Les dons spirituels

8. Les dons de l'Esprit et le fruit de l'Esprit

Un aspect très important de la question des dons spirituals est celui qui concerne leurs rapports avec la sainteté. Diverses questions se pressent ici, questions qui ne sont pas purement théoriques, mais qui s'imposent à nous, souvent à l'improviste, pour des raisons pratiques. Les dons spirituels développent-ils la sainteté ? La sainteté est-elle, ou non, préalablement requise, pour qu'on puisse les recevoir ? Sont-ils une preuve de sainteté ? La sainteté personnelle de l'individu affecte-t-elle l'emploi qu'il fait des dons ? Faut-il se préoccuper des dons, étant donné l'importance suprême de la sainteté ?

Pour éviter tout malentendu, notons que nous entendons ici par sainteté, la ressemblance morale avec le Christ : il s'agit de cette conséquence positive de la conversion, par laquelle la vie même de Christ est reproduite dans et par la vie ou le caractère du croyant. Il y a plusieurs grâces visibles qui marquent un tel caractère, avant tout celles que Paul énumère dans Galates 5.22-23, sous le titre : « le fruit de l'Esprit ». La liste est la suivante : l'amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance la fidélité, la douceur, la tempérance. L'apôtre regarde ces vertus comme produites dans l'âme par la grâce divine ; elles ne sont pas de notre nature originelle, elles proviennent de Dieu.

Différence entre les dons et le fruit.

Il est nécessaire de comprendre la différence fondamentale qui existe entre les dons et le fruit de l'Esprit. Le fruit est le produit naturel d'un principe de vie intérieure, qui se développe d'une manière continue. Le développement du fruit demande du temps ; il est amené à la perfection grâce à l'aide d'éléments extérieurs : le soleil, la pluie, le sol. Les dons, en revanche, sont conférés par la générosité de quelqu'un qui est en dehors de nous. En général ils sont parfaits quand nous les recevons, bien que celui qui les reçoit puisse apprendre à s'en servir de mieux en mieux, comme par exemple dans le cas où nous recevons un appareil de photographie ou une automobile. Ce qui est essentiel pour notre étude, c'est que le fruit vient progressivement du dedans, tandis que les dons viennent tout d'un coup du dehors. Cette distinction est un peu simpliste, mais elle aide à comprendre cette différence fondamentale.

Le fruit de l'Esprit est donc la manifestation et le produit de la vie divine qui a été impartie au croyant au moment de la conversion ; il peut apparaître presque instantanément dans certains cas, mais le plus souvent il apparaît graduellement par une croissance dans la grâce. Son développement est favorisé par des moyens de grâce extérieurs, tels que l'aide des chrétiens et des pasteurs, les circonstances de la vie, et par-dessus tout la communion avec Dieu. Ce fruit peut croître à travers toute la vie chrétienne ; la sainteté doit croître sans cesse.

Les dons de l'Esprit, au contraire, peuvent être conférés soudain, à n'importe quel point de l'expérience du chrétien ; il ressort clairement du Nouveau Testament que certains croyants ont reçu un don en même temps que le baptême du Saint-Esprit. D'autres dons leur ont été accordés à certains tournants de leur nie chrétienne (par exemple I Tim. 4.14 ; passage qui se rapporte probablement au moment où Timothée a été mis à part pour le ministère, Actes 16.1-3). On peut désirer de nouveaux dons et prier pour les obtenir (I Cor. 12.31 ; 14.13 et 39). L'octroi des dons du Saint-Esprit paraît donc plus ou moins indépendant de la maturité atteinte par le croyant au point de vue de la croissance dans la grâce ; étant bien entendu que le Seigneur peut juger de la capacité de chaque individu. Ils ne peuvent jaillir de la vie intérieure mais sont des actes souverains du grand donateur.

L'amour n'est pas un don spirituel.

Le premier et le plus grand FRUIT de l'Esprit est l'amour. Si merveilleux est cet amour divin qui se manifeste dans et par une vie entièrement livrée à l'Esprit de Christ, que lorsque Paul consacre un chapitre entier à le chanter (I Cor. 13), nous sentons qu'il décrit en réalité le chrétien idéal.

