L’Attente actuelle de l’Église

DIXIÈME SOIRÉE

Ésaïe, I.

Même sujet que le précédent

Quelques passages des Livres Saints, que je n’ai pu citer la dernière fois sur la destinée des Juifs, spécialement des passages des petits prophètes, cloront la prophétie historique qui concerne ce peuple ; je dis historique parce que la prophétie est l’histoire que Dieu nous a donnée de l’avenir.

Je vous rappellerai une circonstance très-importante en parlant des Juifs ; c’est que leur histoire est spécialement la manifestation de la gloire de l’Éternel. Demander : En quoi toute cette histoire nous concerne-t-elle ? c’est dire : Que m’importe ce que mon père veut faire pour mes frères. Quand nous voyons combien ce sujet occupe de place dans la Parole de Dieu, nous devons être convaincus que la chose est extrêmement chère au cœur de Dieu, si elle ne l’est pas au nôtre. C’est dans ce peuple, par les voies de Dieu envers ce peuple, que le caractère de l’Éternel est pleinement révélé, que les nations connaîtront l’Éternel, et que nous apprendrons nous-mêmes à le connaître.

Une même personne peut être roi d’un pays, et père de famille ; et voilà la différence entre ce que Dieu a été envers l’Église et ce qu’il a été envers les Juifs. Envers l’Église, c’est le caractère de Père ; envers les Juifs, c’est le caractère de l’Éternel. Sa fidélité, son immutabilité, sa toute-puissance, son gouvernement de toute la terre, tout cela est révélé envers Israël ; c’est pourquoi l’histoire de ce peuple nous fait connaître l’Éternel.

Ps. CXXVI : « Quand l’Éternel ramènera les captifs de Sion…, c’est alors qu’on dira parmi les nations : L’Éternel a fait de grandes choses. »

Voyez sur le même objet Ézéc. XXXIV, 6, 7 : « Et j’enverrai du feu dans Magog, et parmi ceux qui habitent les îles dans la sécurité, afin qu’ils reconnaissent que je suis l’Éternel. Et je ferai connaître mon saint Nom au milieu de mon peuple d’Israël, et je ne laisserai plus profaner mon saint Nom ; mais les nations apprendront que je suis l’Éternel, le Saint d’Israël… »

Verset 28 : « Alors ils reconnaîtront que je suis l’Éternel, leur Dieu, quand après les avoir emmenés vers les peuples, je les rassemblerai dans leur terre, et que je n’en laisserai plus aucun d’eux en arrière. » Voilà par quel moyen l’Éternel se fait connaître. Le Père se révèle à nos âmes par l’Évangile, par l’Esprit d’adoption ; mais l’Éternel se fait connaître par ses jugements, par l’exercice de sa puissance sur la terre.

J’ai dit que le Père se fait connaître par l’Évangile, parce que l’Évangile est un système de pure grâce, un système qui nous enseigne à agir, d’après le principe de la pure grâce ; ce n’est pas « œil pour œil, dent pour dent, » ce n’est pas ce que la justice demande, la loi du talion ; c’est un principe d’après lequel je dois être parfait comme mon Père est parfait. Il n’en est pas ainsi du gouvernement de l’Éternel. L’Éternel bénira sans doute les nations ; mais le caractère de son règne est que « le jugement retournera à la justice (Ps. XCIV, 15.) » Lors du premier avènement de Jésus-Christ, le jugement était en Pilate et la justice en Jésus ; mais quand Jésus reviendra, le jugement s’unira à la justice. Maintenant le peuple de Christ, les enfants de Dieu doivent suivre l’exemple du Sauveur, c’est-à-dire ne pas attendre que le jugement soit selon la rigueur de la justice, mais être doux et humbles au milieu de toutes les injures qu’ils éprouvent de la part des hommes. Unis à Christ, ils en sont dédommagés par la puissance de son amour intime, qui les soulage, par les consolations de la présence de son Esprit, et de plus, par les espérances d’une gloire céleste. D’un autre côté, l’Éternel nous console par une action directe de sa justice en faveur de son peuple, et en le rétablissant dans la gloire terrestre.

Les Juifs, voilà donc le peuple par lequel et dans lequel Dieu établit son nom d’Éternel et son caractère de jugement et de justice. L’Église, voilà le peuple dans lequel, comme dans sa famille, le Père manifeste son caractère de bonté et d’amour.

Qu’arrivera-t-il aux Juifs dans les derniers temps ? C’est ce que nous avons déjà considéré dans Jérém. XXX à XXXIII, et dans Ézéch. XXXVI à XXXIX, où nous voyons une série de promesses et de révélations sur ce point.

