La Résurrection, vérité fondamentale de l’Évangile

VALEUR DE LA DOCTRINE DE LA RÉSURRECTION QUANT À LA JUSTIFICATION ET À LA SANCTIFICATION DES FIDÈLES.

L’usage que l’Apôtre Paul fait de toutes ces vérités, eu égard à la justification des pécheurs ou plutôt de l’Église, est extrêmement remarquable ; ainsi que la manière dont il lie l’une avec l’autre, la justification et la sanctification, dans la doctrine de la résurrection de Christ et des fidèles. Nous en citerons quelques exemples.

Au chapitre III des Romains, il avait présenté la mort ou le sang de Jésus comme l’objet de la loi justifiante. Mais la résurrection entre aussi comme partie intégrante dans l’objet de cette foi ; et l’on n’en doutera pas si l’on examine l’argumentation de l’Apôtre au chapitre ive, dans lequel il prouve qu’Abraham fut justifié par la foi et propose cette foi à l’imitation des Chrétiens. Or, que crut Abraham ? c’est qu’il aurait une postérité nombreuse comme les étoiles au Ciel. Et si l’on demande comment une vérité de ce genre put devenir l’objet d’une loi justifiante, l’Apôtre nous répondra que ce patriarche n’eut point d’égard à son corps déjà amorti, mais qu’il crut en Dieu qui ressuscite les morts et qui appelle les choses qui ne sont point comme si elles étaient ; voyez Rom. IV, 17-22. Or, ajoute Paul, que cela lui ait été imputé à justice, n’a point été écrit seulement pour lui, mais aussi pour nous qui croyons à celui qui a ressuscité des morts Jésus-Christ notre Seigneur, lequel est mort pour nos offenses et ressuscité pour notre justification, vers. 23-25, La foi en la puissance de Dieu qui peut redonner la vie à ce qui est mort, fut donc ce qui justifia Abraham ; c’est encore là ce qui justifie aujourd’hui les croyants. Pierre enseigne aussi la même doctrine : Par Lui (Jésus) vous croyez en Dieu qui l’a ressuscité des morts, 1 Pierre, I, 21.

Dans le VI et le VII chapitre, la doctrine de la résurrection est présentée comme le principe de la justification et de la sanctification des fidèles ; et c’est d’elle que l’Esprit saint se sert pour combattre l’objection que l’on fait ordinairement contre le salut par grâce, c’est-à-dire qu’il ouvre la porte au péché. ― ; L’Apôtre, à la fin du Chapitre V, avait établi que la grâce règne maintenant par la justice pour donner la vie éternelle, et qu’elle abonde par dessus le péché. Pécherons-nous donc, poursuit-il, afin que la grâce abonde ? Ainsi n’advienne ! La chose n’arrivera jamais aux objets de la grâce ; jamais ils ne feront un si horrible calcul. Et pourquoi ? parce qu’étant morts avec Christ et en Christ, en Lui ils sont ressuscités en nouveauté de vie par la loi ; et tout comme Il est vivant pour Dieu après en avoir fini avec le péché sur la croix, ceux qui se sont vus en Lui sur cette dernière, doivent s’estimer vivants et ressuscités comme Lui, et vivre désormais pour Dieu qui les a faits vivants de morts qu’ils étaient. On peut remarquer ici l’intime connexion qui existe entre la justification et la vie Chrétienne, et comme ni la résurrection de Christ est la source de l’une et de l’autre. ― ; Plus loin, Paul nous présente les mêmes choses sous une autre forme. Quoi ! s’écrie-t-il, pécherons-nous parce que nous ne sommes plus sous la loi mais sous la grâce ? Ainsi n’advienne ! Et la raison qu’il en allègue est que nous ne sommes plus sous l’esclavage du péché et de la Loi, mais à un autre maître qui, étant mort à notre place sous la malédiction de la Loi, a rompu les liens qui nous unissaient à notre vieux maître, et nous a affranchis de sa servitude. Or étant morts à la Loi dans le Christ, nous appartenons maintenant à Christ, et puisque Christ est ressuscité des morts, et nous avec Lui, la vie de Christ est en nous, comme jadis la mort y était par notre union avec la Loi : ainsi nous servons, et nous servirons désormais Dieu par la puissance ou l’efficace de celle vie nouvelle, et non plus sous l’influence d’une Loi qui ne peut rien sur nos affections pour les régénérer.

Ainsi d’après l’Écriture c’est dans la résurrection de Christ que nous trouvons la vie, c’est-à-dire la justice qui nous ouvre le Ciel et la puissance de glorifier Dieu sur la terre par la sainteté. Mais plus de détails sont ici nécessaires, et nous les donnerons.

