La Légende dorée

XCV
SAINTE MARIE-MADELEINE, PÉCHERESSE

(22 juillet)

I. Marie-Madeleine naquit de parents nobles, et qui descendaient de famille royale. Son père s’appelait Syrus, sa mère Eucharie. Avec son frère Lazare et sa sœur Marthe, elle possédait la place forte de Magdala, voisine de Géné-zareth, Béthanie, près de Jérusalem, et une grande partie de cette dernière ville ; mais cette vaste possession fut partagée de telle manière que Lazare eut la partie de Jérusalem, Marthe, Béthanie, et que Magdala revint en propre à Marie, qui tira de là son surnom de Magdeleine. Et comme Madeleine s’abandonnait tout entière aux délices des sens, et que Lazare servait dans l’armée, c’était la sage Marthe qui s’occupait d’administrer les biens de sa sœur et de son frère. Tous trois, d’ailleurs, après l’ascension de Jésus-Christ, vendirent leurs biens et en déposèrent le prix aux pieds des apôtres.

Autant Madeleine était riche, autant elle était belle ; et elle avait si complètement livré son corps à la volupté qu’on ne la connaissait plus que sous le nom de la Pécheresse. Mais, comme Jésus allait prêchant çà et là, elle apprit un jour, sous l’inspiration divine, qu’il s’était arrêté dans la maison de Simon le Lépreux ; et aussitôt elle y courut ; mais, n’osant pas se mêler aux disciples, elle se tint à l’écart, lava de ses larmes les pieds du Seigneur, les essuya de ses cheveux et les oignit d’un onguent précieux : car l’extrême chaleur forçait les habitants de cette région à se servir, plusieurs fois par jour, d’eau et d’onguent. Et comme le Pharisien Simon s’étonnait de voir qu’un prophète se laissât toucher par une prostituée, le Seigneur le blâma de son orgueilleuse justice, et dit que tous les péchés de cette femme lui étaient remis. Et depuis lors, il n’y eut point de grâce qu’il n’accordât à Marie-Madeleine, ni de signe d’affection qu’il ne lui témoignât. Il chassa d’elle sept démons, il l’admit dans sa familiarité, il daigna demeurer chez elle, et, en toute occasion, se plut à la défendre. Il la défendit devant le pharisien qui la disait impure, et devant sa sœur Marthe, qui l’accusait de paresse, et devant Judas, qui lui reprochait sa prodigalité. Et il ne pouvait la voir pleurer sans pleurer lui-même. C’est par faveur pour elle qu’il ressuscita son frère, mort depuis quatre jours, qu’il guérit Marthe d’un flux de sang dont elle souffrait depuis sept ans, et qu’il choisit la servante de Marthe, Martille, pour prononcer cette parole mémorable : « Bienheureux le ventre qui t’a porté ! » Madeleine eut aussi l’honneur d’assister à la mort de Jésus, au pied de la croix ; c’est elle qui oignit de parfum le corps de Jésus après sa mort, et qui resta près du tombeau tandis que tous les disciples s’en étaient éloignés, et à qui Jésus ressuscité apparut tout d’abord.

Après l’ascension du Seigneur, la quatorzième année après la Passion, les disciples se répandirent dans les diverses contrées pour y semer la parole divine ; et saint Pierre confia Marie-Madeleine à saint Maximin, l’un des soixante-douze disciples du Seigneur. Alors saint Maximin, Marie-Madeleine, Lazare, Marthe, Martille, et avec eux saint Cédon, l’aveugle-né guéri par Jésus, ainsi que d’autres chrétiens encore, furent jetés par les infidèles sur un bateau et lancés à la mer, sans personne pour diriger le bateau. Les infidèles espéraient que, de cette façon, ils seraient tous noyés à la fois. Mais le bateau, conduit par la grâce divine, arriva heureusement dans le port de Marseille. Là, personne ne voulut recevoir les nouveaux venus, qui s’abritèrent sous le portique d’un temple. Et, lorsque Marie-Madeleine vit les païens se rendre dans leur temple pour sacrifier aux idoles, elle se leva, le visage calme, se mit à les détourner du culte des idoles et à leur prêcher le Christ. Et tous l’admirèrent, autant pour son éloquence que pour sa beauté : éloquence qui n’avait rien de surprenant dans une bouche qui avait touché les pieds du Seigneur.

