La Pèlerine

LA PÈLERINE

CHAPITRE V

Les Pèlerins apprennent beaucoup de choses dans la maison de l'Interprète, par des images et des expériences de toutes sortes; puis, après avoir pris le bain de Sainteté et avoir été vêtus de vêtements blancs, ils reçoivent Grand-Coeur pour guide.

Le souper n'étant pas encore prêt, l'Interprète conduisit les Pèlerins dans ses chambres symboliques, et leur montra ce que le mari de Christiana avait vu quelque temps auparavant. Ils virent donc l'homme dans la cage, l'homme qui a fait un songe, celui qui se fraye un chemin au milieu de ses ennemis, et le portrait du plus grand de tous ; puis encore les autres choses qui avaient été si profitables à Chrétien.

Cela fait, et lorsque Christiana et ses compagnons eurent bien compris tout ce qu'ils avaient vu, l'Interprète les prit de nouveau à part, et les conduisit premièrement dans une chambre où se trouvait un homme qui ne pouvait regarder autre chose que le sol et qui tenait un râteau à fumier dans ses mains. Au dessus de lui, un personnage tenait une couronne céleste, et lui offrait d'échanger son râteau contre cette couronne ; mais l'homme ne levait pas les yeux, et continuait à amener à lui, avec son râteau, les brins de paille, les petits morceaux de bois et la poussière du plancher.

Alors Christiana dit :

— Je crois que je devine ce que cela signifie. Cet individu représente un homme de ce monde, n'est-ce pas ? mon bon Monsieur.

— Tu as dit vrai et son râteau montre son esprit charnel. Et le fait que tu le vois occupé à râteler les pailles, les petits morceaux de bois et la poussière du sol, plutôt que d'écouter ce que dit le personnage qui lui offre la couronne céleste, signifie que le ciel est pour plusieurs une fable, et que les choses terrestres sont les seules qui leur paraissent réelles. Le fait que cet homme ne peut pas regarder autre chose que le sol, signifie que les choses terrestres, quand elles exercent toute leur puissance sur l'esprit des hommes, détournent entièrement leurs cœurs de Dieu.

— Oh ! délivre-moi de ce râteau à fumier! s'écria Christiana.

— Cette prière, dit l'Interprète, est presque complètement tombée en désuétude. « Ne me donne ni pauvreté, ni richesse » (Proverbes 30.8) est la prière d'à peine un sur mille. Les brins de paille, les petits morceaux de bois et la poussière, sont les choses que la plupart des hommes préfèrent.

Miséricorde et Christiana se mirent à pleurer en entendant ces paroles, et dirent :

— Hélas ! ce n'est que trop vrai !

Après que l'Interprète leur eut montré ceci, il les conduisit dans la meilleure chambre de la maison — c'était vraiment une très jolie pièce — puis il leur dit de regarder tout autour, afin de voir si elles ne remarqueraient pas quelque chose qui leur serait profitable. Elles regardèrent donc de tous côtés, mais ne virent rien d'autre qu'une grosse araignée contre le mur; elles la passèrent sous silence.

Miséricorde dit alors :

— Je ne vois rien, Monsieur ; tandis que Christiana restait bouche close.

— Regardez encore, dit l'Interprète.

Elles regardèrent de nouveau, et dirent :

— Il n'y a rien qu'une vilaine araignée, accrochée au mur par ses pattes.

— N'y a-t-il qu'une vilaine araignée dans toute cette chambre? demanda l'Interprète.

Les larmes vinrent aux yeux de Christiana, car elle comprenait les choses très facilement, et elle dit :

— Non, Seigneur, il y en a plusieurs, et des araignées dont le venin est plus destructif que celui de l'araignée que nous voyons.

L'Interprète la regarda avec complaisance et répliqua :

— Tu as dit la vérité.

Miséricorde se mit à rougir, et les garçons se couvrirent le visage, car tous commençaient maintenant à comprendre le sens de l'énigme.

L'Interprète continua

— « L'araignée s'accroche avec ses mains » comme vous le voyez, « et se trouve dans les palais des rois » (Proverbes 30.28). Pourquoi ceci est-il rapporté, sinon pour vous montrer que, quoique vous soyez remplis du venin du péché, vous pouvez cependant vous accrocher par la main de la foi, et habiter dans la meilleure chambre de la maison du Roi des cieux.

