Préparation évangélique

LIVRE XI

CHAPITRE XXI
DE LA NATURE ESSENTIELLE DU BIEN

La divine écriture des Hébreux nous ayant enseigné de différentes manières quelle est l’essence du bien, nous donne à comprendre que le bien n’est pas autre chose que Dieu même, lorsqu’elle dit : « Le Seigneur est bon pour tous ceux qui mettent leur confiance en lui, pour l’âme qui le cherchera. » Puis : « Rendez témoignage au Seigneur, parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde est pour les siècles (Ps., CVI, 1) : » enfin, parce qu’a dit notre Sauveur à celui qui le questionnait sur ce sujet (Matth., XIX, 17). « Pourquoi m’interrogez-vous sur ce qu’est le bien ? nul n’est bon, si ce n’est Dieu seul. »

Ecoutons ce que dit Platon dans le Timée.

« Disons la cause qui a porté le suprême ordonnateur de l’univers à l’engendrer et à le coordonner. Il était bon ! or, l’être bon ne saurait jamais avoir d’envie contre qui que ce soit. Etant exempt de passion, il a voulu que toutes ces choses lui ressemblassent le plus possible. »

Dans la République, il dit ce qui suit :

« N’est-il pas vrai que le soleil aussi n’est pas la vue ; mais en étant cause, il est soumis à la vision de ce même organe ? Cela est vrai, dit-il. – Eh bien, repris-je, dites que c’est de la même sorte que j’entends qu’est le fils du bien. Le bien l’a engendré semblable à lui et il en est de même dans la région intellectuelle pour l’intelligence et les actes qui en dépendent, que du soleil dans les choses visibles pour la vue et les objets visibles. »

Ensuite il ajoute :

« Ce qui donne le caractère de la vérité à nos connaissances, et ce qui rend a celui qui sait la conviction de sa science, dites que c’est l’idée du bien. »

Puis encore :

« Vous avouerez, je pense, que le soleil ne donne pas seulement la propriété d’être vus aux objets visibles ; mais sans être la génération, il leur donné d’être engendrés, de s’accroître et de se nourrir. Comment, non ? Dans ce qui est du ressort de nos connaissances, dites que, non seulement la connaissance que nous en avons émane du bien ; mais que c’est de lui que ces choses tiennent l’être et leur substance ; encore que le bien ne soit pas la substance, mais qu’il soit placé, par sa dignité et sa puissance, bien au-dessus de toute substance. »

Platon dit en ceci, de la manière la plus explicite, que non seulement l’attribution d’être connue, donnée aux substances intellectuelles, mais même l’existence et la substance leur vient du bien, c’est-à-dire de Dieu. Quant à ce qu’il observe que le bien n’est pas la substance, mais qu’il est placé par sa dignité et sa puissance au-dessus de toute substance, en aorte que rien ne lui est consubstantiel, ni ne peut être cru ingénéré ; attendu que tout tire l’être et la substance de celui qui n’est point substance ; mais qui, par sa dignité et son pouvoir, est au-dessus de toute substance ; c’est précisément ce que les oracles des Hébreux proclament, en déclarant avec raison qu’il n’y a qu’un seul Dieu, qui est, pour tous les êtres, la cause d’existence : ainsi, tous ceux, qui ne possèdent pas par eux-mêmes l’être et la substance, qui ne participent pas à la nature du bien, ne sauraient raisonnablement être considérés comme des dieux : le bien, en effet, ne leur est pas acquis par nature. On ne peut le placer que dans un seul et non dans un autre, savoir dans le bien unique, celui que Platon a admirablement proclamé au-dessus de toute substance, primant tout par sa dignité et sa puissance.

Voici de nouveau Numénius qui, développant la pensée de Platon dans ses livres du bien (περὶ τοῦ ‘Αγατοῦ), s’exprime de la manière suivante :

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