Notes sur les Paraboles de notre Seigneur

II.
L’ivraie

Matthieu 13.24-30 ; 13.36-43

« Il leur proposa une autre parabole en disant : Le royaume des cieux est comparé à un homme qui sème de la bonne semence dans son champ. Mais pendant que les hommes dormaient, son ennemi vint et sema de l’ivraie parmi le blé, puis il s’en alla ». Notre Seigneur n’a rien imaginé ici, mais il parle d’un acte de malice qui a dû être connu de ses auditeurs. La loi romaine le suppose ; et un écrivain moderne, en parlant des coutumes et des mœurs de l’Orient, affirme qu’il est également pratiqué dans l’Inde. « Voyez », dit-il, « ce coquin attentif au moment où son voisin labourera son champ ; dès que le champ est ensemencé, il s’y rend à son tour de nuit, et y répand ce que les natifs appellent pandinellu, c’est-à-dire de l’ivraie ; elle croît avant la bonne semence et se propage rapidement, tellement que le malheureux propriétaire du champ doit attendre des années avant de pouvoir se débarrasser de cette plante nuisible. Il y en a une autre encore, appelée perum-pirandi, qui est la plus nuisible de toutes ; si un homme achète un champ que quelqu’un aurait voulu posséder, ce dernier dit, pour se venger : « Je planterai le perum-pirandi dans ses « terresa. »

a – Roberts : Oriental Illustrations, p. 541. Il paraît que le même fait se passe aussi quelquefois en Irlande.

Le Seigneur a également expliqué lui-même cette parabole, et c’est fort heureux, car souvent cette explication a été nécessaire, en particulier dans la lutte que l’Église soutint contre les donatistes. Il n’y a aucun doute ici quant à celui qui sème : « Celui qui sème la bonne semence, c’est le Fils de l’homme. » Ce titre, par lequel le Seigneur se désigne lui-même ordinairement, ne lui est donné qu’une seule fois par un autre (Actes 7.56) ; il signifie alors que le Sauveur glorifié apparut à Etienne sous une forme humaine. Ce nom, quoique emprunté à l’Ancien Testament, parut si étrange aux Juifs, qu’ils dirent, en l’entendant : « Qui est ce Fils de l’homme ? » (Jean 12.34) ; le Messie n’était pas appelé : « Fils de l’homme », mais : « Fils de David » (Matthieu 9.27 ; 12.23 ; 15.22 ; 20.31). Il réclame, par ce titre, sa participation à notre nature humaine. Il était « Fils de l’homme », parce qu’il réalisait pleinement lui seul la vraie humanité, comme second Adam, chef et représentant d’une race nouvelle. Il condamne ainsi toutes les erreurs qui ont surgi quant à sa personne, telles que celles des ébionites et des gnostiques.

Mais si Christ est le semeur, dans la parabole précédente et dans celle-ci, la semence est différente. Ce n’est plus ici « la parole de Dieu », ou, « la parole du royaume », mais : « les enfants du royaume. » Nous arrivons ainsi à un développement nouveau de la première parabole. La parole a produit son effet ; elle a pénétré dans les cœurs de ceux qui sont devenus, par son moyen, des enfants du royaume.

« Le champ, c’est le monde ». On a beaucoup disputé sur le sens de ces mots si simples. Voici comment les donatistes d’Afrique justifiaient leur séparation d’avec l’Église catholique : L’Église, disaient-ils, est un corps parfaitement saint, la sainteté est son caractère distinctif. Ils admettaient qu’il pouvait s’y trouver des hypocrites ; mais les impies, reconnus comme tels, ne doivent pas y être tolérés ; car, en les conservant, on profanerait le caractère de la vraie Église, et alors ce serait le devoir des fidèles de s’en séparer. Telle était leur position, qu’ils justifiaient en citant Ésaïe 52.1 et tous les passages de l’Écriture qui parlent de la séparation future de l’Église d’avec tout mal. Ces passages, disaient-ils, doivent s’appliquer à l’Église dans son état actuel.

