Élans de l’âme vers Dieu

97. Joies du dévouement

Oui, Seigneur, il est doux de se dévouer pour toi et pour mes frères ; doux de dépenser sa vie à ton service, d’associer notre œuvre à la tienne, ou plutôt, des deux n’en faire qu’une, et imiter ainsi Celui qui fait du bien à tous, qui gouverne l’univers, et qui donne la vie éternelle. Oui, il y a, dans l’infini de notre œuvre, ainsi comprise, des rassasiements de joie que le monde entier ne peut offrir, et que toi, Seigneur, tu accordés aux plus humbles de tes serviteurs. Donner son temps, son pain, sa santé, son être, tu l’as dit toi-même, Jésus, c’est en recevoir cent fois autant dans ce monde, en joies intérieures qui valent mieux que tous ces sacrifices. Ces joies-là, du moins, personne ne saurait me les ravir. L’homme peut bien me priver de joies mauvaises, m’écraser de sa fortune, me refuser son attention, me poursuivre de sa haine, mais il ne saurait m’empêcher de le plaindre, de prier pour lui, de l’aimer et d’agir pour son bien ! L’homme peut me disputer une place à ton soleil, ô mon Dieu, mais non une place dans ton cœur !

Mais, hélas ! ce bonheur si pur, puisé dans le dévouement, j’en jouis rarement ; la vanité et l’égoïsme le chassent de mon sein. Tout en l’appréciant je ne le recherche pas. C’est un idéal que mon esprit contemple, bien plus qu’une réalité que goûte mon cœur. Mon Dieu, achève ce que tu as commencé ; tu m’as fait goûter combien tu es bon, rassasie-moi de ta bonté ; que je te devienne semblable ; que, comme toi, j’aime sans mesure et sans distinction ; que la pluie de mes prières, que le soleil de mon dévouement, comme ta pluie et ton soleil, tombe et se lève sur les bons et sur les méchants, pour m’unir aux uns et sauver les autres ! Ne me laisse pas rebuter par leur indifférence et leur ingratitude, toi qui n’as été rebuté ni par mon ingratitude ni par mon indifférence.

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