Élans de l’âme vers Dieu

100. Ne pas scandaliser

Mon Dieu, je suis facilement frappé du mal que mon péché me fait à moi-même, mais, je le confesse, je le suis rarement du mal que mon péché fait à mes frères. Si je cherche à leur en dérober la vue, c’est pour moi et non pour eux ; la pensée que je puis les scandaliser est la dernière de mes pensées. Et toutefois, que de mal je puis faire ainsi ! Hélas, je devrais dire que de mal n’ai-je pas ainsi déjà fait ! Qui pourrait me dire les semences mauvaises qu’ont jetées dans les cœurs mes paroles et mes actes ! qui pourrait suivre, à travers mille et mille vies, les influences de mes tristes exemples ? Oh. ! mon Dieu, cette pensée m’épouvante ! Viens à mon secours ; non pour la chasser, mais pour la faire fructifier. Hélas ! combien de malheureux pourront, au dernier jour, me reprocher d’avoir contribué à leur perte ! Quelle foule de réprouvés couvriront peut-être de leurs reproches les rares bénédictions de ceux que j’aurai édifiés ! Ah ! je comprends cette terrible parole : « Malheur à celui par qui le scandale arrive ! » Je comprends que pour lui, « mieux vaudrait n’être, jamais né, » lui qui se perd et qui perd ses frères ! Donne-moi donc un sentiment plus vif de ma responsabilité ; pénètre-moi à la fois du danger et de la grandeur de ma tâche ! Que je sente vivement que je puis, par mes exemples, mettre sur la voie du salut ou de la perdition ! Que je porte à l’avenir, avec moi, la bonne odeur de l’Évangile ; que tout en moi respire la foi, l’amour, la paix, et que ma vie entière soit, pour le monde, un attrait vers toi. Oh ! mon Dieu, quand je songe au bien immense que je pourrais faire ainsi et que je ne fais pas, je suis confus, humilié, mais en même temps altéré du désir de mieux faire dès l’instant même. Oui, Seigneur, je te demande que ma première parole, à la rencontre de mes frères, soit une parole d’édification ; mon premier acte un acte d’amour. Je te demande surtout que ce ne soit pas ici une émotion passagère ; mais qu’à la vue de tout homme je me dise désormais : « Malheur à celui par qui le scandale arrive, et bienheureux ceux qui procurent la paix. »

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