Institution de la Religion Chrétienne

LIVRE I
Qui est de connoistre Dieu en tiltre et qualité de Créateur et souverain Gouverneur du monde.

Chapitre XVI
Que Dieu ayant créé le monde par sa vertu, le gouverne et entretient par sa providence, avec tout ce qui y est contenu.

1.16.1

Or de faire un Dieu créateur temporel et de petite durée, qui eust seulement pour un coup accomply son ouvrage, ce seroit une chose froide et maigre : et faut qu’en cecy principalement nous différions d’avec les Payens et toutes gens profanes : que la vertu de Dieu nous reluise comme présente, tant en l’estat perpétuel du monde, qu’en sa première origine. Car combien que les pensées des incrédules soyent contraintes par le regard du ciel et de la terre de s’eslever au Créateur, néantmoins la foy a son regard spécial pour assigner à Dieu la louange entière d’avoir tout créé Héb. 11.3. A quoy tend ce que nous avons allégué de l’Apostre, que c’est par la foy que nous comprenons le monde avoir esté si bien basty par la Parole de Dieu. Car si nous ne passons jusques à sa providence, par laquelle il continue à maintenir tout, nous n’entendrons pas droictement, que veut cest article, que Dieu soit Créateur, combien qu’il semble que nous l’ayons imprimé en nostre esprit, et que nous le confessions de bouche. Le sens humain s’estant proposé la vertu de Dieu pour une fois en la création, s’arreste là : et le plus loing qu’il se puisse avancer, n’est sinon de considérer et marquer la sagesse, puissance et bonté de l’ouvrier qui se présente à l’œil en ce grand et si noble bastiment, encores qu’on ne tinst conte de les regarder : puis après il conçoit quelque opération générale de Dieu, pour conserver et conduire le tout, de laquelle toute vigueur et mouvement dépend. Brief, il estime que ce que Dieu a du commencement espandu de vigueur par tout, suffit à garder les choses en leur estat. Or la foy doit bien passer plus outre, c’est de recognoistre pour gouverneur et gardien perpétuel, celuy qu’elle a cognu estre créateur : et non pas seulement en ce qu’il conduit la machine du monde, et toutes ses parties, d’un mouvement universel : mais en soustenant, nourrissante et songnant chacune créature, jusqu’aux petis oiselets. Pourtant David après avoir dit en brief que le monde a esté créé de Dieu, descend tantost après à cest ordre continuel de gouverner : Les cieux, dit-il, ont esté establis par la parole de Dieu, et toute leur vertu par l’Esprit de sa bouche. Puis il adjouste, que Dieu regarde sur tous ceux qui habitent sur la terre, il dissipe les conseils des peuples Ps. 33.6, 10, 13 : et ce qui est là dit à ce mesme propos. Car combien que tous n’arguent point si dextrement qu’il seroit requis, toutesfois pource qu’il ne seroit point croyable, que Dieu se meslast des affaires humaines, sinon que le monde fust son œuvre : et aussi que nul ne croit à bon escient, que le monde soit basty de Dieu, qu’il ne soit quant et quant persuadé qu’il a le soin de ses œuvres : David procède par bon ordre, en nous menant de l’un à l’autre. Bien est vray, que les Philosophes aussi enseignent en général que toutes les parties du monde tirent et prenent vigueur d’une inspiration secrette de Dieu, et nostre sens le conçoit ainsi : mais ce pendant nul ne parvient en si haut degré que monte David, et y attire tous fidèles, en disant, Toutes choses attendent après toy, Seigneur, à ce que tu leur donnes viande en leur temps : quand tu leur donnes elles la recueillent, quand tu ouvres ta main elles sont rassasiées de biens. Si tost que tu destournes ta face, elles sont estonnées : quand tu retires ton Esprit, elles défallent, et s’en revont en poudre : quand tu envoyes ton Esprit, elles revienent et renouvellent la face de la terre Ps. 104.27-30. Mesmes combien que les Philosophes s’accordent à ceste sentence de sainct Paul, que nous avons nostre estre et mouvement et vie en Dieu Actes 17.28 : toutesfois ils sont bien loin, d’estre touchez au vif du sentiment de sa grâce, telle que sainct Paul la presche : c’est qu’il a un soin spécial de nous, auquel se déclaire sa faveur paternelle, laquelle le sens charnel ne gouste point.