II. Or le chef de la province se rendit dans le temple pour sacrifier aux idoles, espérant obtenir ainsi un enfant, car son mariage était resté sans fruit. Mais Madeleine, par sa prédication, les dissuada de sacrifier aux idoles. Et, quelques jours après, elle apparut en rêve à la femme de ce chef et lui dit : « Pourquoi, étant riches, laissez-vous mourir de faim et de froid les serviteurs de Dieu ? » Et elle la menaça de la colère divine si elle se refusait à faire en sorte que son mari devînt plus charitable. Mais la femme eut peur de parler à son mari de cette vision. Madeleine lui apparut encore la nuit suivante ; et, de nouveau, elle négligea d’en avertir son mari. Enfin, la troisième nuit, Madeleine se montra, tout irritée et le visage enflammé, et elle lui reprocha amèrement la dureté de son cœur. La femme se réveilla toute tremblante, et vit que son mari tremblait aussi. « Seigneur, lui dit-elle, as-tu vu de ton côté ce que j’ai vu en rêve ? » Et le mari répondit : « J’ai vu la chrétienne, qui m’a reproché mon manque de charité, et m’a menacé de la colère divine. Que devons-nous faire ? » Et la femme : « Mieux vaut lui obéir que d’encourir la colère de son Dieu ! » Ils donnèrent donc l’hospitalité aux chrétiens, et promirent de pourvoir à tous leurs besoins.

Un jour que Marie-Madeleine prêchait, ce même chef lui dit : « Te crois-tu en état de défendre la foi que tu prêches ? » Et elle : « Certes, je suis prête à défendre une foi qui se trouve encore fortifiée tous les jours par les miracles et la prédication de mon maître Pierre, l’évêque de Rome ! » Alors le chef et sa femme lui dirent : « Nous t’obéirons en toute chose si tu parviens à obtenir pour nous, de ton Dieu, la naissance d’un fils. » Et Marie-Madeleine pria le Seigneur pour eux, et sa prière fut entendue, car bientôt la femme se trouva enceinte.

Alors le chef résolut de se rendre auprès de Pierre, pour savoir de lui si ce que Madeleine disait du Christ était vrai. Et sa femme lui dit : « Eh ! quoi, mon ami, penses-tu donc partir sans moi ? » Et lui : « Je ne puis songer à te prendre avec moi, car tu es enceinte, et les dangers de la mer sont grands ! » Mais elle insista si fort, comme savent faire les femmes, et se jeta à ses pieds avec tant de larmes, qu’elle finit par obtenir ce qu’elle demandait. Madeleine fit sur eux le signe de la croix, pour les mettre à l’abri des pièges du démon, et ils partirent, laissant à la garde de Madeleine tout ce qu’ils n’emportaient pas avec eux sur le bateau. Or, après un jour et une nuit du voyage, la mer se leva, la tempête souffla ; et la femme du chef, accablée de frayeur et toute secouée par l’orage, enfanta un fils avant le terme naturel, et, l’ayant enfanté, mourut. Quant à l’enfant nouveau-né, il tremblait de faim, cherchait vainement le sein maternel et poussait des cris lamentables. Le malheureux père se désespérait, disant : « Hélas ! que vais-je faire ? J’ai désiré avoir un fils, et voilà que, par ce désir, j’ai perdu à la fois ma femme et mon fils ! » Cependant les matelots s’écriaient : « Qu’on jette à la mer ce cadavre, car aussi longtemps qu’il sera avec nous la tempête continuera à nous tourmenter ! » Déjà même ils s’étaient emparés du cadavre pour le jeter à la mer, malgré les supplications du pèlerin, lorsque apparut à l’horizon une terre inconnue. L’apercevant, le pèlerin obtint des matelots, à force de prières et de promesses, qu’on transportât sur cette terre le cadavre de sa femme et l’enfant nouveau-né. On aborda donc, et l’on se mit en devoir de creuser une fosse. Mais le sol était si dur qu’on ne pouvait le creuser ; de telle sorte que le pèlerin enveloppa le cadavre dans un manteau, et le disposa dans un endroit écarté, après lui avoir placé l’enfant sur la poitrine. Puis, après avoir invoqué l’aide de Marie-Madeleine, il remonta à bord et poursuivit sa route.

