Les épîtres de Paul

3.
Authenticité et intégrité

Le caractère très particulier de cette lettre est peut-être la raison pour laquelle elle est moins expressément citée que la première. Ainsi dans l’épître de Clément Romain ne se trouve que l’expression ἐνοπτριζόμεθα (36, 2), qui paraît rappeler 2 Corinthiens 3.18 ; dans Ignace, ad Trall. (3, 3) : le terme φείδομαι ; comparez 2 Corinthiens 1.23 et 12.6. Dans Polycarpe (4, 1) : ὅπλα τῆς δικαιοσύνης ; comparez 2 Corinthiens 6.7. Le beau passage de la lettre à Diognète, 5, 8, est évidemment calqué sur 2 Corinthiens 6.8-10. L’admission universelle de 2 Corinthiens vers la fin du IIe siècle est constatée par le fragment de Muratori, les versions syriaque et latine, les citations d’Athénagore, de Théophile, d’Irénée, de Clément d’Alexandrie et de Tertullien.

Quant aux preuves internes, nous nous bornons à dire que le savant qui, à travers ces pages, ne sait pas discerner la vivante personnalité de saint Paul, doit avoir, dans le travail du cabinet, perdu le sens des réalités.

L’intégrité a d’abord été révoquée en doute, comme nous l’avons dit, au sujet des passages 6.14 à 7.1 et ch. 9, Nous croyons avoir dissipé les apparences qui avaient fait naître ces doutes. En Hollande, il est aujourd’hui une école qui semble vouloir réaliser en théologie, à l’égard du texte apostolique, le tableau fameux de la leçon d’anatomie de Rembrandt. Schmiedel, qui ne sympathise guère avec elle, paraît cependant disposé à lui donner raison pour le passage 11.31-33. Mais nous avons cherché à montrer comment ce passage rentre dans le contexte. Deux théologiens allemands ont porté sur notre épître une main plus hardie encore : Hagge a essayé de refaire avec nos deux lettres trois épîtres de l’apôtre, l’une de l’hiver 56-57, composée de huit fragments de la 1re aux Corinthiens ; la seconde, de Pentecôte 57, comprenant six morceaux de 1 Corinthiens et quatre de 2 Corinthiens ; la troisième, de juin 58, renfermant les sept premiers chapitres de 2 Corinthiens, puis le neuvième, enfin les quatre derniers versets de l’épître. Schürer n’a-t-il pas eu raison de dire que, si l’intention d’un pareil travail n’a pas été de fournir des armes à ceux qui dénigrent la critique biblique, c’en est du moins là le résultat ?

Nous avons déjà indiqué les raisons qui nous empêchent de souscrire à l’hypothèse de Hausrath dans son Viercapitel-Brief. Les raisons par lesquelles il cherche, ainsi que Pfleiderer et Schmiedeln, à démontrer la priorité de ces quatre chapitres par rapport à la composition des neuf premiers, n’ont pas besoin d’être réfutées en détail après que nous avons montré que, jusqu’à la fin du ch. 7, il ne s’agit que du règlement de faits particuliers et incidentels et que depuis le ch. 10 seulement Paul entame la question solennelle de sa relation avec l’église entière, telle qu’elle doit se décider à son arrivée. Il me paraît que, cela compris, l’unité de la lettre ne peut faire doute.

n – Nous n’insistons pas de nouveau ici sur l’énorme invraisemblance qu’il y aurait à ce que des lettres de l’apôtre conservées dans les archives de l’église eussent été aussi arbitrairement manipulées que le supposent cette hypothèse et celle de Hagge.

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