Vie de Guillaume Farel

55. Gauthier Farel

On éprouve du rafraîchissement à laisser les hommes et leurs folies pour se tourner vers Dieu, à mettre de côté les absurdités qui procèdent du cœur naturel, pour se désaltérer aux fleuves d'eaux vives jaillissant d'un cœur rempli de l'Esprit Saint. Guillaume Farel écrivait au printemps de 1534 :

« Grâce, paix et miséricorde de la part de Dieu notre Père par notre Seigneur Jésus, seul Sauveur et Rédempteur qui pour nous est mort, mais maintenant règne en gloire aux lieux où il faut le chercher, car Lui seul est notre vrai trésor céleste. Ce trésor ne peut nous être ôté, ni dérobé, bien que tout s'élève contre Lui. Nous en faisons l'expérience de jour en jour à mesure qu'il plaît au Père Éternel de nous ouvrir la porte pour annoncer Son Fils. Et si Dieu nous donnait plus de courage nous verrions autre chose, mais nous avons tant de chevaux rétifs qui reculent au lieu d'avancer, étant non seulement peu utiles eux-mêmes mais encore empêchant les autres de marcher. Ceux-là, me semble-t-il, accomplissent les paroles du Seigneur Jésus qui accusait les Pharisiens de ne pas entrer et d'entraver ceux qui entrent.

Mais malgré les croix et les obstacles, Dieu ne laissera point Son œuvre inachevée et Il manifestera les méchants... Les ennemis ne cessent d'inventer de nouvelles fables et menteries, mais Dieu les fait tourner à leur confusion, car mensonge ne peut vaincre vérité. Il faut que la lumière luise et que les ténèbres prennent fin... Vous savez comment le Seigneur a visité la maison, mettant mes frères à l'épreuve, surtout celui qui est né après moi, car il y a longtemps qu'il est en prison et que ses biens sont confisqués ». C'est de Gauthier Farel dont Guillaume parle ici ; lui et sa femme avaient ouvertement confessé Jésus-Christ. Sa captivité était un grand chagrin pour Guillaume, non seulement à cause de lui-même, mais aussi pour sa vieille mère qui était veuve. Gauthier paraît avoir habité avec elle ou du moins dans le voisinage ; il fut emprisonné à Gap.

Dans une autre lettre, Guillaume s'exprime en ces termes : « Grâce, paix et miséricorde de Dieu notre très bon Père par son seul Fils Jésus, notre salut et notre vie. Il est la pierre d'achoppement contre laquelle dans sa propre personne et dans celles de ses membres, le monde a tant lutté et il le fera jusqu'au bout. Mais ce sera en vain, car ni conseil, ni prudence, ni sagesse ne peuvent tenir contre Dieu, et si les iniques élèvent leurs cornes elles seront rompues. Quelque chose qui puisse advenir aux justes, ils ne doivent perdre courage, mais en pleine foi et assurance ils doivent dire avec le saint prophète : Le Seigneur est mon aide, je ne craindrai point, que me ferait l'homme ? Oh ! qu'il est heureux celui à qui le Seigneur donne cette grâce ! Que tout va noblement quand tout est perdu selon le monde ! Alors nous expérimentons la vertu de Dieu qui aide puissamment aux siens lorsqu'ils n'ont fiance qu'en Lui. Mais quand nous avons recours à l'Égypte et nous fions aux hommes, Dieu se montre véritable, nous faisant éprouver ce que sont les hommes.

Je l'ai expérimenté quant à mon frère qui a été longuement détenu pour peu de chose. Il a voulu avoir le secours de gens que je croyais en meilleurs termes qu'ils ne le sont (le roi de France et Messieurs de Berne) et Dieu sait ce qu'il en est advenu. J'ai voulu céder au jugement d'autrui contre le mien propre. Dieu soit loué et son bon plaisir s'accomplisse ! Si le Père céleste de sa bonne volonté veut le délivrer, Il a tout en sa main, Il le fera. S'il Lui plaît qu'il en soit autrement, que sa bonne volonté soit faite et ainsi soit-il ! Mais je ne veux cesser de prier pour lui comme faisaient les fidèles quand Pierre était détenu, ni aussi d'user d'autres moyens comme Paul en a usé... Et puissions-nous tous adorer notre Dieu plus purement que nous ne l'avons fait jusqu'ici, craignant plus qu'avant ce très puissant Seigneur et que la crainte de l'homme soit chassée loin de nous. Craignons la malédiction de Dieu qui est annoncée à tous ceux qui n'ont leur confiance en Dieu, et saisissons des deux mains la bénédiction promise à ceux qui souffrent pour Jésus.

Plaise au Seigneur Dieu que le pauvre prisonnier comprenne bien ces choses afin qu'il pousse hardiment en avant, déclarant ce qui en est du bon Sauveur. Car ce qui m'inquiète c'est qu'il est peu instruit et je crains qu'il ne comprenne guère. Je vous recommande sa pauvre mère veuve et pleine d'angoisses. Puisse Celui qui dispose de tout à sa plus grande gloire, nous mener et nous conduire par son St-Esprit, lequel Il nous fasse suivre, mettant de côté toute autre prudence, sagesse et conduite, afin que tout ce qui est en nous, pensées, paroles ou actions soit à l'honneur et à la gloire de Dieu pour l'avancement de sa Sainte Parole. Amen ! »

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