Il faut bien comprendre que cet amour est un fruit et non un don. I Cor. 13.1, établit cette distinction. Il n'est pas scripturaire de dire : « Je recherche l'amour, le plus grand de tous les dons ! ». Beaucoup parlent ainsi, mais l'amour n'est pas mentionné dans la liste des neuf dons de l'Esprit (I Cor. 12.8-11). Plutôt que d'attendre l'amour (I Cor. 13) comme un don achevé que Dieu mettrait tout d'un coup dans le coeur, nous devons considérer qu'il n'est que le fruit du développement d'un principe divin en nous. Il devient parfait par une vie de communion étroite avec le Seigneur, et non autrement.

Si l'on considère l'amour, décrit si merveilleusement dans I Cor. 13, comme étant non seulement le premier des fruits de l'Esprit (Gal. 5:22), mais comme comprenant aussi en lui tous les autres fruits de l'Esprit, on peut noter deux faits très importants au sujet de la relation entre les dons et le fruit :

Il y a NEUF DONS énumérés dans I Cor. 12.8 à 11, et NEUF FRUITS énumérés dans Gal. 5.22 et 23.

Le grand chapitre sur l'amour (I Cor. 13) est inséré entre les deux principaux chapitres qui traitent des dons spirituels, et il fait partie intégrante du sujet.

Le premier fait nous enseigne que les dons et les fruits sont destinés à se compléter les uns les autres ; le second fait, qu'ils sont en relation intime les uns avec les autres.

On interprète souvent l'exhortation de Paul au sujet de « la voie plus excellente » (I Cor. 12.31) comme si l'apôtre disait : « Ne vous occupez pas des dons spirituels, recherchez seulement l'amour ». Cela est faux, car il n'est pas écrit : « recherchez l'amour AU LIEU des dons spirituels » ; mais « recherchez l'amour ET ASPIREZ aux dons spirituels ». C'est un manque d'équilibre contraire à l'Ecriture, que d'ignorer ou de négliger les dons spirituels.

UN APPEL A L'ÉQUILIBRE.

Lorsque l'apôtre écrit : « Aspirez aux dons les meilleurs », et : « Je vais vous montrer encore une voie par excellence », il ne nous invite pas à négliger les dons spirituels. Il fait un appel à L'ÉQUILIBRE, et il établit les vraies (valeurs spirituelles. La chose la plus grande de toutes, c'est une ressemblance croissante avec Christ ; c'est donc une grande erreur de penser que les dons peuvent tenir lieu des fruits. Il développe cette pensée avec une très grande force dans les premiers versets de I Cor. 13. Il représente les dons spirituels opérant de la manière la plus brillante — puis il anéantit d'un seul coup toute cette splendeur. Le don des langues, celui de prophétie, de connaissance et de foi, tout est également rabaissé. Tout le raisonnement vise ceux qui exerçaient ces dons sans avoir l'amour. C'est un passage frappant. C'est un passage d'une importance capitale pour tous ceux qui se réclament d'une expérience de Pentecôte.

Remarquons que l'apôtre ne met pas en doute un seul instant l'authenticité des dons (comme le font tant de personnes aujourd'hui) ; il ne s'agit pas de contrefaçons qui viendraient de quelque puissance démoniaque. Il s'agit de dons authentiques du Saint-Esprit, que les fidèles ont reçus directement du Seigneur Lui-même, mais qu'ils exercent maintenant sans avoir gardé le sens des vraies valeurs spirituelles. Si quelqu'un s'étonne ici, c'est parce qu'il se représente les dons spirituels comme étant imposés à l'homme par le Saint-Esprit. En réalité ces chapitres montrent qu'une fois les dons accordés, leur exercice est à la disposition de la volonté de l'individu (I Cor. 14.14, 19, 28, 30, 32). L'idéal est que le croyant soumette sa volonté si parfaitement à la volonté de Dieu que tout exercice des dons se fasse (vraiment « dans l'Esprit ». Il n'en est pas toujours ainsi, mais ce devrait être le but de tous ceux qui ont des dons spirituels.

