Élans de l’âme vers Dieu

88. Amour de Dieu

Seigneur, l’apôtre nous dit de ta part : « Dieu est amour ; » le sacrifice de ton Fils unique, pour nous, pécheurs, nous répète : « Dieu est amour ; » la nature, à son tour, par mille voix nous crie : « Dieu est amour ; » et je puis me dire que moi, pauvre petite créature ; moi, perdu dans la poussière des mondes ; moi, misérable, je suis l’objet de cet amour ! Tu as pensé à moi pour me créer, tu y penses pour me conserver, et tu t’en occuperas, aux siècles des siècles, pour soutenir mon existence et mon bonheur. Et moi, Seigneur, qu’ai-je fait ? Comment ai-je répondu à tant d’amour ? J’ai joui des biens que tu m’as donnés, oubliant le donateur ! J’ai compté les promesses de ta Parole, délaissant mes devoirs ! J’ai voulu être aimé sans répondre à ton affection, comme si tu te devais à moi sans réciprocité de ma part ! Enfant ingrat, j’ai compté sur la tendresse de mon père pour autoriser mes désobéissances, et tandis que tu travaillais pour moi dans ta maison, nouvel enfant prodigue, j’ai médité ma fuite en terre étrangère. J’ai vécu dans le monde, dans le plaisir, le péché, ne te rappelant à mon souvenir qu’aux heures de privation ou de danger ! Si du moins, alors, j’étais complètement revenu vers toi. Mais non. Moins sage que cet enfant prodigue, je me suis arrêté en route, et quand je t’ai vu de loin, les bras tendus vers moi, je n’ai pas voulu m’approcher. Moi, plein de feu pour tant d’objets méprisables, je n’ai pour toi qu’un amour tiède et passager. Il faut que je m’exhorte, que je m’excite à t’aimer sous l’aiguillon de la honte et au nom du devoir ! Mon Dieu, que mon cœur est pauvre, que mon dévouement est mesquin, que je suis misérable, et combien j’ai besoin, qu’après m’avoir aimé, tu m’apprennes, me pousses à t’aimer à mon tour. Oh ! jusqu’à quand faudra-t-il me sentir lié à ce péché que je hais et que je garde ? jusqu’à quand me faudra-t-il être complice de mon propre ennemi ? Mon Dieu, change ma pauvre nature, ôte-moi ce cœur de pierre où est écrite ta loi, mais ta loi morte comme l’inscription sur la tombe ; et donne-moi un cœur de chair, vivant pour aimer, pour aimer toi qui m’aimes, et, à ton exemple, ceux même qui pourraient me haïr.

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