Commentaire sur les Actes des Apôtres

Chapitre XX

20.1

Or, après que le tumulte eut cessé, Paul, ayant fait appeler les disciples et les ayant exhortés, prit congé d’eux et partit pour aller en Macédoine.

Saint Luc explique en ce chapitre, comment saint Paul partant d’Asie, a derechef passé la mer pour aller à Jérusalem. Or combien que tout ce qui est ici écrit, mérite bien d’être soigneusement médité, nonobstant il n’a point besoin de longue exposition. On peut bien voir que l’Eglise a été gardée par une vertu admirable de Dieu au milieu de ces tempêtes bouillantes. L’Eglise était bien tendre et faible en la ville d’Ephèse ; et les fidèles ayant une fois expérimenté cette émotion soudaine, pouvaient à bon droit être étonnés, et craindre que semblables tourbillons et orages ne se levassent derechef. Il ne faut douter que ce n’ait été à grand regret que S. Paul s’est séparé d’eux ; toutefois pour ce qu’une plus grande nécessité le tire ailleurs, il est contraint de laisser comme en une mer tempêtueuse ceux qui lui étaient comme enfant de naguère engendrés, à grand peine échappés et tirés hors d’un péril. Et quant à eux, combien qu’ils soient grandement fâchés et marris du départ de S. Paul, néanmoins afin qu’ils ne fassent tort aux autres Eglises, ils ne le retiennent et ne le retardent point. Ainsi nous voyons qu’ils n’ont point été adonnés à eux-mêmes ; mais qu’ils ont eu soin et affection au royaume de Christ, afin qu’ils procurassent en commun tant leur bien que le bien de leurs frères. Ces exemples sont dignes d’être diligemment observés ; afin qu’au milieu de cette misérable dissipation nous fassions notre effort d’aider les uns aux autres. Que si quelque fois il advient que nous soyons destitués d’aides utiles, il nu faut point toutefois que nous chancelions, sachant que Dieu tient le gouvernail de notre navire. Et il nous faut noter que S. Paul ne s’en va point sans saluer les frères ; mais plutôt il les fortifie en prenant congé, comme S. Luc tantôt après expliquera des Macédoniens, que saint Paul les exhorta par beaucoup de paroles ; c’est-à-dire non point à la légère, comme s’il suffisait qu’ils fussent exhortés seulement de leur office ; mais sollicitant jusques à importunité, et inculquant vivement les choses qui sont nécessaires de connaître (ainsi qu’il commande ailleurs qu’on fasse, 2 Timothée 4.2) afin que la mémoire ne s’en perdît.

20.2

Et après avoir parcouru cette contrée, et exhorté les frères par beaucoup de discours, il vint en Grèce.

20.3

Et quand il y eut demeuré trois mois, comme les Juifs lui dressèrent un guet-apens au moment où il allait s’embarquer pour la Syrie, il fut d’avis de s’en retourner par la Macédoine.

Dieu a ainsi exercé son serviteur en diverses sortes et par combats continuels, afin qu’en lui il nous proposât devant les yeux un exemple de constance invincible. Ce n’est point assez qu’il soit rompu du labeur et fâcherie de long chemin et difficile ; mais il y a avec cela le danger de sa vie, par les gens postés sur son chemin et les embûches. Que tous les serviteurs de Christ se mettent incessamment ce miroir devant les yeux, afin que l’ennui de quelques difficultés que ce soient ne leur fasse jamais perdre courage. Toutefois quand saint Paul dressant son chemin ailleurs, évite les embûches qui lui étaient préparées, il veut bien en même temps montrer que nous devons avoir égard à notre vie jusques-là, que nous ne nous jetions point follement dedans le milieu des dangers. Quant à ceux qui lui font compagnie, ils rendent un témoignage excellent de la crainte qu’ils ont de Dieu ; et nous voyons combien sa vie a été précieuse aux fidèles, vu que plusieurs choisis de diverses nations pour lui faire compagnie, entreprennent pour l’amour de lui un voyage pénible et difficile, et lequel ne se pouvait faire sans grands frais. Saint Luc dit que S. Paul s’arrêta à Philippes durant les jours des pains sans levain ; pour autant qu’alors il y avait meilleure opportunité d’enseigner. Et comme ainsi soit que l’abrogation de la Loi fut encore inconnue, il se devait bien garder qu’en méprisant le jour de fête, les ignorants ne pensassent qu’il fut contempteur de Dieu. Combien qu’il m’est avis qu’il a plutôt cherché opportunité d’enseigner, pour ce que lors les Juifs étaient plus attentifs à apprendre.

20.4

Et il était accompagné jusqu’en Asie par Sopater, fils de Pyrrhus, de Bérée ; par Aristarque et Second de Thessalonique ; par Gaïus de Derbe, et Timothée ; et par les Asiates Tychique et Trophime.

20.5

Or ceux-ci, ayant pris les devants, nous attendaient à Troas.

20.6

Mais nous, après les jours des pains sans levain, nous nous embarquâmes à Philippes, et en cinq jours nous les rejoignîmes à Troas, où nous demeurâmes sept jours.

20.7

Or le premier jour de la semaine, comme nous étions assemblés pour rompre le pain, Paul s’entretenait avec eux, devant partir le lendemain ; et il prolongea son discours jusqu’à minuit.

Ou il entend le premier jour de la semaine, le prochain du Sabbat ; ou bien quelque certain jour de Sabat ; et ce dernier me pourrait sembler plus vraisemblable, pour ce que selon la coutume, ce jour était plus propre pour faire assemblée. Mais puis que ceci n’est pas nouveau aux Evangélistes, de mettre selon l’usage de la langue Hébraïque Un, pour le premier, il conviendra bien si nous disons que le lendemain du Sabat il fit ce sermon. Aussi cela serait trop froid, si on exposait ceci d’un chacun jour. Car a quel propos serait ici faite mention du Sabbat, sinon pour dénoter le choix et quelque opportunité du temps ? Il est aussi vraisemblable que Paul a bien voulu attendre le Sabbat, afin qu’au jour avant son départ il assemblât plus facilement tous les disciples en un même lieu. Or cette ardeur de tous est bien digne d’être observée, que d’un côté saint Paul ne s’est point ennuyé ni fâché d’enseigner jusques à minuit, combien qu’il fut prêt de se mettre en chemin ; et les autres ne se sont ennuyés d’apprendre. Car il n’y a point eu d’autre cause de prolonger son propos, que le zèle et l’affection attentive des auditeurs.

Assemblés pour rompre le pain. Combien que selon les Hébreux Rompre le pain signifie quelque fois manger ou banqueter en la maison, toutefois je l’expose ici de la sainte Cène ; et ce pour deux raisons. Car puisqu’on peut facilement recueillir de ce qui s’ensuit, que là il y eut grande assemblée de gens, il n’est point convenable de dire que le banquet ait peu être apprêté en une maison privée. Puis il sera expliqué ci-après par saint Luc, que Paul a pris le pain, non point au temps du souper, mais après minuit. Joint qu’il ne dit pas qu’il ait pris le pain pour sa réfection, mais seulement pour en goûter. Je conclus donc qu’un jour solennel fut assigné entre eux pour faire la sainte Cène du Seigneur, lequel jour serait le plus commode pour tous. Et afin que saint Paul récompensât aucunement ce que par son absence il serait longtemps sans parler à eux, il prolongea son propos plus que de coutume. Or touchant ce que j’ai dit, que là était une grande multitude de personnes, on le peut recueillir de ce qu’il y avait beaucoup de lampes allumées en la chambre ; et cela n’était point fait pour ostentation, mais pour la nécessité. Car là où on ne fait les choses par nécessité, il n’y a plus qu’ambition et vanité, qui rend les hommes somptueux. Or c’était une chose bien séante, que tout ce lieu fut éclairé de lampes allumées, afin que cette sainte assemblée ne fut exposée à quelque soupçon de vilenie, ou de quelque méfait. Il y a aussi une autre conjecture, à savoir que si la chambre n’eut été remplie, ceux qui étaient là présents n’eussent souffert que ce jeune homme Eutychus se fut assis sur la fenêtre. Car c’eut été une vilaine licence à mépriser et rejeter la doctrine céleste, de s’asseoir à la fenêtre, s’il y eût eu assez de place ailleurs.

20.8

Or il y avait beaucoup de lampes dans la chambre haute où nous étions assemblés ;

20.9

et un jeune homme nommé Eutyche, qui était assis sur la fenêtre, fut accablé d’un profond sommeil, pendant que Paul prolongeait son discours, et, entraîné par le sommeil, il tomba du troisième étage en bas, et fut relevé mort.