La mort est la fin de tout ce que peuvent enfanter notre propre sagesse et nos propres efforts, même dans l’état de grâce ; car notre souche naturelle est le premier Adam qui a apporté la mort dans le monde, ainsi que le péché duquel les enfants de Dieu souffrent encore plus ou moins soit dans leurs corps soit dans leurs âmes. Mais l’Église voit ses péchés dans le Christ ; sachant, dit Paul, que notre vieil homme a été crucifié avec Lui, Rom. VI, 6. L’étonnant amour du Sauveur, passant par-dessus les affreuses conséquences du péché, l’a porté à devenir le substitut de cette Église, pour se soumettre comme tel, au juste jugement de Dieu, aux douleurs de la mort, et aux souffrances qui sont, par la juste sentence du Saint des saints, le résultat nécessaire de l’iniquité. Très-saint en lui-même, le Sauveur ressentit mieux que personne toute la rigueur de ce jugement à cause de la puissance divine déployée en Lui. Mais comme Il aimait ses créatures de l’amour de Dieu même, c’est-à-dire infiniment et d’une manière incompréhensible, Il porta comme un Agneau et sans ouvrir la bouche, toute l’horreur de la colère éternelle ; Il prit la coupe qui lui était présentée ; Il la vida jusqu’à la lie, et Il rendit l’Esprit, écrasé sous le poids de nos péchés. — Satan, le prince de ce monde qui avait l’empire de la mort et en tenait les clefs, se réjouit dans la victoire qu’il avait eu la permission de remporter pour un moment, sur Celui qu’il n’avait pu vaincre par la tentation. Il poussa des cris de triomphe par la bouche de ses serviteurs, qui dirent : Aha ! Aha ! Ps. XL, 15, sur l’âme du seul Juste, de la seule espérance de l’Église et du monde. Mais ce n’était pas contre la faiblesse de l’humanité dégénérée et corrompue qu’il avait à faire. Jésus, avait pris à soi, il est vrai, le péché, ou plutôt l’amende du péché, et la ressemblance de la chair de péché, Rom. VIII, 3 : devenu aussi vraiment homme et capable de souffrance que l’un d’entre nous, Il s’était soumis à subir la sentence destinée à l’homme, et à passer entre les bras de cette mort qui est le salaire de l’iniquité. Mais il n’avait pas ce qui donne à la mort le pouvoir de retenir l’homme dans ses chaînes, c’est-à-dire, la Loi du péché qui habite dans nos membres, Rom. VII, 23 : Satan ne put pas la trouver chez le Prince de notre salut, chez Celui qui a été tenté comme nous en toutes choses sans péché. S’il parvint à faire condamner Jésus comme coupable de blasphème et de révolte, par les instruments de sa haine, on sait assez que ce fut l’aveuglement de ces derniers qui dicta leur sentence, puisqu’aucun crime qui fût digne de cette mort n’existait chez leur victime. Et si Jésus reçut sans mot dire cette sentence et son exécution, c’est qu’Il la sentait partir de plus haut que du siège judicial d’Anne ou de Pilate ; comme nous le voyons en Ésaïe, LIII. Le prince des ténèbres ne trouva donc rien en Lui, Jean, XIV, 30 ; et le passager triomphe qu’il lui fut donné de remporter sur le Prince de la vie, ne fut que le signal de sa défaite. Il exécuta sur le Christ la sentence prononcée contre l’Église, parce que c’était sur son épaule qu’était placée la clef du sépulcre, ou que, par le jugement de Dieu, c’était lui qui avait sur nous l’empire de la mort. Mais comme cette sentence était celle de la Justice divine, ou plutôt le dernier effort de la Justice contre nous, dès que Satan eut rempli son office infernal, et que la victime eut été frappée, il arriva ce dont Jonas le prophète était le signe ; la mer furieuse de la colère de Dieu fut apaisée ; le prince de la mort, monstre qui avait englouti l’Envoyé Céleste, fut rendu impuissant, Hébr. II, 14 ; Dieu le contraignit de rendre sa proie. Descendu dans les entrailles du sépulcre, Jésus en ressortit vivant, tenant en ses mains les clefs qui jusqu’alors avaient été entre les mains de l’ennemi, et avec lesquelles Il ouvrira un jour les portes de ce lieu invisible qui retient encore les siens loin de leur patrie. Voyez Apoc. I, 18. Matth. XVI, 18.

