Démonstration évangélique

LIVRE IV

CHAPITRE XVI

DU PSAUME II

Le Christ est fréquemment désigné nommément comme l’objet des persécutions des rois et des princes, des nations et des peuples. Il est engendré de Dieu et appelé Fils de l’homme ; il reçoit de son Père les nations et toute la terre en héritage.

« Pourquoi les nations ont-elles frémi ? pourquoi les peuples ont-ils médité de vains complots ? les rois de la terre se sont levés, et les princes se sont ligués contre le Seigneur et contre son Christ. » Il ajoute : « Mais moi, j’ai été établi roi par lui, sur Sion, sa montagne sainte, et je publie le décret du Seigneur. Le Seigneur m’a dit : Vous êtes mon fils ; je vous ai engendré aujourd’hui. Demandez-moi, et je vous donnerai les nations pour héritage et la terre pour empire. »

L’esprit de Dieu désigne ici fort clairement le Christ qu’il appelle le Fils de Dieu, comme le font les passages déjà cités ; il annonce en même temps les complots que l’on tramera contre lui, et l’appel qu’il doit faire aux nations, prédiction que l’événement a confirmée dans notre Sauveur Jésus-Christ. Aujourd’hui encore les nations et les peuples, les rois et les princes ne cessent de tramer contre le Seigneur et contre sa doctrine. Et si les Juifs rapportent l’accomplissement de cet oracle à un autre temps, il faut donc qu’ils reconnaissent que le christ qu’ils attendent souffrira de nouveau, selon ces paroles : « Les rois de la terre se sont levés et les princes se sont ligués contre le Seigneur et contre son Christ. » Ce qu’ils n’admettront jamais, puisqu’ils espèrent que le christ à venir sera un grand prince, un roi éternel et le libérateur de leur nation. Car si celui-ci doit subir les mêmes épreuves, pourquoi croire ou rejeter l’un plutôt que l’autre. Exclus de cette allégation, s’ils rapportent l’oracle sacré à David ou a quelqu’un des rois juifs qui sont descendus de lui, il faudra démontrer que ni David, ni tout autre des Hébreux qui se sont jamais illustrés ne fut annoncé comme Fils de Dieu, ni comme engendré de Dieu, ainsi que celui que le psaume annonce, ni enfin comme exposé aux complots des nations et des rois, des princes des peuples. Si l’on ne cite aucun d’eux et s’il est établi par l’événement qu’autrefois le Christ de Dieu eut à essuyer les complots des rois et des princes, des nations et des peuples, et qu’il y est en butte aujourd’hui encore, pourquoi n’est-il pas celui que le prophète annonce quand il dit : « Les rois de la terre se sont levés et les princes se sont ligués contre le Seigneur et contre son Christ. » A lui seul encore se peuvent appliquer ces paroles du même psaume : « Le Seigneur m’a dit : Vous êtes mon fils, je vous ai engendré aujourd’hui ; demandez-moi et je vous donnerai les nations pour héritage et la terre pour empire, » Or la prophétie s’est accomplie en lui seul incontestablement, lorsque la vois de ses disciples s’est étendue dans toute la terre et que leurs paroles ont retenti jusqu’aux extrémités du monde. Le psaume nomme évidemment le Christ, quand il apprend qu’il est fils de Dieu, en parlant en son nom de la sorte : « Le Seigneur m’a dit : Vous êtes mon Fils ; je vous ai engendré aujourd’hui. » Comparez ce qui est dit en son nom encore dans les Proverbes ; « Avant que les montagnes ne fussent affermies et que les collines ne s’élevassent, il m’a engendré (Prov., VII, 25) ainsi que ce passage du psaume CIX où le Père lui dit : « Je vous ai engendré avant l’aurore. » Or, remarquez que les saintes lettres annoncent comme le seul et le même Christ et Fils de Dieu tout ensemble, celui qui sera circonvenu des hommes, qui recevra les nations en héritage et possédera les extrémités de la terre, montrant ses rapports avec les hommes par deux signes : par les complots formés contre lui et par la soumission des nations à sa puissance.

DU PSAUME XIX

Le Christ désigné nommément obtient de ion Père ce qu’il demande.