Je ne vois point qu’il y ait cause ne raison pourquoi aucuns de ceux qui ont écrit, se courroucent si âprement contre le sommeil de ce jeune homme ; en sorte qu’ils disent que la mort qui s’en était ensuivie, a été une punition de ce qu’il s’était endormi. Car quelle merveille y a-t-il en ceci, si après avoir longtemps combattu contre le sommeil, finalement il est surmonté et comme complètement assommé ? Et on peut facilement conjecturer que contre son vouloir il a été saisi et opprimé de sommeil, parce qu’il n’avait choisi une place qui fut propre pour se reposer et dormir. S’il eût cherché un lieu propre pour dormir, c’eût été un signe de nonchalance et oisiveté. Mais ce qu’étant assis sur une fenêtre, il est abattu et opprimé de sommeil, qu’est-ce autre chose que sans coulpe digne de répréhension succomber sous l’infirmité de nature ? comme si quelque défaillance de cœur survenait par faute de manger, ou de trop grande lassitude. Ceux qui étant plongés dedans les sollicitudes terrestres, viennent avec mépris et dédain pour entendre la Parole ; ceux qui étant remplis de vin et viandes sont appesantis de sommeil ; ceux qui étant vigilants dans les autres choses, entendent par corvée la parole de Dieu, sont dignes que leur nonchalance soit condamnée. Mais quant à Eutychus, S. Luc l’absout en termes exprès, quand il dit qu’étant abattu et emporté de profond sommeil après minuit, il est tombé du haut en bas. Or le Seigneur a voulu réveiller la foi des siens non seulement par le sommeil, mais aussi par la mort de ce jeune homme, afin qu’ils reçoivent plus allègrement la doctrine de Paul, et la retinssent vivement imprimée en leurs cœurs. Il est vrai que du commencement ç’a été une tentation qui n’était pas petite, mais qui pouvait ébranler ou déstabiliser tous les plus constants. Car qui eût pu penser que Christ présidât en cette compagnie, de laquelle un pauvre homme est tombé du haut en bas, et se tue ? Mais plutôt, qui n’eut pensé que ce fut là un signe de la malédiction de Dieu ? Mais le Seigneur ayant donné soudain remède ôta tout le trouble des cœurs de ses fidèles.

20.10

Mais Paul étant descendu, se pencha sur lui, et, l’ayant pris dans ses bras, dit : Ne vous troublez point, car son âme est en lui.

Nous savons que les apôtres ont quelque fois usé de cérémonies extérieures, quand ils ont fait des miracles, par lesquelles ils rapportassent la gloire à Dieu, qui en était auteur. Mais quant à ce que maintenant Paul s’est penché sur ce jeune homme, je ne pense, que cela ail été fait à autre fin, sinon afin qu’il s’incitât à plus grande affection de prier. Il fait autant comme s’il se mêlait avec ce pauvre homme mort. Et peut-être qu’il fait cela a l’imitation d’Elisée, lequel a fait le semblable, comme le témoigne la sainte histoire, 2 Rois 4.34. Toutefois il a été plus incité d’une affection véhémente, que de l’imitation du Prophète. Car cette conjonction l’aiguillonne d’avantage à prier de toute son affection le Seigneur de lui rendre la vie. Ainsi quand il embrasse ce corps mort, il signifie par une telle contenance, qu’il le présente à Dieu pour être vivifié. Et on peut recueillir du texte, qu’il n’a point laissé de l’embrasser, jusques à ce qu’il eût connu que la vie lui était rendue.

Ne vous troublez point. Il faut noter que la principale cause qui a rendu S. Paul ainsi soigneux, ç’a été qu’il craignait que ce fâcheux événement n’ébranlât la foi des fidèles, et ne troublât leurs esprits. Cependant le Seigneur a confirmé entre eux comme d’un cachet engravé le dernier sermon que Paul fit à Troas. Quand il dit que son âme est en lui, il ne dit pas qu’il n’a point été mort (car en cette sorte il ensevelirait la gloire de ce miracle) mais il signifie que la vie lui est rendue par la grâce de Dieu. Ce qui s’ensuit après, qu’ils ont été grandement consolés, je ne le restreins point à la joie qu’ils eurent de ce qu’ils avaient recouvré ce jeune homme ; mais je comprends en même temps la confirmation de la foi, quand Dieu leur eût montré un si excellent témoignage de son amour.

20.11

Et étant remonté, il rompit le pain, et il mangea, et après avoir conversé assez longtemps, jusqu’au point du jour, il partit ainsi.

20.12

Or, on ramena le jeune homme vivant, et ils furent grandement consolés.

20.13

Pour nous, prenant les devants sur le vaisseau, nous fîmes voile vers Assos, où nous devions reprendre Paul ; car il l’avait ainsi ordonné, lui-même devant faire le chemin à pied.

On ne saurait pas bien dire pourquoi saint Paul a mieux aimé d’aller par terre, ou si ç’a été qu’il lui fâchât de monter sur mer, ou pour visiter les frères en passant. De moi, je pense qu’il a fui lors la mer pour sa santé. Au reste, son humanité est bien digne d’être louée, en ce qu’il épargne ses compagnons. Car pourquoi est-ce qu’il les a renvoyés d’avec soi, sinon pour les relever de fâcherie ? Nous voyons bien par cela qu’ils se sont montrés prompts à user d’humanité, et faire plaisir les uns aux autres. Les compagnons de saint Paul ont été prompts à lui faire service ; et quant à lui, tant s’en faut qu’il ait été rigoureux exacteur, que plutôt il a quitté bénignement et de son bon gré les services qu’ils étaient prêts de lui faire ; et qui plus est, laissant derrière sa propre commodité, il a pourvu à leur soulagement. Quant à la ville d’Assos, il est tout notoire que les Géographes l’attribuent à Troas. Cette même ville a été dite Apollonie selon le témoignage de Pline. ils ont laissé par écrit que ç’a été une colonie des Etoliens.

20.14

Et quand il nous eut rejoints à Assos, nous le prîmes à bord et nous vînmes à Mitylène.

20.15

Et étant partis de là par mer, nous arrivâmes le lendemain en face de Chios. Le jour suivant, nous abordâmes à Samos, et après nous être arrêtés à Trogylle, nous arrivâmes le lendemain à Milet.

20.16

Car Paul avait résolu de passer devant Ephèse sans s’y arrêter afin qu’il ne lui arrivât pas de perdre du temps en Asie ; car il se hâtait pour être à Jérusalem le jour de la Pentecôte, si cela lui était possible.

Il n’y a point de doute que Paul n’ait eu des causes grandes et nécessaires de se hâter ; non pas qu’il eût quelque dévotion au jour ; mais pour ce que les étrangers avaient coutume de venir en Jérusalem de toutes parts, et en grande multitude en ces jours de fête. Comme ainsi soit qu’il espérât de profiter de quelque manière en une si grande multitude de gens, il n’a point voulu laisser cette occasion. Sachons donc que ce n’a point été pour observer les cérémonies de la Loi qu’il s’est ainsi hâté ; mais qu’il s’était proposé l’utilité de l’Eglise ; en partie afin qu’il racontât aux fidèles que le royaume de Christ s’était étendu ; en partie aussi afin que s’il y en avait encore qui fussent étranges de Christ, il les gagnât ; en partie aussi à cette fin qu’il repoussât les calomnies des méchants. Toutefois il nous faut noter qu’il pourvoit cependant aux autres Eglises. Car faisant venir à soi les Anciens d’Ephèse à Milet, il donne bien à entendre comment il était soigneux de l’Asie. Et quant à ce qu’ils ne font difficulté de venir, étant appelés, c’est un signe non seulement de concorde, mais aussi de modestie. Car combien qu’ils fussent plusieurs, néanmoins il ne leur fâche point de rendre obéissance à un seul apôtre de Christ, lequel ils savaient être doué de dons excellents. Au surplus, on pourra facilement connaître par la déduction du texte, que les Anciens sont ici appelés ceux qui présidaient, et avaient le gouvernement de l’Eglise, et non pas ceux qui étaient plus anciens d’âge. Or ceci est usité presque en toutes langues, qu’on appelle anciens et pères ceux qui sont commis pour conduire et gouverner les autres, combien que l’âge ne réponde pas toujours au mot.

20.17

Mais de Milet il envoya à Ephèse, et fit appeler les anciens de l’Eglise.

20.18

Et lorsqu’ils furent arrivés vers lui, il leur dit : Vous savez, depuis le premier jour où je suis arrivé en Asie, comment je me suis conduit avec vous tout le temps,

En ce sermon saint Paul s’arrête principalement sur ce point, d’exhorter ceux qu’il avait ordonnés Pasteurs à Ephèse, qu’à son exemple ils exécutent fidèlement leur charge. Car voilà comment une censure se fera bien, et comment autorité sera donnée à la doctrine, quand celui qui se mêle d’enseigner, ne commande rien par paroles, que lui-même n’ait montré par effet auparavant. Or quant à S. Paul, il ne lui messied point de raconter ses vertus. Il est vrai qu’il n’y a rien moins tolérable dans les serviteurs de Christ, que l’ambition et vanité ; mais comme ainsi soit que tous connaissaient bien quelle était la modestie et humilité de saint Paul, il ne fallait pas craindre qu’il tombât en soupçon de vaine vanterie ; et principalement vu qu’étant contraint par nécessité, il produisait sa fidélité et diligence pour exemple aux autres. Il est vrai qu’il loue hautement ses labeurs, sa patience, sa constance et ses autres vertus. Mais à quel propos ? Ce n’est point, à la vérité, afin qu’il remporte des applaudissements des auditeurs pour cela ; mais à cette fin que sa sainte exhortation ait des aiguillons plus poignants, et demeure vivement imprimée en leurs cœurs. Il y a eu un autre but aussi, à savoir que son intégrité servît pour l’avenir à autoriser sa doctrine. Or il allègue des témoins de vue, afin qu’on ne pense qu’il parle de choses inconnues. Je dis témoins de vue, lesquels non seulement connaissaient le tout, mais aussi qui avaient le jugement pur et non corrompu d’affections quelconques.

