Simples entretiens sur la prière

Préface

Nous publions une 5° édition des Simples entretiens sur la prière. Leur auteur, S.-D. Gordon, est encore peu connu dans notre pays. Depuis longtemps déjà, il exerce pourtant une puissante influence en Angleterre, en Ecosse et en Amérique. Ses ouvrages sont lus partout et ont de nombreuses éditions.

Nous avons reçu tant de bien de ses Quiet talks on prayer que nous avons ardemment désiré les mettre à la portée des chrétiens de langue française. Ce n’était pas chose aisée. Gordon se refuse à parler français. Il a fallu de grands efforts pour rendre dans notre langue ses fortes pensées.

En lisant ces pages tout vrai chrétien comprendra mieux l’importance capitale de la prière et s’humiliera d’avoir si peu et si mal prié.

Quand nous nous plaçons en face des promesses de Dieu, nous comprenons que nous n’avons pas le droit d’avoir des vies impuissantes, en grande partie stériles, puisque tout est possible à celui qui demande avec foi.

En priant, en effet, nous entrons dans le royaume de la vérité et de la réalité, nous sommes arrachés à toutes les ténèbres, à toutes les erreurs, à tous les esclavages; nous sommes transportés dans une atmosphère spirituelle qui permet à toutes les semences de vérité déposées en nous de donner de glorieuses moissons.

La prière nous révèle Dieu et nous mêmes, elle fait descendre Dieu dans nos vies avec toutes ses vertus, elle fait de nous des vainqueurs, des rois; elle nous ôte nos illusions, notre confiance en nous, elle nous ouvre la Parole de Dieu, elle nous la rend vivante et puissante, elle nous y fait découvrir des trésors inconnus, de profonds abîmes et de hautes montagnes. La prière vraie, faite au nom de Jésus, est ce qu’il y a de plus grand, de plus puissant ici-bas. Notre témoignage n’a de valeur que dans la mesure où nous prions. Quand nous allons vers les pécheurs en sortant de la présence de Dieu, nous leur donnons à boire de l’eau vive, nous leur ouvrons des horizons éternels, nous les faisons monter. Entre tous les hommes, rois, millionnaires ou mendiants, les seuls vis-à-vis desquels Dieu se sent lié, les seuls par le moyen desquels il transforme le monde, ce sont les hommes qui prient.

La vraie prière, c’est Dieu et l’homme se rencontrant sur l’autel du sacrifice pour se donner l’un à l’autre. Par conséquent, prier c’est nous quitter nous-mêmes, c’est mourir à toute vie propre pour trouver Dieu, c’est entrer dans son intimité de façon à ne rester étranger à aucune de ses pensées d’amour, dé ses souffrances, de ses indignations, de ses projets, de ses ambitions à notre égard, à l’égard de l’Eglise et du monde. C’est en priant que nous comprenons par le cœur tout ce qu’il y a de tendresse dans le cœur paternel de Dieu pour chaque créature humaine. Alors nous ne pouvons plus accepter ce monde tel qu’il est; nous le voulons tel qu’il devrait être.

Que Dieu souffre de voir encore notre humanité dans un tel état d’ignorance, d’égarement, de mensonge, d’abrutissement, de folie, de souffrances, dix-neuf siècles après qu’il nous a acheté le pardon et le Saint-Esprit! C’est pour cela qu’il nous dit sous tant de formes et avec tant d’insistance: priez. C’est comme s’il nous disait: ayez donc du cœur!

En vérité, est-il juste que, Jésus-Christ ayant acquis à toute créature les mêmes grâces qu’à nous—le même pardon, la même paix, les mêmes consolations, la même liberté, la même espérance—nous jouissions de ces grâces quand tant d’autres en sont privés? Etre riches et laisser mourir le monde quand Dieu nous dit de lui donner à manger, c’est inique! Mais si nous sommes riches pour enrichir les pauvres, pour nous dépenser à leur profit, pour passer notre vie à genoux en leur faveur, alors nos privilèges sont une source de grâces pour l’humanité, L’aveuglement de ce monde livré à Satan accuse Dieu. Les injustices de ce monde—nous éclairés, consolés, enveloppés de prières et de moyens de grâce, et autour de nous d’autres créatures dans la nuit de l’ignorance et du désespoir, dans l’hiver glacial de l’égoïsme, enveloppées de tentations—accusent Dieu. Et puisque la justice est la base de son trône, tout ce que nous avons reçu par la Parole, par le Saint-Esprit, par la communion fraternelle, tous doivent le recevoir. Travaillons-y par la prière.

Prier, c’est créer dans les âmes un terrain favorable, un climat propice à la Parole de Dieu. Toute semence a besoin pour germer d’un sol approprié à sa nature, d’un climat qui lui convienne. Si tant de semences de vérité jetées dans les âmes donnent de si maigres moissons, c’est parce que nous semons sur un sol glacé. On ne sème pas en hiver. C’est pourquoi, avant de parler aux hommes, il faut parler à Dieu; avant de pouvoir remporter la victoire sur les hommes, il faut l’avoir remportée avec Dieu contre nous-mêmes et contre Satan.

C’est la méthode du Seigneur Jésus. Avant de commencer son ministère dans la puissance du Saint-Esprit, il avait remporté la victoire sur Satan au désert; avant d’entrer dans la maison de l’homme fort pour piller ses biens, il l’avait lié. {Mt 12.24-30}

C’est la méthode des apôtres. Avant de descendre dans les rues de Jérusalem pour évangéliser, ils ont passé dix jours en prière.

C’est la méthode de tous les hommes de Dieu qui ont été des remueurs de consciences. C’était déjà la méthode des patriarches et des prophètes.

Voyez Jacob épouvanté en apprenant qu’Esaü arrive avec quatre cents hommes. Il passe une nuit en prière, le cœur rempli d’angoisse. Il plaide, il rappelle à Dieu ses promesses, il demande la délivrance. Et, pendant qu’il prie, Dieu transforme tellement les sentiments de son frère Esaü que, le lendemain, au lieu d’une épée pour le transpercer, Jacob trouve deux bras qui s’ouvrent pour le presser sur le cœur ému de son frère.

Pourquoi faut-il prier avant d’agir? Pourquoi Dieu fait-Il, en réponse aux prières des croyants, ce qu’autrement II ne ferait pas, ce qu’il ne pourrait même pas faire? C’est ce que Gordon va nous dire clairement et puissamment.

On prie quelquefois comme si la prière avait pour but d’émouvoir Dieu en faveur de ce monde et de le persuader qu’il doit répandre son Esprit. On le supplie de telle façon qu’on donne l’impression qu’il ne se soucie pas, comme nous, des âmes à sauver et que son amour pour le monde perdu est peu de chose en comparaison du nôtre. Prier ainsi, ce n’est pas prier intelligemment. Prier, c’est faire passer ce qui nous préoccupe de nos mains dans les siennes, c’est abandonner notre faiblesse à sa toute puissance, c’est rappeler à notre Dieu quelqu’une de ses promesses en lui disant: «Tu sais, je compte sur Toi pour l’accomplir». Et c’est demeurer dans cette attitude de confiance. Dieu attend, pour accomplir de grandes choses, que nous ayons foi en Lui et que nous nous laissions vaincre par Lui.

Que Dieu se serve de ce livre pour faire comprendre et éprouver à beaucoup de chrétiens quelle puissance de bénédiction ils peuvent être s’ils savent se livrer avec amour, avec foi, avec persévérance, au saint travail de l’intercession.

S. DELATTRE.

 retour à la page d'index chapitre suivant