1.16.2

Pour mieux esclaircir telle diversité, il est à noter que la providence de Dieu, telle que l’Escriture la propose, s’oppose à fortune et à tous cas fortuits. Et d’autant que ceste opinion a esté quasi receue en tous aages, encores aujourd’huy est en vogue, et tient tous les esprits préoccupez, asçavoir que toutes choses advienent de cas fortuit : ce qui devoit estre bien persuadé de la providence de Dieu, non-seulement est obscurcy, mais quasi ensevely du tout. Si quelqu’un tombe en la main des brigans, ou rencontre des bestes sauvages : s’il est jetté en la mer par tempeste : s’il est accablé de quelque ruine de maison ou d’arbre : si un autre errant par les désers trouve de quoy remédier à sa famine : si par les vagues de mer il est jette au port, ayant évadé miraculeusement la mort par la distance d’un seul doigt, la raison charnelle attribuera à fortune toutes ces rencontres tant bonnes que mauvaises. Mais tous ceux qui auront esté enseignez par la bouche de Christ, que les cheveux de nos testes sont contez Matt. 10.30 chercheront la cause plus loing, et se tiendront tout asseurez que les événemens, quels qu’ils soyent, sont gouvernez par le conseil secret de Dieu. Quant aux choses qui n’ont point d’âme, il nous faut tenir ce point pour résolu, combien que Dieu leur eust assigné à chacune sa propriété, toutesfois qu’elles ne peuvent mettre leur effect en avant, sinon d’autant qu’elles sont addressées par la main de Dieu. Parquoy elles ne sont qu’instrumens, auxquels Dieu fait descouler sans fin et sans cesse tant d’efficace que bon luy semble, et les applique selon son plaisir, et les tourne à tels actes qu’il veut. Il n’y a vertu si noble ny admirable entre les créatures qu’est celle du soleil. Car outre ce qu’il esclaire tout le monde de sa lueur, quelle vertu est-ce de nourrir et végéter par sa chaleur tous animaux, d’inspirer par ses rayons fertilité à la terre, en eschauffant la semence qu’on y jette ? Après, la faire verdoyer de beaux herbages, lesquels il fait croistre, en leur donnant tousjours nouvelle substance, jusques à ce que le blé et autres grains se lèvent en espics : et qu’il nourrit ainsi toutes semences par ses vapeurs, pour les faire venir en fleur, et de fleur en fruit, cuisant le tout jusques à ce qu’il l’ait amené à maturité : quelle noblesse et vertu aussi est-ce, de faire bourgeonner les vignes, jetter leurs fueilles, et puis leurs fleurs, et en la fin leur faire apporter un fruit si excellent ? Or Dieu pour se réserver la louange entière de toutes ces choses, a voulu devant que créer le soleil, qu’il y eust clairté au monde, et que la terre fust garnie et parée de tous genres d’herbes et de fruits Gen. 1.3. Parquoy l’homme fidèle ne fera point le soleil cause principale ou nécessaire des choses qui ont esté devant que le soleil mesme fust créé ne produit : mais il le tiendra pour instrument, duquel Dieu se sert pource qu’il luy plaist : non pas qu’il ne peust sans tel moyen accomplir son œuvre par soy-mesme. D’autre part, quand nous lisons qu’à la requeste de Josué le soleil s’est arresté en un degré l’espace de deux jours : et en faveur du Roy Ezéchias, son ombre a esté reculée de quinze degrez Jos. 10.13 ; 2Rois 20.11, nous avons à noter que Dieu par tels miracles a testifié, que le soleil n’est pas tellement conduit par un mouvement naturel, pour se lever et coucher chacun jour, que luy n’ait le souverain gouvernement pour l’advancer et retenir, afin de nous renouveler la mémoire de ceste faveur paternelle envers nous, qu’il a monstrée en la création du monde. Il n’y a rien plus naturel que de voir les quatre saisons de l’an succéder par tout l’une à l’autre : toutesfois en ceste succession continuelle il y a une telle diversité et si inégale, qu’on apperçoit clairement que chacun an, chacun mois et chacun jour est disposé en une sorte ou en l’autre par une providence spéciale de Dieu.