« Que le Seigneur accomplisse vos vœux maintenant j’ai su que le Seigneur a sauvé son Christ ; il l’exaucera du haut du ciel. » Puisque nous nous proposons d’exposer ici combien souvent le Christ est désigné par son nom dans les prophéties, juste titre que nous citons ces paroles qui l’annoncent clairement. Du reste, tout le psaume adresse en la personne des saints des prières au Christ. Car, puisqu’après s’être fait homme il a supporté mille outrages à cause de nous et pour nous, nous apprenons à prier avec celui qui a prié et conjuré pour nous le Père, comme avec celui qui repousse les guerres visibles ou invisibles qui nous sont intentées. Aussi empruntons-nous les paroles de ce psaume pour lui dire : Que le Seigneur vous exauce au jour de la tribulation, que le nom du Seigneur de Jacob vous protège, qu’il vous envoie son secours de son sanctuaire et que de Sion il veille sur vous. Ensuite, comme il lui appartient en qualité de pontife suprême d’offrir pour nous les sacrifices spirituels de glorification et de prédication de l’essence divine, et comme, ainsi qu’un sacrificateur, il s’est offert en holocauste à Dieu le Père, lui et l’homme qu’il s’est uni sur la terre, nous lui disons encore : « Qu’il se souvienne de vos sacrifices et que votre holocauste lui soit agréable, parce que tout ce qu’il prépare est salutaire et utile au monde, » non ajoutons « Que le Seigneur vous donne selon votre cœur et qu’il remplisse tous vos désirs » Puis nous confessons sa résurrection d’entre les morts et nous disons : « Nous nous réjouirons de votre salut. » Quel est le salut du Christ sinon sa résurrection qui a relevé les hommes de leur abaissement ; aussi disons-nous encore : « Nous serons glorifiés par le nom de notre Dieu, et que le Seigneur accomplisse votre vœux. Enfin nous apprenons à dire maintenant j’ai su que le Seigneur a sauvé son fils » ; car nous n’avons reconnu cette vérité que lorsque nous avons reconnu son salut et compris la vertu de sa résurrection.

DU PSAUME XXVII

Le christ est désigné par son nom ; il a le Seigneur pour père et pour protecteur. Le seigneur est le soutien de son peuple et le protecteur ceux que son Christ a sauvés.

Ce psaume se rapporte au Christ, il contient la prière que le Christ adressa à son Père au temps de sa passion. C’est pourquoi il est dit au commencement : « J’ai crié vers vous, Seigneur, mon Dieu, ne vous taisez pas, car je deviendrai semblable à ceux qui descendent dans le sépulcre. » A la fin le Psalmiste prédit la résurrection d’entre les morts : « Béni soit le Seigneur parce qu’il a écouté la voix de ma prière. Le Seigneur est ma défense et mon bouclier ; mon cœur a espéré en lui et j’ai été secouru, et ma chair a reverdi et je le louerai en ma volonté. » l’Esprit divin et prophétique ajoute : « Le Seigneur est la force de son peuple et sa protection est le salut de son Christ. » Ainsi nous apprend-il que tout ce que racontent les divines Ecritures des merveilles du Christ opérées pour le salut des hommes, de son enseignement, de ses œuvres, ou des mystères de la résurrection dont il s’agit ici, s’est consommé par la volonté et la puissance du Père, protecteur fidèle de son Christ, dans les merveilles et les bienfaits de sa prédication et de ses œuvres.

DU PSAUME LXXXIII

>Le Christ, désigné par son nom, a Dieu pour protecteur ; un jour, celui de la résurrection, et une maison de Dieu, qui est l’Eglise.

« О Dieu, notre protecteur, jetez les yeux sur nous et regardez la face de votre Christ, parce qu’un jour passé dans votre demeure vaut mieux que mille jours. J’ai préféré être abaissé dans la maison du Seigneur, plutôt que d’habiter dans les tentes des pécheurs. » Ceux qui savent que le Christ de Dieu est le Verbe, la sagesse, la lumière véritable et la vie, et qui connaissent son incarnation, frappés d’étonnement pour un dessein si extraordinaire, s’écrient : « Et nous l’avons vu ; il était sans forme ni beauté, et son extérieur était méprisable et au-dessous de celui des fils des hommes. Homme de douleur et familiarisé avec la misère, il a été méprisé, parce qu’il a détourné le visage. » (Isaïe, LIII. 2) Aussi conjurent-ils le Seigneur de regarder la face de son Christ, qui pour nous a été couverte de mépris et abreuvée d’outrages, et de se montrer favorable, parce qu’il a pris nos péchés sur lui et souffre pour nous. Ils le supplient ainsi comme embrasés du désir et demandant par leurs prières, de voir la face de la gloire du Christ et le jour de sa lumière. Ce jour est celui de sa résurrection d’entre les morts, jour seul et unique, jour véritablement grand, jour du Seigneur. Ils le disent préférable à ces innombrables jours ordinaires, ou même à ceux que Moïse a consacrés par les fêtes, les cérémonies et le sabbat, qui, au dire du grand Apôtre, ne sont que l’ombre du jour et non le jour lui-même. Seul jour de Dieu, le jour de notre Sauveur ne resplendit pas en tout lieu, mais seulement dans les parvis du Seigneur, c’est-à-dire dans les églises du Christ établies dans l’univers entier, les parvis du Dieu vivant. Celui qui a pénétré ces merveilles, aime et préfère leur avilissement et proclame que ce séjour en est bien meilleur que celui des tentes des pécheurs. Sous ce dernier caractère, il désigne la synagogue qui a rejeté le Christ, les réunions des impies d’une autre croyance, des nations incrédules. Et quiconque entrera dans l’Eglise du Christ, la trouvera bien préférable à ces assemblées.

