Le don de parler diverses langues

CHAPITRE 10

INTRODUCTION À L'ÉTUDE

1 CORINTHIENS 14

Nous arrivons maintenant à ce long passage tellement controversé : la grande discussion de l'apôtre Paul sur le thème du don des langues.

Que de choses contradictoires ont été dites et écrites sur ce passage ! C'est pourquoi, avant d'en analyser la matière, il est nécessaire de nous rappeler le contexte et les raisons qui agissent sur l'argumentation de Paul.

I

LE BUT DE L'ARGUMENTATION DE PAUL

1° Paul écrit pour mettre bon ordre

Ici, comme dans toute son épître, Paul apporte l'équilibre là où existe la plus grande confusion. Il est évident par le texte lui-même et par l'ampleur de l'enseignement donné, que l’église de Corinthe avait besoin d'être corrigée sur sa conception du don des langues. C'est donc sous cette optique que nous devons lire ce chapitre, en nous référant au but que Paul s'est fixé, d'en finir avec les idées désordonnées et charnelles qui abîmaient le témoignage de Christ à Corinthe.

2° Paul n'est pas en contradiction avec Actes 2

Si nous voulons comprendre la pensée de Paul dans ce chapitre et l'expliquer honnêtement, nous devons nécessairement tenir compte du texte biblique le plus clair, celui du chapitre 2 des Actes. Ce passage de Paul si contesté doit être interprété par la Bible elle-même ; l'Écriture contient sa propre explication. J'ai donné ailleurs (Voir chapitre 5) les raisons bibliques qui m'amènent à rejeter la notion qu'il existe une opposition entre les Actes et les épîtres. Je suis convaincu par la Parole de Dieu elle-même que Paul, dans ce chapitre 14 des Corinthiens, entend par « langues » le même phénomène que celui décrit par Luc dans les Actes.

Une fois ce principe établi, nous avons entre les mains la clé qui nous permet de comprendre le chapitre entier d'une manière logique et utile.

3° Paul considère le don des langues dans le contexte de l'assemblée

Nous devons retenir la perspective de Paul. Dans ses chapitres 11 à 14, comme nous l'avons indiqué, Paul a en vue un objectif précis : l'église et son édification par l'action du Saint-Esprit.

Au chapitre 11, il traite le rôle de la femme dans l'assemblée, ainsi que le déroulement de la sainte-cène.

Au chapitre 12, il définit la nature des dons spirituels, en relevant leur fonction organique dans le corps de Christ. Rappelons ici que l'Esprit, par le don qu'il accorde à chaque croyant, le qualifie ainsi pour le service de Dieu, quelle que soit la nature de ce service. Le croyant découvre alors son véritable rôle dans l'assemblée. L'Esprit, en le remplissant, agit par lui de manière à édifier, c'est-à-dire à bâtir l'église, non plus par les énergies de la chair, mais par une force et une sagesse qui viennent directement de Dieu.

Nous devons insister une fois de plus sur le fait que, pour Paul, le but d'un don spirituel n'est pas l'édification de soi-même, mais le service d'autrui : il est une expression de l'amour de Dieu que l'Esprit crée dans l'âme du croyant pour son prochain. Par cette action, l'Esprit cherche à développer la vie de la communauté, afin de contribuer à sa croissance, surtout par la conversion de nouvelles âmes. En étudiant le chapitre 14 de Paul, il ne faut pas perdre de vue cet objectif du Saint-Esprit : il accorde ses dons, y compris le don des langues, pour le bien de la communauté et non celui de l'individu.

Au chapitre 13, Paul montre que, sans le vrai mobile du Saint-Esprit, sans la force cohésive que donne l'amour, tout soi-disant « don » n'est que parade et néant.

De même, au chapitre 14, c'est dans le contexte de l’église que Paul examine la nature et le but du don des langues ; tout son enseignement sur « les langues » doit être compris dans ce même sens. Paul n'est pas concerné, dans ce chapitre, par la question de la sanctification de l'individu ; il pense à celle de l'assemblée. Les versets 4, 5, 12, 19, 23, 28 (pour ne citer que les phrases saillantes) démontrent cela de la manière la plus évidente.

