Précis d'histoire de l'Eglise

Chapitre 5 : L’Eglise d’Orient aux VIIIe et IXe siècles

1. Gains et pertes. L’Eglise continue à lutter contre l’Islam et se maintient en Asie Mineure. Elle fait des conquêtes en pays slaves, par les efforts de Cyrille et Methodus, qui travaillèrent en Bulgarie et en Serbie. Ils ont traduit la Bible en slavon et ont posé les bases de cette langue. Ils évangélisèrent aussi la Moravie et la Tchéquie.

Les Slaves du Sud restèrent attachés à l’Eglise d’Orient, mais ceux du Nord passèrent plus tard à l’Eglise latine.

2. Controverse iconoclaste. Le culte des images s’était développé. On embrassait les icones, on faisait brûler des cierges, on se prosternait devant elles. Cela choquait les monophysites et les Musulmans. Certains chrétiens voulaient donc freiner le culte des images.

L’Empereur Léon III (717-741) l’Isaurien prit la tête du mouvement. Par un premier édit, il fit enlever les images de la portée des fidèles. Par un deuxième édit, il interdit la fabrication des images, et ordonna qu’on enterre ou recouvre celles qui existaient. On l’appela iconoclaste (briseur d’image).

Les papes Grégoire II (715-731) et Grégoire III (731-741), ainsi que l’évêque Germanos de Constantinople protestèrent. Ce dernier démissionna et Anastase, son successeur, encouragea les tendances iconoclastes.

Constantin V (741-775), successeur de Léon III, condamna par le Concile de Constantinople le culte des images comme un acte de polythéisme, une invention du diable et une hérésie. Pendant tout son règne, il persécuta les adorateurs d’images.

L’impératrice Irène, régente pendant la minorité de son fils, à qui elle fit crever les yeux et qu’elle fit périr, convoqua en 787 un Concile à Nicée. Les délégués de l’évêque de Rome influencèrent les débats, et on déclara le précédent Concile de Constantinople hérétique. On rétablit le culte des images, on distingua :

Peut après les iconoclastes reprirent le dessus et l’impératrice fut exilée. L’Eglise grecque la vénère comme une sainte martyre.

L’empereur Léon V (813-820) l’Arménien combattit lui aussi le culte des images, mais la veuve d’un de ses successeurs, Théodora, le rétablit. Elle fixa la fête de l’orthodoxie, célébrée encore aujourd’hui ; on y prononçait l’anathème contre tous les hérétiques de tous les temps, et l’on y proclame les vertus de l’Eglise greco-byzantine.

3. Hérésie paulicienne. Elle naît au 7e siècle en Asie mineure. On accusait les Pauliciens d’être manichéens : il y avait là une exagération, car ils ne se livraient pas aux spéculations des anciens manichéens. D’autre part, ils reprenaient à leur compte l’opposition entre esprit bon et matière mauvaise. Ils rejetaient l’Ancien Testament et une partie du Nouveau. Ils étudiaient surtout Luc, Jean, Paul. Ils n’attribuaient pas une grande valeur aux sacrements, ils étaient hostiles au baptême des enfants, très anticléricaux et très hostiles au culte des images.

Un certain Constantin de Samosate fut l’initiateur du mouvement. Le général Siméon, envoyé pour les réprimer, se convertit.

Au VIIIe siècle, ils se maintinrent en Asie-Mineure, soutenus par Léon III, qui en transplanta en Thrace, d’où ils évangélisèrent la Bulgarie. Mais Théodora les persécuta très violemment.

En Bulgarie et en Bosnie, ils gagnèrent à leurs idées une partie notable de la population. Ils y prirent le nom de Bogomiles (amis de Dieu) et se maintinrent jusqu’aux invasions musulmanes (XIVe et XVe siècles).

4. Jean Damascène (VIIIe siècle). C’est le théologien classique de l’Eglise Orthodoxe. Il recueillit les déclarations des Pères du IVe siècle et composa un ouvrage sur la Trinité, où il développa la doctrine de la périchorèse ou circumincession qui affirme que chacune des trois Personnes de la Trinité est présente dans les deux autres.

C’était un adversaire des iconoclastes. Il préconisait le culte des images, en se basant sur le fait que le Fils est l’image du Dieu invisible.

Les deux principaux ouvrages de Jean Damascène sont Les sources de la connaissance, où il examine successivement la philosophie, les hérésies et la doctrine orthodoxe, et Les saints parallèles qui exposent la doctrine des théologiens du IVe siècle, en particulier celle des Cappodociens. Cet ouvrage fut traduit en latin et de ce fait influença les théologiens scholastiques d’Occident.

5. Vie intérieure de l’Eglise d’Orient. Les dissidences monophysites et monothélites, puis les invasions arabes réduisirent à peu près à rien l’importance des patriarches orthodoxes d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem. De ce fait, le patriarche de Constantinople apparaissait comme le seul chef de l’Eglise d’Orient et pouvait s’intituler patriarche œcuménique. Mais il n’avait aucune indépendance en face de l’empereur qui intervenait dans les nominations et qui prononçait des destitutions. La théologie se perdait dans des discussions « byzantines » sur des points de détail. Le culte restait très pompeux. La vénération pour les reliques encourageait la pratique des pèlerinages, en particulier à Jérusalem. Les moines, toujours très nombreux, favorisaient la superstition. Certains se rendirent utiles par des travaux manuels, l’exercice de l’hospitalité et des ouvrages d’érudition. Ceux du Mont Athos, par exemple, se distinguèrent comme copistes. Le niveau très bas de la moralité à la cour impériale, dans l’Eglise et dans la population allait précipiter la décadence.

La vénération des images.

Nous décrétons la restauration des saintes images qui doivent être vénérées comme l’a été de tout temps le signe de la croix. Elles seront rétablies dans les églises, sur les vases du culte, sur les vêtements sacerdotaux, sur les murailles, sur les tableaux séparés, dans les maisons et dans les rues ; car plus on voit ces saintes figures, plus l’esprit s’élève jusqu’à la mémoire et au respect qui sont dus aux personnages qu’elles représentent. Nous décrétons qu’on s’en approchera pour les baiser, pour se prosterner devant elles, sans entendre toutefois par là qu’on leur rendra le véritable culte, qui n’est dû qu’à la nature divine. On ne fera pour elles que ce que l’on fait pour le signe de la croix, pour les saints évangiles et autres objets sacrés. On leur rendra aussi l’honneur de l’encens et des cierges selon l’usage pratiqué pieusement depuis un temps immémorial ; car toute démonstration extérieure de respect accordée à l’image passe à celui dont elle reproduit les traits, et le fidèle qui salue cette image vénère le personnage qu’elle représente.

Concile de Nicée
MANSI T. XIII, p. 377.

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