Dialogue avec Tryphon

XC

1 – Eh bien ! me dit Tryphon, prouvez-le-nous directement, d’après les Écritures, si vous voulez que nous partagions votre conviction. Oui, nous savons que le Christ doit souffrir, qu’il sera conduit à la mort comme une brebis ; mais doit-il être crucifié, peut-il subir une mort aussi honteuse, aussi infâme, puisqu’elle est maudite par la loi ? Tâchez de nous le prouver ; pour nous, la seule idée d’une pareille mort nous révolte.

2 – Vous savez, lui répondis-je, et vous convenez avec moi, que les prophètes ont enveloppé d’images et de figures la plupart des choses qu’ils ont dites ou faites, de sorte qu’elles étaient presque incompréhensibles pour le plus grand nombre, et que ce n’était pas sans peine que la vérité cachée sous ces voiles apparaissait à ceux qui la recherchaient et voulaient s’en instruire.

— Oui, me dirent-ils tous ensemble, nous en convenons avec vous.

3 – Écoutez donc la suite, leur répondis-je. Cette croix si détestée en apparence, Moïse l’a représentée par les différents signes qu’il a exprimés.

— Quels sont ces signes ? me demanda Tryphon.

4 – Dans la guerre du peuple hébreu contre Amalec, tandis que le fils de Nave, nommé Jésus, était à la tête de l’armée, Moïse priait les bras étendus ; Or et Aaron les soutinrent dans cette position pendant tout le jour, de peur qu’ils ne vinssent à tomber de lassitude. Si la position de Moïse gardait quelque chose de la forme d’une croix, le peuple était vaincu, ainsi que nous l’apprenons des livres mêmes de ce saint prophète ; mais tant qu’il persévérait dans cette attitude, Amalec perdait l’avantage : ainsi la victoire se trouvait du côté de la croix. 5 Mais ce n’est pas tant cette position de Moïse, pendant sa prière, qui faisait triompher le peuple hébreu, que le nom de Jésus qui se trouvait à la tête de l’armée, lorsque Moïse représentait sa croix sur la montagne. Qui ne sait que la prière la plus efficace est celle qui se fait avec larmes et gémissements, le genou en terre et le corps incliné ! Dans la suite, ni Moïse, ni aucun autre, ne prit sur la pierre cette attitude en forme de croix pendant sa prière ! Et la pierre ici n’est-elle pas encore un signe qui représente le Christ et ne convient qu’à lui ?

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