Je vous citerai quelques autres passages sur le même sujet en suivant l’ordre des prophètes dans la Bible.

Dan. XII, 1… c’est la présence de celui qui agira pour le peuple de Daniel, c’est-à-dire pour le peuple Juif.

Je désire vous faire remarquer quelques traits de cette prophétie. Premièrement, Dieu dans sa puissance, par le ministère de Micael, tiendra ferme pour les enfants du peuple de Daniel, et ce sera un temps de détresse telle qu’il n’y en aura jamais eu. C’est ce qui nous explique ce qu’on lit en Matt. XXIV, et Marc, XIII, 19.

La résurrection, vers. 2, s’applique aux Juifs. Vous trouverez exactement les mêmes expressions dans Ésaïe, XXVII : « Tes morts vivront… ; et dans Ézéc. XXXVII, 12. C’est une résurrection figurée du peuple enseveli comme nation parmi les Gentils.

« Les uns ressusciteront pour l’opprobre et l’infamie éternelle. » C’est ce qui arrivera aux Juifs. És. LXVI, 24.

En un mot, d’une part Dieu tenant ferme pour son peuple dans un temps de détresse, et de l’autre, un résidu délivré, voilà le sommaire du XIIme de Daniel.

Dans Osée II, 14, jusqu’à la fin du chapitre, nous voyons que le Seigneur recevra Israël, l’introduira dans son pays après l’avoir humilié, mais lui avoir aussi parlé selon son cœur ; qu’il le rendra tel qu’il était au temps de sa jeunesse ; que l’Éternel fera une alliance avec lui, le bénira de toute manière dans cette terre, et l’épousera à toujours.

Et de plus il y a une chaîne non interrompue de bénédictions depuis l’Éternel jusqu’aux biens terrestres répandus en abondance sur Israël, qui est la semence de Dieu, car c’est la force du mot Jizréel ; c’est pourquoi il est ajouté « je la sèmerai pour moi en la terre. » Car Israël deviendra le moyen de bénédiction pour la terre comme la vie d’entre les morts. Maintenant tout est entravé par le péché ; voilà les malices spirituelles dans les lieux célestes et toutes sortes de misères, qui sont accompagnées sans doute de bien des miséricordes. Dieu fait tout contribuer au bien de ceux qui l’aiment, mais au temps d’alors il y aura plénitude des bénédictions terrestres.

Osée III, 4, 5 : « Car les enfants d’Israël demeureront longtemps sans roi et sans gouverneurs, sans sacrifices et sans statues, sans éphod et sans téraphims. Puis les enfants d’Israël se convertiront, et ils chercheront l’Éternel leur Dieu et David leur roi, et recourront à l’Éternel et à sa bonté dans les derniers jours. » Ils n’auront ni vrai Dieu ni faux dieu, mais après cela ils rechercheront l’Éternel et David, c’est-à-dire le Bien-aimé, — Christ.

Joel III, 1, 16-18, 20, 21. Après avoir parlé des nations lors du retour de son peuple de la captivité dans des versets cités auparavant à l’occasion du jugement exercé sur les Gentils, Dieu parle dans ceux-ci des Juifs. Jérusalem sera nettoyée ; l’Éternel habitera en Sion ; il sera l’asile de son peuple et la force des enfants d’Israël. Voilà ce qui arrivera quand le jugement de Dieu viendra sur les nations.

Amos IX, 14, 15 : « Et je ramènerai de la captivité, etc. Et je les planterai dans leur terre, ils n’en seront plus arrachés. » Cela n’est pas encore accompli.

Ce qui précède ces versets est cité dans le XVme des Actes, non pour démontrer que la prophétie fût alors accomplie, mais que Dieu avait de tout temps posé le principe d’un peuple pris parmi les Gentils. C’est-à-dire que le langage des prophètes concordait avec ce que Simon-Pierre racontait que Dieu avait fait dans ce temps-là. Ce n’est pas l’accomplissement d’une prophétie, mais l’établissement d’un principe par la bouche des Prophètes comme par celle de Simon-Pierre.

Mich. IV, 1-8. Cela n’est pas non plus accompli. Nous voyons là une topographie de Jérusalem et sa première domination rétablie.

V, 4, 7 et 8. Nous voyons le nom de Christ devenir bientôt grand jusqu’aux bouts de la terre ; Israël être la pluie de la bénédiction divine partout, et sortir vainqueur de tout ce qui s’oppose à lui.

À l’occasion de Michée, vous pouvez remarquer, en rappelant le principe déjà établi, la manière dont l’esprit de prophétie mentionne, versets 19 et 20, les promesses faites aux Pères sans condition.