DU PSAUME LXXXVIII

Le Christ désigné nommément doit souffrir le mépris et l’outrage ; son changement ; son peuple insulté par ses ennemis.

« Cependant, Seigneur, vous avez repoussé, méprisé et rejeté votre Christ ; vous avez détruit l’alliance de votre serviteur. Vous avez souillé son sanctuaire dans la poussière et le reste. » Il ajoute « Souvenez-vous, Seigneur, des opprobres de vos serviteurs que je porte en mon sein ; des insultes des nations dont vos ennemis couvrent, dont ils chargent la face de votre Christ » (v. 38).

Le Christ est ici désigné nommément, ainsi que son affliction au jour de la passion. En son temps nous développerons le sens du psaume entier, pour établir que les détails n’en conviennent qu’à notre Sauveur et Seigneur. Cependant le Christ deux fois nommé, quel est-il, sinon celui dont le changement, c’est-à-dire l’Eglise a été et est encore couverte des opprobres, des ennemis du Christ ? Car tout ennemi de la doctrine du Christ nous reproche les souffrances que notre Sauveur a endurées pour notre salut et surtout sa mort et sa croix.

DU PSAUME CXXXI

Le Christ désigné nommément sort de la race de David ; il est appelé la corne de David. Il confondra les Juifs ennemis et renouvellera la sanctification du Père.

« Le Seigneur a fait à David un serment véritable ; ce serment est irrévocable : Je placerai sur votre trône un fils qui naîtra de vous. Sur la fin il ajoute : « Là je signalerai la corne de David j’ai préparé le flambeau de mon Christ, je couvrirai ses ennemis de confusion, et ma sanctification resplendira sur lui. » Le Seigneur jure ici au sujet du rejeton de la race de David qu’il appelle la race ; et sa corne. Il indique le Christ et avertit qu’il lui a préparé un flambeau, les prophéties, ce semble, dont fut précédé le Christ qui seul s’est levé comme un soleil sur tous les habitants de la terre. David lui-même, préparé comme flambeau du Christ, n’eut que l’éclat du flambeau par rapport à ce soleil et à celle lumière parfaite, « Là, dit-il, je signalerai sa corne, en désignant ainsi le lieu d’où il annonce que. le Christ doit naître. Car David ayant demandé de contempler en esprit le lieu de la naissance du Christ, et ayant dit : « Je ne monterai pas sur le lit de mon repos ; je n’accorderai pas le sommeil à mes yeux, ni l’assoupissement à mes paupières, et le repos à ma tête, jusqu’à ce que j’aie trouvé la demeure du Seigneur et le tabernacle du Dieu de Jacob, » l’Esprit saint lui désigne Bethléem, et le psalmiste ajoute : « Voici que nous avons appris qu’il était en Ephrain, c’est-à-dire en Bethleem. Nous l’avons trouvé dans des campagnes couvertes de forêts. Nous entrerons en son tabernacle, nous adorerons le lieu où se sont arrêtés ses pieds. » Aussi après la manifestation de ces circonstances, il ajoute : « Là je signalerai la corne de David ; j’ai préparé un flambeau à mon Christ. » Peut-être encore dans un autre sens désigne-t-il l’humanité dont le Verbe est revêtu à Bethléem, puis qu’à travers ce corps, de même qu’à travers un vase de terre, la vertu divine qui y résidait a répandu comme par une lampe les splendeurs de la lumière divine et spirituelle sur tous les hommes.

D’AMOS

Le Christ dénommé nommément par son père ; il est reconnu de tous les peuples, et rejette les Juifs.

« Préparez-vous à invoquer le Dieu d’Israël car voici celui qui fait gronder le tonnerre et qui crée le vent, qui annonce son christ aux hommes, qui forme l’aurore et les ténèbres, et qui marche sur les hauteurs de la terre. Le Seigneur le Dieu tout puissant est son nom. Ecoutez la parole de Dieu, la lamentation que je prononce contre vous. La maison d’Israël est tombée : elle ne se relèvera plus. » La vierge est étendue sur sa propre terre ; nul ne pourra la rétablir. (Amos, IV, 13). Dieu qui, pour la septième fois, annonce le Christ par son nom, ici fait gronder le tonnerre et crée le vent ; et la prédication évangélique est appelée tonnerre, parce qu’elle se fait entendre à tous les hommes, comme sous le nom de vent est désigné le souffle que le Christ a répandu sur ses apôtres.

