Le fruit de l'Esprit

7. LA BONTÉ

La bonté est tombée de nos jours dans un genre de discrédit ; non pas, à vrai dire, la qualité elle- même, mais le mot qui la désigne. Nous appelons parfois certaines gens des « saintes-nitouches » [1], et nous entendons par là un type de personnes d'une dévotion affectée souvent entachée d'hypocrisie. [1] En anglais « Goody-good », littéralement des bonnes « bonnes-femmes »

Dans le langage moderne, le mot qui semble le mieux qualifier cette bonté robuste et vraie, fruit de l'Esprit, est le mot « solide ». Ainsi, nous disons souvent que certaines marchandises sont des marchandises « solides » ; qu'un cordonnier fait un « travail solide » pour la réparation de nos chaussures, et de certaines personnes, pour employer une locution expressive, qu'elles sont des « gens solides ».

Une telle expression ne suppose pas, généralement, une habileté spéciale, au contraire. Par « gens solides » nous voulons communiquer l'idée du caractère plutôt que de dons particuliers. Nous entendons par là qu'ils ont une personnalité bien équilibrée, un caractère tout à fait honnête ; nous pouvons compter sur eux, et ils forment dans les chemins de la vie une société excellente. Voilà la bonté véritable. Et combien belle aussi !

La bonté passive.

La bonté semble avoir deux aspects. Nous pourrions les appeler bonté active et bonté passive, quoique l'expression « passive » ne puisse être employée ici que dans un sens très restreint, car la bonté exerce toujours une influence très active.

Notre Seigneur Lui-même décrivit la bonté passive lorsqu'Il compara Ses disciples au « sel de la terre ». (Matt. 5.30). L'idée mise en évidence est l'effet préservatif invisible qu'exerce le sel sur toutes les choses avec lesquelles il vient en contact. La société est corrompue par le péché : seule, l'existence, presque inaperçue parfois, de l'Eglise de Dieu dans le monde, empêche la démoralisation complète. Abraham intercédant pour Sodome, et la promesse divine de ne pas détruire la ville s'il s'y trouvait seulement dix justes, vient à l'esprit comme une illustration de ce principe. (Genèse 18).

Il n'est pas difficile de voir l'influence tranquille mais puissante d'un homme, d'une femme vraiment bons sur leur entourage. Nous avons tous remarqué comment l'arrivée d'une telle personne dans un groupe de gens du monde mettra sensiblement frein à l'impureté et à la mondanité de la conversation. De même, le ton moral d'une maison de commerce ou d'une maison privée sera relevé par l'humble bonté d'un de ses membres influents.

Une telle puissance discrète exige toutefois une bonté qui soit partie intégrante du caractère . Une contrefaçon tout extérieure, revêtue pour des motifs de gain égoïste ou de commodité personnelle, est généralement vite jugée. La bonté véritable est chose que l'on ressent, — l'hypocrisie aussi.

Elle peut se corrompre rapidement, et son influence n'aura pas une portée bien grande sur la base d'une réputation déjà acquise. Les hommes oublient une erreur passagère dans l'exercice d'un don bien plus facilement qu'un défaut de caractère. Notre Seigneur exprima très ouvertement cette vérité : « Le sel est une bonne chose : mais si le sel perd sa saveur, avec quoi l'assaisonnera-t-on ? Il n'est bon ni pour la terre ni pour le fumier ; on le jette dehors ». (Luc 14.34-35).

Demeurer bon, au sens véritable du mut, implique une marche étroite avec l'Esprit de Dieu. C'est une bénédiction de savoir que là où cette marche est maintenue par la grâce divine, le fruit de l'Esprit sera la récompense certaine. La communion avec ce qui est « vertueux et digne de louange » fera germer en nous cette qualité divine, aussi sûrement que le soleil apporte de la couleur à la pèche et à la pomme de la douceur.

La bonté active.

La bonté n'est pas seulement passive, comme « qualité » du caractère. Elle se manifeste sous forme de bonnes œuvres.

« L'homme bon tire de bonnes choses de son bon trésor ». (Matt. 12.35).

Cette déclaration, du plus grand de tous les Maîtres, est claire comme le cristal dans les trois aspects de la vérité qu'elle nous présente : d'abord, l'homme vraiment bon ; deuxièmement le « trésor » qu'un tel homme doit certainement amasser dans son cœur ; troisièmement, la révélation de ce « trésor » devant le monde. J'ai eu le privilège de connaître intimement un tel chrétien, en Ecosse ; il était délicieux de découvrir, le soir, par l'art de la conversation, les « choses excellentes » que renfermait son cœur. La pauvreté de la conversation est souvent l'indice d'une bonté bien faible.