1.16.3

Et de faict, le Seigneur s’attribue toute puissance, et veut que nous la recognoissions estre en luy : non pas telle que les Sophistes l’imaginent, vaine, oisive, et quasi assopie mais tousjours veillante, plene d’efficace et d’action et aussi qu’il ne soit pas seulement, en général et comme en confus le principe du mouvement des créatures (comme si quelqu’un ayant une fois fait un canal, et addressé la voye d’une eau à passer dedans, la laissoit puis après escouler d’elle-mesme) mais qu’il gouverne mesmes et conduise sans cesse tous les mouvemens particuliers. Car ce que Dieu est recognu tout-puissant, n’est pas pource qu’il puisse faire toutes choses, et néantmoins se repose, ou que par une inspiration générale il continue l’ordre de nature tel qu’il l’a disposé du commencement : mais d’autant que gouvernant le ciel et la terre par sa providence, il compasse tellement toutes choses, que rien n’advient sinon ainsi qu’il a déterminé en son conseil Ps. 115.3. Car quand il est dit au Pseaume, qu’il fait tout ce qu’il veut, cela s’entend d’une volonté certaine et propos délibéré. Et de faict, ce seroit une maigre fantasie, d’exposer les mots du Prophète selon la doctrine des Philosophes, asçavoir que Dieu est le premier motif, pource qu’il est le principe et la cause de tout mouvement : en lieu que plustost c’est une vraye consolation, de laquelle les fidèles adoucissent leur douleur en adversitez, asçavoir qu’ils ne souffrent rien que ce ne soit par l’ordonnance et le commandement de Dieu, d’autant qu’ils sont sous sa main. Que si le gouvernement de Dieu s’estend ainsi à toutes ses œuvres, c’est une cavillation puérile de le vouloir enclorre et limiter dedans l’influence et le cours de nature. Et certes tous ceux qui restreignent en si estroites limites la providence de Dieu, comme s’il laissoit toutes créatures aller librement selon le cours ordinaire de nature, desrobbent à Dieu sa gloire, et se privent d’une doctrine qui leur seroit fort utile : veu qu’il n’y a rien plus misérable que l’homme, si ainsi estoit que les mouvemens naturels du ciel, de l’air, de la terre et des eaux eussent leur cours libre contre luy. Joinct qu’en tenant telle opinion, c’est amoindrir trop vilenement la singulière bonté de Dieu envers un chacun. David s’escrie que les petis enfans qui sont encores à la mammelle de la mère, ont assez d’éloquence pour prescher la gloire de Dieu Ps. 8.2 : c’est asçavoir d’autant que si tost qu’ils sont sortis du ventre, et venus au monde, ils trouvent leur nourriture qui leur est apprestée par une providence d’enhaut. Je confesse bien que cela est naturel et général : mais si faut-il ce pendant que nous contemplions et considérions ce que l’expérience monstre tout évidemment, qu’entre les mères les unes ont les mammelles plenes et bien fournies de lait, les autres seront quasi seiches, selon qu’il plaira à Dieu de nourrir un enfant abondamment, et l’autre plus petitement. Or ceux qui attribuent droictement à Dieu la louange de Tout-puissant, recueillent de cela double fruit. Premièrement, d’autant qu’il a assez ample faculté de bien faire, veu que le ciel et la terre sont sous sa possession et seigneurie, et que toutes créatures dépendent de son plaisir pour s’assujetir à luy en obéissance. Secondement, pource qu’on se peut asseurément reposer en sa protection, veu que toutes choses qui pourroient nuire de quelque part que ce soit, sont sujettes à sa volonté, veu que Satan avec toute sa rage et tout son appareil est réprimé par la volonté d’iceluy comme d’une bride, et veu que ce qui peut contrevenir à nostre salut est submis à son commandement. Et ne faut pas penser qu’il y ait autrement moyen de corriger ou appaiser les espovantemens ou craintes excessives et superstitieuses que nous concevons aisément quand les dangers se présentent, ou que nous les appréhendons. Je dy que nous sommes craintifs d’une façon superstitieuse, si quand les créatures nous menacent ou présentent quelque espovantement, nous les redoutons comme si elles avoyent quelque pouvoir de nuire d’elles-mesmes, ou qu’il nous en veinst quelque dommage par cas fortuit, ou que Dieu ne fust point suffisant pour nous aider à l’encontre d’icelles. Comme pour exemple, le Prophète défend aux enfans de Dieu de craindre les estoilles et signes du ciel, comme font les incrédules Jér. 10.2. Certes il ne condamne point toute crainte : mais d’autant que les infidèles transfèrent le gouvernement du monde de Dieu aux estoilles, ils imaginent que tout leur bon heur ou mal heur dépend d’icelles, et non pas de la volonté de Dieu. Ainsi au lieu de craindre Dieu ils craignent les estoilles, planètes et comètes. Ainsi, qui voudra éviter ceste infidélité, qu’il se souviene tousjours que la puissance, action, ou mouvement qu’ont les créatures, n’est point une chose qui se pourmène et voltige à leur plaisir : mais que Dieu par son conseil secret y gouverne tellement tout, que rien n’advient qu’il n’ait luy-mesme déterminé de son sceu et vouloir.

