Le fruit de l'Esprit

5. LA LONGANIMITÉ (LA PATIENCE)

La « longanimité » nous ramène aux tout premiers temps, quand l'histoire des rapports de Dieu avec les hommes était encore jeune, « lorsque la patience de Dieu se prolongeait, aux jours de Noé ». (1 Pierre 3.2).

Fait remarquable, le cercle se complète ; la patience de Dieu opère de nouveau vers la fin, retenant le plus longtemps possible le jour inévitable du jugement : « Le Seigneur ne tarde pas dans l'accomplissement de la promesse, comme quelques-uns le croient ; mais Il use de patience envers vous, ne voulant pas qu'aucun périsse, mais voulant que tous arrivent à la repentance. Le jour du Seigneur viendra.... (2 Pierre 3.9).

Un attribut de Dieu

La longanimité, fruit de l'Esprit, est l'un des attributs du Tout-Puissant. Elle forme partie du nom éternel (Exode 34.6) ; elle est une raison fréquente d'adoration et de louange.

Elle se révèle d'une manière particulière dans la patience et la miséricorde divines envers les pécheurs (et non envers leur péché). Ce gracieux attribut de la Divinité brille d'une lumière plus grande encore si nous nous rappelons que tout péché est finalement une offense personnelle contre un Dieu personnel. Ce sentiment permet aux pécheurs réconciliés avec Dieu par Christ d'apprécier Sa longanimité avec plus de profondeur. Paul dit : « J'ai obtenu miséricorde, afin que Jésus-Christ fit voir en moi le premier toute Sa longanimité pour que je servisse d'exemple » (1 Tim 1.16).

Le but de la longanimité divine est d'amener les hommes à la repentance. (Rom. 2.4). Il importe de se rappeler ceci : la patience divine a un but. Elle n'est pas seulement une endurance passive et sans objet. Elle diffère en cela d'une simple résignation à l'inévitable.

Il s'ensuit donc que la longanimité véritable est essentiellement volontaire. Dieu n'est pas obligé de souffrir longtemps les malfaiteurs. Il le fait parce que l'amour est « patient et plein de bonté » (1 Cor 13.4) et ceux qui font preuve de longanimité agissent ainsi dans le dessein ferme de manifester de la bonté.

Un fruit de l'Esprit

Nous devons contempler la longanimité à sa source même dans le cœur de Dieu, en nous rappelant que ce fruit de l'Esprit résulte directement de notre participation à la nature divine, et ne parvient à maturité que par notre communion constante avec Dieu.

La ressemblance entre Dieu et ses enfants peut ici devenir très belle. Je n'oublierai jamais la remarque passagère d'un pasteur fidèle que j'entendis dans ma jeunesse. Certaines personnes s'opposaient âprement à lui, cherchant à entraver son ministère et à y porter atteinte par tous les moyens en leur pouvoir. Quelques-uns d'entre nous étaient émerveillés de la manière dont il supportait leurs insultes et leur perversité. « Dieu est patient avec eux, je peux l'être aussi », dit-il simplement.

L'épître aux Colossiens contient une déclaration importante au sujet de la longanimité (Col. 1.11). « Fortifiés à tous égards par Sa puissance glorieuse, en sorte que vous soyez toujours et avec joie persévérants et patients ». Deux idées sont particulièrement frappantes dans ce passage :

a) L'objet d'un tel revêtement de puissance doit être la longanimité. Nous pensons généralement que ce revêtement est donné dans le seul but de nous permettre d'accomplir des œuvres grandioses en son Nom, et de remplir un ministre puissant et varié. La « longanimité » est cependant ici la fin spécifique de la puissance, et cela peut apporter à quelques personnes une lumière nouvelle sur le but pour lequel nous recevons le Baptême du Saint-Esprit. Sans aucun doute, il est accordé parfois pour faire de certains hommes des « colonnes » dans l'Eglise (Galates 2.9). De tels hommes sont toujours d'une valeur et d'une important de premier ordre. Il arrive que des prédicateurs brillamment doués, des travailleurs actifs pour Christ, ont peu de valeur comme « colonnes » simplement parce qu'ils ne montrent pas assez de longanimité. Leur ministère aurait peu d'occasions de s'exercer sans le concours d'assemblées déjà établies, qui subsistent grâce aux véritables colonnes que sont leurs pasteurs et leurs anciens.

b) La seconde chose digne de remarque est que nous devons être persévérants et patients avec joie. Or, ceci est un point capital. Nombre de personnes se parent d'une caricature de la longanimité. Elles se vantent de leur patience, et ne cessent de publier leur douceur et leur résignation remarquables. Leurs soupirs feraient honneur à une machine à vapeur ! Tout cela n'est pas le fruit de l'Esprit ; la longanimité qu'il donne est joyeuse, elle chante. Moffatt traduit ainsi ce passage. « En sorte que vous soyez toujours joyeusement patients ».