En ceci, comme en beaucoup d’autres points, l’Église doit à saint Augustin, non pas la formation de sa doctrine, car elle ne la doit à aucun homme, mais d’arriver à la claire conscience de ce qu’elle avait possédé jusqu’alors, sans bien s’en rendre compte. Il répliqua, d’accord en cela avec les donatistes, qu’en effet la sainteté est un caractère essentiel de l’Église ; mais il refusa d’accepter leur définition de la sainteté, et montra que ce caractère appartenait à l’Église qu’ils avaient abandonnée. L’Église catholique est, dit-il, malgré toutes les apparences contraires, un corps saint, car ses membres sont ceux-là seuls qui vivent dans une communion réelle avec Christ, et possèdent son Esprit de sainteté. Tous les autres, alors même qu’ils paraissent lui appartenir, ne sont pas ses vrais membres ; ils entourent Christ, mais ne le touchent pas, comme cette femme croyante, qui reçut de sa vertu la guérison. (Luc 8.45) Il y a certaines conditions extérieures sans lesquelles on ne peut appartenir à son Église, mais qui ne constituent pas à elles seules un membre de cette Église. Ceux qui sont dans l’Église, mais non de l’Église, n’en souillent pas les vrais membres, aussi longtemps que ceux-ci ne participent pas au même esprit, ni à leurs mauvaises œuvres. Ils sont comme les animaux impurs qui se trouvaient aussi dans l’arche (Genèse 7.2), comme des boucs avec les brebis (Matthieu 25.32), comme du mauvais poisson dans un même filet avec le bon (Matthieu 13.47) ; ce sont des vases à déshonneur qui se trouvent dans une même maison avec des vases à honneur (2 Timothée 2.20), ou de l’ivraie croissant dans le même champ avec le blé, et qui doit à la fin en être séparée pour toujours.

Les donatistes confondaient l’Église visible avec la vraie Église, que le Seigneur seul connaît. Saint Augustin ne faisait pas cette confusion. Il affirmait deux états différents de la même Église : l’état présent, dans lequel le mal y est toléré, et l’état futur, dans lequel elle sera affranchie de tout mal. Il concluait de notre parabole et de celle du filet que le mélange des justes avec les injustes, comme celui de l’ivraie avec le blé, doit subsister jusqu’à la fin de l’économie présente. Les donatistes agissaient comme des serviteurs qui, malgré la défense du maître, seraient allés pour enlever l’ivraie, et accomplir ainsi la séparation avant le temps.

Les donatistes cherchèrent toutes sortes d’expédients pour échapper à ces conclusions. Ils répondirent : Christ a montré que le champ, ce n’est pas l’Église, mais le monde ; par conséquent, on ne saurait faire valoir la parabole contre nous ; car il ne s’agit pas de savoir si les méchants doivent être tolérés dans le monde (ce que nous reconnaissons tous), mais s’ils doivent être tolérés dans l’Église. Cependant, il faut bien reconnaître que la parabole concerne « le royaume des cieux » ou l’Église. Il n’était pas besoin d’un enseignement spécial pour faire savoir aux disciples qu’il y aurait toujours un mélange dans le monde ; mais il était nécessaire de leur montrer ce mélange aussi dans l’Église, de peur qu’ils ne fussent scandalisés. L’expression : « monde » ne doit pas nous embarrasser. Aucune autre n’aurait suffit à Celui qui voyait d’avance l’Évangile prêché à toutes les nations, comme une semence qui devait être répandue jusqu’aux extrémités de la terre.