— J'avais compris quelque chose de cela, mais pas tout, dit Christiana. Je pensais que nous ressemblions aux araignées, et que, comme elles, nous étions de vilaines créatures, même quand nous nous trouvons dans la plus belle chambre ; mais que nous puissions apprendre à faire agir notre foi par la vue de cette araignée, être venimeux et disgracieux, cela ne m'est pas entré dans l'esprit. Et cependant, elle s'est accrochée avec ses pattes, comme je le constate, dans la meilleure pièce de la maison. Dieu n'a rien fait en vain.

Ils parurent tous contents quoiqu'ils eussent des larmes dans les yeux. Les deux femmes se regardèrent mutuellement, puis elles s'inclinèrent devant l'Interprète.

Il les conduisit dans une autre pièce où se trouvaient une poule et ses poussins, puis il leur dit de les observer un moment. Un des poussins alla boire à l'auge ; à chaque gorgée, il levait la tête vers le ciel.

— Voyez, leur dit l'Interprète, ce que fait ce poulet ; apprenez de lui à reconnaître d'où vous viennent les biens, et à les recevoir en regardant en haut. Observez encore.

Elles virent alors que la poule a quatre manières différentes d'agir avec ses poussins.

  1. Elle a un gloussement habituel pour les appeler à tout instant dans la journée.
  2. Elle a un appel particulier, dont elle n'use que de temps en temps.
  3. Elle a un cri spécial pour les ramener sous ses ailes (Matthieu 23.37).
  4. Elle a un cri de détresse.

— Comparez maintenant, dit l'Interprète, cette poule à votre Roi, et ces poussins à ceux qui lui obéissent. Lui aussi a des méthodes différentes pour agir envers son peuple. Par son appel ordinaire, il ne donne rien ; par son appel spécial, il témoigne qu'il a quelque chose à donner ; il a aussi une voix spéciale pour rassembler ses enfants sous ses ailes, et il a un cri de détresse pour donner l'alarme quand il voit venir l'ennemi.

Je vous ai amenées dans cette chambre, mes bien-aimées, parce que vous êtes des femmes et que ces choses sont faciles à comprendre pour vous.

— Faites-nous voir encore d'autres choses, Monsieur, nous vous en prions, dit Christiana.

Il les conduisit alors à l'abattoir, où un boucher tuait une brebis ; et voici, la brebis était tranquille et subissait patiemment la mort.

Alors l'Interprète leur dit :

— Vous devez apprendre de cette brebis comment il faut souffrir et supporter les injustices, sans murmurer et sans se plaindre. Voyez avec quelle tranquillité elle accepte la mort, et comment, sans se révolter, elle se laisse arracher la peau de dessus les oreilles. Votre Roi vous nomme ses brebis.

Ensuite, il les conduisit dans son jardin, où se trouvait une grande variété de fleurs. Puis il leur dit :

— Voyez-vous ces fleur ?

— Oui, répondit Christiana.

— Remarquez que toutes sont différentes les unes des autres, quant à la grosseur, la couleur, le parfum et la qualité ; les unes sont plus belles que les autres, cependant elles restent où le jardinier les a placées, sans se quereller.

Il les conduisit encore dans son champ, où il avait semé du blé et du froment, mais elles remarquèrent que tous les épis avaient été coupés, il ne restait plus que la paille.

Il leur dit :

— Ce terrain a été fumé, labouré et ensemencé ; mais que ferons-nous de la récolte ?

— Brûlez-en une partie et faites du fumier avec le reste, dit Christiana.

Alors l'Interprète leur dit :

— Vous recherchez le fruit, et quand vous n'en trouvez pas, vous condamnez la récolte à être brûlée ou foulée aux pieds par les hommes ! Prenez garde de ne pas vous condamner vous-mêmes en disant cela !

En revenant, ils aperçurent un petit rouge-gorge qui tenait une grosse araignée dans son bec.

— Regardez ceci, dit l'Interprète.

Elles regardèrent. Miséricorde s'étonna, mais Christiana dit : — Quel déshonneur pour ce petit rouge-gorge ! un oiseau qui se distingue par sa sociabilité. Je croyais qu'il se nourrissait de miettes de pain ou d'autres aliments inoffensifs. Je l'aime moins maintenant.