Cette prophétie a été manifestement accomplie à l’avènement du Christ, auquel le Seigneur devait former l’aurore et les ténèbres l’aurore pour ceux qui avaient connu la lumière de salut, et les ténèbres pour ceux des fils de la circoncision qui rejetaient le Christ.

La prophétie les menace des dernier malheurs, lorsqu’il leur annonce la désolation à laquelle ils furent livrés aussitôt après leur attentat contre notre Sauveur Jésus-Christ. Depuis cette époque funeste, et jusqu’à nos jours, la maison d’Israël est renversée, l’avertissement et une sentence ont été rendus de Dieu contre la maison de Jérusalem qui doit tomber, et contre les institutions de ce peuple ils ne se rétabliront pas, car ils n’ont personne pour leur porter secours, et nul, est-il écrit, ne pourra la rétablir. Comme ils n’ont pas reçu le Christ de Dieu qui leur avait été envoyé, il les a justement abandonné, et il s’est tourné vers les nations de la terre, après avoir manifeste, aux Juifs la cause de leur délaissement dans cette expression de sa douleur où il semble la justifier « Jérusalem, Jérusalem qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, souvent j’ai voulu réunir tes enfants comme la poule réunit ses petits sous ses ailes ; vous ne l’avez pas voulu ; voici que votre demeure va demeurer déserte. ».

D’HABACUC

C’est le Christ nommément que le Père délivrera et qui délivrera lui-même ses christs.

« Vous êtes sorti pour le salut de votre peuple, pour celui de vos christs. Vous avez frappé de mort la tête des impies » (Habacub, III, 13). Suivant Aquila, « vous êtes sorti pour le salut de votre peuple avec votre christ. » Comme Aquila met le nombre singulier au lieu du pluriel, en disant que le Dieu de l’univers a lancé son peuple, c’est avec justesse que nous avons cité ce passage qui confirme notre proposition avec évidence.

Suivant les septante, plusieurs justes seront appelés christs de lui et par lui, et c’est d’eux qu’il est dit « Ne touchez pas mes christs, et n’offensez pas nos prophètes. » Ils ont cru en lui, ils ont été honorés de l’onction sainte de la régénération du Christ et peuvent dire comme le grand Apôtre. « Nous avons été rendus participants du Christ » (Hébr., III, 14)

DES LAMENTATIONS DE JÉRÉMIE

Le Christ nommément est circonvenu des Juifs et reçu des nations.

« L’Esprit de notre bouche, le Christ, le Seigneur a été enveloppé dans nos péchés nous avions dit de lui : Nous vivrons sous votre ombre, au milieu des nations. » Les admirables prophètes de Dieu à qui l’Esprit divin recélait l’avenir, annonçaient qu’ils vivraient encore et que leur parole conserverait une énergie pour agir parmi les nations et non pas en Israël. Ils disaient que le Christ désigné nommément comme celui qui leur communiquait l’esprit prophétique, serait enveloppé dans les péchés de ce peuple. Du quel ? évidemment du peuple de la circoncision qui le circonvint. Remarquez que la prédiction dit que le Christ sera enveloppé, ce qui peut s’accorder avec son second avènement annoncé par les prophéties comme glorieux et fort de la puissance divine. Ainsi donc ceux de la circoncision s’égarent en rapportant à son premier avènement ce qui est dit du second, sans que les prophéties le fassent entendre. Comment, en effet, serait-il en même temps glorieux et abject, comblé d’honneur, roi et sans forme ni beauté, et méprisable aux yeux des fils des hommes ; sauveur, libérateur d’Israël et circonvenu par lui, trainé au supplice comme une brebis et livré à la mort par les impies ? D’après nous, au contraire, les promesses qui se rapportent au Christ se divisent en deux parts avec une justesse que confirme l’examen ; ce qui indique les faiblesses et les souffrances de son humanité est reconnu, consommé en sa première manifestation, et les traits de gloire et de divinité sont attendus encore en son second avènement. Une preuve évidente que le premier avènement a eu lieu, c’est la connaissance de Dieu qui s’est répandue par son entremise chez toutes les nations, diffusion qu’annoncent les prophéties innombrables et diverses comme celles que nous avons citée « Sous son ombre nous vivrons au milieu des nations. »

DU PREMIER LIVRE DES ROIS

Le Christ désigné nommément est exalté par le Seigneur son père.