« Pendant que les hommes dormaient », l’ennemi sema l’ivraie parmi le blé. Plusieurs interprètes ont pensé que ce sommeil représente ici le manque de vigilance de la part de ceux qui sont chargés de diriger l’Église, en sorte que les impies y pénètrent facilement, pour y semer des erreurs, soit dans la doctrine, soit dans la pratiqueb (Actes 20.29-30 ; Jude 1.4 ; 2 Pierre 2.1, 2, 19) ; on a aussi expliqué dans le même sens le sommeil des vierges sages et des folles (Matthieu 25.5). Je ne crois pas que cette interprétation soit juste. Ceux qui doivent veiller, ce sont « les serviteurs », en général. Ici, il s’agit simplement du fait que l’ennemi vint « de nuit », dans un moment où l’on est ordinairement plongé dans le sommeil (Job 33.15 ; Marc 4.27).

b – C’est l’opinion, en particulier, d’Augustin et de Chrysostome.

« L’ennemi qui l’a semée, c’est le diable. » Satan nous apparaît donc ici dans ses efforts pour ruiner l’œuvre de Christ ; Chrysostome dit : « Après les prophètes, les faux prophètes, après les apôtres, les faux apôtres, après Christ, l’antéchrist. » Tout ce qui concerne Satan et son œuvre, son hostilité à l’égard des chrétiens, est clairement révélé dans le Nouveau Testament. A mesure que les lumières deviennent plus vives, les ombres deviennent plus épaisses. Les hommes n’ont connu toute l’étendue de la puissance des ténèbres que lorsque la puissance du bien leur a été révélée ; ici même, l’explication au sujet de Satan n’est donnée qu’aux disciplesc. Il faut remarquer que Satan est représenté ici comme étant son ennemi, l’ennemi du Fils de l’homme ; la lutte est, ici comme ailleurs, plutôt entre Satan et le Fils de l’homme qu’entre Satan et Dieu. Il importait au plan de la rédemption que la victoire sur le mal fût un triomphe moral. Saint Augustin dit que le Diable devait être vaincu, non par la puissance de Dieu, mais par sa justice.

c – Bengel, à propos d’Éphésiens 6.12, fait remarquer : « Plus un livre de l’Écriture annonce ouvertement le gouvernement et la gloire de Christ, plus il expose également son opposé, le royaume des ténèbres. »

Il importait aussi, pour la même raison, que l’homme qui avait perdu la bataille, la gagnât de nouveau (1 Corinthiens 15.21) ; comme le royaume des ténèbres devait être détruit par l’homme, l’inimitié du serpent fut spécialement dirigée contre la semence de la femme, le Fils de l’homme.

L’appellation de « méchant, » qui lui est donnée, le désigne comme le mal absolu, comme celui dont l’essence est le mal. « Dieu est lumière et en Lui il n’y a point de ténèbres » (1 Jean 1.5 ; Jacques 1.17) ; Satan est ténèbres et en lui il n’y a point de lumière, « aucune vérité » (Jean 8.44). L’homme est dans un état intermédiaire ; il retient la vérité captive dans l’injustice (Romains 1.18) ; la lumière et les ténèbres sont en guerre au dedans de lui. Une rédemption est possible pour l’homme, car sa volonté n’est que pervertie, mais celle de Satan est absolument et définitivement en opposition avec le bien ; aussi, une rédemption est impossible pour lui.

Après avoir fait le mal, l’ennemi « s’en alla ; » aussi l’on ne s’aperçut pas immédiatement de son action. De même, dans l’Église, les commencements du mal ont été souvent difficiles à reconnaître ; ce qui a produit plus tard le plus mauvais fruit paraissait être à l’origine une forme particulière du bien. « Mais après que l’herbe eut germé et eut produit du fruit, alors parut aussi l’ivraie, » dans sa véritable nature. On a souvent remarqué la grande ressemblance qui existe entre le blé et l’ivraie pendant qu’ils sont encore en herbe. Ce n’est que plus tard qu’on peut les distinguer. « Vous les connaîtrez à leurs fruits, » dit le Seigneur. Saint Augustin remarque avec raison que c’est la présence du bien qui fait ressortir le mal : « Celui-là seul qui fait le bien, » dit-il, « peut discerner le méchant dans l’Église ; » et ailleurs : « Les erreurs n’apparaissent qu’à l’homme spirituel, qui peut juger de toutes choses. »