C’est là ce qui donne à la résurrection un rang aussi élevé dans la prédication de ceux qui furent choisis pour en être les témoins devant le monde. Elle avait brillé sur ce dernier comme le soleil lorsqu’il se lève, mais elle ne fut connue et comprise que par les âmes délivrées de la puissance des ténèbres, le dieu de ce siècle ayant aveuglé les entendements des autres, afin que la bonne nouvelle de la gloire de Christ qui est l’image de Dieu ne leur resplendît point, 2 Corinth. IV, 3, comme c’est encore aujourd’hui le cas. Et l’on comprendra sans peine la joie qui dut remplir le cœur de ceux qui aperçurent le grand et certain résultat de la victoire de Christ sur le prince de la mort, et avec quelle ardeur ils durent le publier. Car tandis que cette victoire déclarait l’iniquité d’un monde qui, excité et séduit par Satan, avait crucifié le Seigneur de la gloire, elle proclamait l’Église du Seigneur affranchie de la Loi du péché et de la mort, et participante de tous les privilèges magnifiques échus en partage à son divin représentant. Car, dire simplement que l’Église est bénie de Dieu à cause de Christ, c’est la faire descendre de la position où Dieu l’a placée en Christ. Une avec le second Adam, esprit vivifiant, et dont la vie se répand dans tous les membres de Son corps, on ne peut la considérer à part de ce dernier ; ce qu’Il a fait elle l’a fait en Lui ; et ce qu’Il possède elle le possède, ici-bas par la foi et l’espérance, plus tard par la vue et la jouissance. Aussi l’Écriture nous la représente-t-elle comme vivifiée, ressuscitée, assise dans les Lieux célestes en Christ, Éphés. II, 5, 6. Coloss. II, 12, 13, participante de la nature divine, 2 Pierre, I, 4 ; cohéritière de Christ, Rom. VIII, 17 ; en un mot, comme accomplie en Celui qui est le Chef de toute principauté et de toute puissance, Coloss. II, 10. Déjà élue en Christ avant la fondation du monde, et bénie en Lui de toute bénédiction spirituelle, Éph. I, 3, 4, elle reçoit sur la terre dans la communion qu’elle possède par la foi avec Christ, l’assurance de la joie que Dieu ressent à bénir parce qu’Il est amour. Toute âme qui en croyant a reçu cette vie qui unit à Christ, devient l’objet de la même faveur que celle dont jouit le Bien-aimé du Père, et ce qui est tombé en partage à ce Bien-aimé en conséquence de Son œuvre d’amour sur la terre, et de sa résurrection d’entre les morts, cette âme peut s’en réjouir comme d’un butin qui lui appartient et qui est tenu en réserve pour elle dans les cieux jusqu’au moment où, fils de la résurrection, les fidèles seront manifestés comme fils de Dieu, Luc, XX, 36 ; Rom. VIII, 19-22, c’est-à-dire quand le Seigneur Jésus sera lui-même révélé du Ciel, 2 Thes. I, 7 ; Colos. III, 4. 1 Jean, III, 2 ; Hébr. IX, 28.

Ainsi l’Église doit s’envisager elle-même comme vivante dans le Christ en la présence du Père : c’est là la source de sa paix et de sa joie. Elle comparaît sans tache devant Dieu en Jésus qui est apparu pour ôter nos péchés, et en qui il n’y a point de péché, 1 Jean, III, 5. Ensevelies dans la tombe de Christ, nos transgressions y sont demeurées ; le sang qui les a expiées est maintenant dans les lieux saints qui ne sont point faits demain ; et Dieu voyant ce sang et non pas nos péchés, ne se souvient plus de ces derniers ; car s’en souvenir ce serait oublier Christ, et nous les imputer ne serait pas justice envers Christ ni envers nous. Et si quelquefois Il semble ne les avoir pas oubliés, s’il juge ses enfants selon les hommes en la chair, 1 Pierre, IV, 6, nous avons le mot de cette énigme dans l’Épître aux Hébr. XII, 6-11. Dieu veut que ses enfants marchent dans la force de la vie nouvelle qu’ils ont reçue, et lorsqu’ils se détournent des voies qui Lui sont agréables, alors Il prend la serpe pour émonder la vigne, et les verges pour châtier les héritiers de la gloire. Mais Il n’en agit pas ainsi dans le but de retirer de la tombe de Christ les linges qui l’enveloppaient et que ce parfait Rédempteur y a laissés ; Il n’a pas l’intention de faire revivre notre iniquité, de nous faire douter de son amour, ou de nous laisser croire que nous sommes esclaves et non pas enfants. Tant que le Christ ressuscité est dans les cieux, l’Église a là-haut un témoin certain de l’amour du Père ; en douter ce serait douter de celui du Père pour Christ. En sorte que l’Église peut, encore que le feu de l’affliction ressemblât à une fournaise, tenir le même langage que Job : Voilà, qu’il me tue, je ne laisserai pas d’espérer en Lui. Job, XIII, 15.