Paul, en somme, répond à la question : quelles sont la place et l'utilité du don des langues dans l'assemblée ?

Ayant déjà enseigné aux Corinthiens que les dons de l'Esprit sont pour l'utilité commune, pour l'édification de l’église, (1 Corinthiens 12.7 voir aussi Éphésiens 4.2) Paul leur fait comprendre maintenant que le don des langues n'est pas une exception à la règle. Comme les autres dons, il existe, non pour la satisfaction personnelle de celui qui parle, mais pour atteindre son prochain avec le message de Christ, comme dans Actes 2. Celui qui exerce véritablement ce don vise plus loin que lui-même. Il est évident que, si sa langue ne communique pas Christ à ceux qui l'entourent et surtout à ceux qui ne connaissent pas Christ, si cet homme, par son don, ne parvient pas à aimer et à aider son prochain, ce « don » est vain. L'apôtre Pierre voit la chose exactement de la même manière que Paul, car il ordonne « que chacun mette au service des autres le don qu'il a reçu » 1 Pierre 4.10.

4° Paul compare ici deux dons particuliers

Après avoir donné son enseignement sur les dons spirituels en général, Paul illustre ensuite son argument par un cas concret : il fait la comparaison entre deux dons précis afin d'exposer leur valeur respective pour l'édification de l'assemblée : il met en contraste le don des langues et le don de prophétie. Paul confronte en fait l'église de Corinthe à la question suivante :

— Laquelle de ces deux formes d’expression est la plus utile, la plus nécessaire à l'église ? Sa réponse, très étudiée, est sans équivoque : le don de prophétie est de loin le plus utile. Tout le long du chapitre, il démontre les avantages que présente, dans l'assemblée, le don du prophète sur celui de l'homme qui parle en langue inconnue. Cela est clair comme de l'eau de roche ; il faut être très dur d'entendement pour ne pas l'admettre.

Paul n'est pas concerné dans ce chapitre par l'authenticité ni la validité du don des langues en soi ; il analyse simplement le rôle de ce don par rapport à l'œuvre de Dieu dans les rassemblements de l'église locale. Il ne discute pas non plus de la vie privée de l'individu, ni de la foule dans la rue, mais du fonctionnement de l'assemblée. Or, selon Paul, tout don spirituel est conçu pour l'édification de l'assemblée ; mais, puisqu'il existe dans l'économie de Dieu un véritable don des langues (Actes 2 en est la preuve), comment devons-nous concevoir son utilisation dans le contexte de l'assemblée ? C'est la question que Paul pose.

Et sa réponse ? Comme nous le verrons en étudiant le chapitre entier, Paul ne voit en fait que peu d'utilité pour ce don dans le cadre de l'assemblée. L'Esprit de Dieu sait créer des dons bien plus nécessaires et plus intéressants et c'est à ceux-là, dit Paul, que nous devons aspirer. Pour lui, il y a mieux que le don des langues !

II

LES DONS SPIRITUELS DANS LEUR VRAI CONTEXTE

Usons d'un peu d'imagination ! Combien de fois j'ai vécu des scènes semblables à la suivante, dans les jeunes églises que j'ai vu naître ou que j'ai connues ! Il me semble que je vois cette assemblée de Corinthe, comme tant d'autres que l'apôtre Paul avait fondées, en pleine réunion. Les croyants se réunissent surtout le soir, une ou peut-être plus d'une fois par semaine, selon les possibilités, et généralement après une longue journée de travail. Je vois certains hommes qui luttent contre le sommeil ; deux ou trois sont visiblement exténués ; la plupart des femmes sont également à bout de forces, avec leurs bébés endormis sur les bras et les petits enfants qui apprennent difficilement à rester tranquilles pendant la réunion.

Je vois alors un frère qui se lève. C'est un vieux Juif converti. Avec ses yeux affaiblis, il lit péniblement, d'une voix fière, un extrait d'un précieux rouleau du prophète Ésaïe qu'il commente de manière à attirer l'attention de toute l'assistance ; même les enfants écoutent, impressionnés.