« Or, les esclaves du maître de la maison s’étant approchés, lui dirent : Seigneur, n’as-tu pas semé de bonne semence dans ton champ ? d’où vient donc qu’il a cette ivraie ? » Ces esclaves ne sont pas, comme le pense Théophylacte, les anges (qui sont « les moissonneurs »), mais plutôt les hommes zélés pour la gloire de Dieu, qui ne savent de quel esprit ils sont animés, pas plus que Jacques et Jean qui voulaient faire descendre le feu du ciel sur une bourgade des Samaritains (Luc 9.54). Leur question : « N’as-tu pas semé de bonne semence dans ton champ ? » exprime bien la perplexité, l’étonnement des fidèles, dans les premiers siècles, à la vue des misères que renfermait l’Église visible. Où est donc « l’Église glorieuse, n’ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable ? » N’as-tu pas voulu que ton Église fût une communion pure et sainte ? La doctrine ne doit-elle pas nécessairement produire des fruits de justice ? Pourquoi y a-t-il donc parmi nous tant de personnes qui se livrent au péché et y entraînent les autres ?

Le maître répond : « Un ennemi a fait cela, » et il montre ainsi la source du mal ; elle n’est pas dans l’ignorance, la faiblesse, qui caractérisent tout ce qui est humain, mais dans l’œuvre du grand ennemi spirituel ; « l’ivraie, ce sont les enfants du méchant, et l’ennemi qui l’a semée, c’est le diable. »

La question suivante : « Veux-tu donc que nous allions la recueillir ? » nous rappelle la tentation fréquente d’user de moyens violents pour la suppression de l’erreur, tentation à laquelle l’Église a cédé quelquefois. Mais ceux qui parlent ainsi ne sont pas dignes de confiance en cette matière. Ils n’ont souvent que le zèle de Jéhu pour le Seigneur (2 Rois 10.16), tout au plus le zèle d’Élie (Luc 9.54).

C’est pourquoi le maître dit « non. » Cette défense condamne toutes les mesures prises autrefois pour la condamnation des hérétiques, en sorte qu’on ne leur laissait pas le temps de se repentir. Et voici le motif de cette défense : « De peur qu’en recueillant l’ivraie vous ne déraciniez le blé en même temps. » Cela pouvait avoir lieu soit en déracinant ce qui paraissait être de l’ivraie, mais qui plus tard deviendrait du blé : « les enfants du méchant » qui, par la repentance et la foi, deviendraient des « enfants du royaume ; » soit par l’erreur des serviteurs qui, avec les meilleures intentions, ne pourraient distinguer l’ivraie du blé et envelopperaient tous dans une même condamnation. Le Seigneur seul, qui sonde les cœurs, connaît d’une manière certaine « ceux qui sont siens. » Les catholiques ont prétendu que le pape, étant le représentant du Maître, doit seul répondre à la question : « Veux-tu que nous allions recueillir l’ivraie ? »

La réponse : « non, » n’implique pas que l’ivraie ne sera jamais recueillie mais seulement que le temps n’est pas encore venu de l’arracher et que ce n’est pas leur affaire ; le maître ajoute : « Laissez-les croître tous deux ensemble jusqu’à la moisson. » Paroles solennelles, qui nous enseignent que le mal ne doit pas disparaître peu à peu, mais progresser toujours, jusqu’à ce qu’il atteigne sa plus haute manifestation dans la personne de l’antéchrist. Le bien et le mal doivent croître ensemble « jusqu’à la moisson, » jusqu’à ce qu’ils soient mûrs, l’un pour la destruction, l’autre pour la pleine délivrance.