20.19

servant le Seigneur avec toute humilité et avec larmes, et au milieu des épreuves qui me sont survenues par les embûches des Juifs ;

Premièrement saint Paul raconte non seulement combien de difficultés il a soutenues, mais il tournait aussi les esprits principalement vers son humilité conjointe avec les opprobres et le mépris du monde, et autres afflictions ; comme s’il disait qu’il n’a point été reçu avec applaudissement et honneur, mais qu’il a conversé entre eux sous la condition de la croix. Or ce n’est point une légère épreuve, quand nous ne défaillons point, combien que nous nous voyons fouler par l’orgueil intolérable du monde. Toutefois il nous faut noter chacun point plus distinctement. Servir au Seigneur, n’est point ici pris pour servir Dieu en sainteté et justice (ce qui est commun à tous fidèles) mais il signifie, Exécuter une charge et office public. saint Paul donc ne parle point comme un homme privé, mais comme un Ministre donné à l’Eglise. Et en cette façon il proteste qu’il s’est acquitté avec toute modestie et humilité de l’Apostolat qui lui avait été commis ; en partie pour ce que connaissant bien sa faiblesse, il se déliait de soi-même ; en partie pour ce que pensant à l’excellence de sa charge, il ne s’estimait être assez suffisant ; en partie aussi pour ce qu’il se soumettait de bon gré à endurer l’opprobre et ignominie de la croix de Christ. Car cette humilité de laquelle il est ici parlé, est opposée tant à une assurance procédant de présomption, qu’à la hautesse de courage.

Il ajoute de plus les larmes, lesquelles il jetait pour les combats, les divers assauts de Satan, la cruauté des méchants, les maladies intérieures de l’Eglise, et les scandales horribles survenant de toutes parts. Finalement il ajoute qu’il a été en tremblement pour les embûches des Juifs, et il confesse qu’il a été éprouvé par celles-ci, comme il n’était point d’acier ne de fer, combien qu’il n’a point succombé sous le fardeau. Ainsi nous voyons qu’il n’a point de honte de confesser son infirmité. Or son but est, que ceux à qui il adresse son propos, ne succombent point sous semblables ennuis et fâcheries ; et qu’étant vides de toute ambition, ils exercent leur office soigneusement et en toute révérence ; et que non seulement ils endurent en patience d’être méprisés et rejetés par les hommes, mais aussi qu’ils soient petits en eux-mêmes. Car celui qui aura en son cœur je ne sais quoi de haut, ne sera jamais bien disposé à servir à Christ. Et pour autant que quelque faux semblant de vertu ne peut longuement durer, afin qu’on connaisse qu’il s’est ainsi porté purement et en rondeur, il met en avant sa constance de trois ans, durant lequel temps il avait gardé une même façon. Vous savez, dit-il, quel j’ai été en tout le temps depuis le premier jour. Voilà la vraie épreuve des fidèles serviteurs de Christ, de ne changer point selon les diverses mutations des temps, mais demeurer toujours en un état, et tenir toujours le droit chemin.

20.20

comment je ne vous ai rien caché des choses qui vous étaient utiles, pour me dispenser de vous prêcher et de vous enseigner, en public et de maison en maison ;

Il loue en trois sortes la fidélité de laquelle il a usé en enseignant, et sa diligence. Premièrement, d’autant qu’il a enseigné les disciples d’une façon solide et entière, en sorte qu’il n’a rien omis de ce qui servait à leur salut ; secondement, que ne se contentant point de prêcher en général, il a tâché aussi de faire profiter tout un chacun en particulier ; et finalement il explique un bref sommaire de toute sa doctrine, qu’il les a exhortés à la foi qui est en Christ, et à repentance. Or maintenant puisqu’il nous peint un patron d’un docteur fidèle et craignant Dieu, il faut que tous ceux qui veulent que le Seigneur approuve leur ministère et labeur, aient pour un certain but l’édification de l’Eglise de Dieu proposée devant leurs yeux ; comme il commande ailleurs à Timothée, de considérer de bien près ce que sont les choses utiles, pour s’arrêter à les enseigner, 1 Timothée 4.7-8. Et de fait, l’Ecriture (à la règle de laquelle il faut rapporter toute façon d’enseigner, et pour mieux dire, laquelle est la seule méthode de bien enseigner) ne contient point des spéculations subtiles, lesquelles donnent plaisir en l’ombre et en repos, mais selon le témoignage même de S. Paul, elle est toute utile, pour rendre l’homme de Dieu parfait, 2 Timothée 3.17. Mais saint Paul montre que le Pasteur doit avoir telle affection d’édifier, qu’il n’omette rien, en tant que cela dépend de lui, de tout ce qui est utile à connaître. Car les maîtres qui détiennent tellement les disciples aux premiers rudiments, qu’ils ne parviennent jamais à la connaissance de vérité, font perversement. Et de fait, le Seigneur ne nous instruit pas seulement à demi en sa Parole, mais il enseigne une sagesse parfaite et en toutes sortes accomplie. Dont il apparaît de quelle impudence se vantent être Ministres de la Parole, ceux qui non seulement couvrent et entretiennent l’ignorance du peuple par leur silence, mais aussi ferment les yeux à des erreurs si lourdes, et des superstitions si méchantes, comme aujourd’hui plusieurs font en la Papauté, lesquels manifestement afficheront quelques étincelles de la pure doctrine, mais ils n’osent chasser les ténèbres d’ignorance. Et comme ainsi soit qu’une perverse crainte de la chair les empêche, toutefois ils se couvrent de ce sac mouillé, que le peuple n’est point capable de ferme doctrine. Je confesse bien que toutes choses ne peuvent être ensemble enseignées, et qu’il faut ensuivre la prudence de S. Paul, qui s’est accommodé à la capacité des simples et ignorants. Mais de quelle modération s’agit-il, quand ils laissent les aveugles tomber dans la fosse, quand ils laissent les pauvres âmes sous la tyrannie de l’Antéchrist ; et combien qu’ils voient régner l’idolâtrie, le service de Dieu être corrompu, la Loi être violée, bref toutes choses saintes être profanées ? néanmoins ou ils laissent passer une si vilaine et horrible confusion en ne disant mot, ou bien ils la montrent obscurément et en épargnant, comme gens qui n’y osent pas toucher ? Il nous faut donc noter le mot de Paul, quand il dit qu’il n’a rien omis qu’il n’annonçât toutes les choses qui étaient utiles au peuple. Car nous recueillons de ceci, qu’il est requis des serviteurs de Christ, qu’ils fassent une profession pure et franche de la vraie doctrine ; et n’y a rien qui leur soit plus mal séant, que de procéder par façons obliques, et enveloppées d’une dissimulation cauteleuse.

Publiquement et par les maisons. C’est le second point, que non seulement il les a enseignés tous en l’assemblée, mais un chacun en particulier, selon que la nécessité le requérait. Car Christ n’a point ordonné des Pasteurs ou Ministres à cette condition, que seulement ils enseignent l’Eglise en commun en chaire publique, mais aussi qu’ils aient le soin de chacune brebis, qu’ils ramènent au troupeau celles qui sont égarées, qu’ils raffermissent celles qui sont fourbues et abattues, qu’ils donnent remède à celles qui sont malades, qu’ils soulagent celles qui sont faibles et accablées, Ezéchiel 34.4. Car la doctrine commune sera souvent froide, si elle n’est aidée par admonitions particulières. Par quoi on ne pourrait nullement excuser la nonchalance de ceux qui ayant fait un sermon, passent le reste du temps en oisiveté, comme s’ils avaient fait leur journée ; comme si leur voix était enfermée au temple, vu que depuis qu’ils en sont sortis, ils demeurent complètement muets. Les disciples aussi sont exhortés que s’ils veulent être réputés du troupeau de Christ, il faut qu’ils donnent lieu aux Pasteurs toutes les fois qu’ils viennent a eux ; et qu’il ne faut point refuser les admonitions particulières. Car ceux qui ne daignent point écouter la voix du Pasteur sinon en lieu public, et ne peuvent souffrir d’être repris et exhortés en particulier, mais repoussent fièrement un service si nécessaire, sont plutôt ours que brebis.

20.21

rendant témoignage, tant aux Juifs qu’aux Grecs, de la repentance envers Dieu et de la foi en notre Seigneur Jésus-Christ.

Il vient maintenant au troisième point, et comprend en bref la somme de sa doctrine ; à savoir qu’il les a exhortés tous à foi et repentance, comme on a vu ci-dessus que l’Evangile consiste seulement en ces deux parties. Et on peut bien aussi recueillir de ceci, en quoi réside proprement la vraie édification, de l’Eglise, de laquelle le soin et la charge appartient aux Pasteurs, et à quelle fin il nous faut appliquer toute notre étude, si nous voulons bien profiter en l’école de Dieu. Nous avons déjà remarqué que la parole de Dieu est profanée, quand les lecteurs de celle-ci s’amusent en des questions frivoles. Mais afin que nous ne vaguions çà et là en la lisant, il nous faut retenir ces deux buts que S. Paul nous propose. Car quiconque se détournera ailleurs, en se tracassant beaucoup, il ne fera autre chose que tourner à l’entour d’un cercle. Or par ce mot de Témoigner, il exprime une véhémence plus grande ; comme s’il disait qu’il leur a recommandé avec attestation, afin qu’il n’y eût nulle excuse d’ignorance. Car il fait allusion à la façon de faire des avocats en plaidoiries, lesquels interposent attestations pour ôter toute doute. Comme aussi les hommes ne doivent point être seulement enseignés, mais aussi pressés, à ce qu’ils embrassent le salut en Christ, et qu’ils s’adonnent à Dieu en nouveauté de vie. Or combien qu’il affirme qu’il n’a défailli à personne, toutefois il met les Juifs au premier lieu, pour ce que tout ainsi que Dieu les avait préférés aux Gentils en degré d’honneur, aussi a-t-il fallu que Christ leur ait été offert avec sa grâce, jusques à ce qu’ils se fussent complètement révoltés.

