Préparation évangélique

LIVRE XIV

CHAPITRE XIII
DE LA GYMNASTIQUE ET DE LA MUSIQUE D’APRÈS PLATON DANS LA RÉPUBLIQUE (Platon, République, liv. 7, p. 483 de Ficin ; 521 de H. ET.)

« Quelle sera donc, ô Glaucon, cette science de l’âme qui la transporte de ce qui naît à ce qui est ? et tout en vous parlant je réfléchis pour savoir si nous n’avons pas dit qu’il était nécessaire que, dans leur jeunesse, ceux-ci fussent des athlètes de guerre ?

« Nous l’avons dit.

« Il faut donc joindre à cette science, celle que nous cherchons.

« Laquelle ?

« Celle, de n’être pas inutile aux hommes de guerre.

« Il le faut, dit-il, si cela est possible.

« Cependant, dans ce qui a précédé, leur éducation ne consistait, qu’en gymnastique et en musique.

« Cela est vrai, dit-il.

« La gymnastique n’a pas d’exercice plus relevé que pour ce qui naît et périt ; car elle ne préside qu’aux développements du corps et à sa décroissance.

« Cela me paraît ainsi.

« Or, ce ne peut être là la science que nous cherchons.

« Non assurément.

« Mais, serait-ce la musique telle que nous en avons précédemment développé la nature ?

« Mais si vous vous en souvenez bien, dit-il, il a été reconnu qu’elle était l’opposée de la gymnastique. La gymnastique, par les habitudes qu’elle fait contracter, exerce nos défenseurs suivant une régularité cadencée. Mais ce n’est pas une science : elle nous donne le mouvement rythmique, d’après le rythme. Nous voyons pareillement dans l’art oratoire des choses contraires qui fraternisent entre elles : ainsi la fable et la vérité sont entremêlées dans les discours. Mais, pour un résultat aussi important que celui que vous recherchez, vous ne trouverez dans la musique aucune instruction réelle.

« Vous me rappelez parfaitement ce qui a été dit, lui répliquai-je ; car dans la réalité la musique n’a rien de semblable à l’Être proprement dit. Mais, mon cher Glaucon, qui sera donc dans ces conditions ; car tous les arts m’ont semblé n’avoir qu’une manutention servile ?

« Comment cela serait-il autrement ? »

Ensuite en continuant il dit (Platon, Répub. livre 7, p. 487 de Ficin ; 530 de H. Et.) :

« Que ceux que nous élevons n’entreprennent donc pas d’apprendre imparfaitement quoi que ce soit, qui n’aurait pas toujours pour résultat d’atteindre où nous avons déclaré que tous devaient atteindre, comme nous venons d’en donner la preuve, en parlant de l’astronomie. Avez-vous appris qu’ils obtinssent plus par l’harmonie ? En effet, en soumettant à une mesure commune les symphonies et les sons qu’ils viennent d’entendre, ils n’ont rien accompli, non plus que les astronomes.

« Par tous les dieux, dit-il, ne sont-ils pas ridicules de donner des noms à certaines vibrations, de tromper les oreilles comme si l’on entendait une voix venant de chez les voisins ? Les uns disent qu’ils entendent encore un son dans l’intervalle, ce qui est la plus petite subdivision par laquelle on les puisse mesurer : les autres contestant cela, regardent les sons comme égaux entre eux et tous les deux placent les oreilles au-dessus de l’intelligence.

« Eh bien, lui répondis-je, vous parlez de ces excellentes gens qui nous donnent beaucoup à faire avec des cordes et qui nous mettent à la torture pour monter leurs chevilles. Et pour que cette peinture ne soit pas par trop allongée, en parlant de coups répétés avec le Plectrum, de sons pleins, de demi-tons, de tons forcés des cordes, je finirai ce tableau, en disant que ce ne sont pas eux à qui j’ai affaire : mais bien aux autres dont je disais tout à l’heure que je voudrais les interroger sur les lois de l’harmonie. Eh bien, ils font comme les astronomes, ils cherchent des nombres dans les symphonies dont ils nous entretiennent ; mais ils ne sont pas parvenus à résoudre notre problème : Quels sont les nombres harmoniques, quels sont ceux qui ne le sont pas, et d’où vient qu’il existe des nombres de ces deux espèces ? »

Que ces citations servent de précédents au projet, que nous formons, de nous justifier d’avoir écarté par un jugement sain des études aussi inutiles. Continuons cependant l’examen déjà commencé des doctrines des philosophes, désignés sous le nom de physiciens et des oppositions qui régnaient entre eux. Plutarque rassemblant dans un même cadre toutes les opinions, tant des platoniciens que des pythagoriciens ; celles des philosophes plus anciens, appelés physiciens, comme celles des plus récents : savoir, les Péripatéticiens, les Stoïciens et les Épicuriens, il les a consignées dans un traité qui a pour titre : Sentiments des philosophes sur les principes naturels.

J’en vais citer des extraits.

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