Oui, nous sommes protestants

Trente définitions

Anglicanisme : En Angleterre, la Réforme est née non pas d'un mouvement d'idées, mais de la politique religieuse d'Henri VIII, dont les complications de la vie conjugale provoquèrent un sérieux désaccord avec la papauté (1534). L'Église anglicane est donc, à son origine, une dissidence catholique. C'est la reine Elisabeth I qui conduira cette Église vers un protestantisme plus affiché (1559). La réforme anglicane semble être une voie moyenne entre le catholicisme dont elle conserve les formes extérieures du culte et la hiérarchie ecclésiastique, et le protestantisme dont elle maintient les grandes doctrines.

Calvinisme : Système théologique principalement basé sur la pensée et les écrits de Jean Calvin, réformateur picard (1509-1664). On parle des calvinistes, adeptes de cette théologie. Les calvinistes sont appelés aujourd'hui réformés.

Camisard : Nom donné aux protestants des Cévennes qui se révoltèrent contre le pouvoir après la révocation de l'édit de Nantes. Camisard vient de « chemise ». Les camisards furent ainsi appelés parce que c'est dans cet accoutrement qu'ils se battirent contre les soldats du roi, par dérision. On parle de la guerre des camisards, laquelle dura de 1702 à 1704.

Cène, ou sainte cène : Terme utilisé pour rappeler le dernier repas pascal du Seigneur. C'est le moment, lors de la cérémonie religieuse dominicale (l'eucharistie chez les catholiques) du partage du pain et du vin (communion sous les deux espèces). Le sens donné à la Cène durant le culte est cependant très différent de celui donné à l'eucharistie durant la messe.

Charismatisme : Le christianisme a toujours été visité, à certaines périodes, par des manifestations d'enthousiasme religieux. L'effervescence du mouvement charismatique cherche alors à secouer la torpeur des communautés endormies ou sclérosées. On insiste sur la transformation personnelle radicale, laquelle doit être visible grâce à des phénomènes divers (guérisons, glossolalie, esprit prophétique...) Depuis les années 1970, on parle de renouveau charismatique pour désigner ce mouvement proche, à certains égards, du pentecôtisme. L'expérience du Saint-Esprit devient un signe tangible d'une vraie et forte spiritualité. Dans ce mouvement, on insiste sur la conversion personnelle et sur l'immédiateté de l'action de Dieu. Il a des ramifications dans tous les milieux chrétiens, jouant souvent sur le registre d'un certain œcuménisme. Le catholicisme a tenté de récupérer ce mouvement dynamique, avec plus ou moins de succès.

Congrégationalisme : Une congrégation est un rassemblement. Pour le congrégationalisme, l'Église est le rassemblement des fidèles en un lieu précis. Chaque église locale (paroissiale) est autonome, indépendante et souveraine. Toute organisation supra-locale, comme les fédérations, n'ont qu'une autorité fonctionnelle. Ce sont surtout les Églises dites de professants qui revendiquent le congrégationalisme. Exemple en France : les Églises baptistes. Ces Églises se présentent toujours en prenant le pluriel, pour bien marquer que la véritable Église est locale. Ainsi parle-t-on des Églises baptistes de France, mais on dit l'Église réformée de France. (voir presbyto-synodal.)

Conseiller presbytéral : En affirmant le sacerdoce universel, le protestantisme a effacé le clivage clercs/laïcs et donné un rôle plus important aux laïcs dans la vie et l'organisation de l'Église. A côté du pasteur et du diacre, Calvin imaginait les anciens (presbytéros) qui ont donné par la suite les conseillers presbytéraux. A l'origine, les anciens, avec le pasteur, devaient veiller sur le troupeau, et même écarter de la Cène les personnes qu'ils jugeaient ne pas en être dignes. Aujourd'hui les conseillers presbytéraux sont élus par l'assemblée générale de la paroisse pour un mandat de quelques années. Les conseillés sont, avec le pasteur, les véritables responsables de la bonne marche de la paroisse, tant sur le plan financier et gestionnaire que sur le plan spirituel. Comme le pasteur exerce, dans une paroisse, un ministère limité dans le temps, les conseillers assurent une certaine continuité de l'association cultuelle qu'est l'église locale.

Contre-Réforme : Terme auquel on préfère parfois celui de Réforme catholique et qui désigne l'ensemble des réformes entreprises par l'Église romaine en réponse à la Réforme protestante, notamment la reconstitution du tribunal de l'Inquisition, la création de la congrégation de l'Index, la convocation du Concile de Trente, la création de la Compagnie de Jésus (jésuites).

