Démonstration évangélique

LIVRE IX

CHAPITRE XV

D’ISAIE

Le peuple juif ne devait pas croire en lui.

« Je vis le Seigneur assis sur un trône élevé et les séraphins l’entouraient » (Is., VI, 1). Il dit plus loin : « Et j’entendis la voix du Seigneur : Qui enverrai-je et qui va vers ce peuple ? et je dis me voici, envoyez moi : et il dit : va, et dis à ce peuple : vous entendrez et vous ne comprendrez pas ; vous regarderez et vous ne verrez pas ; car le cœur de ce peuple est devenu grossier, et ses oreilles se sont appesanties ; ses yeux sont fermés, afin de ne pas voir et de ne pas entendre, de peur qu’il ne comprenne, qu’il se convertisse et que je le guérisse. » L’accomplissement de cette prophétie en notre Sauveur se trouve dans l’Evangile où Jean raconte que « quoiqu’il eût fait ces miracles devant eux, cependant ils ne crurent pas en lui » (Jean, XII, 37), afin que la parole du prophète Isaïe fût accomplie : « Seigneur, qui a cru à notre parole, et à qui le bras du Seigneur a-t-il été révélé ? » C’est pourquoi ils ne pouvaient croire ; et Isaïe a dit encore : « Il a aveuglé leurs yeux et il a endurci leurs cœurs, de peur que leurs yeux ne voient, que leur esprit ne comprenne, qu’ils ne se convertissent et que je les guérisse. » Isaïe a dit ces choses quand il a vu sa gloire et qu’il parle de lui (Is., LIII, 1). Selon Matthieu, lorsque ses disciples s’approchèrent de Jésus et lui dirent « Pourquoi nous parlez-vous en paraboles ? » Celui-ci répondit : « Il vous est donné d’entendre les mystères du royaume de Dieu, mais il ne l’est pas donné à ce peuple. Aussi lui parlé-je en paraboles, afin qu’il ne voie pas, qu’il n’entende pas, de peur qu’il ne se convertisse et que je le guérisse alors fut accomplie cette prophétie d’Isaïe contre lui : « Va, et dis à ce peuple : Vous entendrez et vous ne comprendrez pas, » etc.

Remarquez comment Jean continue : Isaïe a dit ces choses quand il a vu sa gloire et qu’il a parlé de lui. Le prophète ayant vu le Christ et la gloire du Christ dans la vision dont il raconte qu’il a vu le Seigneur des armées assis sur un trône élevé et sublime, etc., qui n’admirerait la prophétie, frappé de l’incrédulité actuelle des circoncis envers le Christ. Car autrefois qu’ils le voyaient fait homme et opérant ses merveilles parmi eux, ils ne le considérèrent pas des yeux de l’âme et de la vue de l’intelligence, et il n’y eut point en eux la vue du sens intellectuel pour comprendre quelle était la puissance qui consommait parmi eux des prodiges si grands et si divers ; et même, tandis qu’ils pouvaient entendre de leurs oreilles les paroles de la vie éternelle, et qu’ils écoutaient la voix de la sagesse divine, ils n’entendirent pas des oreilles de l’esprit, de sorte qu’ils amenèrent la prophétie à son accomplissement manifeste. Aujourd’hui encore qu’ils voient avec une si grande évidence la divine puissance du Christ sous laquelle toute race d’homme délivrée de ses superstitions antiques est entraînée à la religion qu’il a établie, toute fois ils n’examinent point et ne réfléchissent pas que ce qui ne put être établi chez eux ni par Moïse ni par les autres prophètes envoyés à ce peuple seul, de ne pas idolâtrer et de ne pas se livrer aux errements du polythéisme, la divine vertu de notre Sauveur l’obtint dans le monde. Enfin appliqués sans cesse aux témoignages prophétiques qui lui sont dus, ils entendent de leurs oreilles, mais ils ne comprennent pas ; et maintenant encore se réalise contre eux la prophétie qui nous occupe.

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