1.16.4

Parquoy que ceci soit premièrement bien résolu : c’est que quand on parle de la providence de Dieu, ce mot ne signifie pas qu’estant oisif au ciel il spécule ce qui se fait en terre : mais plustost qu’il est comme un patron de navire, qui tient le gouvernail pour addresser tous événemens. Ainsi ce mot s’estend tant à sa main qu’à ses yeux : c’est-à-dire que non-seulement il voit, mais aussi ordonne ce qu’il veut estre fait. Car quand Abraham disoit à son fils, Dieu y pourvoira Gen. 22.8 : ce n’estoit point seulement pour luy attribuer la cognoissance de ce qui devoit advenir : mais pour luy remettre le soin de la perplexité en laquelle il estoit, d’autant que c’est le propre office d’iceluy, de donner issue aux choses confuses. Dont il s’ensuit que la providence de Dieu est actuelle, comme l’on dit. Car ceux qui s’attachent à une prescience nue et de nul effect, sont par trop sots et badins. L’erreur de ceux qui attribuent à Dieu un gouvernement général et confus, est moins lourd, d’autant qu’ils confessent que Dieu maintient le monde et toutes ses parties en leur estre, mais seulement, par un mouvement naturel, sans addresser en particulier ce qui se fait : si est-ce néantmoins que tel erreur n’est point supportable. Car ils disent que par ceste providence, qu’ils appellent universelle, nulle créature n’est empeschée de tourner ça et là comme à l’adventure, ne l’homme de se guider et addresser par son franc arbitre où bon luy semblera. Voicy comment ils partissent entre Dieu et l’homme : c’est que Dieu inspire par sa vertu à l’homme mouvement naturel, à ce qu’il ait vigueur pour s’appliquer à ce que nature porte : et l’homme ayant telle faculté gouverne par son propre conseil et volonté tout ce qu’il fait. Brief ils imaginent que le monde et les hommes avec leurs affaires se maintienent par la vertu de Dieu : mais qu’ils ne sont pas gouvernez selon qu’il ordonne et dispose. Je laisse yci à parler des Epicuriens (de laquelle peste le monde a esté tousjours remply) lesquels en leurs resveries pensent que Dieu soit oisif et comme un faynéant : aussi des autres fantastiques, qui jadis ont gazouillé que Dieu gouverne tellement par-dessus le milieu de l’air, qu’il laisse ce qui est dessous à fortune. Car les créatures mesmes qui n’ont ne bouche ne langage, crient assez haut contre une sottise si énorme. Mon intention est seulement de réprouver l’opinion qui est par trop commune, laquelle attribue à Dieu un mouvement incertain, confus et comme aveugle : et ce pendant luy ravit le principal, c’est que par sa sagesse incompréhensible il addresse et dispose toutes choses à telle fin que bon luy semble. Car ceste opinion ne mérite nullement d’estre receue, veu qu’elle fait Dieu gouverneur du monde en tiltre seulement, et non pas d’effect, en luy ostant le soin et l’office d’ordonner ce qui se doit faire. Car, je vous prie, qu’est-ce d’avoir empire pour régir, sinon de présider en telle sorte que les choses sur lesquelles on préside soyent gouvernées d’un ordre estably par certain conseil ? Je ne réprouve pas du tout ce qui se dit de la providence universelle de Dieu : moyennant que cecy d’autre part me soit aussi accordé, c’est que le monde est gouverné de Dieu, non-seulement pource qu’il maintient en estre le cours de nature tel qu’il l’a estably pour un coup, mais pource qu’il a soin particulier d’une chacune créature. Vray est que toutes espèces ont quelque conduite secrette, selon que leur naturel le requiert, comme si elles obéissoyent à un statut perpétuel, auquel Dieu les a astreintes : et par ainsi ce que Dieu a une fois décrété, coule et va son train comme d’une inclination volontaire. Et à cela se peut rapporter la sentence de nostre Seigneur Jésus, que luy et le Père sont tousjours en œuvre dés le commencement : et aussi le dire de sainct Paul, Nous vivons en Dieu, et y avons nostre mouvement et estre. Item ce qu’escrit l’Apostre en l’Epistre aux Hébrieux, c’est qu’en voulant prouver la divinité de Jésus-Christ, il dit que toutes choses sont soustenues par son commandement tout-puissant Jean 5.17 ; Actes 17.28 ; Héb. 1.3. Mais c’est perversement fait de vouloir sous telles couleurs cacher et obscurcir la providence spéciale de Dieu, laquelle nous est tellement monstrée par tesmoignages de l’Escriture clairs et certains, que c’est merveille comment quelqu’un en puisse douter. Et de faict ceux qui tendent un tel voile pour la cacher, sont contraints en la fin d’adjouster par forme de correction, que beaucoup de choses se font par un soin particulier de Dieu : mais ils fallent en restreignant cela à quelques actes particuliers. Parquoy nous avons à prouver que Dieu a une telle superintendance à disposer tous événemens, que tout ce qui se fait procède tellement de ce qu’il a déterminé en son conseil, que rien n’advient par cas d’adventure.

