Somme théologique

Somme théologique — La tertia

42. L'ENSEIGNEMENT DU CHRIST

  1. Le Christ devait-il prêcher aux Juifs seulement ou bien aux païens aussi ?
  2. Dans sa prédication aurait-il dû éviter de heurter les Juifs ?
  3. Devait-il enseigner en public ou secrètement ?
  4. Devait-il enseigner seulement par la parole, ou aussi par l'écrit ?

1. Le Christ devait-il prêcher aux Juifs seulement ou bien aux païens aussi ?

Objections

1. On lit en Isaïe (Ésaïe 49.6) : « C'est trop peu que tu sois mon serviteur pour relever les tribus d'Israël et ramener les survivants de Jacob ; je fais de toi la lumière des nations pour que mon salut atteigne jusqu'aux extrémités de la terre. » Mais le Christ a apporté la lumière et le salut par son enseignement. Cela semble donc trop peu qu'il n'ait prêché qu'aux Juifs et non aux païens.

2. Selon S. Matthieu (Matthieu 7.29), « il enseignait comme ayant autorité ». Mais la puissance de l'enseignement se montre dans l'instruction de ceux qui n'ont reçu aucun enseignement, ce qui était le cas des païens. Aussi S. Paul écrit-il (Romains 15.20) : « J'ai proclamé l'Évangile là où le nom du Christ n'avait pas encore été prononcé, afin de ne pas construire sur les fondations d'un autre. » Donc, le Christ aurait dû bien davantage prêcher à la multitude des païens.

3. Instruire plusieurs est plus utile que d'instruire un seul individu. Mais le Christ a instruit quelques païens, comme la Samaritaine (Jean 4.7) et la Cananéenne (Matthieu 15.22). Il semble donc que, bien davantage, le Christ aurait dû prêcher à la multitude des païens.

En sens contraire, le Seigneur déclare en S. Matthieu (Matthieu 15.24) : « je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël. » Mais on lit en S. Paul (Romains 10.15) : « Comment prêcher, si l'on n'a pas été envoyé ? »

Réponse

Il convenait que la prédication du Christ, par lui-même et par les Apôtres, fût adressée aux seuls Juifs pour commencer.

1° Afin de montrer que la venue du Christ accomplissait les promesses faites anciennement aux Juifs, mais non aux païens. Et S. Paul le dit bien (Romains 15.8) : « J'affirme que le Christ Jésus a été ministre des circoncis », c'est-à-dire apôtre et prédicateur des juifs, « pour manifester la fidélité de Dieu, en accomplissant les promesses faites à leurs pères ».

2° Cela prouvait que sa venue était voulue par Dieu car, dit S. Paul (Romains 13.1), « tout ce qui vient de Dieu s'accomplit avec ordre ». Or cet ordre nécessaire exigeait que l'enseignement du Christ fût d'abord proposé aux Juifs, qui étaient plus proches de Dieu par leur foi et leur culte monothéiste, pour être ensuite transmis par eux aux païens. C'est ainsi que, dans la hiérarchie céleste, les illuminations divines parviennent aux anges inférieurs par l'intermédiaire des anges supérieurs. Aussi, sur cette parole en S. Matthieu : « Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël », S. Jérôme fait-il ce commentaire : « Il ne dit pas cela parce qu'il n'aurait pas été envoyé aussi aux païens, mais parce qu'il l'a été d'abord à Israël. » Aussi Isaïe (Ésaïe 66.19) avait-il écrit : « J'enverrai, parmi les sauvés », c'est-à-dire les Juifs, « vers les nations, auxquelles ils annonceront ma gloire. »

3° Pour enlever aux Juifs un prétexte à calomnie. En effet, sur cette parole (Matthieu 15.24), « N'allez pas chez les païens », S. Jérôme ; écrit « Il fallait annoncer la venue du Messie tout d'abord aux Juifs, pour qu'ils n'aient pas une juste excuse en disant qu'ils l'avaient rejeté parce qu'il avait envoyé ses Apôtres auprès des païens et des Samaritains. »

4° Parce que le Christ a mérité le pouvoir et la domination sur les païens par la victoire de la croix. C'est pourquoi on lit dans l'Apocalypse (Apocalypse 2.26-28) : « Au vainqueur je donnerai pouvoir sur les nations... comme je l'ai reçu de mon Père. » Et dans l'épître aux Philippiens (Philippiens 2.8) : « Parce qu'il s'est fait obéissant jusqu'à la mort de la croix, Dieu l'a exalté pour qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse et que toute langue le proclame. » C'est pourquoi, avant sa passion, le Christ n'a pas voulu prêcher aux païens son enseignement, mais après la passion, il a dit aux disciples (Matthieu 28.19) : « Allez, enseignez toutes les nations. » Cela explique ce qu'on lit en S. Jean (Jean 12.20) : la Passion étant imminente, lorsque certains païens voulurent voir Jésus, celui-ci répondit : « Si le grain de froment ne tombe en terre et ne meurt, il reste seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruits. » Et comme dit S. Augustin sur ce passage : « Ce grain était destiné à mourir, en sa personne, par l'incroyance des Juifs, et à se multiplier par la foi des nations païennes. »

Solutions

1. Le Christ a été la lumière et le salut des païens par les disciples qu'il a envoyés leur prêcher.

2. Faire quelque chose par d'autres montre une plus grande puissance que le faire par soi-même.

Et c'est pourquoi la puissance divine du Christ s'est manifestée hautement du fait qu'il a conféré à ses disciples une telle efficacité d'enseignement qu'ils convertissaient à lui des païens qui n'avaient jamais entendu parler de lui. Or la puissance de l'enseignement du Christ se mesure aux miracles par lesquels il confirmait cet enseignement, à son efficacité de persuasion, et à l'autorité de celui qui parle, parce qu'il s'exprimait comme ayant autorité sur la loi, quand il disait : « Eh bien, moi, je vous dis... » Et sa puissance divine s'est manifestée par la rectitude vertueuse où il vivait, sans aucun péché.