Soph. III, 12, jusqu’à la fin. Quel langage nous avons ici ! Il est dit que Dieu se tait à cause de son amour. Il est tellement ému qu’il « se tait. » Qui est-ce que cela concerne ? Voyez verset 13 : « Les restes d’Israël ne commettront plus l’injustice, ne parleront plus avec tromperie, et leur bouche ne sera plus une langue trompeuse ; mais ils reposeront comme les brebis en leur pâturage sans que rien les trouble. » L’Éternel est au milieu d’eux, personne ne peut les effrayer.

Zach. I, 15, 17-21. Nous voyons là aussi les quatre monarchies, qui ont dissipé Israël, dissipées elles-mêmes par la puissance et par les jugements de Dieu.

IX, 9, jusqu’à la fin : « Réjouis-toi, fille de Sion ; sois dans la jubilation, fille de Jérusalem, voici, ton Roi vient à toi… »

On peut dire que cela est déjà accompli, mais en partie seulement. Il est à remarquer que quand le Saint-Esprit cite cet endroit de Zacharie, il en omet ces mots : « le Juste, et qui se garantit par lui-même. » Jésus en effet ne s’est pas ménagé. Lorsqu’on lui disait avec dérision : « Si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix, » il n’en a rien fait, il ne s’est pas soustrait à la douleur ; loin de se garantir lui-même, il a été notre garant.

X, 6, jusqu’à la fin. Quand est-ce qu’Israël a été comme si l’Éternel ne l’avait pas rejeté ? Jamais.

Maintenant nous allons voir que le peuple d’Israël sera rétabli dans sa terre, mais qu’il n’y aura qu’un résidu qui sera conservé.

Zach. XII. Il y a des fautes de traduction, mais dont je n’ai pas à m’occuper maintenant. Le verset 2 mentionne un temps de guerre, même de toutes les nations contre Israël ; mais Dieu fortifiera Israël d’une manière extraordinaire, et les nations seront détruites, et l’esprit de grâce et de supplication sera répandu sur le résidu d’Israël, qui contemplera avec le cœur pénétré de douleur le Messie qu’il a percé.

Je reprends Ésaïe, XVIII, dont la prophétie dans la traduction française me présente quelque difficulté ; mais son grand objet est trop évident pour être obscurci par quelque traduction que ce soit. Les fleuves de Cus sont le Nil et l’Euphrate. Les ennemis d’Israël étaient sur ces deux fleuves dans la période biblique de leur histoire. Or dans cette prophétie voilà un pays qui est au-delà de ces fleuves, un pays éloigné qui n’était pas encore en relation avec Israël dans les temps passés : le prophète a donc en vue un pays qui devait exister plus tard.

Verset 3. Dieu appelle tous les peuples du monde habitable à en prendre connaissance. Voici que toutes les nations s’occupent d’Israël ; elles sont sommées de la part de Dieu de faire attention à ce qui se passe au sujet de Jérusalem, elles sont toutes intéressées à son sort, le monde est convié à assister aux jugements qui vont avoir lieu. En attendant, Dieu demeure tranquille, et laisse agir les peuples ; Israël commence à retourner dans sa terre.

Voilà une description d’Israël rentrant en Judée à l’aide de quelque nation éloignée de ce peuple, laquelle n’est ni Babylone, ni l’Égypte, ni d’autres nations qui s’occupaient d’Israël dans les anciens temps. Je ne dis ni que ce soit l’Angleterre, ni que ce soit la France ou la Russie. Les Israélites rentrent dans leur pays, mais Dieu ne s’en occupe pas, Israël est abandonné à ces nations, et quand tout s’annonce comme s’il allait fleurir et prospérer de nouveau, voilà que ses rejetons et ses branches sont retranchés, et sont laissés tout l’été et tout l’hiver aux oiseaux de proie et aux bêtes féroces, qui désignent les Gentils. Néanmoins en ce temps-là un présent de ce peuple sera apporté à l’Éternel, et de la part de ce peuple dans la demeure de l’Éternel des armées, en la montagne de Sion.

Ps. CXXVI, 4 : « Ô Éternel ! ramène nos prisonniers. » Sion et Juda seront ramenés les premiers. Les captifs de Sion étaient déjà ramenés, quand cette prière fut présentée à Dieu, verset 1 ; mais ce sont les arrhes de ce que Dieu fera en ramenant tout Israël.