Croix huguenote : L'un des symboles forts du protestantisme. C'est à l'origine, un bijou composé d'une croix de Malte avec échancrures triangulaires à l'extrémité de chaque branche. Les branches sont reliées par des fleurs de lys. Sous la croix, en pendentif, une colombe représente le Saint-Esprit. Cette croix, imaginée par un orfèvre nîmois (vers 1688) semble s'inspirer de la croix de l'ordre du Saint-Esprit institué par Henri III. La croix huguenote fut rapidement adoptée par les protestants du Midi. Aujourd'hui, elle a largement quitté cet espace géographique pour devenir un signe de ralliement. Notons que la colombe est parfois remplacée par une perle allongée qui, pour certains, rappelle la sainte ampoule utilisée pour l'onction royale. Pour d'autres, il s'agit d'une larme qui rappelle les persécutions.

Culte : Non donné à la cérémonie religieuse protestante du dimanche matin. On parle aussi du culte personnel pour signaler le moment de lecture biblique, de méditation et de prière que chaque protestant est invité à vivre quotidiennement. Le culte familial est un moment où, traditionnellement, les membres d'une même famille se retrouvent pour lire ensemble la Bible et prier, voire chanter des cantiques. Cette habitude se perd aujourd'hui.

Désert : Terme typique du vocabulaire protestant français. La période de Désert correspond au siècle des persécutions. Elle a commencé par l'édit de Fontainebleau (1685) qui révoqua l'édit de Nantes, et se termina par l'édit de Tolérance (1787). Cet édit accordait aux protestants et aux juifs un état civil sans pour autant leur accorder la liberté religieuse. Le terme de Désert fait référence à l'expérience d'errance des Hébreux dans le désert (conduits par Moïse), après le départ de l'Égypte pour la Terre promise.

Dispensationalisme : Système d'interprétation de la Bible proposé aux XIXe siècle par l'anglais J. N. Darby (de là les communautés darbystes, parfois appelées communautés de frères étroits). Darby proposait une vision de l'histoire du salut compartimentée en « dispensations » : sept époques successives des rapports de l'homme avec Dieu, rapports toujours douloureux et voués à l'échec final avec, en point d'orgue, l'apostasie de l'Église. C'est pourquoi les darbystes refusent avec force toute structure ecclésiale. Même si on peut les ranger dans la famille protestante, les darbystes refusent toute assimilation avec le protestantisme, même évangélique. Le protestantisme les regarde comme sectaires.

Huguenot : L'étymologie de ce terme est imprécise. Il vient certainement du mot allemand anguenotz et aurait subi plusieurs modifications. Employé péjorativement par les catholiques, les protestants se l'approprièrent avec une certaine fierté. Au XVIe siècle, il devint une précision politique (le parti huguenot et l'armée huguenote). Les protestants qui quittèrent la France pour se réfugier à l'étranger durant les guerres de Religion, aimèrent ce terme qui parlait d'une certaine authenticité protestante. Ils le conservèrent donc. Aujourd'hui encore, les protestants français apprécient ce terme.

Inerrance : On parle de l'inerrance biblique. Ce terme, pour qualifier la Bible, est entré dans une certaine mode des évangéliques américains depuis 1976. Les britanniques discutaient alors du terme « infaillibilité ». Un théologien américain précise : « Les défenseurs de l'inerrance biblique cherchent essentiellement à démontrer la totale fiabilité de l'Écriture comme conséquence de son entière véracité. »

Libre examen : C'est Boileau qui fait remarquer, avec justesse, qu'en refusant tout magistère ecclésiastique et en remettant la Bible à la disposition des fidèles, la Réforme a permis que chaque protestant soit un pape avec une Bible en main. La légitimité religieuse s'enracine dans la Bible, dès lors, toute autorité humaine devient relative ; chacun peut se prononcer en conscience à partir de ce qu'il perçoit des textes bibliques. D'où le libre examen cher aux protestants.

Luthéranisme : C'est la doctrine de Martin Luther, la religion des luthériens (adeptes du réformateur).

Luthéro-réformé : On propose cette contraction de luthérien et réformé pour désigner les Églises de la Réforme, nées des réformateurs Luther et Calvin. Dans ce livre, lorsqu'on utilise cette expression, il faut comprendre que l'on parle des deux familles importantes du protestantisme historique.

Mariage mixte : C'est le mariage entre une personne de religion catholique et une personne de religion protestante.

Multitudiniste : Les Églises dites multitudinistes sont celles dont on ne demande pas vraiment aux membres d'adopter une seule et unique confession de foi, ni même une expérience religieuse spécifique. C'est contre ce type d'Églises que les confessants et les professants se sont démarqués.