1.16.5

Si nous accordons que le principe de tout mouvement est en Dieu, et ce pendant que toutes choses se démeinent ou de leur bon gré, ou à l’adventure, selon que leur inclination les pousse : les révolutions du jour et de la nuict, de l’hyver et de l’esté seront ouvrages de Dieu, entant qu’il a assigné à chacune saison son cours, et leur a imposé certaines loix. Or cela seroit vray si les jours succédans aux nuicts, et les mois venans l’un après l’autre, et si pareillement les années gardoyent toujours une mesme mesure en teneur éguale : mais quand une fois les chaleurs véhémentes avec seicheresse bruslent tous les fruits de la terre, l’autre fois les pluyes venantes outre leur saison corrompent et gastent les semences, que les gresles et tempestes raclent tout ce qu’elles rencontrent, cela ne seroit pas réputé œuvre de Dieu, sinon que par constellations ou autres causes naturelles tant les nuées que le beau temps, le froid et le chaud advinssent. Or par ce moyen on ne laisseroit point lieu ny à la bonté et faveur paternelle de Dieu, ny à ses jugemens. Si ceux contre lesquels je déba, disent que Dieu se monstre assez libéral envers le genre humain en distillant une vigueur ordinaire au ciel et en terre, pour nous pourvoir d’alimens, c’est une resverie trop fade et profane : car c’est autant, comme s’ils nioyent que la fertilité d’un an ne soit une singulière bénédiction de Dieu, et la stérilité et famine ne soyent sa malédiction et vengence. Mais pource qu’il seroit trop long d’amasser toutes les raisons pour rebouter cest erreur, que l’authorité de Dieu nous suffise. Il prononce souvent en la Loy et par les Prophètes, qu’en humectant la terre de rousées et pluye, il testifie là sa grâce : à l’opposite, que c’est par son commandement que le ciel s’endurcit, que les fruits sont mangez et consumez par bruines et autres corruptions : et toutesfois et quantes que vignes, champs et prés sont batus de gresles et tempestes, que cela aussi est tesmoignage de quelque punition spéciale qu’il exerce. Si cela nous est bien persuadé, il est aussi certain qu’il ne tombe pas une seule goutte de pluye sans qu’il ait ordonné en particulier. David magnifie bien la providence générale de Dieu, en ce qu’il nourrit les petis corbeaux qui l’invoquent Ps. 147.9 : mais quand Dieu menace de famine toutes bestes, ne déclaire-il point assez que pour un temps il nourrit plus libéralement tous animaux, et puis après plus maigrement, selon que bon luy semble ? C’est une sottise puérile (comme j’ay desjà dit) de restreindre cecy à quelques actes particuliers, veu que Jésus-Christ prononce sans exception aucune, qu’il n’y a oiselet de si petit prix qu’il soit qui tombe en terre sans la volonté de Dieu son Père Matth. 10.29. Certes si le vol des oiseaux est addressé par le conseil infallible de Dieu, il faut bien confesser avec le Prophète qu’il habite tellement en haut, qu’il daigne bien s’abbaisser pour voir tout ce qui se fait au ciel et en la terre Ps. 113.5-6.

1.16.6

Mais pource que nous sçavons que le monde a principalement esté créé à cause du genre humain, aussi il nous faut tousjours tendre à ce but, en parlant de la providence de Dieu : c’est de sçavoir quel soin il a de nous. Le Prophète Jérémie crie haut et clair : Je say, Seigneur, que la voye de l’homme n’est pas en sa liberté, et que ce n’est pas a luy d’addresser ses pas. Item Salomon : Les pas de l’homme sont addressez de Dieu : et comment l’homme ordonnera-il sa voye Jér. 10.23 ; Prov. 20.24 ? Que ceux contre lesquels je dispute aillent maintenant dire que l’homme a son mouvement naturel de l’inclination de sa nature, mais qu’il le tourne çà et là où bon luy semble. Car si cela estoit vray, l’homme auroit en sa main la disposition de ses voyes. S’ils le nient, d’autant qu’il ne peut rien sans la puissance de Dieu : je réplique à l’opposite, puis qu’il appert que Jérémie et Salomon attribuent à Dieu non-seulement une telle vertu qu’ils nous forgent, mais aussi conseil, décret, et certaine détermination de ce qui se doit faire, jamais ils ne se pourront desvelopper que l’Escriture ne leur soit contraire. Salomon en un autre lieu rédargue très-bien ceste témérité des hommes, lesquels, sans avoir regard à Dieu, comme s’ils n’estoyent pas conduits de sa main, se proposent tel but qu’il leur vient en la teste : L’homme, dit-il, dispose en son cœur, et c’est à Dieu de guider la langue Prov. 16.2 : comme s’il disoit que c’est une folie par trop ridicule, qu’un povre homme délibère ainsi de tout faire sans Dieu, ne pouvant seulement proférer un mot, sinon entant qu’il luy est donné. Qui plus est, l’Escriture, pour mieux exprimer que rien du tout ne se fait sans Dieu, et sa prédestination, luy assujetit les choses qui semblent estre les plus fortuites. Car quel cas trouvera-on plus d’adventure, que quand il tombe une branche d’un arbre sur un passant et le tue ? Or Dieu en parle bien autrement, affermant qu’il a livré un tel homme à la mort Ex. 21.13. Qui est-ce qui ne dira, que le sort soit exposé à fortune ? Or Dieu ne souffre point qu’on parle ainsi, en disant, que l’issue et le jugement luy en appartient. Il ne dit pas simplement, que c’est par sa vertu que les lots ou les balotes soyent jettées au vaisseau, et en soyent tirées hors : mais il se réserve ce que plustost on pouvoit attribuer à fortune, c’est qu’il addresse les balotes à son plaisir : à quoy s’accorde le dire de Salomon : Le povre et le riche se rencontrent, et Dieu esclaire les yeux des deux Prov. 17.2. Car il entend par ces mots, combien que les riches soyent meslez parmy les povres au monde, toutesfois quand Dieu assigne la condition à un chacun, qu’il n’y va pas à l’estourdie, ou en aveugle, veu qu’il esclaire les uns et les autres : et ainsi il exhorte les povres à patience, pource que ceux qui ne se contentent point de leur estat, taschent entant qu’en eux est d’escourre le joug qui leur est imposé de Dieu. Pareillement aussi l’autre Prophète reprend les gens profanes, qui attribuent à l’industrie des hommes, ou à fortune ce que les uns demeurent au bourbier, les autres sont eslevez en honneurs et dignitez : Ce n’est pas, dit il, ne du soleil levant, ne du couchant, ne du mydi que vienent les honneurs Ps. 75.6-7 : car c’est à Dieu d’en disposer comme juge : c’est luy qui humilie, c’est luy qui hausse. En quoy il conclud, d’autant que Dieu ne peut estre despouillé d’office de juge, que c’est par son conseil secret, que les uns sont avancez, et les autres demeurent contemptibles.