Quand il arriva auprès de Pierre, celui-ci vint à sa rencontre ; et, voyant sur son manteau le signe de la croix, il lui demanda qui il était et d’où il venait. Le pèlerin lui raconta toute son histoire. Et Pierre : « Que la paix rentre en toi, et prends ton mal en patience ! Ta femme dort et son enfant avec elle. Mais Dieu est puissant : il peut tout enlever et tout rendre. Il pourra, s’il le veut, changer ta tristesse en joie. » Pierre le conduisit ensuite à Jérusalem, lui montra tous les lieux où le Christ avait prêché et fait des miracles, le lieu de sa passion et celui de son ascension ; et pendant deux ans il l’instruisit dans la foi. Après quoi le pèlerin reprit la mer pour rentrer dans sa patrie. Et comme, sur l’ordre de Dieu, le vent avait poussé de nouveau le bateau près de l’île où avaient été déposés la femme morte et l’enfant, le pèlerin obtint des matelots la permission d’y aborder.

Or, le petit garçon, dont Marie-Madeleine s’était chargée, et sur qui elle veillait de loin pour le maintenir en vie, venait souvent jouer dans le sable du rivage ; et le pèlerin, en approchant de l’île, fut très surpris de voir cet enfant en un tel lieu. L’enfant, de son côté, n’ayant jamais vu aucun homme, prit peur, et se réfugia auprès de sa mère morte, dont il téta le sein à son habitude. Et le pèlerin, s’étant approché, aperçut sa femme, qui semblait dormir, et un bel enfant qui lui tétait le sein. Alors il prit l’enfant dans ses bras et s’écria : « Ô bienheureuse Marie-Madeleine, combien ma joie serait grande si seulement ma femme vivait encore et pouvait rentrer avec moi dans notre patrie ! Et je sais que toi, qui m’as donné un enfant, et qui pendant deux ans as veillé sur lui, tu aurais le pouvoir d’obtenir du ciel que la vie fût rendue à la mère ! » À peine avait-il ainsi parlé que sa femme ouvrit les yeux, comme si elle s’éveillait, et dit : « Bénie sois-tu, Marie-Madeleine, qui m’as tenu lieu de sage-femme dans mes couches et m’as fidèlement secourue dans tous mes besoins ! » Et le pèlerin stupéfait : « Es-tu donc vivante, ma femme chérie ? » Et elle : « Oui, certes ; et je reviens à présent du pèlerinage dont tu reviens toi-même. Et, quand saint Pierre te conduisait dans Jérusalem, te montrant tous les lieux où a vécu et est mort le Christ, j’étais là aussi, sous la conduite de sainte Marie-Madeleine. » Le pèlerin, ravi de joie, remonta sur le bateau avec sa femme et son enfant ; et, peu de temps après, ils entrèrent dans le port de Marseille. Ils trouvèrent là Marie-Madeleine occupée à prêcher avec ses disciples. Se jetant à ses pieds, ils lui racontèrent tout ce qui leur était arrivé ; et saint Maximin les baptisa solennellement.

Alors les habitants de Marseille détruisirent tous les temples des idoles, qu’ils remplacèrent par des églises chrétiennes ; et, d’un consentement unanime, ils nommèrent Lazare évêque de Marseille. Puis Marie-Madeleine et ses disciples se rendirent à Aix, où, par de nombreux miracles, ils convertirent le peuple à la foi du Christ ; et saint Maximin y fut élu évêque.

III. Cependant sainte Marie-Madeleine, désireuse de contempler les choses célestes, se retira dans une grotte de la montagne, que lui avait préparée la main des anges, et pendant trente ans elle y resta à l’insu de tous. Il n’y avait là ni cours d’eau, ni herbe, ni arbre ; ce qui signifiait que Jésus voulait nourrir la sainte des seuls mets célestes, sans lui accorder aucun des plaisirs terrestres. Mais, tous les jours, les anges l’élevaient dans les airs, où, pendant une heure, elle entendait leur musique ; après quoi, rassasiée de ce repas délicieux, elle redescendait dans sa grotte, sans avoir le moindre besoin d’aliments corporels.

