Les Pseavmes

Psaume 38.

Dieu tout-puissant, ne châtie
(Clément Marot)

Prière d’un grand malade. Il crie dans sa souffrance, abandonné de ses amis, entouré de méchanceté et il implore l’aide de son Dieu.

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— 1 —
2 Dieu tout-puissant, ne châtie
Pas ma vie
Dans ton indignation ;
Retiens ta juste colère,
Et modère
Un peu ma punition.
— 2 —
3 Car tes flèches décochées
Sont clouées
Bien fort en moi, sans mentir ;
Il a fallu que jʼendure
Ta main dure,
Tu voulus lʼappesantir.
— 3 —
4 Je nʼai plus ni chair ni veine
Qui soit saine,
Je paye le mal commis,
Et mes os qui sʼatrophient
Se carient,
Châtiment que je subis.
— 4 —
5 Car les peines de mes fautes
Sont si hautes
Que je mʼen vois submergé ;
Le poids trop insupportable
Qui mʼaccable
Va me faire succomber.
— 5 —
6 De mes lésions purulents
Et qui sentent,
Il sort un sang corrompu,
Hélas, cʼest de ma folie
Quʼest sortie
Lʼinfection de ce pus.
(Pause)
— 6 —
7 Le mal qui me fait la guerre
Vers la terre
Mʼa courbé totalement ;
Avec triste et noire mine
Je chemine
Tout en pleurs journellement.
— 7 —
8 Un feu dévore mes aines
Qui sont pleines
Du mal qui mʼa tourmenté,
Car la source de ma vie
Est tarie
Sans retour à la santé.
— 8 —
9 Mon corps qui fut si habile
Est débile,
Tremblant des pieds et des mains,
Et, dans la douleur si forte
Quʼil supporte,
Jette des cris inhumains.
— 9 —
10 Mais tu sais pourquoi je prie
Et je crie,
Tu connais le fond des cœurs ;
Le soupir de ma pensée
Transpercée
Ne peut tʼéchapper, Seigneur.
— 10 —
11 Mon cœur déréglé sʼagite,
Il palpite
Et mes forces mʼont trahi ;
Je ne vois plus la lumière
Coutumière
Tant mes yeux sont affaiblis.
— 11 —
12 Les plus grands amis que jʼaie
Voient ma plaie,
Ne lui portant pas grand soin ;
Et, sans faire de reproches,
Mes plus proches
Sʼy intéressant de loin.
(Pause)
— 12 —
13 Les uns à ma mort sʼattendent,
Et me tendent
Des pièges dans mon malheur ;
Dʼautres disent milles choses
Quʼils supposent,
En salissant mon honneur.
— 13 —
14 Jʼai lʼair de nʼentendre goutte,
Et jʼécoute ;
Leur cœur peut se découvrir,
Je suis là comme une souche,
Et ma bouche
Muette ne peut sʼouvrir.
— 14 —
15 Je suis devenu en somme
Comme un homme
Qui nʼentend vraiment plus rien,
Et qui nʼa quand on le pique,
Pour réplique
Pas un mot qui tombe bien.
— 15 —
16 Mais je garde lʼespérance,
Lʼassurance
De ton secours, je lʼattends ;
Cʼest en Toi, mon Dieu, mon Père,
Que jʼespère,
Tu me répondras à temps.
— 16 —
17 De peur (cʼest pourquoi je prie)
Quʼon ne rie
De mon malheureux émoi ;
Sitôt que le pied me glisse,
Leur malice
Fait quʼils triomphent de moi.
(Pause)
— 17 —
18 Viens donc à moi ; sur la route
Je redoute
De boiter honteusement,
Tant cette grande détresse
Qui mʼoppresse
Me poursuit incessamment.
— 18 —
19 Hélas, en moi avec honte
Je raconte
Mon trop inique forfait ;
Je rêve et je me tourmente,
Me lamente
Pour le péché que jʼai fait.
— 19 —
20 Tandis que mes adversaires
Au contraire
Sont vifs et fortifiés,
Les gens pleins (sans cause aucune)
De rancune
Semblent se multiplier.
— 20 —
21 Ils forment toute une bande,
Et me rendent
Pour le bien lʼiniquité,
Et la source très certaine
De leur haine
Cʼest que jʼaime lʼéquité.
— 21 —
22 Mon Dieu, je nʼai plus personne,
Nʼabandonne
Pas ton humble serviteur ;
Jʼai pour unique espérance
Ta présence,
Ne tʼéloigne pas, Seigneur.
— 22 —
23 Au secours ! car je tʼappelle,
Dieu fidèle,
Par pitié ne tarde plus.
Toute force humaine cède ;
Ma seule aide
Cʼest Toi, Dieu de mon salut.

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