Puis un ancien criminel devenu disciple du Christ prie, la voix brisée, les larmes aux yeux ; il ne sait comment remercier Dieu suffisamment pour son salut. D'autres prient après lui ; les uns louent le Seigneur, les autres l'implorent de sauver leurs parents, leurs enfants, leurs maris, leurs voisins. Un jeune homme se lève ensuite et s'adresse à ses frères d'une voix ferme, avec une exhortation prophétique, un appel à la repentance et à la foi. Courageusement, mais avec humilité, il avertit l'église tout entière en lui reprochant une certaine lâcheté spirituelle vis-à-vis d'un problème auquel elle est confrontée. Une grand-mère, le visage rayonnant d'une joie céleste, appuie les paroles du jeune prophète et prie, en sanglotant, pour toute l'église et surtout pour les jeunes convertis.

Tout le monde demande alors à un homme présent parmi les autres et qui a fait deux ans d'itinérance avec l'apôtre Paul, de leur apporter un enseignement biblique précis sur les questions soulevées par le jeune homme et en rapport avec la prophétie d'Ésaïe qu'on avait lue au début de la réunion. Ce « vétéran » ouvre alors un papyrus bien usé, infiniment précieux, contenant tout un enseignement que Silas et Paul avaient donné à ce sujet dans une ville d'Asie. Il explique la pensée apostolique et cite par cœur plusieurs phrases que Christ lui-même avait prononcées. Toute l'église est éclairée, édifiée. Après avoir partagé le pain et le vin et chanté un psaume et deux ou trois cantiques plus ou moins improvisés, ils s'embrassent et rentrent chacun chez soi pour dormir quelques courtes heures avant d'être à nouveau debout, bien avant l'aube, pour reprendre le dur gagne-pain quotidien.

L'argument de Paul dans 1 Corinthiens 14 s'adresse à un groupe de chrétiens qui vit dans des conditions semblables à celles que je viens de décrire. Il leur dit en somme : — Votre vie est courte, utilisez-la pour Dieu. Le temps que vous pouvez passer ensemble, pour approfondir les choses de Dieu, est infiniment bref ; il est plus précieux que l'argent que vous gagnez, plus que tout objet de valeur ; utilisez-le de la manière la plus efficace, la plus intelligente possible. Pensez surtout aux mamans tracassées qui doivent enseigner et élever les petits dans la foi. Pensez aux besoins de l'esclave qui, toute la semaine, est accaparé par les caprices de son maître ou de sa maîtresse ; il a pourtant besoin de connaître à fond la Parole de Lieu, afin de vivre d'une manière digne de Christ, même sous les coups. Pensez à l'ouvrier que son maître veut faire travailler malhonnêtement pour faire rapporter davantage d'argent à l'entreprise. Pensez à ceux qui viennent à peine d'échapper à une emprise démoniaque de longue durée avant d'entendre l'Évangile. Pensez également à la jeune fille convertie par l'exemple et l'affection d'une chrétienne, mais qui vit à présent en cachette après sa fugue : elle est encore recherchée par les hommes qui avaient vécu de sa prostitution forcée...

— Voilà, dit Paul, je désire — et le Saint-Esprit désire — que toutes ces âmes précieuses et nécessiteuses soient affermies, bâties, fortifiées contre le diable et ses ruses, renseignées sur les promesses et les exigences de la Parole de Dieu. Elles ont besoin d'être aimées, exhortées, averties, encouragées. Elles ont surtout besoin de connaître les Écritures, d'abord les paroles du Seigneur Jésus lui-même, puis tout ce que les apôtres ont pu enseigner sans oublier l'Ancien Testament. Puisque c'est par la Parole de Christ que vient la foi, (Romains 10.17) l'église a besoin de connaître cette Parole par excellence. Priez donc que Dieu vous suscite des prophètes et des docteurs, priez qu'il vous accorde les dons les plus utiles, ceux qui « rapportent » au maximum en trésor céleste et en âmes sauvées.

III

DES LANGUES INCOMPRÉHENSIBLES DANS L'ÉGLISE ?