La repentance qui est envers Dieu. Premièrement il nous faut noter la distinction qui est entre la foi et la repentance, lesquelles aucuns confondent par ignorance et sans propos, quand ils disent que la repentance est une partie de la foi. le confesse bien qu’elles ne peuvent être séparées, d’autant que Dieu n’illumine homme quelconque par l’Esprit de la foi, que en même temps il ne le régénère en nouveauté de vie. Toutefois il est nécessaire qu’elles soient distinguées, comme saint Paul les distingue en ce passage. Car la repentance est une conversion, à Dieu, quand nous réglons et nous et toute notre vie à lui rendre obéissance. Mais la foi est une réception de la grâce qui nous est offerte en Christ. Car toute la religion tend à ce but, qu’en vivant saintement et honnêtement, nous servions au Seigneur ; et puis après, que nous n’attendions aucune partie de notre salut d’ailleurs que de lui, et ne la cherchions ailleurs qu’en Christ. Par ainsi la doctrine de repentance contient la règle de bien vivre, et requiert le renoncement de nous-mêmes, la mortification de notre chair, et la méditation de la vie céleste. Mais pour ce que nous sommes tous corrompus de nature, éloignés de la justice, et détournés de Dieu même ; d’avantage, pour ce que nous fuyons Dieu, lequel nous savons être courroucé contre nous, il faut nécessairement que le moyen pour obtenir tant la réconciliation gratuite, que la nouveauté de vie nous soit proposé. Par quoi si la foi n’y est en même temps conjointe, on ne gagnera rien de nous parler de la repentance. Et même ceux qui enseignent la repentance, et laissant là la foi, s’arrêtent seulement à former la vie, et ordonner les bonnes œuvres, ne sont en rien différents, ou bien peu, des Philosophes profanes. Ils enseignent bien comment il faut vivre ; mais vu qu’ils laissent les hommes en leur nature, on ne peut espérer de cela aucune réformation en mieux, jusques à ce qu’ils appellent à l’espérance de salut les pauvres gens qui étaient perdus, qu’ils vivifient ceux qui étaient morts, leur promettant la rémission de leurs péchés, et qu’ils montrent que par adoption gratuite Dieu reçoit pour enfant ceux qui étaient auparavant esclaves de Satan ; qu’ils enseignent qu’on doit demander l’Esprit de régénération au Père céleste, et qu’il faut puiser de lui la vraie sainteté, justice et droiture, comme de la fontaine de tous biens. Et de là s’ensuit l’invocation, laquelle tient le premier lieu au service légitime de Dieu. Nous voyons maintenant comment la repentance et la foi sont conjointes ensemble d’un lien inséparable. Car la foi est celle qui nous fait obtenir la grâce de Dieu, non seulement à ce qu’il nous soit favorable, nous délivrant de la condamnation de mort, en ne nous imputant point nos péchés, mais aussi afin que nettoyant les ordures de notre chair par son Esprit, il nous reforme à son image. Il ne met point la repentance en premier lieu, pour dire qu’elle précède la foi en tout et partout, vu qu’une partie de celle-ci procède de la foi et en est un effet ; mais pour ce que le commencement de repentance est une préparation à la foi. J’appelle Commencement, le déplaisir de nous-mêmes, lequel nous touchant au vif de la crainte du jugement de Dieu, nous incite à chercher le remède de nos maux.

Et la foi en notre Seigneur Jésus. Ce n’est point sans cause que l’Ecriture nous propose communément Jésus-Christ pour le but et objet de la foi. Car la majesté de Dieu est si haute de soi, que les hommes n’y peuvent pas monter. Si donc Christ ne survient au milieu, tous nos sens s’évanouiront eu cherchant Dieu. Davantage, en tant qu’il est juge du monde, il ne se peut faire que son regard sans son Fils ne nous rende éperdus de frayeur. Or non seulement Dieu se représente à nous en Christ, qui est son image, mais aussi il nous restaure par sa faveur paternelle, et nous remet en vie en toutes sortes. Car il n’y a partie de notre salut qui ne soit trouvée en Christ. Il a effacé nos péchés et offenses par le sacrifice de sa mort ; il a soutenu la peine à cette fin que nous fussions absous ; il nous a nettoyés par son sang ; il a apaisé l’ire du Père par son obéissance ; il nous a acquis justice par sa résurrection. Il ne se faut donc étonner de ce que nous avons dit que la foi doit être complètement attachée à contempler Jésus-Christ.

20.22

Et maintenant voici, lié par l’Esprit, je vais à Jérusalem, ne sachant pas ce qui m’y arrivera ;

Il déclare maintenant plus amplement pourquoi il a parlé de son intégrité et rondeur ; à savoir d’autant qu’ils ne devaient plus voir sa face. Or il était bien requis qu’ils eussent devant les yeux incessamment ce patron, qui leur était proposé de Dieu pour imitation, et que la mémoire de celui-ci après sa mort, demeurât néanmoins toujours en vie. Car nous savons combien il est facile aux hommes de se dévoyer de la pure institution. Au reste, combien qu’il dise qu’il ne sait pas ce qui lui devait advenir en Jérusalem, toutefois pour ce qu’il avait été averti par plusieurs oracles, que les liens lui étaient là préparés, il retranche bientôt après l’espérance de son retour, comme étant prêt de souffrir la mort. Et néanmoins en parlant ainsi, il ne se contredit point. Il est bien vrai que tout à propos il fait une préface douteuse, afin qu’il adoucisse ce qui eût été aux autres fâcheux à entendre ; toutefois il parle en vérité quand il affirme que les événements lui sont encore inconnus ; car il n’avait point certaine et spéciale révélation de toute la procédure.

Lié par l’Esprit. D’aucuns exposent ceci, qu’il a été obligé aux Eglises qui lui avaient donné charge de porter les aumônes. Toutefois il me semble plutôt qu’ici est dénotée une véhémence et impulsion intérieure du Saint Esprit, non pas qu’il ait été hors du sens, comme sont les fantastiques ; mais pour ce qu’étant certifié de la volonté de Dieu, il suivait la conduite intérieure ou l’instinct du Saint Esprit, de son bon gré et paisiblement. Cette façon de parler donc vaut autant comme s’il eût été dit : Je ne peux faire autrement, sinon que je veuille être rebelle contre Dieu, lequel me tire là comme étant lié de son Esprit. Car afin qu’il s’excuse de témérité, il témoigne que le S. Esprit est auteur et guide de son voyage. Mais plût à Dieu que plusieurs frénétiques, lesquels se vantent que tout ce qui leur vient en fantaisie, leur est dicté par l’Esprit, connussent si bien et familièrement l’Esprit que S. Paul ; lequel toutefois ne dit point que tous ses mouvements ou instigations fussent du Saint Esprit, mais annonce que cela lui est advenu comme une chose singulière en ce cas. Car les hommes entreprennent souvent beaucoup de choses follement et sans considération, lesquelles ils exécutent puis après avec obstination, pour ce qu’ils ont honte d’être réputés inconstant. Et non seulement il signifie qu’il a juste et bonne cause d’entreprendre ce voyage, auquel l’Esprit de Dieu le poussait, mais aussi qu’il lui est du tout nécessaire, d’autant que c’eût été mal fait de résister à l’encontre. Au surplus, apprenons à l’exemple de ce saint personnage, de ne regimber point contre l’Esprit de Dieu, mais de nous soumettre à lui en toute humilité et obéissance, pour être gouvernés par lui, afin que selon son bon plaisir il nous mène comme liés ; et cependant que nous ne soyons point traînés par force. Car si les réprouvés, qui sont sous la servitude de Satan, vont selon qu’il les pousse non seulement de leur bon gré, mais aussi de grand désir ; combien en comparaison cette sujétion volontaire doit-elle avoir lieu chez les enfants de Dieu ?

20.23

si ce n’est que, de ville en ville, l’Esprit saint me rend témoignage, disant que des liens et des tribulations m’attendent.

Je n’entends point ceci des oracles secrets, mais des prophéties lesquelles de lieu en autre il entendait des Prophètes. Or cette façon de parler a plus de poids pour magnifier les prophéties, que si les hommes mêmes qui ont parlé, étaient allégués pour témoins. Car c’est ainsi que la parole de Dieu a son autorité, quand nous savons que Dieu en est auteur, combien que les hommes en soient ministres. Or maintenant vu que le même Esprit qui avait averti Paul de ses liens et afflictions, c’est lui aussi qui le tient lié, afin qu’il ne refuse point de se soumettre à lui, nous sommes enseignés par cela, que quelques difficultés qui nous soient présentées, nous ne sommes pas pourtant absous, qu’il ne nous faille obéir aux commandements de Pieu, et suivre sa vocation. Ceux donc se flattent en vain lesquels limitent le devoir de bien faire, en tant qu’on le peut faire sans fâcherie ; et qui mettent en avant pour excuse les dommages et pertes ; en somme, le danger de mort.

20.24

Mais je ne tiens aucun compte de ma vie, en sorte que j’achève ma course et le ministère que j’ai reçu du Seigneur Jésus, pour rendre témoignage à l’Evangile de la grâce de Dieu.