« Le Seigneur s’est élevé sur les cieux et il a fait gronder son tonnerre. Il jugera les sommets de la terre, il donnera la force à nos rois, et il relèvera la corne de son Christ » (I Rois, II, 10). Cette prophétie désigne le rétablissement au ciel du Christ nommément ou de Dieu ; l’Ecriture sainte annonce sa parole qui retentira dans le monde comme le tonnerre, et le jugement qu’il fera des hommes ensuite. Il est dit que le Seigneur donnera la force à nos rois ces rois seront les apôtres du Christ dont il est dit au psaume LXVII« Le Seigneur donnera sa parole aux évangélistes avec une grande puissance. » Ici encore est désigné par son nom le Christ, notre Sauveur, selon son humanité. L’oracle saint annonce que sa corne doit être relevée, en nous révélant son invisible puissance et sa royauté. L’Ecriture appelle en effet la royauté une corne. C’est en ce sens qu’il est dit au psaume LXXXVIII « Et sa corne sera élevée par la vertu de mon nom. »

DU PREMIER LIVRE DES ROIS

Le Christ nommément reçoit du Père une maison fidèle, son Eglise ; pontife fidèle il la préside toujours en esprit de vérité.

« Voici que les jours viennent où je détruirai votre postérité et celle de votre père, et il n’y aura pas de vieilles dans votre maison » (I Rois, II. 33). Après avoir adressé à Héli ces paroles et d’autres encore, la prophétie ajoute « et je me susciterai un prêtre fidèle qui agira selon mon cœur et selon mon âme ; et je lui établirai une maison fidèle, et il entrera toujours devant mon Christ. » Dieu menace de rejeter ceux qui ne suivent pas les rites sacrés il annonce pour leur succéder un prêtre d’une autre famille qui « entrera, dit-il, en présence de mon Christ » ou il marchera en présence de celui que j’ai choisi suivant le sens d’Aquila ; ou encore comme traduit Symmaque, séjournera en présence de mon Christ. Mais enfin quel sera-t-il ? celui sans doute qui s’acquittera avec piété du sacré ministère du Christ de Dieu à qui Dieu, ordonnateur et architecte sage, promet d’édifier la maison de l’Eglise, sans en désigner d’autre que l’Eglise érigée en toute la terre au Christ nommément, où quiconque est consacré par le Christ de Dieu présentera selon un ministère tout spécial les offrandes agréables et selon le cœur de Dieu ; car le sang des taureaux et des boucs répandu selon les anciens rites sera désormais en aversion à Dieu, selon la prophétie d’Isaïe.