Dans une rencontre semblable, quelle est la place d'un don des langues ? Si ce don consiste vraiment en une expression inintelligible, en quoi celui qui l'exerce peut-il faire progresser l'œuvre de Dieu ? La communauté a tant besoin de ce temps précieux pour étudier les Écritures, s'exhorter mutuellement en s'accrochant aux commandements de Jésus-Christ, aux avertissements et aux enseignements des apôtres, en les apprenant par cœur, en les commentant ensemble. Chaque croyant a tant besoin de prier, d'intercéder pour les âmes qu'il connaît, de remercier le Seigneur pour « le pain et le vin » et de l’adorer, en lui demandant les forces de tenir ferme face aux persécutions. Que viendrait donc faire au milieu de tant d'activités utiles, nécessaires, indispensables, une intervention en un langage que personne ne comprend, pas même celui qui parle ?

L'Esprit de Dieu ne fera pas perdre de temps à l'Église

Les membres de l'église de Corinthe étaient pour la plupart des gens assez simples : il n'y avait pas beaucoup de sages, ni de puissants, ni de nobles, disait Paul, 1 Corinthiens 1.26. À part quelques exceptions, c'étaient des ouvriers, des esclaves, de petits commerçants, qui devaient travailler extrêmement dur et qui disposaient de peu de loisirs. D'ailleurs, le monde païen de l'Antiquité ne connaissait rien d'un sabbat ou d'un jour dominical qui aurait permis aux chrétiens de se réunir dans la détente. C'est Jésus qui a donné au monde occidental son jour hebdomadaire de repos, que seuls les Juifs connaissaient auparavant.

Le temps dont disposaient les croyants de Corinthe chaque semaine pour se réunir autour de la table du Seigneur était ainsi très limité. Le disciple qui voulait vivre sa foi était obligé de prendre ce temps sur d'autres activités sans doute légitimes et nécessaires, même sur son sommeil. Pour assister aux réunions de l’église, comme pour étudier la Parole de Dieu et prier dans le secret, chaque croyant devait inévitablement faire des sacrifices considérables.

D'ailleurs, à l'époque des apôtres, la sainte cène se faisait le soir, sans doute parce que le Seigneur Jésus l'institua à cette heure-là. (Le Nouveau Testament ne nous donne pas un seul exemple d'une pratique contraire. Il ne nous met pas non plus sous une obligation de la faire uniquement le soir.) Or, le mot « cène » signifie « souper » et l'on prend le souper le soir et non le matin ! Il y avait pourtant une autre raison à cette pratique, c'était le fait de n'avoir aucun autre moment (du moins dans les pays païens) pour se réunir. Il va sans dire qu'après une longue journée de travail, alors que les assistants étaient nécessairement fatigués, le temps passé en commun était infiniment précieux et jamais trop long pour que l'Esprit de Dieu mette à profit chaque minute.

Or, l'apôtre Paul veut faire comprendre à ses enfants spirituels la valeur de ce temps passé en commun et la nécessité de l'employer de la façon la plus utile pour tous. Lui, mieux que n'importe qui, savait que le temps est notre « bien » le plus précieux. Chaque heure, chaque minute gaspillée est à jamais perdue. Le temps que nous vivons sur la terre est compté ; nous ne pouvons ni le prolonger, ni le récupérer (Quelle folie de supposer que dans l'éternité nous retrouverons le temps perdu, puisque dans l'éternité, nous ne serons plus dans le temps ! C'est maintenant que nous devons nous amasser un trésor pour le ciel, en mettant à profit le temps limité qui nous est confié.) Il est donc indéniable que l’église, une fois réunie, doit employer le temps de son rassemblement pour l'utilité commune, 1 Corinthiens 12.7, pour le plus grand bien de tous.

Il va sans dire que l'Esprit de Dieu, dans sa répartition des dons spirituels, voudra œuvrer de la manière la plus efficace possible. Sans frénésie, sans désordre, il cherchera à provoquer en chaque membre du corps de Christ une action authentique de la grâce de Dieu qui fortifiera ses frères et sœurs. C'est ainsi qu'il fait croître le corps de Christ.