Je dois vous dire quelque chose quant à cette destruction d’Israël et de Juda. Premièrement nous voyons les Juifs rassemblés, ces Juifs qui ont rejeté Jésus, qui sont coupables de la mort de Jésus. Vous savez que les dix tribus n’ont jamais été coupables de ce crime. Il y a une différence remarquable dans la nation : les dix tribus ont été dispersées avant l’apparition des quatre monarchies ; ce sont les Assyriens qui ont emmené captives les dix tribus avant que Babylone existât comme empire. Une circonstance relative à une tribu juive qui vit au milieu des Arabes nous est racontée par M. Wolff qui l’a visitée dans ces derniers temps. Ces Juifs disent d’eux-mêmes qu’ils sont une tribu qui n’a pas voulu rentrer en Judée avec Esdras, parce qu’ils savaient que ceux qui rentreraient avec Esdras devaient retrancher le Messie, et ils sont restés où ils sont. Quand même la tradition serait fausse, l’existence d’une tradition semblable dans une tribu est extrêmement remarquable. Quoi qu’il en soit, une chose est vraie, c’est que les Juifs ayant rejeté le Christ seront assujettis à l’Antéchrist, ils feront une alliance avec le sépulcre et la mort, És. XXVIII, mais leur alliance anéantira toutes leurs espérances. S’étant réunis à l’Antéchrist, ils subiront les conséquences de cette ligue et enfin seront retranchés. Les deux parties des habitants de toute la terre seront retranchées, elles le seront dans le pays même d’Israël après leur retour. Zach. XIII, 8, 9.

Si vous lisez Ézéch. XX, 32–38, vous verrez qu’il en est tout autrement des dix tribus. Au lieu de deux parts retranchées dans le pays, les rebelles n’entrent pas du tout dans le pays ; Dieu fait envers eux ce qu’il a fait à Israël lors de sa sortie d’Égypte, il les retranche avant leur entrée dans le pays.

Il y a donc deux catégories de Juifs dans ce retour ; il y a premièrement la nation juive proprement dite, c’est-à-dire Juda et ceux qui sont allés avec Juda, qui ont rejeté le vrai Christ ; ils seront réunis à l’Antéchrist ; et deux parts seront retranchées dans la terre : secondement, ceux des dix tribus seront aussi retranchés en partie, mais dans le désert, avant d’entrer dans le pays.

Matth. XXIII, 38, 39. Ce jugement, que Jésus a porté sur ce peuple lui-même, nous fait comprendre la certitude de la venue du Seigneur pour rétablir Israël et régner au milieu de lui. « Jérusalem ! Jérusalem ! qui tues les prophètes… votre maison va devenir déserte, jusqu’à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! »

Israël verra Jésus, mais quand cette parole du Ps. CXVIII, 26, sortira de sa bouche. Ce Psaume présente le tableau de la joie d’Israël, en ce temps-là, et c’est de là que le Seigneur a tiré le jugement qui est porté sur les conducteurs juifs lorsqu’ils le rejettent : « La pierre que les constructeurs ont rejetée est devenue maîtresse-pierre du coin. » C’est cette joie, cette salutation, que Dieu a mises dans la bouche des petits enfants qui célébraient le Sauveur dans le temple, précurseurs de ceux qui, dans les temps dont nous parlons, recevront des cœurs de petits enfants, et reconnaîtront le Sauveur jadis rejeté par leurs pères. C’est ce Psaume qui célèbre la joie et la bénédiction d’Israël due à la fidélité de l’Éternel, tout en signalant le péché de cette nation dans le rejet de la « pierre » qui devait constituer le fondement de Dieu en Sion, mais qui devenait aussi, par l’infidélité de cette nation, « pierre d’achoppement » et de jugement.

Outre ces deux classes d’Israélites qui reviendront sous la conduite de la Providence, mais de leur propre volonté, le Seigneur, après son apparition, assemblera d’entre les Gentils les élus de la nation juive qui seront encore parmi eux, et ce rappel se fera avec grande bénédiction. Voir Matth. XXIV, 31 ; comparez Ésaïe, XXVII, 12 et 13, et XI, 10-12.

J’ajoute ici deux principes très-simples et très-clairs, qui distinguent toutes les bénédictions précédentes (le retour de Babylone, par exemple), d’avec l’accomplissement des prophéties que nous venons d’examiner.

Ces deux principes sont :

1° Que les bénédictions découlent de la présence de Christ, fils de David ;

2° Qu’elles sont une conséquence de la nouvelle alliance.

Ni l’une ni l’autre de ces conditions n’ont été remplies lors du retour de Babylone, ni jusqu’à ce jour.

L’Évangile ne s’occupe pas des bénédictions terrestres des Juifs dont il est question dans ces prophéties.

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