1.16.7

Mesmes je dy, que les événemens particuliers sont tesmoignages en général de la providence singulière de Dieu. Moyse récite que Dieu a esmeu un vent de midy au désert, qui a apporté quantité infinie de cailles Nombres 11.31. Il est dit aussi que, voulant jetter Jonas en la mer, il a envoyé un grand tourbillon et tempeste Jon. 1.4. Ceux qui ne pensent pas que Dieu tiene le gouvernail du monde, diront que cela a esté fait outre l’usage commun : or moy, je déduy de là, que nul vent ne s’eslève jamais sans commandement spécial de Dieu. Et aussi la doctrine du Prophète ne seroit pas autrement vraye, c’est qu’il fait les vents ses messagers, et les feux bruslans, ses serviteurs Ps. 104.4 : qu’il fait des nuées ses chariots, et qu’il chevauche sur les ailes des vents, sinon qu’il pourmenast tant les nuées que les vents à son plaisir et qu’il y démonstrast une singulière présence de sa vertu : comme aussi nous sommes enseignez ailleurs, toutesfois et quantes que la mer se trouble par l’impétuosité des vents, que tel changement signifie une présence spéciale de Dieu : Il commande, dit le prophète, et esmeut vents tourbillonneux, et fait escumer les flots de la mer en haut : après il arreste la tempeste et la fait tenir quoye, et fait cesser les vagues à ceux qui navigent Ps. 107.25, 29. Comme aussi Dieu mesme dénonce ailleurs qu’il a chastié le peuple par vents bruslans Amos 4.9 ; Aggée 1.11. Suivant cela, comme ainsi soit qu’il y ait naturellement vigueur d’engendrer aux hommes, toutesfois en ce que les uns sont privez de lignée, et les autres en ont à foison, Dieu veut qu’on recognoisse cela provenir de sa grâce spéciale : comme aussi il est dit au Pseaume, que le fruit du ventre est don de Dieu. Pourtant Jacob disoit à Rachel sa femme, Suis-je au lieu de Dieu, pour te donner des enfans Ps. 127.3 ; Gen. 30.2 ? Pour mettre fin à ce propos, il n’y a rien plus ordinaire en nature, que ce que nous sommes nourris de pain : or l’Esprit déclaire que, non-seulement le revenu de la terre est un don spécial de Dieu, mais aussi adjouste, que l’homme ne vit pas du seul pain Deut. 8.3, pource qu’il n’est pas substenté par se saouler, mais par la bénédiction secrette de Dieu : comme à l’opposite il menace qu’il rompra le baston ou soustenement du pain Esaïe 3.1 : et de faict autrement nous ne pourrions à bon escient user de ceste requeste, Que nostre pain quotidien nous soit donné, sinon que Dieu nous apastelast de sa main paternelle. Parquoy le Prophète, voulant bien persuader aux fidèles que Dieu en les paissant exerce l’office d’un bon père de famille, advertist qu’il donne viande à toute chair Ps. 136.25. En somme, quand nous oyons d’un costé qu’il est dit : Les yeux de Dieu sont sur les justes, et ses aureilles à leurs prières : et de l’autre costé, L’œil de Dieu est sur les meschans pour racler leur mémoire de la terre Ps. 34.16-17 : sçachons que toutes créatures haut et bas sont promptement appareillées à son service, à ce qu’il les applique à tel usage qu’il veut : dont nous avons à recueillir qu’il n’y a pas seulement une providence générale de Dieu pour continuer l’ordre naturel en ses créatures, mais qu’elles sont toutes dressées par son conseil admirable, et appropriées à leurs fins.