L'Interprète répliqua :

— Ce rouge-gorge est l'emblème de certains professants : A première vue, ils ont, comme cet oiseau, une belle apparence, une voix agréable et une bonne conduite ; ils semblent aussi beaucoup aimer ceux qui sont pieux et sincères, et désirer pardessus tout s'associer avec eux, vivre dans leur compagnie, comme s'ils pouvaient se nourrir des miettes de la bonté des autres. C'est pourquoi ils prétendent fréquenter la demeure des justes et les rendez-vous du Seigneur ; mais quand ils sont livrés à eux-mêmes, comme le rouge-gorge, et qu'ils peuvent attraper des araignées et les avaler, ils changent leur régime, boivent l'iniquité et absorbent le péché comme de l'eau.

Quand ils furent rentrés dans la maison, le souper n'étant pas encore prêt, Christiana demanda à l'Interprète de leur montrer, ou de leur expliquer d'autres choses qui pourraient encore leur être profitables.

Celui-ci commença en disant :

— Plus la truie est grosse, plus elle aime la fange ; plus le bœuf est gros, plus il va gaiement à l'abattoir ; et plus vigoureux est le libertin, plus il est enclin au mal.

Les femmes aiment à être belles et parées ; il est bon pour elles d'être ornées de tout ce qui a du prix aux yeux de Dieu.

Il est plus facile de veiller une ou deux nuits, que de rester assis une année entière. Il est aussi plus aisé de bien débuter dans la bonne voie, que de s'y tenir jusqu'à la fin.

Tout capitaine de navire jettera volontiers par-dessus bord, pendant la tempête, ce qui a le moins de valeur dans sa cargaison ; mais lequel voudrait jeter ainsi ce qu'il considérerait comme le meilleur ? Aucun, sauf celui qui ne craint pas Dieu, une seule fissure peut couler un vaisseau, et un seul péché peut causer la perte d'un pécheur.

Celui qui oublie son ami est ingrat envers lui, mais celui qui oublie son Sauveur est sans miséricorde envers lui-même.

Celui qui vit dans le péché, croyant qu'il trouvera le bonheur, ressemble à celui qui sème de l'ivraie, et s'imagine qu'il pourra remplir sa grange de blé ou d'orge.

Si un homme veut vivre justement, qu'il pense constamment à son dernier jour.

Les chuchotements et les pensées changeantes prouvent que le péché existe dans le monde.

Si le monde, que Dieu estime si léger, a une telle valeur aux yeux des hommes, qu'est le ciel où Dieu règne ?

Si la vie, traversée de tant de maux et de difficultés, est, pour nous, si difficile à quitter, qu'est la vie future ?

Chacun loue la bonté des hommes ; mais qui est ému, comme il le devrait, par la bonté de Dieu ?

Il est rare que nous prenions nos repas, sans laisser une partie des aliments qui le composent ; de même, Jésus-Christ a plus de mérite et de justice qu'il n'en faut pour le monde entier.

Quand l'Interprète eut fini de parler, il conduisit de nouveau les voyageurs dans le jardin, et il les mena vers un arbre dont l'intérieur était tout pourri et vidé, et qui cependant, croissait et portait des feuilles.

— Que signifie ceci ? demanda Miséricorde.

— Cet arbre, dont l'extérieur est beau, mais dont l'intérieur est pourri, est l'image de beaucoup de ceux qu'on trouve dans le jardin de Dieu, qui ont la bouche pleine de son nom, mais qui ne font rien pour lui. Leurs feuilles sont belles, mais leur cœur n'est bon qu'à servir d'amadou pour le briquet du diable.

Le souper étant prêt, la table dressée, et toutes choses en place, ils s'assirent et mangèrent, après que l'un d'eux eut rendu grâce. L'Interprète offrait ordinairement de la musique pendant le repas à ceux qu'il recevait à sa table. Les musiciens se mirent donc à jouer ; l'un d'eux, qui avait une fort belle voix, chanta :

O Jésus, bon Berger !
pour tes heureux troupeaux
Il n'est point de disette ;
Sous ta sainte houlette,
Tu diriges mes pas
près des tranquilles eaux.

C'est toi qui chaque jour
viens restaurer mon cœur.
Dans ta bonté propice ;
Aux sentiers de justice
Pour l'amour de ton nom,
tu me conduis, Seigneur.