Ne nous faisons aucune illusion au sujet des bonnes œuvres. Une expérience présumée de l'Esprit de Dieu, ou la foi qui ne produisent pas d'œuvres bonnes, sont pure vanité. « Afin qu'ils voient vos bonnes œuvres, et glorifient votre Père qui est dans les cieux ». « Pour marcher d'une manière digne du Seigneur, portant des fruits en toutes sortes de bonnes œuvres ». « Afin que ceux qui ont cru en Dieu s'appliquent à pratiquer de bonnes œuvres ». (Matt. 5.16 ; Col. 1.10 ; Tit. 3.8).

Voici un fruit de l'Esprit vu et apprécié de tous les hommes, une preuve convaincante, même pour le non-croyant, de la réalité de l'œuvre accomplie par Christ pour nos âmes. « Afin que.... ils remarquent vos bonnes œuvres, et glorifient Dieu au jour où Il les visitera ». (1 Pierre 2.12). Il n'est pas nécessaire d'amonceler référence sur référence.

Un fait mérite cependant d'être relevé : ceux qui se vantent d'une spiritualité profonde courent parfois le plus grand danger de négliger les aspects pratiques de la religion véritable. Lorsque j'étais dans la grande assemblée de Pentecôte à Stockholm, rien ne m'a fait davantage plaisir que de voir « l'Arche » amarrée par les chrétiens dans la rivière tout proche, où, nuit après nuit, pendant l'hiver, ils hébergent gratuitement et confortablement des centaines de pauvres, et fournissent des repas à des centaines d'autres. Une telle « Pentecôte pratique » eût certainement réjoui le coeur de l'apôtre, qui ne craignait pas de dire aux maîtres capables de « s'exhorter et de s'instruire les uns les autres », d'accorder à leurs serviteurs ce qui est « juste et équitable »,ou aux femmes qui pouvaient « chanter par des psaumes, par des hymnes, par des cantiques spirituels », d'être des modèles dans la maison et dans la vie de famille. (Col. 3.16 ; 4.1). Tel est le fruit de l'Esprit, la bonté. Le corollaire de la plénitude de l'Esprit est d'être « pleins de bonnes dispositions » (de bonté) (Romains 15.14).

Le Trône de la Justice.

Nous n'avons pas jusqu'ici mentionné un aspect de cette qualité plus profond encore. La bonté absolue n'est autre que la perfection morale.

Une des déclarations les plus grandioses de la Bible est dans Nahum 1.7. « L'Eternel est bon. Il est un refuge au jour de la détresse ». C'est parce qu'il est bon qu'il peut être un refuge. Le gouvernement moral de l'univers est établi sur un trône de justice. Seule la foi dans cette vérité certaine peut maintenir l'âme ferme dans les tempêtes de la vie. Sans une telle foi pour base tout serait chaos. Ne soyons pas étonnés d'être toujours exhortés à « louer l'Eternel pour Sa bonté ». (Psaume 107). Les hommes peuvent ressembler à Dieu en marchant avec lui, par l'Esprit de Son Fils qui demeure en eux ; — voilà l'Evangile, l'enseignement caché dans le fruit spirituel.

La vérité capitale pour tous ceux qui ont connu la plénitude du Saint-Esprit accompagnée de manifestations évidentes de Sa puissance c'est que le fruit de l'Esprit dort devenir inséparable de cette puissance au fur et à mesure qu'ils avancent dans la vie chrétienne. Sinon, au lieu de recevoir la couronne impérissable, ils finiront par une banqueroute spirituelle. « Quand j'aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance ; quand j'aurais même toute la foi jusqu'à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien. » (1Cor. 13.2-3).

La bonté peut être la récompense, la consolation de ceux qui, jamais peut-être, ne se feront remarquer par des dons brillants. Dorcas n'était nullement prophétesse comme Débora, ou même les filles de Philippe, mais elle fit « beaucoup de bonnes œuvres et d'aumônes », et l'Ecriture nous le rapporte pour l'inspiration des femmes chrétiennes de tous les temps. (Actes 9.36). Chez Barnabas ce fruit de l'Esprit se manifestait d'une manière si évidente qu'il est dit de lui : « C'était un homme de bien[1], plein d'Esprit-Saint et de foi ». (Actes 11.24).

[1] En anglais : « un homme bon »

Puisse Dieu donner encore à Son Eglise de nombreux pasteurs semblables à celui qui fut une bénédiction pour l'assemblée privilégiée d'Antioche.

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