Qu'arrive-t-il lorsqu'on exerce les dons sans amour ?

a) Cet exercice est sans puissance et il est irritant pour les autres.

b) Celui qui exerce le don n’a pas de profit pour lui-même. (« Cela ne sert de rien » 1 Cor 13.1-3) Plus clairement encore :

a) un chrétien qui exerce les dons spirituels sans vivre une vie qui y soit conforme, ne fait pas la moindre impression sur les autres ; il est, au contraire, une pierre d'achoppement pour eux,

b) un chrétien qui se figure qu'en pratiquant abondamment les dons spirituels, il peut suppléer à un manque de sainteté personnelle, se trompe du tout au tout.

Ensuite l'apôtre donne une description positive des merveilles de l'amour (I Cor. 13.4-7), et couronne le tout en montrant que ces qualités sont éternelles. Les dons spirituels, au contraire (et il cite ici la prophétie, les langues et la connaissance) ne sont que pour le siècle présent, où nous voyons comme à travers un miroir. Son but est de donner le vrai sens des valeurs spirituelles, et d'élever l'ambition de ses lecteurs jusqu'au point le plus élevé possible : jusqu'au moment où ils verront face à face... Pour les personnes qui voudraient tordre le sens de ce passage, il y a lieu de souligner que l'Apôtre ne dit pas qu'un seul des dons spirituels doive cesser avant ce temps.

Une doctrine vraie est toujours équilibrée ; c'est pourquoi, tout de suite après l'éloquence passionnée des derniers versets de I Cor. 13, l'Apôtre se hâte de prévenir une réaction possible contre les dons spirituels : « On doit aspirer aux dons spirituels ». (Chap. 14.1).

Mais maintenant il va donner un enseignement détaillé sur les principes qui doivent présider à l'exercice des dons, et la clé de tout, c'est L'AMOUR. Le chapitre 14 est une application pratique du chapitre 13, à la question des dons spirituels. L'amour ne se contente as de l'exercice égoïste d'un don (v. 4, etc.) ; l'amour aura un ardent désir de voir les autres recevoir des bénédictions (v. 19, etc.) ; l'amour prendra bien garde de ne jamais être en scandale à personne (v. 26, etc.) ; tout cela nous ramène à un équilibre parfait entre les dons et les fruits. Le chrétien qui a le plus des fruits de l'Esprit, sera le chrétien qui exercera les dons spirituels avec le plus de profit. Un étalage théâtral de dons, si brillants soient-ils, ne produira rien d'éternel ; il faut que l'homme soit dirigé par l'amour de Dieu. Le caractère du fidèle qui exerce un don spirituel n'affectera pas beaucoup la manifestation extérieure de ce don, mais il aura un effet considérable sur son pouvoir d'édification. Cela est d'une importance capitale.

Les dons spirituels et le manque de sanctification.

Ceci constitue un problème tellement grave aux yeux de quelques-uns, qu'il faut l'examiner sérieusement.

Dans le Nouveau Testament, il n'y a pas de problème de ce genre. Le, problème se pose à cause de quelques idées erronées, et, croyons-nous, très peu conformes à l'Ecriture, qui ont été répandues parmi les chrétiens à la faveur de telle ou telle doctrine du baptême du Saint-Esprit.

a) C'est une erreur de croire que le baptême du Saint-Esprit enlève au croyant la possibilité de pécher à l'avenir. Selon l'Ecriture, le croyant peut avoir besoin, après ce baptême, d'un grand progrès dans la sanctification personnelle ; il doit pour cela MARCHER selon l'Esprit (Galates 3.2-3 et 5.16-25). Il est vain de penser qu'une expérience quelconque, une « crise », une « bénédiction », puisse remplacer la marche continuelle selon l'Esprit, quelque utile qu'une pareille crise puisse être sans aucun doute à la sanctification même.

Nous ne pouvons pas aborder ici le vaste problème de la sainteté. Qu'il nous suffise d'indiquer que, selon le Nouveau Testament, la sainteté procède de trois sources : le Sang (Hébr. 13.12), la Parole (Jean 17.17) et l'Esprit (I Pierre 1.2). Le baptême du Saint-Esprit a pour conditions préalables la repentance et la rémission des péchés, ainsi qu'un cœur pur : et cette dernière condition est remplie par la foi dans le précieux sang (Actes 2.38 ; 15.9). Le but du baptême est la puissance dans le témoignage (Actes 1.8) sous les différentes formes qu'enseigne l'Esprit.