Or, certain prêtre, voulant mener une vie solitaire, s’était aménagé une cellule à douze stades de la grotte de Madeleine. Et, un jour, le Seigneur lui ouvrit les yeux, de telle sorte qu’il vit les anges entrer dans la grotte, prendre la sainte, la soulever dans les airs et la ramener à terre une heure après. Sur quoi le prêtre, afin de mieux constater la réalité de sa vision, se mit à courir vers l’endroit où elle lui était apparue ; mais, lorsqu’il fut arrivé à une portée de pierre de cet endroit, tous ses membres furent paralysés ; il en retrouvait l’usage pour s’en éloigner, mais, dès qu’il voulait se rapprocher, ses jambes lui refusaient leur service. Il comprit alors qu’il y avait là un mystère sacré, supérieur à l’expérience humaine. Et, invoquant le Christ, il s’écria : « Je t’en adjure par le Seigneur ! si tu es une personne humaine, toi qui habites cette grotte, réponds-moi et dis-moi la vérité ! » Et, après qu’il eut répété trois fois cette adjuration, sainte Marie-Madeleine lui répondit : « Approche-toi davantage, et tu sauras tout ce que tu désires savoir ! » Puis, lorsque la grâce du ciel eut permis au prêtre de faire encore quelques pas en avant, la sainte lui dit : « Te souviens-tu d’avoir lu, dans l’évangile, l’histoire de Marie, cette fameuse pécheresse qui lava les pieds du Sauveur, les essuya de ses cheveux, et obtint le pardon de tous ses péchés ? » Et le prêtre : « Oui, je m’en souviens ; et, depuis trente ans déjà, notre sainte Église célèbre ce souvenir. » Alors la sainte : « Je suis cette pécheresse. Depuis trente ans, je vis ici à l’insu de tous ; et, tous les jours, les anges m’emmènent au ciel, où j’ai le bonheur d’entendre de mes propres oreilles les chants de la troupe céleste. Or, voici que le moment est prochain où je dois quitter cette terre pour toujours. Va donc trouver l’évêque Maximin, et dis-lui que, le jour de Pâques, dès qu’il sera levé, il se rende dans son oratoire : il m’y trouvera, amenée par les anges. » Et le prêtre, pendant qu’elle lui parlait, ne la voyait pas, mais il entendait une voix d’une suavité angélique.

Il courut aussitôt vers saint Maximin, à qui il rendit compte de ce qu’il avait vu et entendu, et, le dimanche suivant, à la première heure du matin, le saint évêque, entrant dans son oratoire, aperçut Marie-Madeleine encore entourée des anges qui l’avaient amenée. Elle était élevée à deux coudées de terre, les mains étendues. Et, comme saint Maximin avait peur d’approcher, elle lui dit : « Père, ne fuis pas ta fille ! » Et Maximin raconte lui-même, dans ses écrits, que le visage de la sainte, accoutumé à une longue vision des anges, était devenu si radieux, qu’on aurait pu plus facilement regarder en face les rayons du soleil que ceux de ce visage. Alors l’évêque, ayant rassemblé son clergé, donna à sainte Marie-Madeleine le corps et le sang du Seigneur ; et, aussitôt qu’elle eut reçu la communion, son corps s’affaissa devant l’autel et son âme s’envola vers le Seigneur. Et telle était l’odeur de sa sainteté, que, pendant sept jours, l’oratoire en fut parfumé. Saint Maximin fit ensevelir en grande pompe le corps de la sainte, et demanda à être lui-même enterré près d’elle, après sa mort.

Le livre attribué par les uns à Hégésippe, par d’autres à Josèphe, raconte l’histoire de Marie-Madeleine presque de la même façon. Il ajoute seulement que le prêtre trouva la sainte enfermée dans sa cellule, que, sur sa demande, il lui donna un manteau dont elle se couvrit, et que c’est avec lui qu’elle se rendit à l’église, où, après avoir communié, elle s’endormit en paix devant l’autel.