Telles sont les diverses prophéties où le Christ est désigné sous ces noms. Cependant comme à ce nom est sans cesse attachée la prédiction des souffrances du Seigneur, il faut reprendre ce qui est exposé sur sa divinité dans le psaume XLIV dont le titre est : Au bien aimé ; où le prophète, après avoir annoncé dans le commencement le Christ comme roi, après quelques autres paroles ajouta sur la divinité du Christ « Votre trône, Dieu, est un trône éternel ; le sceptre d’équité est le sceptre de votre empire vous avez aimé l’équité et haï l’iniquité ; aussi Dieu, votre Dieu, vous a sacré d’une huile de joie au-dessus de tous ceux qui y participent avec vous. » Ainsi que nous l’avons déjà montré, celui qui chérit l’équité et qui hait l’iniquité est le même que celui qui, pour ce motif, a reçu d’un autre Dieu supérieur et son père, l’onction d’allégresse plus magnifique et plus glorieuse que celle qui en fut l’image. Or, honoré de Dieu et non des hommes d’une glorieuse faveur, quel nom méritera-t-il, sinon celui de Christ ? Donc il se nomme encore Dieu, comme il a été déjà établi en son lieu. Il faut encore rappeler ici ces paroles d’Isaïe « L’esprit du Seigneur repose sur moi ; aussi le Seigneur m’a envoyé évangéliser les pauvres, relever les courages abattus, annoncer aux captifs la liberté, et aux aveugles la lumière » (Is., LXV, 1) Déjà nous avons fait voir à leur occasion que les prêtres qui étaient élevés au milieu des hommes au sacerdoce divin étaient oints d’un parfum matériel mais le Christ de la prophétie est oint par la vertu divine ; tous ces traits se rapportaient à notre Sauveur, à Jésus, le seul vrai Christ de Dieu, qui, ayant pris un jour le livre de celle prophétie dans une synagogue, rencontra le passage déjà cité, et en annonça l’accomplissement. Il est écrit en effet, que lorsqu’il eut lu et roulé le livre, il le remit au ministre et s’assit. Les yeux de tous les assistante étaient fixés sur lui, et il commença à dire : « Aujourd’hui celle prophétie s’est accomplie à vos oreilles » (Luc, IV, 20). A ces autorités il faut ajouter celle de Moïse, qui, en élevant Aaron, son frère, à la souveraine sacrificature, d’après le modèle qui lui fut montré et l’ordre qu’il reçut « Vous ferez tout d’après le modèle qui vous a été montré sur la montagne, » manifesta qu’il avait vu des yeux de l’intelligence et par la lumière de l’esprit de Dieu, le grand pontife du monde, le vrai Christ de Dieu ; il le figura dans un culte corporel et emblématique, et l’honora du nom de vrai Christ. Le grand Apôtre lui-même confirme cette idée, lorsqu’il dit sur la loi de Moïse « Leur ministère n’a pour objet que ce qui était la figure et l’ombre des choses célestes » (Héb., VIII, 5) ; Ailleurs (Ib., X, 1), « la loi n’ayant que l’ombre des biens à venir. » Ailleurs encore (Colos., II, 16), « que personne ne vous condamne pour le boire et le manger, ou à cause des jours de fête, de néoménies ou de sabbat, toutes choses qui ne sont que l’ombre de l’avenir. » En effet, si les prescriptions de la loi sur l’usage des viandes, les jours de fête et de sabbat étaient l’ombre de la vérité, vous conviendrez aussi que le grand prêtre représentait un autre pontife, et qu’il s’appelait Christ pour figurer le seul et véritable christ. Ce christ figuratif est d’autant plus éloigné du véritable, que celui-ci a été honoré de ces paroles de la bouche de Dieu : « Asseyez-vous à la droite jusqu’à ce que j’aie réduit vos ennemis à vous servir de marchepied, et régnez sur vos ennemis, » et : « je vous ai engendré avant l’aurore, » et encore « le Seigneur l’а juré et il ne révoquera pas son serment vous êtes le prêtre éternel, suivant l’ordre de Melchisédech, vous êtes la progéniture et fils de Dieu, engendré avant l’aurore et avant toute créature, » Il est clairement désigné en ces passages comme pontife éternel. Cependant le christ de Moïse, chargé d’un rôle passager, ainsi que les héros de la scène, voit sa carrière s’achever comme celle des hommes, et rend ainsi témoignage au Christ unique et véritable. Le