Élans de l’âme vers Dieu

124. Les rêves de la vie

Mon Dieu, où sont aujourd’hui mes projets de jadis, les rêves de ma jeunesse ? où sont ces parents que je ne devais jamais quitter, ces amis qui ne devaient jamais me fuir ? Hélas ! projets, rêves, amis, tout s’est dissipé. Rien de ce que j’avais prévu ne s’est réalisé ; et ma vie s’est remplie de choses inattendues. Les années ont passé sans laisser d’autres traces que quelques souvenirs, eux-mêmes bientôt effacés. J’ai vu mourir ceux qui m’ont vu naître, et ceux que j’ai vu naître me verront bientôt mourir. Encore quelques jours, aussi courts, aussi pauvres que ceux que j’ai déjà passés, et je me courberai vers la terre pour ne plus me relever. Tout a passé autour de moi. Je vais passer comme toutes les autres créatures ; toi seul restes immuable et vivant. Oui, toi et ta Parole, toi et tes promesses, toi et ton Évangile ; car si je vois tout vieillir, tout me tromper, je vois en même temps que ta Parole ne vieillit pas, que tes promesses s’accomplissent, et que, tandis que tout me lasse, ton Évangile seul ne saurait me lasser. Toujours doux à mon cœur, toujours nouveau, souvent plus brillant et plus persuasif, il me semble un fruit fait pour mûrir avec ma vie, et me fournir un aliment appropriée chaque saison ; c’est que l’expérience vient sans cesse confirmer ce que tu m’avais dit ; mais que jusque-là je n’avais ni bien cru, ni bien compris. Je disais jadis, sans bien le sentir, que le péché porte son châtiment avec lui ; que la piété a les promesses de la vie présente ; que la foi est le plus précieux de tous les dons ; et tant d’autres vérités. Je disais tout cela, sans en être bien vivement persuadé ; mais aujourd’hui, ma persuasion est si vive, que ces vérités m’apparaissent comme de nouvelles découvertes. J’en prends possession comme pour la première fois, et je savoure avec délices cette nourriture spirituelle, que jadis j’avais à peine goûtée. Béni sois-tu pour avoir ainsi renfermé des bienfaits dans tes bienfaits, et réservé à chaque âge une évidence plus grande, une foi plus vive, une paix plus profonde, et un acquiescement plus complet à ta sainte volonté.

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