Il faut que tous les fidèles, et principalement les Ministres de la Parole, soient tellement disposés en leurs cœurs, que laissant toutes choses, ils suivent leur droit chemin pour rendre obéissance à Dieu. Il est bien vrai que la vie est un don de Dieu si excellent, qu’on ne le doit mépriser ; comme ainsi soit qu’en elle nous soyons créés et formés à l’image de Dieu, à ce que nous méditions cette immortalité bienheureuse qui nous est réservée dans les cieux ; et qu’en elle dès cette heure Dieu se montre être notre Père par divers enseignements. Tant il y a toutefois que pour ce qu’elle nous est ordonnée comme une course ou un combat, il se faut toujours avancer pour parvenir jusques au but, et surmonter tous obstacles, afin que rien ne nous empêche ou retarde en courant. Car c’est grande honte que nous soyons tellement saisis d’un fol amour de vivre, que pour l’amour de la vie nous perdions les causes de vivre. Et ceci est exprimé par les paroles de S. Paul. Car ce qu’il n’estime rien la vie, il ne le fait pas simplement, mais il oublie le regard de celle-ci, afin qu’il parachève sa course, et accomplisse son ministère lequel il avait reçu de Christ ; comme s’il disait que tout le désir qu’il a de vivre, ce n’est que pour satisfaire en bonne conscience à la vocation de Dieu ; et pourtant il ne lui fâchera point de perdre la vie, pourvu que par la mort il parvienne au but de sa charge, lequel lui est limité de Dieu. Or il nous faut bien noter ce qu’il dit : Avec joie. Car il signifie qu’on ne peut ôter ceci aux fidèles ni par douleur ni par tristesse, qu’ils ne vivent et meurent joyeusement au Seigneur. Car la joie d’une bonne conscience est si profondément enracinée et si bien cachée, qu’elle ne peut être ôtée par les fâcheries externes, ni par douleur de la chair ; et se réjoui si joyeusement qu’elle ne peut être accablée.

Il faut aussi noter la définition de cette course, à savoir que c’est le ministère reçu du Seigneur. Il est bien vrai que S. Paul parle de soi-même ; mais il montre par son exemple que tous ceux qui n’ont point le Seigneur pour guide et conducteur de leur course, s’égarent. Dont il s’ensuit que la vocation de celui-ci est une règle de bien vivre pour chacun de nous. Et de fait, nous ne pouvons autrement nous résoudre que ce que nous faisons soit approuvé de Dieu, sinon que notre vie soit réglée selon son bon plaisir. Et principalement cette certitude est requise pour les Ministres de la parole, a ce qu’ils n’entreprennent rien, qu’ils n’aient le Fils de Dieu pour garant. Et il n’y a point de doute que S. Paul ornant son Apostolat de cette marque, comme il a accoutumé, ne confirme l’autorité de celui-ci. Il appelle l’Evangile, Evangile de la grâce de Dieu, et ce à cause de la fin ou l’effet. Cependant c’est un titre d’une louange singulière, que par l’Evangile la grâce de Dieu et le salut parvient jusque à nous. Car il nous est fort nécessaire de savoir que là nous trouverons Dieu propice.

20.25

Et maintenant voici, je sais que vous ne verrez plus mon visage, vous tous, parmi lesquels j’ai séjourné en prêchant le royaume de Dieu.

Il déclare ouvertement ce qu’il avait signifié plus obscurément et couvertement. Or nous avons dit qu’il leur avait ôté l’espérance de son retour à cette intention, qu’il imprimât plus vivement ses exhortations et remontrances en leur mémoire. Car nous savons quelle efficace ont les dernières paroles de ceux qui prennent congé et se séparent, ou de ceux qui meurent. Il a voulu aussi par cet avertissement prévenir et pourvoir qu’ils ne fussent comme attachés à sa présence, et que par ce moyen en son absence leur foi ne défaille d’ennui. Il appelle derechef la doctrine de l’Evangile Royaume de Dieu, pour ce qu’elle commence le Royaume de Dieu ici-bas en ce monde, en réformant les hommes à l’image de Dieu, jusques à ce qu’il soit finalement accompli en la dernière résurrection.

20.26

C’est pourquoi je vous atteste aujourd’hui que je suis net du sang de tous ;

Or il ne fait point ceci tant pour l’amour de soi, que pour leur donner loi en plus grande autorité, comment ils doivent faire leur office. Au reste, ce passage contient un bref résumé de bien et droitement enseigner ; et par celui-ci les Docteurs sont par injonction très expresse exhortés de faire soigneusement leur office. Quelle façon donc d’enseigner doivent tenir les Pasteurs ? Premièrement il ne faut point qu’ils estiment à leur fantaisie ce qui est bon de mettre en avant, et ce qui est bon de laisser ; mais il faut qu’ils en laissent le jugement à Dieu seul. Par ce moyen les inventions humaines ne trouveront accès ni ouverture en l’Eglise de Dieu. Davantage, l’homme mortel ne sera si hardi de prendre autorité de déchirer l’Ecriture par pièces, en telle façon qu’il en prenne ça et là un lopin selon qu’il lui aura semblé bon, et qu’il en obscurcisse une partie ; et d’autre part, qu’il en supprime beaucoup ; mais il enseignera tout ce qui est manifesté dans les Ecritures, et combien qu’il le fasse prudemment et en temps, selon que l’édification de l’Eglise le requerra, toutefois ce sera simplement et sans fard, comme il faut que fasse un bon et fidèle messager de Dieu. J’ai dit qu’il y faut user de prudence ; car il faut toujours regarder à l’utilité et au bien de l’Eglise, moyennant qu’il n’y ait point d’astuce, en laquelle beaucoup de gens se plaisent, quand ils veulent faire fléchir la parole de Dieu à leurs méthodes, et quand ils nous forgent je ne sais quelle philosophie mêlée de l’Evangile et de leurs inventions. Voire, pour ce que ce mélange est plus plaisant et mieux venu envers les hommes, de là est venu le Franc-arbitre, les mérites des œuvres, et ce qu’aucuns ont nié la providence de Dieu et son élection gratuite. Or ce que nous avons naguère dit, est bien digne d’être noté, à savoir que le conseil de Dieu, duquel S. Paul fait ici mention, est enclos en sa parole, et ne le faut point chercher ailleurs. Car plusieurs choses nous sont cachées en cette vie, desquelles la manifestation entière est différée jusques à ce jour auquel nous verrons Dieu avec de nouveaux yeux, face à face, ainsi qu’il est (1 Corinthiens 13.12). Ceux donc qui interprètent fidèlement l’Écriture, et qui par celle-ci instruisent le peuple en la foi, en la crainte du Seigneur, et en tous exercices de vraie religion, annoncent la volonté de Dieu. Or tout ainsi que par cette sentence sont condamnés tous ceux qui en disputant philosophiquement gâtent et corrompent la pureté de l’Écriture par leurs levains, à cette fin qu’ils n’enseignent rien qui soit éloigné du sens commun des hommes, comme nous avons dit naguère ; aussi S. Paul foudroie d’une façon terrible contre ceux qui pour la crainte de la croix et des persécutions ne parlent sinon de manière ambiguë et obscurément.

Que je suis net du sang de tous. Je ne doute point qu’il n’ait regardé au passage d’Ezéchiel, où Dieu annonce à son Prophète, qu’il sera coupable du sang, s’il n’exhorte en bonne conscience les méchants de se repentir. Car il commet les Pasteurs pour gouverneurs de son Eglise à cette condition, que si par leur négligence quelque chose vient à perdition, il faudra bien qu’ils en rendent compte, et même s’ils ne démontrent ouvertement la voie de salut sans aucun déguisement, que la perdition des âmes leur soit imputée. Or il faut bien dire que ceux qui ne peuvent être réveillés par une menace si rigoureuse, sont merveilleusement stupides. En quoi tant plus se découvre l’impiété Epicurienne du clergé du Pape ; là où après qu’ils ont prononcé à pleine bouche leurs titres magnifiques, ils ne se soucient non plus de rendre compte de tant d’âmes qui périssent, que s’il n’y avait point de Juge assis au ciel. Non moins aussi se montrent-ils vilains effrontés devant tout le monde, en ce qu’étant adonnés du tout à dévorer les pauvres brebis, ils usurpent le titre de Pasteurs. Au demeurant, le Seigneur montre bien combien les âmes lui sont précieuses, quand il punit d’une façon si grave la nonchalance des Pasteurs à cause de la ruine de celles-ci. Mais quoi ? il y en a par trop qui estiment bien peu leur salut, au soin duquel Dieu daigne bien s’adjoindre à eux.

20.27

car je vous ai annoncé tout le conseil de Dieu, sans en rien cacher.

20.28

Prenez donc garde à vous-mêmes et à tout le troupeau au milieu duquel l’Esprit saint vous a établis évêques, pour paître l’Eglise du Seigneur, qu’il a acquise par son propre sang.

Il adresse maintenant son propos aux Pasteurs, et montre par plusieurs raisons qu’ils doivent veiller soigneusement ; et que non sans cause il était en si grand souci ; mais pour ce que la nécessité le requérait ainsi. La première raison est, qu’ils sont obligés au troupeau sur lequel ils sont commis. La seconde, qu’ils ont été appelés à cette charge par le Saint Esprit, et non point par un homme mortel. La troisième, que ce n’est point un petit honneur de gouverner l’Eglise de Dieu. La quatrième, que le Seigneur a rendu témoignage par un enseignement notable, en quel prix et réputation il a son Eglise, quand il l’a rachetée par son propre sang. Or quant au premier point, non seulement il veut qu’ils veillent sur le troupeau, mais qu’en premier lieu ils avisent à eux-mêmes. Car à grand peine celui procurera jamais à bon escient le salut des autres, lequel ne tient compte du sien ; et celui exhortera en vain les autres à bien et saintement vivre, lequel ne montrera qu’il ait lui-même affection et révérence envers Dieu et son service ; et même celui qui étant l’un du troupeau, se met en oubli, n’emploiera pas sa peine et son étude pour tout le troupeau. Afin donc qu’ils soient soigneux des brebis qui leur sont commises, S. Paul les exhorte qu’un chacun regarde de se contenir en la crainte de Dieu. Car en ce faisant il adviendrait qu’ils s’acquitteraient de la fidélité qu’ils devaient au troupeau. Car nous avons dit que Paul prend son argument de la vocation, à savoir que leur labeur est dédié et obligé à l’Eglise sur laquelle ils sont commis ; comme s’il disait que depuis qu’ils ont été ordonnés Pasteurs, ils ne sont plus en leur liberté ou puissance, mais sont publiquement obligés à tout le troupeau.