IV. Au temps de Charlemagne, Girard, duc de Bourgogne, désolé de ne pouvoir pas avoir un fils, faisait de grandes charités aux pauvres, et construisait nombre d’églises et de monastères. Lorsqu’il eut ainsi construit le monastère de Vézelay, l’abbé de ce monastère, sur sa demande, envoya à Aix un moine avec une escorte, afin qu’il essayât, si la chose était possible, de ramener de cette ville le corps de sainte Madeleine. Le moine, en arrivant à Aix, vit la ville détruite de fond en comble par les païens ; mais un heureux hasard lui permit de découvrir un tombeau de marbre qu’il supposa être celui de la sainte : car toute l’histoire de celle-ci y était sculptée. La nuit suivante, donc, le moine ouvrit le tombeau, prit les ossements qui s’y trouvaient, et les rapporta à son hôtellerie. Et, dans cette même nuit, sainte Madeleine, lui apparaissant en rêve, lui dit d’être sans crainte et de poursuivre son œuvre. Le moine s’en retourna vers son monastère avec les précieuses reliques ; mais, quand il arriva à une demi-lieue du monastère, ni lui ni ses compagnons ne purent faire avancer davantage les reliques jusqu’à ce que l’abbé fût venu au-devant d’elles, et les eût fait solennellement conduire en procession.

V. Un soldat, qui avait l’habitude de faire, tous les ans, un pèlerinage au tombeau de sainte Madeleine, fut tué dans un combat. Ses parents, pleurant autour de son cercueil, reprochaient pieusement à la sainte d’avoir permis que leur fils mourût sans confession. Et voilà que tout à coup le mort, à la surprise générale, se leva et demanda un prêtre. Puis, lorsqu’il se fut confessé et eut reçu l’extrême-onction, aussitôt il s’endormit en paix dans le Seigneur.

VI. Sur un bateau en péril, une femme, qui était enceinte, invoqua sainte Madeleine, faisant le vœu que, si elle était sauvée et s’il lui naissait un fils, elle donnerait cet enfant au monastère de la Madeleine. Alors une femme d’apparence surnaturelle s’approcha d’elle, et, la prenant par le menton, la conduisit saine et sauve jusqu’au rivage : en récompense de quoi, la naufragée, ayant mis au monde un fils, remplit fidèlement son vœu.

VII. Certains auteurs racontent que Marie-Madeleine était la fiancée de saint Jean l’Évangéliste, et que celui-ci s’apprêtait à l’épouser lorsque le Christ, survenant au milieu de ses noces, l’appela à lui : ce dont Madeleine fut si indignée que, depuis lors, elle se livra tout entière à la volupté. Mais c’est là une légende fausse et gratuite : et le Frère Albert, dans sa préface à l’évangile de saint Jean, nous affirme que la fiancée que le saint quitta pour suivre Jésus, resta vierge toute sa vie, et vécut, plus tard, dans la société de la Vierge Marie.

VIII. Un aveugle se rendait en pèlerinage au monastère de Vézelay. Lorsque l’homme qui le conduisait lui dit que déjà on apercevait l’église, l’aveugle s’écria : « Ô sainte Marie-Madeleine, ne me sera-t-il jamais donné de voir ton église ? » Et aussitôt il recouvra la vue.

IX. Un homme qui était en prison appela à son aide Marie-Madeleine ; et, dans la nuit, une femme inconnue lui apparut, qui brisa ses chaînes, lui ouvrit la porte de la prison, et lui ordonna de s’enfuir.

X. Un clerc de Flandre, nommé Étienne, était tombé dans une telle dépravation qu’il se livrait à tous les vices, et ne voulait pas même entendre parler des choses du salut. Il gardait seulement une grande dévotion à Marie-Madeleine, et ne manquait pas de jeûner la veille de sa fête. Or, comme il visitait le tombeau de la sainte, celle-ci lui apparut, tout en larmes, et soutenue des deux côtés par des anges. Et elle lui dit : « Pourquoi, Étienne, te conduis-tu d’une façon si indigne de moi ? Mais moi, du jour où tu as commencé à m’invoquer, j’ai toujours prié le Seigneur pour toi ! Maintenant donc, lève-toi et fais pénitence, et je ne t’abandonnerai pas jusqu’à ce que tu te sois réconcilié avec Dieu ! » Et Étienne se sentit rempli d’une telle grâce divine que, renonçant au siècle, il entra en religion, et mena depuis lors une vie parfaite. À sa mort, on vit Marie-Madeleine descendre vers lui, soutenue par deux anges, et emporter son âme au ciel comme une blanche colombe.

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