leur pardonner. O pécheur ! viens donc à Jésus-Christ. Ce que tu demandes de Dieu est justement ce qu’il veut t’accorder, ce qu’il est intéressé à te donner ; ce qu’il t’aurait déjà donné depuis longtemps, si tu étais venu le lui demander. Viens à Christ, âme humiliée, et Il te fera grâce.

Ma seule crainte, en terminant, c’est qu’en retournant dans vos maisons vous ne laissiez les impressions salutaires que vous venez de recevoir s’effacer et s’évanouir. Faites-moi un plaisir ; c’est une faveur que je réclame de vous : pour peu que la Parole ait touché aujourd’hui votre cœur, retournez seuls chez vous, si c’est possible ; et si vous êtes obligés de vous en aller en compagnie, parlez peu, enfermez-vous au plus tôt dans votre cabinet. Là, tombez à deux genoux devant le Seigneur ; confessez-lui vos péchés et demandez grâce en invoquant le sang de Christ. Et « qui sait ? » qui sait si dans les cieux ce jour ne sera pas un grand jour de fête, parce que des centaines de pécheurs auront été ainsi amenés à prier pour la première fois, à connaître leurs péchés et à se convertir à Dieu ? J’espère que nos frères demeureront tandis que nous allons tous ensemble demander à Dieu qu’il en soit ainsi. Vous qui désirez qu’il le fasse, dites un amen fervent aux quelques phrases de supplication par lesquelles je termine :

« Seigneur, sauve-nous maintenant. Nous confessons notre iniquité ; nous t’en demandons humblement le pardon par le sang de Christ. Nous te supplions de ne pas nous le refuser, mais fais que nous nous retrouvions tous à ta droite. Opère puissamment dans nos cœurs et sauve aujourd’hui un grand nombre d’âmes, pour l’amour de Jésus. » Et le peuple répondit : Amen !

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