Auquel le Saint Esprit vous a mis Évêques. Par le nom même de leur charge il exhorte qu’ils sont mis comme une sentinelle, où il faut qu’ils veillent pour le salut commun de toutes les brebis. Mais S. Paul s’arrête principalement à ceci, qu’ils n’ont été ordonnés par les hommes, mais que c’est Dieu qui leur a commis la charge de l’Eglise. Dont est requis un plus grand devoir et diligence d’eux, d’autant qu’ils auront à rendre un compte difficile devant le siège souverain du grand Juge. Car tant plus que la dignité du Seigneur auquel nous servons est excellente, tant plus aussi nature nous pousse à lui porter grande révérence ; et la révérence aiguise notre désir. Au reste, combien que du commencement le Seigneur ait voulu que les Ministres de sa Parole fussent élus par les voix des hommes, toutefois il se réserve toujours le gouvernement de son Eglise ; non seulement à cette fin que nous connaissions que lui seul préside sur celle-ci, mais aussi que nous sachions que le trésor inestimable de salut ne procède d’ailleurs que de lui. Car si nous pensons que l’Evangile soit parvenu à nous ou par cas fortuit, ou à l’appétit des hommes, ou par leur industrie, nous le défraudons de sa gloire et dignité. Or S. Paul attribue ceci particulièrement au Saint Esprit, par lequel Dieu gouverne son Eglise, et lequel est témoin secret de la vocation de Dieu en la conscience d’un chacun. Quant à ce mot d’Évêque, il nous faut noter ceci en bref, que S. Paul appelle ainsi indifféremment tous les Anciens d’Ephèse. Dont nous recueillons selon le commun usage de l’Écriture, que les Évêques ne diffèrent en rien des Anciens ; mais qu’il est advenu par abus, qu’on a commencé à nommer Évêques ceux qui tenaient le premier lieu en chacune ville. Je dis abus, non point que ce soit une chose mauvaise qu’il y ait quelqu’un en chacun collège d’Eglise, qui soit éminent par-dessus les autres ; mais pour ce qu’une telle audace n’est nullement tolérable, quand les hommes pliant les noms de l’Écriture à leur guise et façon, ne font nulle difficulté de changer le langage du Saint Esprit.

Pour gouverner l’Eglise. Le mot Grec signifie Paître, mais par une similitude bien propre il est transféré à toute sorte de gouvernement. Or nous avons dit que c’est-ci le troisième argument pris de l’excellence de l’office, comme S. Paul même exhorte ailleurs Timothée, d’aviser comment il doit se gouverner en la maison de Dieu, qui est l’Eglise du Dieu vivant, la colonne et la fermeté de vérité, 1 Timothée 3.15 ; comme s’il disait qu’il n’est pas question d’être paresseux en une charge si difficile ; et que ceux que Dieu a ordonnés dispensateurs de sa famille, seront tant moins excusables, d’autant plus que ce degré d’honneur est plus excellent, sinon qu’ils satisfassent à une si haute dignité, c’est-à-dire, sinon qu’ils soient vigilants et diligents à s’acquitter de leur charge. Or si ainsi est que les Évêques ne sont point ordonnés de Dieu et par le Saint Esprit, sinon pour paître l’Eglise, c’est une pure moquerie que la hiérarchie de la Papauté, en laquelle les Évêques se glorifiant d’un titre vain, ne font point seulement semblant de toucher à la charge et office d’enseigner.

Laquelle il a acquise par son sang. C’est la quatrième raison par laquelle S. Paul sollicite les Pasteurs à exercer diligemment leur office, à savoir que le Seigneur a donné un gage excellent de son amour envers l’Eglise, en épandant son propre sang pour cette. Dont il apparaît combien elle lui est précieuse. Et à la vérité, il n’y a rien qui doive plus aiguillonner les Pasteurs, à ce qu’ils s’emploient à faire leur office d’un cœur joyeux, que quand ils considéreront que le prix du sang de Christ leur est donné en garde. Car il s’ensuit de cela, que s’ils n’emploient fidèlement leur labeur pour le profit et utilité de l’Eglise, non seulement la perdition des âmes leur sera imputée, mais ils sont coupables de sacrilège, d’autant qu’ils auront profané le sang sacré du Fils de Dieu, et anéanti pour ce qui les concerne, la rédemption acquise par lui. Or c’est un péché fort énorme, si par notre nonchalance non seulement la mort de Christ est rendue inutile, mais aussi si le fruit de celle-ci s’abolit et se perd. Or il est dit que Dieu a acquis l’Eglise, afin que nous sachions qu’il veut qu’elle lui demeure entière ; pour autant que c’est bien la raison qu’il possède ceux qu’il a rachetés. Toutefois il faut en même temps se rappeler, que tout le genre humain est sous la servitude de Satan, jusques à ce que le Fils de Dieu nous ait affranchis de sa tyrannie cruelle, nous recueillant en l’héritage de son Père. Au reste, pour ce que cette façon de parler de laquelle saint Paul use ici, semble être dure, il faut voir en quel sens il prend ceci, que Dieu a acquis l’Eglise par son sang. Car il n’y a rien plus mal convenable, que de forger Dieu corporel ou mortel. Mais en parlant ainsi, il montre l’unité de personne en Christ. Car pour ce que les natures sont distinctes en Christ, l’Écriture mentionne quelque fois à part ce qui est propre à chacune de celles-ci. Mais quand elle nous propose Dieu manifesté en chair, elle ne sépare point sa nature humaine de la Divinité. Toutefois pour ce que les deux natures sont tellement unies en Christ, qu’elles constituent une personne, ce qui convient vraiment à l’une, est quelque foi improprement transféré à l’autre. Comme en ce passage S. Paul attribue sang à Dieu ; pour ce que Jésus-Christ homme, qui a répandu son sang pour nous, était Dieu aussi. Les anciens ont appelé cette manière de parler : Communication de propriété : d’autant que la propriété de l’une des natures est accommodée à l’autre. J’ai dit que par ce moyen est clairement exprimée une seule personne de Christ, afin que nous ne le forgions point double, ce que Nestorius a voulu autre fois faire. Néanmoins si ne faut-il pas que nous imaginions une confusion des deux natures, comme Eutyches a voulu faire, ou telle que Servet ce vilain chien orgueilleux espagnol a voulu forger en ce temps-ci ; lequel n’estimait autre chose de la Divinité de Christ, sinon un fantôme de nature humaine, lequel il dit avoir été toujours reluisant en Dieu.

20.29

Car je sais qu’après mon départ entreront parmi vous des loups dangereux, qui n’épargneront point le troupeau ;

Ici St. Paul allègue même la nécessité, qui est un aiguillon bien poignant, et par celle-ci exhorte les Ephésiens de veiller soigneusement. Car il avertit que des loups viendront après lui, qui feront des ravages terribles. Il est vrai que c’est comme une perpétuelle destinée à l’Eglise, qu’elle soit molestée de loups, par quoi il n’est jamais temps de dormir. Mais tant plus qu’ils viennent en grand nombre, et sont plus nuisibles, d’autant plus les Pasteurs doivent être diligents à faire le guet. Car Dieu donne parfois quelque relâche, afin que le troupeau soit nourri paisiblement et en repos. Et tout ainsi que les brebis paissent dans les champs en plus grande sûreté, quand il fait beau temps et clair, et au contraire qu’il y a plus grand danger quand l’air est obscur, et plein de brouillards, aussi il advient parfois, que quelque temps serein est octroyé à l’Eglise de Dieu ; puis après survient un temps trouble et obscur, qui est propre pour les embûches des loups. L’intention donc de saint Paul est qu’il est besoin de mieux veiller qu’on n’a fait jusques à présent, qu’il y a de plus grands dangers bien prochains. Mais on pourrait demander d’où vient cette connaissance à saint Paul. Premièrement, il ne nous faut point douter que sa présence n’ait grandement servi à repousser ou chasser les loups. Et ce n’est point merveilles si la vertu du Saint Esprit, laquelle reluit chez les Ministres modèles de Christ, réprime les méchants, en sorte qu’ils ne soient si hardis de montrer leur venin ; et même si cette lueur céleste fait écarter beaucoup de ténèbres et nuées obscures de Satan. Comme ainsi soit dont ; que saint Paul savait bien que la malice de Satan avait été pour certain temps réprimée par son moyen. Il peut aussi facilement deviner ce qui devait advenir après son départ. Combien qu’il est vraisemblable que le Seigneur lui avait révélé par l’Esprit de prophétie, à cette fin que les autres fussent avertis par lui ; comme nous voyons que cela a été fait. Or quelque chose qu’il y ait, apprenons que toutes les fois que les bons et fidèles Ministres départent d’avec nous, c’est lorsqu’il nous faut craindre les loups, lesquels il leur a été bien difficile de garder et d’approcher de la bergerie, quelque bon guet qu’ils aient su faire.