La victoire de Satan sur le premier Adam le mit en possession de tous les biens et de l’héritage que celui-ci avait reçu dans la Création ; car les créatures primitivement heureuses, sont maintenant assujetties à la vanité, non de leur propre volonté, mais par celui qui les y a assujetties, Rom. VIII, 20. La victoire de Jésus sur Satan dépouilla ce dernier du bien qu’il s’était injustement acquis. Il a dépouillé les principautés et les puissances qu’Il a produites en public triomphant d’elles en Lui-même, Coloss. II, 15, c’est-à-dire quand Il est remonté dans les Cieux avec notre chair glorifiée, après avoir été les pestes de la mort et la destruction du sépulcre, Osée, XIII, 14. Dieu dans sa sagesse n’a pas encore manifesté les résultats de cette victoire ; mais l’Église sait, ou du moins devrait savoir, qu’elle est remportée ; puisque d’un côté Christ est déjà ressuscité, et que de l’autre Dieu a annoncé la ruine de Satan et le règne de Jésus sur toute la création, aussi bien que la future résurrection des saints : et elle devrait, dans l’assurance de sa parfaite justification, attendre avec une parfaite espérance la grâce apportée par la manifestation de notre Seigneur Jésus-Christ, 1 Pierre, I, 13. Malheureusement elle a perdu ces choses de vue. Les enfants de Dieu sont restés au pied de la croix, au lieu de s’avancer dans le sanctuaire avec le Souverain Sacrificateur des biens à venir. Sans doute Golgotha est un lieu d’où découlent des eaux pour l’âme altérée ; c’est la porte du tabernacle d’où l’on découvre le feu de l’autel dévorant la victime expiatoire, l’amour qui consomme le plus parfait de tous les sacrifices. Mais c’est du Ciel, c’est du Lieu très-saint où le Souverain Sacrificateur présente le sang sur le propitiatoire, que vient l’assurance de la justice. Notre vie est cachée avec Christ en Dieu, Coloss. III, 3. Et c’est pour avoir (en pratique du moins et non pas en théologie) négligé de considérer le Christ vivant, qu’en perdant la consolation, la pleine assurance ou la joie de l’espérance qu’on en retire, l’Église a aussi perdu de sa vie spirituelle, et ne rend plus au milieu de ce monde qu’elle devrait convaincre de péché, de justice et de jugement par la puissance de l’Esprit qu’elle a reçu, qu’un pauvre et maigre témoignage, consistant beaucoup plus en paroles qu’en efficace, et démenti en grande partie par son peu de sainteté. — Que l’on ne s’y trompe pas, la liaison qui existe entre la résurrection de Jésus, l’assurance de la justification, et une vie de sanctification, est bien plus grande que l’on ne pense d’ordinaire. La foi qui unit l’âme au Sauveur entré dans les Cieux, n’est pas une simple opinion, mais une foi de l’efficace de Dieu qui L’a ressuscité des morts, Coloss. II, 12, comme Paul l’enseigne aussi, Éphés. I, 19, 20. La vie communiquée à un cadavre, n’agit pas avec plus d’énergie, quoique d’abord elle puisse être imperceptible à l’œil ; et l’efficace de la vie de la foi est, en premier lieu, de nous faire saisir Christ comme notre justice dans sa mort et dans sa résurrection ; en second lieu, de nous affectionner à toutes les choses spirituelles. Quand, en croyant, nous avons éprouvé pour nous-mêmes l’efficace de cette puissance qui a retiré de la tombe le grand Pasteur des brebis, et que nous nous sommes vus morts, ensevelis et ressuscités avec Christ, par cette même efficace nous découvrons d’un côté l’espérance de notre vocation, et de l’autre la grandeur de l’amour de Dieu pour de pauvres pécheurs tels que nous. L’Esprit qui nous révèle Christ, nous conduit à la connaissance de Dieu comme Père, devenant ainsi un Esprit d’adoption, Rom. VIII, 14-16 ; et c’est là la source de la sainteté en nous. Reconnaissant la grâce qui nous a conféré le don de la justice ; convaincus maintenant que notre vie n’est pas de nous, mais de Dieu ; ayant fait notre compte que Christ étant vivant, notre vie est assurée, la mort vaincue et le Ciel ouvert pour nous ; notre désir est désormais d’appartenir à Dieu et de le glorifier en faisant ce qui Lui est agréable, désir qui ne peut nullement exister là où n’a pas été répandue la vie dont nous parlons. Alors nos affections sont naturellement dirigées vers la source de cette vie, c’est-à-dire, vers ce qui est en haut, Colos. III, 1 ; et nous considérons les choses de la terre dans l’Esprit de ceux qui se savent ressuscités avec Christ et qui attendent leur propre résurrection. Telle est la véritable sainteté ; et comme on le voit, elle découle non pas d’une simple conviction que le de voir du Chrétien est de faire ceci ou d’éviter cela, mais de la puissance de cette même foi qui nous a unis à notre Chef dans Sa mort et dans Sa vie. La vieille nature est considérée comme une chose morte, parce qu’elle a crucifié le Sauveur, et parce que l’on possède une nouvelle vie dont les douceurs et la gloire laissent dans l’ombre tout ce que le monde peut présenter de plus séduisant pour la chair.

