Élans de l’âme vers Dieu

82. Mon cœur est partagé

Mon Dieu, mon cœur n’est pas entièrement à toi ; il n’est pas non plus entièrement au monde ; mon cœur est partagé entre le monde et toi. Tous mes efforts tendent à faire marcher ensemble ma conscience et ma passion, et depuis des années que je le tente, je n’y ai pas encore réussi ; j’ai même acquis la conviction que je n’y réussirai jamais ! Oui, l’expérience m’a répété ce que ton Fils m’avait déjà dit : « Nul ne peut servir deux maîtres, Dieu et Mammon. » Ma vie entière est déchirée par ces efforts en sens contraire. Je ne veux plus subir ces pénibles déchirements. Seigneur, je suis las de tant de luttes ; je veux désormais n’avoir d’autre maître que toi, d’autre volonté que la tienne, d’autre œuvre que ton œuvre. Je veux renoncer à moi-même, vivre en toi et pour toi, et alors ma sanctification deviendra facile, mon bonheur abondant. Oh ! mon Dieu, que de temps j’ai perdu jusqu’à ce jour à vouloir concilier ce qui était inconciliable ! Mais peut-être fallait-il que mon expérience me répétât ce que m’avait dit ta Parole. Aujourd’hui, je crois, parce que j’ai vu et touché cette vérité. A l’avenir, je pourrai du moins opposer à mon incrédulité, non seulement tes déclarations, mais aussi le souvenir de mes misères et de mes souffrances passées. A chaque tentation, je rappellerai mes regrets, mes remords ; et si tu viens à mon aide, certainement je triompherai. Oui, je le sens, cette expérience me sera utile, et je te bénis de l’avoir fait tourner à mon bien. Mais désormais, Seigneur, mène-moi, donne-moi de ne plus suivre ces détours que m’indiquait Satan, sous prétexte que j’arriverais toujours ; donne-moi de mettre de l’unité, de la droiture dans ma vie ; que pas une pensée ne sorte de mon cœur, pas une parole de mes lèvres, pas un acte de ma vie, dont tu ne sois toi-même le but et le moyen ; que j’agisse en toi avec calme, parce que j’agirai avec toi ; que j’agisse sans hâte, parce que tu seras mon compagnon d’œuvre ; que j’accepte le revers comme le succès, me rappelant que la nuée, sombre du côté où elle regarde la terre, est radieuse de soleil du côté de ton ciel, et que, finalement, tu ne me demandes pas de gouverner le monde, mais de gouverner mon cœur. Mon bon Père, fais cela ; j’ai la confiance que tu le feras, et je te rends grâce pour l’avoir commencé en m’inspirant cette douce prière.

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