20.30

et que d’entre vous-mêmes se lèveront des hommes qui annonceront des doctrines perverties, afin d’attirer les disciples après eux.

Il fait le mal plus grand, d’autant qu’une partie de ces loups est dedans ; et que même se cachant sous le titre de pasteurs, n’attendent que l’occasion de nuire. Il déclare aussi ce qu’on doit craindre de ces loups, à savoir que le troupeau soit dissipé, quand l’Eglise distraite de l’unité de la foi, est divisée en bandes et sectes. Car tous ceux qui ne s’acquittent pas de leur office, ne sont pas loups ravisseurs, mais sont mercenaires bien souvent, et ceux-ci ne sont point si dangereux au troupeau. Mais la corruption de la doctrine est une maladie mortelle pour les brebis. Puis en troisième lieu est dénotée la source et origine de ce grand mal ; à savoir qu’ils voudront attirer des disciples après eux. Faisons donc cette résolution, que l’ambition est mère de toutes hérésies. Car quand les Pasteurs sont menés d’une même affection et zèle à recueillir des disciples à Christ, lors la pureté de la parole de Dieu aura sa vigueur ; car l’Eglise ne peut être en son entier, sinon quand le seul Fils de Dieu est entendu pour maître. Par quoi il faut nécessairement que la doctrine de salut soit pervertie, et que le salut du troupeau soit foulé aux pieds, quand cette cupidité règne, que les hommes veulent être écoutés comme maîtres. Or tout ainsi que ce passage montre bien que quasi toutes les corruptions de la doctrine procèdent de l’orgueil des hommes, quand un chacun désire de se montrer et apparaître plus qu’il ne serait de besoin ; aussi d’autre part on peut recueillir de cela même, qu’à grand peine se peut-il faire que les ambitieux ne se détournent de la droite pureté, et qu’ils ne corrompent la parole de Dieu. Car vu que la pure façon de traiter l’Écriture tend à ce but, que Christ soit seul éminent, et que les hommes ne se peuvent rien attribuer, qu’ils ne diminuent autant de la gloire de Christ ; il s’ensuit que tous ceux qui sont adonnés à eux-mêmes, et qui cherchent leur propre gloire, par laquelle ils obscurcissent Christ totalement, corrompent et gâtent la pure doctrine. Ce qu’aussi le Seigneur lui-même confirme en Jean 7.18. Or par ce mot Se lèveront, il signifie que ces loups nourrissaient déjà dedans eux une peste occulte, jusques à ce que quelque occasion se présentât pour se manifester. Au reste, ce passage est un remède fort propre pour obvier au scandale horrible que Satan a mis en avant de tous temps pour troubler les consciences infirmes. S’il advient que des ennemis manifestes fassent la guerre à l’Evangile, cela étonne moins les esprits fidèles que si du sein et giron de l’Eglise sortent quelques ennemis domestiques, qui sans qu’on y pense viennent à donner l’alarme, ou qui par menées occultes viennent à solliciter le peuple à se révolter de Dieu. Tant il y a toutefois que Dieu dès le commencement a exercé son Eglise de cette tentation, et l’exerce encore aujourd’hui. Et pourtant, que notre foi soit munie de cette défense, à cette fin qu’elle ne tombe bas, si quelques fois il advient que les pasteurs deviennent loups enragés.

Or il les avertit que ces loups les grèveront, afin qu’il leur donne tant plus de crainte ; et d’avantage qu’ils annonceront choses perverses, et ce pour attirer les disciples après eux ; pour ce qu’à grand peine se peut-il faire que l’ambition ne corrompe l’Evangile. On peut aussi voir par ceci combien est frivole la gloire des Papistes, en ce qu’ils se vantent de la succession continuelle. Car comme ainsi soit que nous pouvons facilement montrer que ces bêtes cornues ne sont rien moins que ce qu’ils veulent être estimés, combien que ils soient convaincus en toutes sortes, néanmoins voici leur franchise à laquelle ils ont recours, qu’ils sont successeurs des apôtres par un ordre continuel. Voire, comme si ceux desquels saint Paul avertit qu’on se donne garde, n’avaient point aussi succédé. Ainsi donc, puis que Dieu permet souvent que les loups exercent leur rage sous la personne des Pasteurs, on par un juste jugement, ou bien pour éprouver la constance des siens ; l’autorité ne consiste point seulement au nom et au lieu, et la succession n’est de nulle importance, sinon que en même temps la fidélité et intégrité y soient. Que si les Papistes répliquent que le nom de loups ne leur convienne point ; pour faire examen de cela, il ne faudra qu’un seul mot de saint Paul, qui servira de pierre de touche, quand il dit : Pour attirer les disciples après eux. Or à quel but tend toute la religion Papale, sinon à ce que le fol appétit des hommes domine au lieu de la parole de Dieu ? Et Christ n’a point là de disciples, où il n’est pas avoué pour seul maître.

20.31

C’est pourquoi veillez, vous souvenant que durant trois ans, nuit et jour, je n’ai cessé d’avertir chacun avec larmes.

Saint Paul les exhorte derechef a être diligent, par son exemple. Cependant toutefois il conjoint la crainte du danger ; comme s’il disait qu’ils ont besoin de bien aviser à se donner garde, et que cela ne serait pas bien séant, qu’ils se lassent de faire leur devoir, comme ainsi soit qu’ils eussent vu en lui une constance invincible, en laquelle il avait continué trois ans. Il leur rappelait aussi ses larmes, qui ajoutaient une grande efficace à ses exhortations. Quant à ce qu’il dit qu’il a exhorté chacun d’eux, on le peut rapporter tant au peuple qu’aux anciens. Car pour ce qu’il avait délibéré de leur tenir propos concernant toute l’Eglise, il parle comme si tout le corps eût été là présent. Toutefois si quelqu’un aime mieux restreindre ceci à l’ordre des Pasteurs, le sens sera, que non seulement leurs désirs devaient être enflammés du propos qu’il leur tenait, mais qu’il est bien raisonnable qu’ils se souviennent de tant d’exhortations, lesquelles il n’avait cessé de leur faire par l’espace de trois ans. Toutefois il me semble qu’il sera plus convenable d’entendre qu’il parle de tous en général.

20.32

Et maintenant je vous recommande à Dieu, et à la parole de sa grâce, à lui qui est puissant pour vous édifier encore, et vous donner l’héritage parmi tous ceux qui ont été sanctifiés.

Il entremêle une prière, ce qui ne doit sembler mal convenable, quand on parle de grande affection. Car il ne s’est point soucié de faire une oraison qui eût toutes ses parties bien digérées, à la façon des rhétoriciens ; vu que nulles paroles ne pouvaient suffire pour exprimer l’affection, véhémente, de laquelle il était embrasé. Il avait parlé de choses grandes et hautes, qui surmontaient de beaucoup la faculté des hommes. Et pourtant se tournant à faire prière, il laisse un peu le fil de son propos ; combien que ce n’est point tant une droite prière, qu’une vive déclaration de son désir. Comme s’il eût dit, qu’il est bien vrai qu’ils ne sont pas suffisant pour porter une telle charge ; mais qu’il leur désire nouvelles forces du ciel, par lesquelles ils puissent obtenir victoires sur toutes tentations. Cependant toutefois il ne faut point douter que combien qu’il ne parle qu’aux Pasteurs, qu’il ne comprenne néanmoins généralement toute l’Eglise en cette oraison. Premièrement, il les recommande à Dieu ; puis après il les recommande à la parole de sa grâce. Et toutefois ce n’est que une recommandation ; mais saint Paul a voulu exprimer la façon, par laquelle ; le Seigneur a accoutumé de maintenir le salut de ses fidèles, comme saint Pierre enseigne que ce salut est sauvegardé par foi, 1 Pierre 1.5. Et le moyen de cette garde dépend de la Parole, de peur que le salut ne périsse au milieu de tant de dangers. Or il est bien requis que nous sachions comment Dieu nous veut sauver. Car pour ce que sa majesté nous est cachée, nous jetions la vue d’une part et d’autre en doutant, jusques à ce qu’il s’approche de nous par sa Parole. Aussitôt donc qu’il entreprend de nous sauver, il propose sa Parole comme instrument pour maintenir et garder notre salut. Et en ce sens il a ajouté ce mot de Sa grâce (car selon la coutume des Hébreux, cela signifie : Laquelle apporte sa grâce) afin que les fidèles se reposent plus sûrement sur la parole de Dieu, en laquelle il nous déploie sa faveur. Cette exposition est simple et propre ; car ce qu’aucuns l’exposent de Christ est trop contraint.