1.16.8

Ceux qui veulent rendre ceste doctrine odieuse, calomnient que c’est la fantasie des Stoïques, que toutes choses advienent par nécessité. Ce qui a esté reproché aussi bien à sainct Augustins[a]. Quant à nous, combien que nous ne débattons pas volontiers pour les paroles, toutesfois nous ne recevons pas ce vocable dont usoyent les Stoïques, asçavoir, Fatum : tant pource qu’il est du nombre des vocables desquels sainct Paul enseigne de fuir la vanité profane 1Tim. 6.20, qu’aussi que nos ennemis taschent par la haine du nom grever la vérité de Dieu. Quant est de l’opinion, c’est faussement et malicieusement qu’on nous la met sus. Car nous ne songeons pas une nécessité la quelle soit contenue en nature par une conjonction perpétuelle de toutes choses, comme faisoyent les Stoïques : mais nous constituons Dieu maistre et modérateur de toutes choses, lequel nous disons dés le commencement avoir selon sa sagesse déterminé ce qu’il devoit faire, et maintenant exécuté par sa puissance tout ce qu’il a délibéré. Dont nous concluons que non-seulement le ciel et la terre, et toutes créatures insensibles sont gouvernées par sa providence, mais aussi les conseils et vouloirs des hommes : tellement qu’il les addresse au but qu’il a proposé. Quoy doncques ? dira quelqu’un : ne se fait-il rien par cas fortuit ou d’adventure ? Je respon que cela a esté très-bien dit de Basilius le Grand, quand il a escrit que Fortune et Adventure sont mots de Payens : desquels la signification ne doit point entrer en un cœur fidèle. Car si toute prospérité est bénédiction de Dieu, adversité, sa malédiction : il ne reste plus lieu à fortune en tout ce qui advient aux hommes. D’avantage les paroles de sainct Augustin nous doivent esmouvoir. Il me desplaist, dit-il, qu’au livre que j’ai fait contre les Académiques[b], j’ay si souvent nommé Fortune : combien que par ce nom je n’ay point signifié quelque Déesse, comme les Payens ; mais l’événement fortuit des choses, comme en commun langage nous disons, Possible, Paradventure : combien qu’il faut rapporter tout à la providence de Dieu. En cecy mesme je ne l’ay point dissimulé, disant, La Fortune qu’on appelle communément, est possible conduite par un gouvernement caché : et appelons seulement Fortune, ce qui se fait sans que la cause et la raison nous en apparoisse. Or combien que j’aye dit cela, toutesfois je me repens d’avoir usé en ce livre-là du mot de Fortune : d’autant que je voy que les hommes ont une très-mauvaise coustume, qu’au lieu de dire, Dieu l’a ainsi voulu : ils disent, La Fortune l’a ainsi voulu. Brief ce sainct docteur enseigne par tout, que si on laisse rien à la fortune, le monde sera tourné, et viré à la volée. Et combien qu’il enseigne quelquesfois que toutes choses se font partie par le franc arbitre de l’homme, partie par l’ordonnance de Dieu, toutesfois il monstre bien que les hommes sont sujets à icelle et sont par icelle, addressez. Car il prend ce principe, qu’il n’y a rien plus hors de raison, que d’estimer que rien se face sinon comme Dieu l’a décrété : pource qu’autrement il adviendroit à la volée. Par laquelle raison il exclud tout ce qui pourroit estre changé du costé des hommes : et tantost après encores plus clairement, en disant qu’il n’est licite de chercher la cause de la volonté de Dieu. Or quand il use de ce mot de Permission, il nous sera bien liquide par un passage comment il entend, disant que la volonté de Dieu est la première cause et souveraine de toutes choses, pour ce que rien n’advient sans sa volonté ou permission[c]. Il ne forge pas un Dieu qui se repose en quelque haute tour pour spéculer, en voulant permettre cecy ou cela, veu qu’il luy attribue une volonté actuelle, laquelle ne pourroit estre réputée cause, sinon qu’il décrétast ce qu’il veut.

[a] Ad Boni., lib. II, 6 et alibi.
[b] Retract., cap.
[c] Quæstion., lib. LXXXIII ; De Trinitate, lib. III, cap. IV.