Un produit des hivers de Dieu

Lorsque, dernièrement, je quittai ma maison en Angleterre, c'était au milieu de l'hiver. Beaucoup d'arbres étaient dénudés et le givre couvrait le sol. Je fis le tour des parterres que j'avais plantés, et songeai aux couleurs gaies des fleurs qui les avaient remplis l'été précédent : tout était disparu. Nous avons seulement pu préparer dans la serre des couches pour une culture entièrement nouvelle de plantes annuelles délicates.

Cependant, au dehors, les racines des grands vieux arbres, solides et robustes, toujours pleins de vie, pénétraient profondément dans la chaleur du sol ; et des touffes de plantes vivaces sortaient déjà de terre, pour voir si le printemps approchait.

La longanimité possède les caractéristiques de ces vieux arbres précisément parce qu'elle est le produit des hivers, comme des étés de Dieu. Elle a la force des choses qui viennent à maturité par l'épreuve. De toute évidence ce fruit de l'Esprit ne peut croître en nous sans que nous soyons éprouvés. Car, qui peut « souffrir » sans avoir connu l'épreuve ? Et qui peut « souffrir longtemps » sans épreuve prolongée ? Sûrement le dessein de Dieu dans les tribulations de Ses enfants est de produire et de perfectionner en nous, de la seule manière possible, ce fruit de l'Esprit.

Le malheur peut avoir deux effets distincts. Il peut remplir d'amertume ou de tendresse. Les patriarches Job et Joseph sont, dans la Bible, les deux grands exemples de tribulation produisant la patience et c'est une des plus grandes beautés de l'histoire que Joseph, après dix années de prison par une injustice grossière. apparaisse aussi libre d'amertume, aussi radieux qu'une matinée de printemps, toujours animé d'une foi lumineuse, et d'un amour triomphant.

La marque d'un serviteur approuvé.

La longanimité véritable est qualité plutôt rare. Nous trouvons souvent le défaut opposé, fort peu attrayant : la vivacité et la mauvaise humeur. Et, murmurons-le tout doucement, les prédicateurs même ne manifestent pas toujours autant de longanimité qu'on pourrait en attendre.

La Bible elle-même donne quelques exemples. Il y a Jonas. Il put amener une grande ville à la repentance par sa prédication, mais se montra coléreux comme tout au sujet du ricin. (Jonas 4.9). Et, pouvons-nous le dire ? il n'était pas le dernier prédicateur enflammé de la justice, qui pouvait avoir l'humeur excessivement difficile quand sa prédication était terminée, si tout n'allait pas comme il l'entendait. De tels hommes peuvent avoir du succès comme prophètes et évangélistes ; ils ne font que de piètres pasteurs.

Même les douze apôtres nous donnent un exemple d'impatience par leur attitude à l'égard des mères qui amenaient leurs petits enfants à Jésus, et la manière dont ils les congédièrent brièvement. Certains types de spiritualité semblent toujours d'une impatience étrange avec les enfants. Mais le Seigneur Jésus n'était pas ainsi.

Nul ne peut se permettre de négliger ce fruit de l'Esprit s'il veut devenir un ministre approuvé de Dieu. L'Ecriture le compte expressément parmi les caractères distinctifs d'un tel homme. (2 Cor. 6.4-6). Il doit prendre soin de le manifester dans sa prédication, et « reprendre, censurer, exhorter avec toute douceur et en instruisant ». (2 Tim. 4.2.) Qu'il est facile de laisser une note d'impatience et d'irritation se glisser dans un sermon ! Les gens paraissent parfois si lents à comprendre et à montrer quelque approbation. Seul l'Esprit de Christ peut nous donner la grâce de répéter à plusieurs reprises les mêmes vérités, dans le langage le plus simple possible, jusqu'à ce que les auditeurs semblent vraiment commencer à comprendre. Le prédicateur peut en être persuadé : qu'ils saisissent ou non la doctrine, ils sentiront bien sa disposition d'esprit, et rien ne fermera plus effectivement leurs cœurs que de ressentir son impatience envers eux.

Je me souviens d'une convention, en Angleterre, pendant laquelle un prédicateur fit, de l'estrade même, des reproches à l'assemblée pour son inattention. Il parlait du Calvaire à une réunion de croyants. Pauvre prédicateur ! nous n'avons plus beaucoup entendu parler de lui et cela n'est pas étonnant. Il lui fallait chercher en lui-même la raison de son échec. Il ne possédait qu'une connaissance intellectuelle, et s'impatientait que nous ne nous laissions pas éblouir quand nos cœurs n'étaient pas touchés.

Nos vies prêchent des sermons plus efficaces que ne le font nos paroles. Un prédicateur doit manifester de la longanimité dans sa conduite s'il veut gagner les âmes. (2 Tim. 3.10). J'ai été parfois émerveillé de voir comment certains des pasteurs les plus actifs que je connaisse, — des hommes auxquels sont confiés de grandes et vivantes assemblées — semblent avoir du temps à perdre, une patience illimitée, pour rendre visite à toutes sortes de personnes déraisonnables, sans importance apparente, et pour causer avec elles. Mais n'est-ce pas là, après tout, la raison secrète de leur succès ? Je pense que oui.

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