véritable Christ sans l’onction de Moïse, ni l’effusion d’un baume matériel et composé, a rempli néanmoins toute la terre de son nom et de sa vertu, lorsqu’il a formé au sein des nations la société de son nom appelée Christianisme ; or, jamais le christ de Moïse ne fut ainsi appelé des hommes, sinon dans les écrits de Moïse, ce qui est évident. Le nom de Jésus était déjà vénérable aux anciens amis de Dieu ; Moïse le premier, changea le nom de son successeur en celui de Jésus, car il est écrit : « Voici les noms de ceux que Moïse envoya pour examiner la terre promise. Moïse appela Jésus Mausès, fils de Navé, et il les envoya. » Remarquez, comment pénétré de la valeur des noms, après avoir approfondi ce qui concerne les hommes saints qu’il a nommés et les motifs qui lui ont suggéré leurs noms, le prophète introduit Abraham recevant de Dieu pour prix de sa vertu, le nom entier d’Abraham ce n’est pas le temps d’en expliquer la signification ; ainsi appela-t-il Saraï Sara. Celui qui fut appelé Ris à sa naissance, fut nommé Isaac, et Jacob fut honoré du surnom d’Israël en récompense de sa lutte. Moïse comprit par une sagesse et une science toute divine plusieurs vérités surnaturelles de la force et de la nature des noms, et quoique nul de ceux qui avaient vécu avant lui n’eût porté le nom de Jésus, le premier, sous l’impression de l’esprit de Dieu, il changea le nom de celui qui devait être son successeur dans la conduite du peuple pour l’appeler Jésus, convaincu que le nom qu’il avait reçu de ses parents à sa naissance ne lui convenait plus : ses parents l’avaient appelé Nausès. Ce n’est que longtemps après la sortie d’Egypte, lorsqu’il fut purifié par des aspersions et l’effusion du sang des victimes que celui-ci reçut l’onction sainte de la main de Moïse. Mais le Christ figure et véritable au commencement et dès les profondeurs les plus reculées de l’éternité, qui existait sans imperfection tout en tout, toujours semblable à lui-même et ne changeant jamais, fut toujours Christ, et avant de venir parmi les hommes, et après son avènement, non pas consacré de la main d’un homme ou par l’effusion d’une liqueur matérielle qui fut entre leurs mains, mais sanctifié par l’éternelle divinité du Dieu suprême. Le ministère de son nom est développé,… à ce que nous avons dit, et est exprimé chez le très-sage Saumon, au Cantique des cantiques « Votre nom est un parfum répandu » (Cant., I, 2), animé de l’esprit céleste et honoré de la vision des mystères du Christ et de son Eglise ; après avoir parlé de l’âme comme de l’épouse, et de l’autre comme de l’époux, il cherche le nom de l’époux et s’écrie comme il lui adressait la parole : « Votre nom d’époux céleste est un parfum et non seulement un parfum, mais d’un parfum répandu ; or quel nom signifie parfum répandu, sinon celui de Christ ? car il ne pourrait ni être Christ, ni en porter le nom sans que le parfum fût répandu. Nous avons expliqué quel est ce parfum dont le Christ a reçu l’effusion. Après cette longue explication du nom de Christ, examinons celui de Jésus ; mais le prophète de Dieu changea son nom de naissance et sous l’influence de l’Esprit saint, il appelle ce grand homme Jésus ; il était convaincu que le fils de Nausès ne devait pas diriger autrement le peuple après sa mort, et que puisque les lois qu’il avait données lui-même, devaient un jour être changées et détruites, et périr comme Moïse lui-même en quelque manière, nul autre que Jésus, le Christ de Dieu, ne pouгrait donner une législation supérieure à la première. Ainsi donc Moïse, le plus admirable des prophètes, ayant puisé dans l’esprit de Dieu la connaissance de ces deux noms de notre Sauveur Jésus-Christ en décora comme d’un royal diadème ceux qu’il discerna des chefs, les conducteurs du peuple, le grand prêtre de Dieu, et son propre successeur ; il sut leur distribuer ces deux noms avec intelligence. A Aaron il donna celui de Christ et à Nausès qui devait lui succéder, celui de Jésus. Ainsi les écrits de Moïse furent parés de deux noms de notre Sauveur Jésus-Christ.