Lequel est puissant d’achever de vous édifier, etc. Le mot Grec Puissant, duquel saint Paul use, se rapporte à Dieu, et non pas à sa Parole. Or cette consolation a été ajoutée, afin qu’ils ne perdissent courage par le sentiment de leurs infirmités. Car tandis que nous sommes environnés des vices de la chair, nous ressemblons à un bâtiment commencé. Il est vrai qu’il faut bien que tous fidèles soient fondés en Jésus-Christ ; mais il s’en faut beaucoup que leur foi soit parfaite en tout et partout. Qui plus est, combien que le fondement demeure ferme, néanmoins quelque fois les parties du bâtiment clochent et penchent. Par quoi il est besoin d’y mettre la main incessamment, et d’y ajouter de nouveaux appuis à toutes heures. Cependant saint Paul dit qu’il ne faut désespérer, d’autant que le Seigneur ne veut laisser son œuvre imparfaite ; comme il souligne en Philippiens 1.6 : Celui qui a commencé en vous cette bonne œuvre, la parachèvera jusques au jour du Seigneur Jésus. A quoi aussi est correspondant ce qui est dit Psaumes 138.8 : Tu ne laisseras point l’œuvre de tes mains. Ce qui est incontinent ajouté de l’héritage de vie, appartient à la jouissance actuelle (comme on dit). Aussitôt que Christ a fait reluire sa clarté en nos cœurs, nous passons de mort à vie ; et la foi est une entrée au Royaume des cieux ; et aussi l’Esprit d’adoption ne nous est point donné sans cause. Mais saint Paul promet ici aux fidèles continuel accroissement de grâce, jusques à ce qu’ils entrent en possession de l’héritage auquel ils sont appelés, et lequel leur est déjà préparé dans les cieux. Il parle d’une puissance de Dieu, non point telle que nous avons accoutumé d’imaginer sans effet, mais d’une puissance actuelle et par effet. Car il faut que les fidèles l’appréhendent en telle sorte, qu’elle leur soit comme un bouclier en la main, pour mettre au-devant de tous les assauts de Satan. Or tout ainsi que l’Écriture enseigne que nous avons assez de défense en la vertu de Dieu ; aussi souvenons-nous qu’il n’y a gens forts au Seigneur, sinon ceux qui ayant du tout renoncé à la confiance de leur franc-arbitre, se reposent en Dieu ; comme saint Paul atteste à bon droit, que lui seul est puissant d’achever d’édifier.

20.33

Je n’ai convoité ni l’argent, ni l’or, ni les vêtements de personne.

Comme il a montré naguère quelle peste dangereuse c’est que l’ambition ; aussi il exhorte maintenant de se garder d’avarice ; et se propose derechef pour exemple, qu’il n’a convoité les biens d’autrui, mais plutôt a gagné sa vie au travail de ses mains ; non pas que cela ait suffit pour l’entretenir sans autre assistance ; mais pour ce que s’adonnant à travailler de ses mains, il a épargné les Eglises, afin qu’il ne les grevât pas d’aucune dépense, dans la mesure qu’il lui était possible. Il faut noter qu’il ne dit point seulement qu’il n’a point ravi, comme volontiers gens affamés arrachent toujours quelque proie par importunité ; mais il affirme qu’il a été pur de toute mauvaise convoitise. Dont nous recueillons que nul ne sera bon et fidèle Ministre de la Parole, que en même temps il ne soit contempteur de l’argent. Et de fait, nous ne voyons rien advenir plus ordinairement que ceci, à savoir que tous ceux qui sont adonnés à gain déshonnête, corrompent la parole de Dieu pour acquérir la grâce des hommes. Lequel vice saint Paul condamne âprement chez les Évêques en un autre passage, 1 Timothée 3.3.

20.34

Vous savez vous-mêmes que ces mains ont pourvu à mes besoins et à ceux des personnes qui étaient avec moi.

Il n’impose point Loi précisément par ces paroles, laquelle il soit nécessaire de garder toujours à tous Ministres de la Parole ; car il n’a point usé d’une telle autorité, qu’il ôtât aux serviteurs du Seigneur ce que lui-même leur a octroyé, Matthieu 10.10. Mais plutôt en plusieurs passages il maintient leur droit, à ce qu’ils soient nourris des deniers publics de l’Eglise, 1 Corinthiens 9.14 ; Galates 6.6. Joint aussi qu’il a bien souffert que plusieurs Eglises lui aient administré et vivres et habillements, Philippiens 4.10, 16. Et non seulement il a librement pris salaire de son labeur présent, mais il dit que quand il était à Corinthe, il a dépouillé les autres Eglises, pour subvenir à son indigence, 2 Corinthiens 11.8. Il ne commande donc point simplement aux Pasteurs qu’ils gagnent leur vie au travail de leurs mains ; mais il déclare bientôt après, jusques où il les exhorte à suivre son exemple, à savoir pour supporter les faibles. Les Corinthiens ne lui refusaient point le salaire qui lui appartenait ; mais d’autant que les faux-Apôtres faisaient valoir leurs coquilles en ne prenant rien de leurs auditeurs, et par ce moyen acquéraient la faveur du peuple, saint Paul n’a point voulu être moindre qu’eux en cet endroit, ni leur donner occasion de calomnier ; comme il dit 1 Corinthiens 9 ; 2 Corinthiens 11. Il exhorte donc qu’on ne donne point de scandale aux faibles, et que leur foi ne soit point troublée ni détournée. Car Recevoir les faibles (comme le mot Grec signifie cela) c’est autant que supporter leur rudesse par bénignité ; comme il dit, Romains 14.

20.35

En toutes choses je vous ai montré que c’est en travaillant ainsi qu’il faut secourir les faibles, et se souvenir des paroles du Seigneur Jésus, car lui-même a dit : Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir.

Il n’y a point de passage où on trouve cette sentence de mot à mot ; mais les Evangélistes en rapportent d’autres qui reviennent au même, desquelles saint Paul a pu tirer celle-ci. D’avantage, nous savons que tout ce que Jésus-Christ a dit, n’a point été rédigé par esprit. Or il répète cette doctrine générale du mépris de l’argent ; duquel mépris c’est-ci un vrai témoignage, quand quelqu’un est beaucoup plus enclin et prompt à donner, qu’il n’est à recevoir. Et Christ n’a pas parle seulement selon la raison politique, comme si les hommes libéraux étaient bienheureux, pour ce qu’ils tiennent les autres obligés par leurs bienfaits, et que devoir quelque chose soit une espèce de servitude ; mais il a regardé plus haut, à savoir que celui qui donne aux pauvres, prête à Dieu, (Proverbes 19.17) que ceux qui communiquent aux, frères nécessiteux de l’abondance, qui leur est donnée en garde, sont bons et fidèles dispensateurs de Dieu ; qu’il n’y a chose qui fasse les hommes ressembler de plus près à Dieu, que la libéralité ou bénévolence. On lit aussi dans les auteurs profanes ces beaux titres de bénévolence et de libéralité ; et la plus part du monde confessera bien que toutes ces choses sont vraies ; mais c’est en faisant signe des oreilles seulement, comme les ânes. Car la vie commune des hommes montre ouvertement combien il y en a peu qui soient persuadés qu’il n’y a rien plus désirable que de distribuer de nos biens pour aider à nos frères. Par quoi il faut que les disciples de Christ s’étudient tant plus à bien penser à cette félicité, afin que se déportant du bien d’autrui tant qu’ils pourront, ils s’accoutument à donner ; et non point d’un courage fier et orgueilleux, comme si c’était une chose misérable, qu’ils fussent obligés à quelqu’un ; ou par une ambition perverse, pour obliger les autres à eux ; mais seulement afin que d’un bon cœur et volontaire ils s’exercent dans les devoirs de charité, et que par ce moyen ils donnent à connaître aux autres la grâce de leur adoption.

20.36

Et après avoir dit ces choses, s’étant mis à genoux, il pria avec eux tous.

Il est vrai que l’affection intérieure obtient le premier lieu dans les prières, mais les signes externes, comme découvrir la tête, ployer les genoux, lever les mains en haut, et autres semblables, ont double utilité. La première, que nous exercions tous nos membres pour servir à la gloire et honneur de Dieu ; puis après, que notre paresse soit réveillée par une telle aide. Joint qu’en la prière publique qui se fait en l’assemblée, il y a une troisième utilité ; d’autant que par ce moyen les enfants de Dieu font profession de leur religion, et les uns incitent les autres à porter révérence à Dieu. Or tout ainsi que lever les mains est un signe de confiance et de désir ardent, aussi nous ployons les genoux pour manifester notre humilité. Au demeurant, en priant il a conformé et comme scellé tout le propos qu’il a tenu ci-dessus ; d’autant qu’on ne peut espérer fruit quelconque de la doctrine, sinon par la bénédiction de Dieu. Par quoi si nous voulons faire quelque profit et enseignement, admonestant et exhortant il faut que toujours nous y ajoutions cette conclusion, à savoir que nous finissions par prières.

20.37

Et tous versèrent d’abondantes larmes, et se jetant au cou de Paul, ils l’embrassaient,

Il ne faut pas s’étonner si tous les fidèles ont porté une singulière affection à ce saint personnage. Car c’eût été une ingratitude trop lourde et vilaine, s’ils eussent méprisé celui que le Seigneur avait orné d’une si grande excellence de dons. Or la principale cause pourquoi ils pleurent, c’est (comme dit saint Luc) pour ce qu’ils ne verront plus sa face. Car ils n’étaient point marris sans bonne et juste cause de leur inconvénient et de toute l’Eglise d’Asie ; d’autant qu’ils voyaient bien qu’ils seraient privés d’un trésor inestimable. Au reste, puis que le Saint Esprit loue leurs larmes par la bouche de saint Luc, comme rendant témoignage d’une vraie piété, amour et dilection, aussi condamne-t-il la témérité de ceux qui requièrent des fidèles une constance endurcie et barbare. Car ce qu’ils songent que les affections ne procèdent que du vice, est faux, vu qu’elles nous sont données naturellement de Dieu. Par quoi la perfection des fidèles ne réside point en cela, qu’ils dépouillent toutes affections, mais qu’ils les prennent seulement pour justes causes, et les modèrent.

20.38

étant surtout affligés de la parole qu’il avait dite, qu’ils ne verraient plus son visage. Et ils l’accompagnaient jusqu’au vaisseau.

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