Préparation évangélique

LIVRE VI

CHAPITRE I
QUE C’EST UNIQUEMENT D’APRÈS LE COURS DES ASTRES QUE LES DÉMONS, CONJECTURANT À LA MANIÈRE DES HOMMES, PRÉSIDENT LES CHOSES FUTURES QU’ILS FONT ANNONCER PAR LEURS ORACLES

« Lorsque les dieux annoncent des choses futures, ils avouent que c’est qu’elles sont dans les décrets du destin, et qu’ils ne les connaissent que par l’inspection des astres ; c’est là une chose que confessent explicitement tous les dieux amis de la vérité. »

Puis il continue :

« Apollon interrogé sur le sexe d’un enfant qu’une femme portait dans son sein, répondit que d’après la conjonction des astres au moment de la conception, elle devait accoucher d’une fille. Voici ses propres expressions :

« L’enfant naît d’une terre, où le sol desséché par l’absence de la pluie prive la mère d’une boisson rafraîchissante, au moment où elle a senti les premiers mouvements du fruit qu’elle portait dans son sein. Ce sera une fille et non un fils : car la sage Phébé s’est rencontrée avec la chaste Vénus, qui te promet, ô mortel chéri, une jeune fille. Voilà donc la conjonction de la lune avec Vénus au temps de la conception, donnée comme cause de la naissance d’une fille. »

C’est aussi par la même voie que les oracles prédisent les maladies. Écoutez en effet :

« Un poison mortel se glissera dans ses entrailles, remplissant sa poitrine de douleurs cruelles, etc. »

Puis ensuite :

« Le destin t’a condamné à ces douleurs : son immuable et inflexible volonté est de te consumer par ces tourments, parce que Saturne au haut des cieux entre dans une voie funeste. »

Et ensuite :

« Le terrible Mars, fléau des mortels, s’empresse de se joindre à l’astre de Saturne ; il te force d’accomplir ton fatal destin ; il ébranle les fondements de ton âme : C’est pour cela que la divine sagesse de ton père t’avait commandé de fuir Mars et sa funeste influence. »

— Ceci ne laisse donc plus douter que ce n’était par aucune vertu divine, mais bien par la combinaison des astres, d’après les calculs mathématiques, qu’ils prédisaient l’avenir. Il n’y a donc entre eux et les autres hommes aucune différence : leurs œuvres ne prouvent donc en eux aucune vertu divine et supérieure à l’humanité. Maintenant voyez ces mêmes oracles nous enlever non plus seulement la disposition de ce qui est hors de nous, mais encore notre liberté intime, en assujettissant à l’influence des astres jusqu’aux mouvements de notre volonté.

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