Nous n’insisterons pas sur les effets sanctifiants que produit une ferme conviction de la résurrection de Christ et de notre résurrection en Lui ; il nous suffit d’avoir prouvé que ce que nous avons vu être le principe justifiant, est aussi principe sanctifiant ; et nous dirons même nécessairement sanctifiant. Plût à Dieu qu’on le comprît parmi les Chrétiens, et qu’au lieu d’établir la vie Chrétienne sur tant de bases qui n’ont que peu de solidité, et qui quelquefois n’en ont que l’apparence, on voulût bien étudier la manière dont Paul prêcha aux Romains, chap. VI et VII ! – Mais nous ne quitterons pas le sujet sans faire encore une remarque. – Pour la sanctification de l’âme il est essentiel d’estimer le péché à sa juste valeur, et de comprendre l’état de perdition dans lequel nous sommes par nature. Or rien ne démontre aussi positivement que la doctrine de la résurrection, que le péché est une mort et que nous naissons dans celle mort. C’est ce qui est né de l’Esprit qui est esprit, disait Jésus à Nicodème, mais ce qui est né de la chair est chair, Jean, III, 6. La nécessité d’une nouvelle vie, de la vie de Christ communiquée par l’union que l’Esprit de Dieu forme entre Jésus et nous, implique formellement que nous sommes morts en nos fautes et en nos péchés, et non pas seulement malades ou inhabiles à faire ce qui est bon sans un secours étranger. Ce qui exige une résurrection est entièrement privé de vie ; ce qui ne l’exige pas, peut, moyennant quelque aide, quelque amélioration, quelques efforts pour se jeter dans la piscine quand elle est troublée, échapper aux conséquences de son état. Telle est précisément, par rapport à l’étendue du péché, l’erreur de l’homme naturel, ou de bien des âmes ignorantes qui ne savent pas que Jésus est la résurrection et la vie, et que par conséquent le corps et l’âme sont morts à cause du péché. Nous en avons un exemple dans le langage de Marthe, de Marie et des Juifs proches de la tombe de Lazare, Jean, XI, 21, 32, 37. Les deux saurs semblent reprocher à Jésus d’être arrivé trop tard, et les assistants murmurent de ce qu’il n’a pas empêché la mort de son ami ; image de la manière dont la pauvre sagesse humaine apprécie la profondeur de sa misère [C’est-à-dire que l’on croit bien que la grâce de Dieu est nécessaire pour réformer l’homme ; mais non pas qu’elle puisse ou doive le refondre en entier, quoique ce soit pourtant là son œuvre. L’ignorant ne sait pas que la nature humaine est morte et qu’il faut que l’homme revive. L’homme est mauvais, dit-on, il faut que Dieu le corrige. Principe tout-à-fait faux : Dieu ne corrige rien, mais il crée quelque chose de nouveau qui s’oppose aux progrès de la chute.]. Mais s’il a fallu que pour nous sauver Jésus mourût et ressuscitât, et si nous ne sommes vivants que par une participation à Sa résurrection, il faut donc que nous soyons morts en nos fautes et privés de toute force pour nous donner la vie. La nature du remède atteste ici la grandeur du mal, et prouve irréfragablement que ce dernier est complet et irrémédiable. En nous annonçant la mort comme passée, la résurrection établit la réalité de notre mort ; en proclamant une vie nouvelle procurée aux croyants, elle met un sceau sur la vanité de notre ancienne vie, appuyant ainsi cette sentence du St. Esprit : Nous sommes débiteurs non point à la chair pour vivre selon la chair, car si vous vivez selon la chair vous mourrez, Rom. VIII, 12, 13. Cette doctrine pose donc les bases fermes d’une sanctification selon le Seigneur, ou d’une séparation d’avec tout ce qui est un fruit de la chair, même de la chair revêtue de ses apparences les plus saintes.

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