Si donc un croyant fait perdre à ses frères ne serait-ce que quelques minutes par une activité inutile, il bloque en fait l'action de l'Esprit. Nous pouvons mieux évaluer la portée de son erreur en faisant un calcul : si par une action charnelle, cet homme fait perdre, disons, cinq minutes à une communauté de cent membres, il fait perdre en réalité 5 × 100 = 500 minutes ! soit plus de huit heures perdues pour l'œuvre de Dieu. Or, l'Esprit de Dieu ne poussera jamais un homme à abuser ainsi du temps que la communauté a consacré au Seigneur.

Voici en fait l'argument de l’apôtre Paul : lorsque toute l'église est réunie, lequel des deux dons en question sera le plus utile ? Lequel révélera le mieux Christ aux hommes ? Lequel servira le mieux le dessein du Saint-Esprit qui est d'édifier l'église : faire parler quelqu'un en une langue que ni lui ni les autres ne comprennent ? Ou bien parler directement de la part de Dieu aux frères et sœurs présents dans la langue qu'ils connaissent tous ? La réponse est aussi claire que la lumière du jour.

IV

POURQUOI DES LANGUES A CORINTHE ?

Corinthe était une ville carrefour sur l'isthme entre deux mers, un port très important, extrêmement cosmopolite, fréquenté par des marchands, des marins, des voyageurs parlant toutes sortes de langues. Quoi de plus normal que l'Esprit de Dieu se serve, à l'occasion, d'un croyant de Corinthe pour attirer l'attention d'un étranger sur l'Évangile dans sa propre langue, afin que celui-ci s'intéresse sérieusement à la vérité et se convertisse ? Seulement, dit Paul, dans ce cas, l'assistance doit être mise au courant afin que tous comprennent et soient bénis par la repentance d'un pécheur qui se tourne vers Dieu.

Jérusalem était, elle aussi, une ville extrêmement cosmopolite, surtout à l'époque des trois grandes fêtes de l'année : à Pâques, à la Pentecôte et à la fête des Tabernacles.

Césarée, étant à la fois un port et la capitale romaine de la Palestine, était également une ville très cosmopolite. Avec ses nombreux légionnaires, originaires de tant de pays souvent lointains, et le trafic incessant des caravanes entre l'Afrique et l'Asie, Césarée était, comme Corinthe, une ville particulièrement stratégique ; c'est sans doute la raison pour laquelle l'Esprit de Dieu a choisi la ville de Césarée pour commencer son œuvre parmi les non-Juifs et pour s'y manifester par le don des langues.

Éphèse était une ville beaucoup plus grande que Jérusalem, Césarée ou Corinthe. C'était un port, lui aussi stratégique, un centre culturel et religieux de l'Asie où toutes les races et toutes les langues se confondaient.. Quoi de plus normal que de voir le Saint-Esprit démontrer, là aussi, sa maîtrise sur le Babel de la confusion ?

Dans la pensée de l'apôtre Paul, il existait, certes, une place pour le véritable don des langues. Supposons, par exemple, que parmi ceux qui assistent à une prédication, il se trouve des étrangers venus d'un pays lointain, ne sachant rien de l'Évangile et ne connaissant que très peu le grec, la langue courante de l'époque. Pourquoi, s’il le juge utile, le Saint-Esprit ne parlerait-il pas par la bouche d'un enfant de Dieu, en une langue comprise par ces âmes dans le besoin ? Par ce moyen, Dieu peut attirer leur attention et les convaincre. Ils voudront ainsi se renseigner sur l'Évangile, soit (peut-être difficilement) en grec, soit par le moyen d'un interprète dans une langue intermédiaire, pourquoi pas ? N'est-ce pas là le véritable sens de ce don ? C'est précisément et incontestablement ce qui est arrivé à Jérusalem le jour de la Pentecôte. Dans une ville aussi cosmopolite que Corinthe, il serait donc tout à fait logique qu'un frère s'exprime en langue étrangère si l'occasion l'exigeait. L'Esprit de Dieu est chaque fois prêt à se mettre à la portée d'une âme qui cherche Christ.