1.16.9

Toutesfois pource que la tardiveté de nostre esprit est bien loing de pouvoir monter jusques à la hautesse de la providence de Dieu, il nous faut pour la soulager mettre yci une distinction. Je dy doncques, combien que toutes choses soyent conduites parle conseil de Dieu, toutesfois qu’elles nous sont fortuites. Non pas que nous réputions fortune dominer sur les hommes, pour tourner haut et bas toutes choses témérairement (car ceste resverie doit estre loing d’un cœur chrestien) : mais pource que des choses qui advienent, l’ordre, la raison, la fin et nécessité est le plus souvent cachée au conseil de Dieu, et ne peut estre comprinse par l’opinion humaine, les choses que nous sçavons certainement provenir de la volonté de Dieu, nous sont quasi fortuites : car elles ne monstrent point autre apparence, quand on les considère en leur nature, ou quand elles sont estimées selon nostre jugement et cognoissance. Pour donner exemple, posons le cas qu’un marchand estant entré en une forest avec bonne et seure compagnie, s’esgare et tombe en une briganderie, où les voleurs luy coupent la gorge : sa mort n’estoit point seulement préveue à Dieu : mais estoit décrétée en son vouloir. Car il n’est point seulement dit qu’il a préveu combien s’estendroit la vie d’un chacun : mais qu’il a constitué et fiché les limites qui ne se pourront passer Job 14.5. Néantmoins d’autant que la conception de nostre entendement peut appréhender, toutes choses apparoissent fortuites en une telle mort. Qu’est-ce que pensera ici un chrestien ? Certes il réputera que cela est fortuit en sa nature, mais il ne doutera pas que la Providence de Dieu n’ait présidé à guider la fortune à son but. C’est une mesme raison des événemens futurs. Comme toutes choses à venir nous sont incertaines, aussi nous les tenons en suspens, comme si elles pouvoyent escheoir ou en une sorte ou en l’autre. Cela néantmoins demeure résolu en nostre cœur, qu’il n’adviendra rien que Dieu n’ait ordonné. Et en ce sens le nom d’Evénement est souvent réitéré en l’Ecclésiaste : pource que de prime face les hommes ne peuvent parvenir à la première cause, laquelle leur est cachée bien profond. Néantmoins ce que l’Escriture nous monstre de la providence secrette de Dieu, n’a jamais esté effacé tellement du cœur des hommes, que tousjours quelque résidu n’ait estincelé parmy leurs ténèbres. Mesmes les sorciers des Philistins, combien qu’ils chancellent en doute, ne pouvans bonnement déterminer de ce qu’on leur demande : si est-ce qu’ils attribuent l’adversité partie à Dieu, partie à fortune. Si l’arche, disent-ils, passe par ceste voye-là, nous saurons que c’est Dieu qui nous a affligez : si elle tend ailleurs, il nous est advenu un malheur 1Sam. 6.9, C’est bien une grande folie, si leur devinement les trompe, de recourir à fortune : ce pendant nous voyons qu’ils sont là tenus enserrez de n’oser croire simplement que leur malheur soit fortuit. Au reste, comment Dieu fleschit et tourne ça et là tous événemens par la bride de sa providence, il nous apperra par un exemple notable : Voicy, au mesme instant que David fut surprins et enclos par les gens de Saül au désert de Manon, les Philistins se ruent sur la terre d’Israël, tellement que Saül est contraint de se retirer pour secourir à son pays 2Sam. 23.26-27. Si Dieu donnant tel empeschement à Saül, a voulu pourvoir au salut de son serviteur David : combien que les Philistins ayent soudain prins les armes et outre l’opinion des hommes, nous ne dirons pas toutesfois que cela soit venu de cas d’adventure : mais ce qui nous semble estre quelque accident, la foy le recognoist estre une conduite secrette de Dieu. Il n’y apparoist pas semblable raison par tout : mais si faut-il tenir pour certain, que toutes les révolutions qu’on voit au monde, provienent du mouvement secret de la main de Dieu. Au reste, il est tellement nécessaire que ce que Dieu a ordonné adviene, que toutesfois ce qui se fait n’est pas nécessaire précisément ny de sa nature : et de cecy se présente un exemple familier : Puis que Jésus-Christ a vestu un corps semblable au nostre, nul de sens rassis ne niera que ses os n’ayent esté fragiles : et toutesfois il estoit impossible qu’ils fussent rompus. Voylà comment ce qui en soy peut advenir ainsi ou ainsi, est déterminé en une sorte au conseil de Dieu : dont nous voyons derechef que ces distinctions n’ont pas esté inventées sans propos : c’est qu’il y a nécessité simple ou absolue, et nécessité selon quelque regard. Item, qu’il y a nécessité de ce qui s’ensuit et de la conséquence. Car ce que les os du Fils de Dieu n’ont peu estre cassez, cela vient pour le regard que Dieu les avoit exemptez : et par ainsi ce qui naturellement pouvoit escheoir d’un costé ou d’autre, a esté restreint à la nécessité du conseil de Dieu.

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