Parole : Lorsqu'il parle de la Parole, le protestant parle de la Bible, Parole de Dieu. Il peut aussi parler de l'Écriture pour signaler la même Bible. Dans le vocabulaire protestant, on parlera aussi de la Parole sainte, de l'Écriture sainte, de la Sainte Bible.

Parpaillot : Comme huguenot, ce terme a été utilisé par les catholiques de façon injurieuse, pour qualifier les protestants. C'est une déformation de papillon, en occitan (parpailhol). Aujourd'hui, les protestants aiment s'appeler parpaillots lorsqu'ils parlent entre eux : « Nous, les parpaillots ! »

Pasteur : On dit parfois aussi ministre de la Parole, ou conducteur spirituel. Le ou la pasteur est celui ou celle qui conduit les membres d'une paroisse, comme le gardien du troupeau. Après une formation universitaire d'environ six ans de théologie protestante, il peut exercer un ministère, reconnu par ses pairs. Il est alors consacré à ce ministère qui fait de lui tout à la fois un animateur, un gestionnaire, un psychologue, un orateur, un théologien, un confident... Le grand public le reconnaît comme le représentant du protestantisme et il est repéré comme « un curé qui peut se marier ». Un peu restrictif tout de même ! Le terme a été féminisé. Une femme exerçant le ministère pastoral est appelée pasteure. La pastourelle est, dans un langage quelque peu oublié, la femme du pasteur.

Patois de Canaan : Cette locution qualifie une manière de parler qui reprend systématiquement ou presque des paroles bibliques. L'expression a une connotation péjorative. Elle désigne un langage d'initiés chez les personnes coutumières de la Bible, incompréhensible pour des profanes.

Presbytéro-synodal : Ce mot correspond à un régime d'organisation d'églises. Le terme presbytérien, chez les réformateurs, signifie « ancien », comme dans le Nouveau Testament (et non pas prêtre comme dans l'Église catholique). Les anciens sont constitués en collège (le conseil) auquel la communauté confie la gestion de l'église, tant au point de vue spirituel que temporel. Le terme synodal signale le fait que les communautés locales ne s'estiment pas autosuffisantes ni autonomes, et qu'elles envoient leurs délégués à une instance (le synode) supra-paroissiale, pour traiter des questions importantes. La particularité du régime presbytéro-synodal est double. Il refuse de concevoir la relation d'autorité à sens unique (du bas vers le haut, ou de base presbytérale vers le synode), et préfère un mouvement constant de va-et-vient. Ce régime manifeste aussi la réalité d'un corps, où ceux qui le composent vivent l'esprit communautaire (voir, par opposition, le congrégationalisme).

Pré-réformateur : Avant qu'entre en scène les grands réformateurs (comme Luther et Calvin), des hommes ont entamé des programmes qui préparaient cette Réforme. On les présente comme pré-réformateurs (Valdo, Huss, Wyclif).

Professant : On parle d'Églises de professants pour signaler les Églises protestantes, souvent de type évangélique, dont les membres doivent faire profession de leur foi (attestation de cheminement personnel qui conduit à une véritable conversion). C'est sur une déclaration publique, en église, de leur expérience spirituelle que les personnes deviennent alors membres de la communauté. On parle aussi de confessants, et d'Églises de confessants.

Refuge : Mouvement d'émigration des huguenots hors de France et leur accueil dans les pays européens déjà gagnés au protestantisme (Angleterre, Pays-Bas, pays nordique, Suisse, Allemagne) et même au-delà (Amérique, Afrique du Sud). Deux grandes périodes ont été enregistrées : au XVIe siècle, lorsque le roi et l'Église catholique commencent à persécuter les gens de la religion prétendue réformée (R.P.R.), puis, après la révocation de l'édit de Nantes, en 1698. Dès cette date, c'est plus de 250 000 protestants qui quittèrent la France, soit un quart du protestantisme recensé alors.

Sacerdoce universel : Principe protestant insistant sur l'égalité en dignité de tous les croyants baptisés. La doctrine du sacerdoce universel s'oppose au retour d'une prêtrise individuelle et confère à tout le corps ecclésial un appel commun. Ce qui n'empêche pas des ministères précis, comme celui du pasteur. Mais son rôle n'est pas, comme celui du prêtre dans certaines autres religions, d'être un intermédiaire unique et obligatoire pour atteindre Dieu.

Temple : Même si le terme « église » désigne aussi le lieu de rassemblement des protestants, c'est traditionnellement le terme « temple » qui convient. Les temples protestants sont généralement d'une grande sobriété, sans vitraux, sans statues, et souvent sans beauté, ni confort. L'austérité se mesure dit-on, à la dureté de ses bancs !

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