Le vrai sens du don des langues

Même sans avoir recours à une action miraculeuse, l'Esprit de Dieu est pleinement conscient de la valeur des langues. J'ai travaillé pour le Seigneur dans de nombreux pays où, souvent, l'emploi de langues étrangères était indispensable. D'innombrables fois, la présence d'un frère ou d'une sœur capable de prêcher l'Évangile en telle ou telle langue était d'une valeur inestimable. Il en était de même quand il s'agissait de l'interprétation d'un message que Dieu me donnait pour ceux dont je ne connaissais pas la langue. Par ce moyen, Dieu a permis que j'aie un rapport spirituel direct et fort béni avec des personnes et des auditoires dont j'ignorais complètement la langue.

Pour ceux qui ne sortent jamais de leur pays d'origine et qui ne comprennent et ne parlent qu'une seule langue, celle de leur enfance, il est difficile d'imaginer quelle peut être l'importance stratégique d'une langue véritable.

Si je me trouve dans un pays hostile au message de Jésus-Christ, comme il y en a tant aujourd'hui et dont je ne connais pas la langue, l'utilité d'un vrai don des langues est évidente. Supposons que la foule soit sur le point de me lyncher à cause de ma foi ou parce que je distribue des évangiles. Je ne serais pas du tout étonné si le Saint-Esprit me donnait alors de crier la vérité sur Jésus-Christ dans la langue de ce pays, avant de succomber sous les coups et les outrages. Si, par ces quelques mots en langue miraculeusement inspirée par son Esprit, Dieu atteignait la conscience de plusieurs personnes dans la foule pour les amener à la foi en Christ, ne serait-ce pas une chose tout à fait normale ?

L'Esprit de Dieu ne manque pas d'intelligence ! Il cherche à apporter la Parole de Dieu à chaque être humain de la manière la plus authentique et la plus puissante possible.

V

LA MAISON DE GAÏUS

Laissons agir une fois de plus notre imagination — et que Dieu la sanctifie ! Celui qui a prêché l'Évangile au péril de sa vie n'aura pas de peine à comprendre une œuvre apostolique comme celle de Paul.

L'église de Corinthe se donne rendez-vous dans la maison de Gaïus Romains 16.23 au moment du coucher du soleil. Les portes de la cour sont ouvertes, donnant sur la rue. Certains frères sont en train de prêcher l'Évangile sur la placette à l'angle de la rue : le reste de l'assemblée prie dans la cour.

Au milieu de la foule qui écoute la prédication en plein air se trouvent quelques matelots berbères arrivés ce jour-là de Carthage sur un bateau phénicien et ils se promènent. Intrigués par les voix et attirés par la foule dont une partie se moque alors que le reste écoute très attentivement, ils s'approchent. Ne sachant pas un mot de grec, ils se joignent aux moqueurs et l'un d'eux, à moitié ivre, se heurte au chrétien qui témoigne de sa foi, en le menaçant d'un gros couteau. La foule s'agite, la situation devient dangereuse.

Subitement, l'Esprit de Dieu saisit l’un des frères qui crie à haute voix. À l'étonnement des Berbères, il s'exprime dans leur propre langue en disant que le Dieu vivant les appelle à trembler devant le nom de Jésus-Christ qui va les juger, lui qui a versé son sang pour eux. Il ne prononce que deux ou trois phrases, puis il s'arrête ; mais ces hommes dangereux sont stupéfaits et trois d'entre eux demandent, par des gestes, à en savoir plus. On les amène dans la cour de la maison de Gaïus, au milieu de l'assemblée réunie ; on parvient à trouver quelqu'un qui sait tout juste quelques mots du dialecte de ces hommes : comme ils connaissent aussi un peu de latin, on arrive, à plusieurs, à leur faire comprendre l'essentiel de l'Évangile. On met alors toute l'assemblée au courant de ce qui se passe. L'un de ces hommes rejette le message et il part à la recherche de ses amis, en jurant horriblement. mais au moins, il a été évangélisé ! Les deux autres, avant la tombée de la nuit, se donnent à Christ et, le lendemain matin, avant le départ de leur navire, ils se font baptiser dans le port et emportent avec eux la vérité qui pourra alors pénétrer dans leur pays.

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