Théologie de l’Ancien Testament

§ 145. Principes qui ont présidé à la fixation des fêles.

Le nombre sept joue ici un grand rôle. Dès Genèse 2.2, il apparaît comme le nombre du parfait accomplissement de l’œuvre divine. De là vient que le septième jour est mis à part, que deux fêtes durent sept jours, que sept semaines séparent Pâque de Pentecôte, que le septième mois est tout particulièrement le mois des solennités, et enfin que les grands jours de fêtes sont au nombre de septj.

j – Pâque et les Tabernacles ont chacun deux grands jours, cela fait quatre ; Pentecôte, Expiations et la nouvelle lune du septième mois, sont les trois autres grands jours.

Les trois fêtes à pèlerinage ont à la fois une signification agraire et historique.

[Au point de vue historique, on célébrait à la Pentecôte le don de la Loi sur Sinaï, mais sans que cela fût nulle part prescrit dans l’A. T. Au reste, c’était la moins considérable des trois fêtes à pèlerinage. Ézéchiel 45.21 et sq., n’en parle pas. On sait que Pâque était destiné à entretenir en Israël le souvenir de la délivrance d’Egypte et spécialement de l’ange exterminateur qui avait épargné les premiers-nés des Israélites ; lors de la. fête des Tabernacles, le peuple habitait sept jours sous des cabanes de feuillage en mémoire du séjour dans le désert. Au point de vue agricole, Pâque était la fête des premiers épis, Pentecôte celle des premiers pains, et les Tabernacles celle de la fin des récoltes d’automne.]

Le jour des expiations, bien qu’unique en son genre, est cependant dans une relation intime avec la fête des tabernacles ; de même que le jour de Pâque sert d’introduction à la semaine des pains sans levain, ainsi le jour des expiations ouvrait la fête des Tabernacles. Il ne faut pas s’en étonner. Il est vrai que c’était une bien sérieuse introduction à la plus joyeuse de toutes les fêtes. Mais le peuple, pressé de rendre grâces à Dieu pour tous les biens dont l’année était couronnée, ne le pouvait faire que lorsqu’il avait été préalablement réconcilié avec son bienfaiteur. Comment un peuple souillé pourrait-il faire agréer à un Dieu saint la consécration qu’il Lui ferait des produits de sa terre ? Il est probable que c’est au milieu d’une fête des Tabernacles commencée par un jeûne sans repentance, que retentit comme un coup de tonnerre cette parole d’Osée : « Israël, ne te réjouis point et ne sois point transporté de joie comme les autres peuples, car tu t’es prostitué… » Osée 9.1. — Nous verrons plus tard (§ 153) que c’était également par le jour des expiations que s’ouvrait l’année de jubilé, qui commençait en automnek. — Moïse ne dit pas pourquoi les expiations étaient fixées précisément au dixième jour du septième mois ; il est probable que c’était pour que la première décade de ce mois solennel fût considérée comme un temps de préparation et de recueillement ; du moins est-ce ainsi que la tradition a compris la chose, car elle a fait de ces dix jours une période de jeûne et d’humiliation.

k – L’année civile commençait en automne avec le mois Tisri ; l’année sacrée, au printemps avec le mois Abib ou Nisan.

[Le Talmud suppose que la date du dixième jour vient de ce que c’est à pareil jour qu’Adam a péché et s’est repenti ; ou bien qu’Abraham s’est fait circoncire, ou bien encore que Moïse, descendant de Sinaï, a trouvé le veau d’or et a fait expiation pour le péché du peuple ! Bæhr pense que ce nombre de dix est destiné à donner du jour des expiations la plus haute idée possible ; la fête du 10o jour du 7e mois doit être la fête la plus significative, la plus riche.]

Un autre facteur dans la fixation des fêtes, ce sont les phases de la lune. Pour les nouvelles lunes, cela va sans dire et leur nom l’indique assez. Mais cela est vrai également de Pâque et des Tabernacles, qui tombaient toutes deux sur des pleines lunes, ainsi que de l’arrière-Pâque. qui était une répétition de Pâque que l’on faisait pour ceux qui n’avaient pu prendre part, à la première fête, et qui devait se célébrer à la prochaine lunaison, le quatorzième jour du second mois (Nombres 9.9-13. Comparez 2 Chroniques 30.2). « Sur la lune est pris le signe de la fête », lisons-nous dans l’Ecclésiastique (Siracide 43.7)l.

l – Remarquons aussi que ces deux fêtes ne s’éloignaient guère, l’une de l’équinoxe du printemps, l’autre de l’équinoxe de l’automne.

Toutefois, ce serait une complète erreur que de considérer la marche des saisons comme la base du calendrier religieux des Israélites. Passe pour le paganisme, où la divinité est si fort identifiée avec la nature. Là, cela se comprend, les grandes époques de la nature sont aussi considérées comme des moments importants dans la vie des dieux. Dans l’A. T., au contraire, les astres et la nature sont mis au service de la théocratie pour mesurer les temps sacrés (Genèse 1.14 ; Psaumes 104.19), afin que par là soit bien constatée l’identité du Dieu de la nature et du Dieu de l’alliance.

George, dans son ouvrage sur les anciennes fêtes juives, 1835, page 193, les appelle des fêtes chronologiques et pense qu’elles avaient pour but de faciliter le calcul du temps. Tout au plus pourrait-on défendre ce point de vue à l’égard des Nouvelles lunes, qui n’occupent dans le Pentateuque qu’un rang tout à fait subordonné. Non ! ce ne sont pas les hommes qui ont fixé les fêtes et qui en ont fait des jours sacrés. C’est là une institution divine par laquelle le Dieu de l’alliance a voulu d’une part conserver chez son peuple la mémoire des grandes délivrances passées (Exode 13.9 ; Lévitique 23.42, etc.), et d’autre part lui rappeler que toute bénédiction, même pour la vie présente et pour les travaux agricoles, dépend de Celui qui a fait avec les siens une alliance éternelle.

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