Théologie de l’Ancien Testament

§ 196. Les astres.

Les païens considéraient les astres comme des puissances divines, des génies revêtus de corps lumineux, ou tout au moins comme le séjour de ces puissances et de ces génies. A leurs yeux donc, qui disait corps célestes, était bien près de dire esprits célestes. L’A. T., au contraire, non content d’insister sur le fait que toute l’armée des cieux a été créée comme tout le reste de l’univers (Psaumes 33.6), distingue avec soin entre les corps et les esprits célestes. Juges 5.20 ; Job 38.7 sont de simples personnifications poétiques, et l’on n’est absolument pas en droit de voir autre chose dans Job 9.9 ; 26.13. Plus Israël risquait de se laisser gagner par le sabéisme des peuples qui l’environnaient (Job 31.26), plus il importait de prohiber absolument le culte des astres (Deutéronome 4.19 ; 17.3). Mais la Bible ne se contente pas de prohiber ; aux défenses les plus positives elle ne dédaigne pas d’ajouter le raisonnement, et dans de nombreux passages elle cherche à donner sur l’origine et l’utilité des astres des notions propres à enlever le désir même de leur rendre un culte. Ainsi, d’après Genèse 1.14, les astres sont de simples luminaires, מארת, créés par Dieu, destinés à éclairer les habitants de la terre et à leur rendre possible la mesure du temps (Psaumes 104.19-23) ; si leur éclat et la régularité de leur marche prêchent la grandeur et la sagesse du créateur (Psaumes 8.4 ; 19.5 ; Amos 5.8 ; Job 9.9 ; 38.31), on ne peut néanmoins établir la moindre comparaison entre leur gloire et celle de l’Éternel (Job 25.5). Dieu les dirige à son gré, comme un général son armée ; chaque nuit Il les passe en revue (Ésaïe 40.26). Voyez aussi Ésaïe 45.12. Ils servent également à annoncer ou à accompagner ses jugements (Joël 3.15 ; Ésaïe 13.10 ; Habakuk 3.11 ; Josué 10.12). Comme toutes les choses créées, ils passeront, ils vieilliront aussi bien que la terre (Ésaïe 34.4, comparé à Ésaïe 51.6 ; Psaumes 102.26 et sq.).

Eh bien ! ce sont certainement là tout autant d’idées auxquelles le nom de « Éternel des armées » donne en quelque sorte un corps. Je n’en veux pour preuve que Ésaïe 24.23 : « La lune rougira et le soleil sera honteux quand l’Éternel des armées régnera en la montagne de Sion. » il y a ici plus que dans Ésaïe 60.19 : « Tu n’auras plus le soleil ni la lune pour t’éclairer ; l’Éternel sera pour toi une lumière éternelle ! » Ésaïe 24.23 veut dire évidemment que les grands jugements qui précéderont l’établissement du règne de Dieu sur la terre prouveront la folie du culte des astres. Comparez encore Ésaïe 27.1.

Vatke pense que c’est là le plus ancien sens du nom de Dieu qui nous occupe, et que c’est du temps des Juges qu’il a été inventé comme une protestation contre le sabéisme des peuples voisins. Cela se peut ; cependant, je crois plutôt que c’est à Josué 5.14, que remonte l’origine de ce nom : « Je suis, dit l’Ange de l’Éternel, le chef de l’armée de l’Éternel, qui suis venu présentement. » Dans ce cas, ce serait de l’armée des esprits célestes qu’il s’agirait avant tout dans la presque totalité des cas où il est parlé de l’Éternel des armées.

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