DE L’EXODE

Jésus, le successeur de Moïse, l’ange et le futur conducteur du peuple apporte le nom du Christ qui inspire les prophètes.

« Voici que j’envoie mon ange devant vous, afin qu’il vous garde dans le chemin et qu’il vous fasse entrer en la terre que je vous ai préparée. Respectez-le, écoutez sa voie, ne vous élevez pas contre lui, car il ne vous pardonnera point ; car c’est mon nom qu’il porte. « Mon nom, dit le Seigneur, le nom du celui qui vous prédit ces événements est celui qui doit vous introduire dans la terre promise. » Si ce fut Jésus seulement, il est évident que Dieu dit qu’il portera son nom. Il ne faut donc plus être surpris s’il l’appelle ange, puisqu’il donne le même, nom à Jean, tout homme qu’il était : « Voici que j’envoie mon ange devant vous, il vous préparera les voies » (Matth., II, 10).

DE ZACHARIE

Jésus, le grand prêtre, fils de Josédech, est le symbole et l’image de notre Sauveur qui ramène à Dieu les âmes des hommes dont la captivité s’était appesantie (Zach., III, 1).

« Et le Seigneur me montra Jésus, le grand prêtre, debout devant l’ange du Seigneur, et Satan était à sa droite pour s’opposer à lui, et le Seigneur dit à Satan : « Le Seigneur te réprimera, Satan ; il te réprimera, le Seigneur qui a choisi Jérusalem. » Celui-ci n’est-il pas un tison arraché au feu ? Jésus était couvert de vêtements souillés,. » et il se tenait devant la face de l’ange du Seigneur, et l’ange dit à ceux qui se tenaient devant lui : « Otez-lui ses vêtements souillés, » et il lui dit : « Voilà que j’ai ôté de vous l’iniquité. Revêtez-le d’un noble vêtement ; posez sur sa tête une tiare pure, et ils le revêtirent de vêtements précieux. » Le prophète ajoute : « Ecoutez, ô Jésus, souverain pontife, vous et tous ceux qui sont auprès de vous, parce que tous, vous serez témoins de grands prodiges, voici que j’amène de l’Orient mon serviteur » (Zach., VI, 10). Un peu plus bas il ajoute à ces paroles : « Le Seigneur me parla en disant : « Prenez ce qui est de la transmigration de ses princes et de ses prophètes et de ceux qui l’ont connue ; vous viendrez en ce jour dans la maison de Sophonie qui arrive de Babylone ; vous prendrez l’or et l’argent, et vous ferez des couronnes, et vous les poserez sur la tête de Jésus, fils de Josédech, le grand prêtre, et vous lui direz : Voici ce que dit le Seigneur tout-puissant : Voilà l’homme, l’Orient est son nom. Il gouvernera en cette terre ; il élèvera la maison du Seigneur, et il prendra la force ; il se reposera et il dominera sur son trône, et le prêtre sera à sa droite, et il y aura entre eux un conseil de paix. » Or, le prophète grand prêtre, qui porte le nom de Jésus, me semble une image claire et un symbole fidèle de notre Sauveur Jésus-Christ, honoré qu’il est de son titre et chargé de ramener le peuple de la captivité de Babylone. Ainsi, Jésus-Christ notre Sauveur fut envoyé, suivant Isaïe, pour annoncer aux captifs leur délivrance, rendre la vue aux aveugles, consoler les affligés, et rendre à ceux qui pleurent Sion l’onction d’allégresse. Ces deux illustres grands prêtres, le christ de Moïse et Jésus, le fils de Josédech, offrent l’image de notre Sauveur et Seigneur Jésus-Christ. Aaron le christ de Moïse, qui délivra le peuple de la servitude et fut son guide à la liberté et dans les préparatifs de la sortie de l’Égypte, est un symbole fidèle du véritable Seigneur qui nous a délivrés, nous Gentils, des superstitions d’Egypte. Jésus, le grand prêtre, dont parle le prophète, guide des Juifs qui reviennent de la captivité, est l’image de Jésus notre Sauveur (Héb., IV, 14), notre grand-prêtre, qui a pénétré les cieux et qui nous délivre de la confusion et de la captivité de cette vie pour nous faire tendre à la cité céleste, la vraie Jérusalem. Pour plus de vérité, ce Jésus, image du vrai Jésus, portait des vêtements doublés, et l’ange de ténèbres se tenait à sa droite et lui résistait ; car notre véritable Sauveur et Seigneur Jésus, qui est descendu du ciel pour notre délivrance s’est revêtu de nos iniquités ; il a purifié l’homme de ses souillures, et a souffert les tourments de la passion par amour pour nous. Aussi Isaïe dit-il (Isaïe, LIII, 4), « Il porte nos iniquités, et il s’est chargé de nos douleurs, et nous avons cru qu’il était dans le travail, la souffrance et l’affliction. Il a été blessé à cause de nos péchés, et il a été brisé à cause de nos crimes. » Jean-Baptiste encore, en voyant le Seigneur, dit (Jean, I, 29) : « Voici agneau de Dieu qui efface les péchés du monde. » Paul aussi s’exprime d’une manière semblable, et dit (II Cor., V, 21) « A cause de nous, Dieu a traité celui qui ne connaissait pas le péché comme s’il eût été le péché même, afin qu’en lui nous devinssions justes de la justice de Dieu. » Et (Gal., III, 13) : « Le Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, s’étant rendu lui-même malédiction pour nous. » Quand la prophétie annonce ces événements, elle les indique en disant : « Jésus était couvert de vêtements souillés. » Cependant il dépouilla ces tristes vêtements, et retourna au ciel lorsqu’il abandonna le lieu de notre captivité, et alors il reçut le diadème de la divinité du Père, il revêtit le glorieux vêtement de la lumière du Père, et prit la tiare divine et les autres ornements du pontife.

Il n’est pas difficile d’expliquer ce qui concerne le démon. Opposé aujourd’hui encore à la doctrine de Jésus, et à l’Eglise que notre maître a établie dans l’univers, cet esprit résiste à notre Sauveur, comme il l’а déjà fait dès le moment où ce charitable maître descendit pour nous délivrer de sa tyrannie. Le démon l’a assailli une première fois en sa vie, et une seconde par les pièges qu’il lui tendit en la passion. Mais après avoir dissipé ces frivoles attaques du démon et de ces invisibles phalanges qu’animaient la haine et l’inimitié, Jésus nous a fait passer de leur servitude à son service, et il nous a réunis comme des pierres vivantes pour élever la maison de Dieu et la société de la religion, de sorte que l’oracle céleste trouve son accomplissement en lui : « Voilà l’homme, l’Orient est son nom ; il germera en celle terre, il élèvera la maison du Seigneur, et il prendra la puissance ; il se reposera et il dominera sur son trône. » Remarquez bien comment en parlant dans ses révélations de l’ancien Jésus, l’image du véritable, le prophète dit : « Voilà l’homme, l’Orient est son nom. » Plus bas il dit comme d’un autre Orient à ce Jésus qui était présent : « Ecoutez, о grand prêtre Jésus, vous et ceux qui sont auprès de vous, parce que tous sont prophétiques : Voici que j’amène de l’Orient, mon serviteur. » Si donc la parole sainte concernait un autre envoyé de Dieu qui doit venir, et qui serait l’Orient, avec plus de vérité le fils de Josédech en fut donc l’image, puisqu’il fut appelé dans un sens mystérieux et Jésus et Orient ; car c’est à lui que s’adressent ces mots : « Voici un homme, l’Orient est son nom. » Comme symbole, le pontife mérita le nom de Sauveur, de même que celui d’Orient. En effet, le nom de Jésus traduit en grec signifie salut de Dieu, car l’Isua des Hébreux signifie salut, et le fils de Navé fut nommé par ce peuple Josué ; or, Josué signifie salut de Juo, c’est-à-dire salut de Dieu. Toutes les fois donc que nos exemplaires grecs portent salut de Dieu, il faut se tenir assuré que l’hébreu ne met point d’autre mot que celui de Jésus.

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