Le baptême du Saint-Esprit ne produit pas l'impeccabilité, et le Nouveau Testament ne fait pas des dons du Saint-Esprit un signe de sainteté. Ils sont le signe de la venue de celui qui peut sanctifier ; mais son œuvre peut n'avancer que lentement, surtout si l'on n'obéit pas à la Parole écrite. Toute confusion doit être évitée sur ce point.

b) L'autre erreur qui cause chez plusieurs trouble et scandale, est l'idée que le Saint-Esprit ne peut se manifester qu'en des êtres déjà parvenus à la perfection.

Comment peut-on penser pareille chose lorsqu'on a une Bible ouverte devant soi ? Dans l'Ancien Testament, il y a le cas de Jephté (Juges 11.29), de Samson (Juges 15.14), de Saül, qui tous avaient une sanctification très imparfaite. Dans le Nouveau Testament on voit sans cesse que le Seigneur travaille avec, et par le moyen d'hommes et de femmes très imparfaits, môme parmi les apôtres, et même après la Pentecôte. La 1ère épître aux Corinthiens traite des divisions de l'église, de cas d'immoralité, de désordres, d'hérésies, etc. ; cependant le Saint-Esprit se manifestait chez les Corinthiens d'une manière telle que Paul déclare qu'il ne leur manque aucun don, dans l'attente de la manifestation du Seigneur (1Co 1.7). Ce simple fait est à l'abri de toute contradiction. Quelle réponse à ceux qui ne veulent pas admettre qu'il y ait d'authentiques dons de l'Esprit, là où ils trouvent la moindre trace d'imperfection. Nous n'excusons pas les imperfections ; ce que nous avons déjà dit suffit à montrer combien on doit les prendre au sérieux chez ceux qui ont des dons de l'Esprit. Mais ce qui nous étonne, ce sont les problèmes que posent des personnes qui ont pourtant la Bible.

Toutes ces difficultés proviennent de ces deux erreurs jumelles : ou que le baptême du Saint-Esprit devrait produire une perfection définitive ; ou que l'exercice des dons de l'Esprit est une preuve de perfection. Dieu veuille nous ramener à la vérité biblique !

Citons pour conclure les paroles pleines de mesure de Conybeare et Howson, au chapitre 13 de leur Vie et Epîtres de saint Paul : « Beau rêve que celui d'une Eglise semblable à une société d'anges ; ce n'est pas sans peine que nous ouvrons les yeux pour voir la réalité... Du vivant même des apôtres, tout comme aujourd'hui, les miracles ne suffisaient pas pour convertir ; l'inspiration ne produisait pas la sainteté ; alors, comme aujourd'hui, l'imperfection et le mal se glissaient parmi les membres de l'Eglise, et ralentissaient la marche du Royaume de Dieu ». Les amis aussi bien que les adversaires du Réveil de Pentecôte, ont à retenir la leçon que donne le Nouveau Testament : l'inspiration ne crée pas la sainteté. Mais l'inspiration n'en est pas moins réelle et précieuse.

Ce que nous désirons ardemment, c'est une Eglise glorieuse, possédant les neuf dons et les neuf fruits de l'Esprit, dans une harmonie toute à la gloire du Rédempteur.

Un Réveil ne peut pas continuer par la puissance du Saint-Esprit, si l'on voit en lui seulement l'inspirateur des paroles et des actes, et non l'auteur de la sainteté. Si l'on ATTRISTE l'Esprit de Dieu par un manque de sanctification (Ephés. 4.30) on finira aussi par ÉTEINDRE les manifestations de l'Esprit (I Thess. 5.19). Le plan harmonieux et divin que révèle le Nouveau Testament fait du Saint-Esprit la source aussi bien des fruits que des dons ; nous le bénissons et nous lui obéissons pour l'un et pour l'autre aspects de notre Rédemption.

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