Ils doivent croître « ensemble ; » l’Église visible doit être mélangée jusqu’à la fin : ce n’est pas une raison pour s’en séparer et fonder une autre petite Église selon nos vues particulières. Ceux qui le font transgressent un commandement positif et tombent dans le piège de l’orgueil, Même chez les meilleurs, il y a toujours un mélange de bien et de mal, comme dans l’Église visible. Saint Augustin fait souvent remarquer que les donatistes n’ont pas réussi à former une Église pure ; ils avouent eux-mêmes qu’il pouvait se trouver parmi eux des hypocrites ; malgré cela, ils montraient un esprit d’orgueil et un manque absolu de charité vis-à-vis de l’Église dont ils s’étaient séparés. Ce même orgueil caractérise plus ou moins tous les schismatiques qui ont voulu fonder de petites congrégations, sous prétexte de se séparer du mal. Chaque jeune chrétien, dans le temps de son premier amour, a la tentation d’être quelque peu donatiste. Il serait sans doute étrange qu’il ne désirât pas de voir l’Église de son Sauveur être une Église glorieuse, sans tache, ni ride. Mais il doit apprendre que ce désir, quelque légitime qu’il soit, ne peut se réaliser maintenant ; plus il souffre de la part des faux frères, plus il doit demander avec ardeur que le règne de Dieu vienne.

Il doit se rappeler que tous les essais qui ont été faits de vouloir réaliser avant le temps la parfaite communion des saints, sont des œuvres de la chair ; qu’aucune bénédiction ne peut reposer sur eux, et que, par conséquent, ils ne pourront jamais être couronnés de succès.

Fuller (Holy State, v. 2) énumère les six raisons pour lesquelles, dans le royaume de la grâce, les impies doivent être mélangés avec les croyants : « Premièrement, » dit-il, « parce que les hypocrites ne peuvent être retranchés que par Celui qui sonde le cœur ; en second lieu, parce que si les hommes opéraient eux-mêmes la séparation, les chrétiens faibles seraient considérés comme n’étant pas chrétiens et traités comme des réprouvés ; en troisième lieu, parce que les élus de Dieu qui vivent encore dans le péché seraient rejetés ; en quatrième lieu, parce que Dieu, par le mélange des justes et des injustes, veut éprouver la vigilance et la patience de ses serviteurs ; en cinquième lieu, parce qu’il veut épuiser ses faveurs sur les injustes, afin de les rendre d’autant plus inexcusables ; enfin parce que les justes qui souffrent de la part des méchants réclameront avec d’autant plus d’ardeur le jour du jugement. »

Quelques interprètes modernes, craignant qu’on ne se servît de notre parabole pour empêcher une stricte discipline dans l’Église, ont fait remarquer qu’il n’est pas tenu compte, dans l’explication du Seigneur, de la proposition des serviteurs (v. 28), ni de la réponse du maître (v. 29). Ils en concluent que la parabole n’a pas pour but de nous enseigner ce que doit être la tâche des serviteurs du Seigneur, mais ce qu’elle sera ; que la proposition des serviteurs n’est amenée que pour fournir une occasion à la réponse du maître et que la dernière partie de cette réponse est la seule vraiment importante. Mais lorsque Christ affirme que son dessein est d’opérer une complète séparation à la fin des temps, il défend implicitement, non pas l’exercice d’une juste discipline, en attendant, ni une exclusion de l’assemblée visible, si elle est nécessaire, mais toute tentative d’anticiper sur la séparation finale, qui lui appartient en propre.

« Au temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs : Recueillez premièrement l’ivraie et liez-la en faisceaux pour la brûler entièrement, mais amassez le blé dans mon grenier. » La séparation aura donc lieu, non pas maintenant, mais « au temps de la moisson, » et ce sont « les moissonneurs » qui l’opéreront. Ce « temps de la moisson » est, selon la parole du Seigneur, « la fin du monde, » et « les moissonneurs, ce sont les anges, » qui accompagneront le Seigneur quand il reviendra pour exercer le jugement (Matthieu 16.27 ; 24.31 ; 2 Thessaloniciens 1.7 ; Apocalypse 19.14) et accompliront sa volonté à l’égard de ceux qui l’ont servi (Matthieu 24.31) et à l’égard des rebelles (Matthieu 13.49 ; 22.13).