Quand les chants et la musique cessèrent, l'Interprète demanda à Christiana ce qui l'avait engagée tout premièrement à entreprendre son pèlerinage. Elle répondit :

— Tout d'abord, la perte de mon mari me vint à l'esprit, et me chagrina profondément ; mais cela ne provenait que de l'affection naturelle. Ensuite, je me souvins des angoisses et du pèlerinage de mon mari, et de ma conduite brutale envers lui. Je me sentis si corrompue que j'aurais voulu me jeter dans l'étang. A ce moment opportun, j'eus un songe qui me révéla le bien-être de mon mari, et une lettre me fut envoyée, par le Roi du pays où il habite, pour m'inviter à venir le rejoindre. Le rêve et la lettre, ensemble, firent une telle impression sur mon esprit que je fus forcée de me mettre en route.

— Mais n'avez-vous rencontré aucune opposition avant de quitter votre demeure ?

— Oui, une de mes voisines, Madame Timorée — une parente de celui qui voulait persuader mon mari de revenir en arrière, de crainte des lions — railla ce qu'elle appelait mon entreprise désespérée. Elle fit tout ce qu'elle put pour me dissuader, en me rappelant les angoisses et les difficultés que mon mari avait rencontrées pendant son voyage; mais je surmontai tout cela. Cependant, un rêve dans lequel je vis deux méchants hommes qui complotaient de me faire manquer mon voyage, me troubla beaucoup. Je l'ai encore présent à l'esprit, et il me fait redouter tous ceux que je rencontre; je crains toujours qu'ils ne veuillent me faire du mal, et me détourner de mon chemin. Je puis dire à mon Seigneur, quoique je ne désire pas que tout le monde le sache, qu'entre cette maison et la porte par laquelle nous sommes entrées, nous avons été si, cruellement attaquées que nous avons dû crier : « A l'assassin ! » et les deux hommes qui nous livrèrent cet assaut ressemblaient à ceux que j'avais vus dans mon rêve.

— Tu as bien commencé, dit l'Interprète, et la fin de ton voyage sera encore meilleure.

Puis, il s'adressa à Miséricorde et lui dit :

— Et qui t'a engagée à venir ici, bien-aimée ?

Miséricorde rougit, trembla, et resta un moment silencieuse.

— Ne crains point, crois seulement, et dis-moi ce que tu penses.

— En vérité, Monsieur, mon manque d'expérience me rend silencieuse et me remplit de la crainte de rester court. Je ne puis parler de visions et de rêves comme mon amie Christiana, j'ignore aussi ce que c'est que de déplorer le refus de suivre les conseils de bons parents.

— Qu'est-ce donc, chère aimée, qui t'a engagée à faire ce que tu as fait ?

— Eh bien, quand notre amie que voici faisait ses préparatifs de départ, je vins, par hasard, la visiter avec une autre personne. Nous heurtâmes à sa porte, et, une fois entrées, nous lui demandâmes ce qu'elle faisait. Elle nous répondit qu'elle avait été invitée à rejoindre son mari, et elle nous raconta comment elle l'avait vu, en rêve, habitant un curieux endroit en compagnie d'Immortels. Elle nous dit qu'il portait une couronne, jouait de la harpe, mangeait et buvait à la table de son Prince et le louait pour l'avoir introduit dans ce lieu, etc. Il me semblait, tandis qu'elle nous racontait ces choses, que mon cœur brûlait au-dedans de moi. Et je me disais : « Si c'était vrai, je quitterais volontiers mon père et ma mère, et le lieu où je suis née, et j'accompagnerais Christiana ». Je la questionnai plus tard sur la vérité de son récit, et lui demandai si elle me permettait de la suivre, car je voyais qu'on ne pouvait plus habiter notre ville sans courir le danger de la destruction. Je partis le cœur lourd, non que je fusse fâchée de m'en aller, mais à cause des parents que je laissais derrière moi. Et je suis venue, selon le désir de mon coeur. Si je puis, j'irai avec Christiana rejoindre son mari et son Roi.

