Démonstration évangélique

LIVRE IX

CHAPITRE XI

DE JOB

La marche du Christ sur la mer.

« Il commande au soleil, et le soleil ne se lève pas ; il enferme les astres comme sous un sceau. Seul il a étendu les cieux, et il marche sur les flots comme sur la terre (Job, IX, 7). » Or, ces traits ne peuvent se rapporter qu’à notre Sauveur et Seigneur comme Verbe de Dieu, ordonnateur de toutes choses. Seul donc de tous les hommes aux jours de son union avec la nature humaine, après avoir pris le corps et la forme de l’homme, il marcha sur la mer, alors qu’il contraignit ses disciples à monter sur une barque et à s’éloigner en le précédent, jusqu’à ce qu’il eût congédié la foule. Après l’avoir congédiée, il gravit une montagne afin de prier à l’écart. Or, sur le soir, il était seul en ce lieu. Déjà la barque était au milieu de la mer ; les disciples, le voyant sur la mer, se troublèrent, disant que c’était un fantôme, et dans leur frayeur ils jetèrent des cris. Mais aussitôt Jésus leur dit : « Prenez courage ; c’est moi, ne craignez pas » (Matth., XIV, 22). Autrement, cette prophétie offrirait-elle une idée digne de Dieu, si on la rapporta au Dieu suprême et au Père de toutes choses ? Est-il, en effet, majestueux et digne du Dieu du monde de dire qu’il marchait sur la mer ? Comment, en effet, comprendre cette marche sur la mer de celui qui enferme tout, et qui remplit le ciel et la terre, et qui dit : « Le ciel est mon trône, et la terre est l’escabeau de mes pieds » (Is., LXVI, 1) et « je remplis le ciel et la terre, dit le Seigneur » (Jérémie, XXIII, 24). Mais notre Sauveur et Seigneur « s’étant anéanti lui-même en prenant la nature d’esclave, et devenu tel que les autres hommes (Philip., II, 7), » pour offrir aux yeux de ses disciples un exemple de sa vertu divine cachée au grand nombre, marcha sur les flots de la mer, au rapport de l’évangéliste, et commanda à la tempête et aux vents, lorsque ceux qui le virent furent remplis d’admiration, disant : « Quel est cet homme à qui les vents et la mer obéissent » (Marc, IV, 40) ? Cette mer, le symbole d’une autre mer immense, la mer spirituelle, où est le dragon formé pour être le jouet des anges de Dieu, et sur laquelle notre Sauveur et Seigneur a brisé sous ses pieds la tête du dragon qui s’y tient, et des autres dragons inférieurs, selon ces paroles : « Tu as brisé dans les flots les têtes des dragons ; tu as écrasé la tête du dragon » (Ps., LXXIII, 14), c’est le symbole de cette autre mer, dont il dit lui-même dans le psaume : « Je suis descendu dans la profondeur des mers (Ps., LXVIII, 2). » Il développe ses grandeurs aux yeux de Job, et dit : « As-tu pénétré la profondeur des mers ? as-tu marché dans le sein de l’abîme ? les portes de la mort se sont-elles ouvertes par respect devant toi ? Les portiers de l’enfer ont-ils frémi à ta vue » (Job, XXXVIII, 16) ? Ainsi donc, lorsqu’il marcha sur la mer durant sa vie mortelle, et qu’il commanda aux vents et à la tempête, Jésus-Christ accomplit les symboles des mystères cachés.

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