« Comme donc on recueille l’ivraie et qu’on la brûle entièrement au feu, il en sera de même à la fin du monde. Le Fils de l’homme enverra ses anges, et ils recueilleront hors de son royaume tous les scandales et ceux qui pratiquent l’iniquité. »

Le châtiment des impies est souvent comparé, dans l’Écriture, à un feu qui consume les épines, les mauvaises herbes, la balle, les branches mortes. (2 Samuel 23.6-7 ; Matthieu 3.10,12 ; 7.19 ; Jean 15.6 ; Hébreux 6.8 ; 10.26 ; Ésaïe 5.24 ; 9.18-19 ; 10.16-17 ; 33.11-12 ; 66.24) Mais n’est-ce là qu’une image ? Le feu reparaît également dans l’interprétation de notre parabole : « Les anges jetteront dans la fournaise de feu ceux qui pratiquent l’iniquité. » Paroles terribles ! Si c’est là une image, elle est empruntée en tout cas au supplice le plus affreux que les hommes aient inventé. Il était en usage chez les Chaldéens (Jérémie 29.22 ; Daniel 3.6) ; la tradition juive raconte que Nemrod fit jeter Abraham dans une fournaise de feu pour avoir refusé de se prosterner devant les idoles. Antiochus Epiphane employa le feu pour vaincre la constance des confesseurs juifs au temps des Macchabées ; Néron s’en servit également contre les chrétiens.

Quelle que soit l’interprétation qu’on donne de ces expressions : « fournaise de feu, » ou « lac de feu, » (Apocalypse 19.20 ; 21.10), « feu qui ne s’éteint point » (Marc 9.44) « feu éternel, » (Matthieu 25.41), ce qui est certain, c’est qu’elles font allusion à un supplice si terrible, que le Fils de Dieu est venu du ciel et a subi la mort pour nous délivrer des angoisses exprimées par les mots de « pleurs et grincements de dents. »

« Alors les justes brilleront comme le soleil dans le royaume de leur Pèred » Comme le feu est l’élément naturel du royaume des enfers, la lumière est celui du royaume céleste.

d – Dans le Berger d’Hermas deux paraboles présentent la même vérité sous des images différentes. Dans la première, le voyant contemple des arbres tels qu’ils sont en hiver, sans feuilles ; tous, les stériles et les autres, paraissent également morts. On lui dit qu’il n’est également pas possible de distinguer maintenant les justes des pécheurs. Dans la seconde parabole, il voit encore des arbres, dont les uns se couvrent de feuilles, et les autres restent dépouillés. Il en sera ainsi dans la vie future, qui sera un été pour les justes, mais toujours un hiver pour les injustes qui, ne portant pas de fruit, seront coupés et jetés au feu.

Lorsque tout élément de ténèbres aura disparu, la lumière apparaîtra dans tout son éclat (Colossiens 3.4 ; Romains 8.18 ; Proverbes 4.18 ; 25.4-5).

La gloire sera manifestée dans les saints, une gloire qui résidait en eux, mais qui attendait l’heure de sa pleine réalisation. Ce sera le jour de la « manifestation des enfants de Dieu ; » « ils brilleront comme le soleil » quand les nuages ont disparu (Daniel 12.3) ; ils seront reconnus par tous comme « les enfants de lumière » de ce Dieu qui est « le Père des lumières » (Jacques 1.17), qui est lumière, et en Lui il n’y a point de ténèbres (1 Jean 1.5).

Alors seront accomplies ces prophéties de L’Ancien Testament : « L’incirconcis et le souillé ne passeront plus désormais parmi toi » (Ésaïe 52.1) ; « Il n’y aura plus, en ce jour-là, de Cananéens dans la maison de l’Éternel des armées » (Zacharie 14.21) ; « Quant à ton peuple, ils seront tous justes » (Ésaïe 60.21 ; 35.8 ; Joël 3.17 ; Ézéchiel 37.21-27 ; Sophonie 3.13).

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