— Ton départ est bon, car tu as cru à la vérité. Tu es une Ruth qui, pour l'amour de Noémi et de son Dieu, a quitté père et mère, et sa patrie, pour se rendre auprès d'un peuple qu'elle ne connaissait pas auparavant. « Que l'Eternel te rende ce que tu as fait, et que ta récompense soit entière de la part de l'Eternel, le Dieu d'Israël, sous les ailes duquel tu es venue te réfugier ! » (Ruth 2.11-12)

Le souper terminé, on se prépara à aller se coucher. Les femmes eurent chacune leur chambre, et les garçons en partagèrent une entre eux. Quand Miséricorde fut au lit, elle ne put s'endormir, tant elle était joyeuse, car ses craintes d'échouer étaient plus éloignées d'elle que jamais. Elle se reposa en bénissant et en louant Dieu qui l'avait ainsi comblée de sa faveur.

Elles se levèrent avec le soleil, et se préparèrent à partir mais l'Interprète voulut les faire rester encore un moment, « car, » dit-il, « vous devez partir d'ici en ordre ».

Puis il dit à la jeune fille qui leur avait ouvert la porte, la veille

— Emmène-les au jardin, et fais-leur prendre un bain ; lave les et purifie les de la souillure qu'elles ont amassée en voyageant.

Alors la jeune Innocente les conduisit au jardin, à l'endroit du bain, et leur dit qu'elles devaient se laver et se nettoyer, comme son maître désirait que fissent toutes les femmes qui s'arrêtaient chez lui, pendant leur pèlerinage.

Elles se lavèrent donc, et se nettoyèrent, ainsi que les garçons. Quand ils sortirent tous du bain, non seulement leur peau était douce et propre, mais toutes leurs jointures et leurs muscles étaient fortifiés et vivifiés. En rentrant à la maison, les Pèlerines paraissaient beaucoup plus belles que lorsqu'elles se rendaient au bain.

L'interprète les prit alors par la main, les regarda, et leur dit : « Vous êtes belles comme le soleil ! » Puis il demanda le sceau avec lequel il scellait tous ceux qui s'étaient lavés dans son bain. On le lui apporta, et il posa sa marque sur elles, afin qu'on pût les reconnaître partout où elles iraient. Ce sceau était le contenu et la substance de l'agneau pascal que mangèrent les enfants d'Israël lorsqu'ils sortirent du pays d'Egypte; (Exode 12.8-10) et la marque fut posée entre leurs yeux; elle augmenta leur beauté, car c'était un ornement pour leur visage ; elle ajoutait aussi de la gravité à leur maintien et le rendait plus semblable à celui des anges.

Alors l'Interprète dit à la jeune fille qui s'occupait de ces femmes :

Va au vestiaire, et cherche des vêtements pour ces pèlerins. Elle alla et rapporta des vêtements blancs (Apocalypse 19. 8) qu'elle déposa devant lui ; il lui commanda de les en revêtir ; c'était du « fin lin, blanc et pur ».

Quand les femmes furent ainsi parées, elles eurent peur l'une de l'autre, car elles ne pouvaient voir, sur elles-mêmes, la gloire qu'elles remarquaient l'une sur l'autre. Chacune commença alors à considérer l'autre meilleure qu'elle-même.

— Vous êtes plus belle que moi, disait l'une.

—Vous êtes plus agréable à voir que moi, répondait l'autre.

Les enfants étaient aussi fort étonnés de voir comment on les avait habillés.

L'Interprète appela alors un de ses serviteurs, nommé Grand Cœur, et lui ordonna de prendre une épée, un Basque et un bouclier.

— Accompagne mes filles, lui dit-il, conduis-les au palais nommé Plein de Beauté, où elles doivent se reposer.

Grand Cœur prit ses armes et marcha devant elles. Et l'Interprète leur dit : « que Dieu vous aide ! » Les autres membres de la famille leur adressèrent aussi de nombreux souhaits. Ainsi, elles continuèrent leur route en chantant :

Seigneur ! partout sur cette terre
Tu vois et garde tes brebis,
Et sous tes yeux, comme un bon père,
Avec amour tu les conduis !

C'est ton esprit qui leur envoie,
Pour les nourrir, tes Serviteurs,
Et qui leur aplanit la voie
Où tu répands mille douceurs,

Si quelque danger se présente
Ta force est leur ferme rempart ;
Et ta promesse consolante
De leur cœur est la bonne part.

Oh ! quelle paix, Berger fidèle,
Que celle dont nous jouissons !
Aussi vers la gloire éternelle,
En sûreté, nous avançons.

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