3. De même que le Christ ne devait pas, dès le début, communiquer sa doctrine indifféremment aux païens, de même il ne devait pas repousser totalement ceux-ci, pour ne pas leur enlever l'espérance du salut. Et c'est pourquoi quelques païens en particulier ont été accueillis à cause de l'éminence de leur foi et de leur dévouement.


2. Dans sa prédication, le Christ aurait-il dû éviter de heurter les juifs ?

Objections

1. S. Augustin a dit : « Dans l'homme Jésus Christ, le Fils de Dieu s'est offert à nous en modèle de vie. » Mais nous devons éviter de scandaliser, non seulement les fidèles mais aussi les infidèles, selon cette recommandation de S. Paul (1 Corinthiens 10.32) : « Ne scandalisez ni les Juifs, ni les païens, ni l'Église de Dieu. » Il semble donc que le Christ aussi, dans son enseignement aurait dû éviter de heurter les Juifs.

2. Aucun sage ne doit empêcher son œuvre de réussir. Mais, du fait que Jésus troublait les Juifs par son enseignement, il empêchait celui-ci de porter ses fruits. S. Luc (Luc 11.53) rapporte en effet que les pharisiens et les scribes, après avoir été repris par lui, « se mirent à lui en vouloir terriblement et à le faire parler sur une foule de choses, lui tendant des pièges pour surprendre ses paroles et pouvoir l'accuser ».

3. L'Apôtre conseille (1 Timothée 5.1) : « Ne rudoie pas le vieillard, honore-le comme un père. » Or les prêtres et les chefs des Juifs étaient les anciens de ce peuple. Ils n'auraient donc pas dû recevoir de durs reproches.

En sens contraire, il était prophétisé en Isaïe (Ésaïe 8.14) que le Messie serait « un caillou qui fait tomber, et une pierre de scandale pour les deux dynasties d'Israël ».

Réponse

Le salut de la multitude doit passer avant la paix de quelques individus. C'est pourquoi, quand certains empêchent par leur perversité le salut du grand nombre, il ne faut pas craindre qu'un prédicateur ou un docteur les heurte afin de pourvoir au salut de la multitude. Or les scribes, les pharisiens et les chefs des Juifs empêchaient gravement le salut du peuple par leur malice, parce qu'ils s'opposaient à l'enseignement du Christ qui seul pouvait procurer le salut, et parce qu'ils corrompaient la vie du peuple par leur conduite mauvaise. Et c'est pourquoi le Seigneur, sans se laisser arrêter par leur scandale, enseignait publiquement la vérité et leur reprochait leurs vices. Et c'est pourquoi il est rapporté (Matthieu 15.12, 14) que, les disciples de Jésus lui disant : « Sais-tu que les Juifs, en entendant cette parole, en sont scandalisés ? » Jésus répondit : « Laissez-les. Ce sont des aveugles conducteurs d'aveugles. Si un aveugle se fait le guide d'un aveugle, tous deux tombent dans un trou. »

Solutions

1. On doit éviter de scandaliser quiconque pour ne donner à personne, par une action ou une parole déplacée, une occasion de chute. « Mais quand le scandale naît de la vérité, il vaut mieux endurer le scandale qu'abandonner la vérité ». dit S. Grégoire.

2. En blâmant publiquement les scribes et les pharisiens, le Christ n'a pas empêché mais plutôt favorisé l'effet de son enseignement. Parce que, leurs vices étant connus du peuple, celui-ci n'était guère détourné du Christ à cause des paroles des scribes et des pharisiens, qui s'opposaient toujours à l'enseignement du Christ.

3. Cette parole de l'Apôtre doit s'entendre des « anciens » qui ne le sont pas seulement par l'âge et l'autorité, mais qui sont aussi des vieillards par leur dignité morale, selon les Nombres (Nombres 11.16) : « Rassemble-moi soixante-dix des anciens d'Israël, que tu connais comme de vrais anciens du peuple. » Mais ceux qui font servir à la malice le prestige de la vieillesse en péchant publiquement, il faut les condamner ouvertement et sévèrement comme l'a fait Daniel (Daniel 13.52) : « Toi qui as vieilli dans le crime... »


3. Le Christ devait-il enseigner en public ou secrètement ?

Objections

1. On lit que le Christ a dit bien des choses à ses disciples en particulier, comme on le voit dans le discours de la Cène. Aussi a-t-il dit (Matthieu 10.27) : « Ce que vous entendez à l'oreille dans votre chambre, proclamez-le sur les toits. » Donc il n'a pas tout enseigné en public.

2. On ne doit exposer qu'aux parfaits les profondeurs de la sagesse, selon S. Paul (1 Corinthiens 2.6) : « Nous parlons de sagesse parmi les parfaits. » Mais l'enseignement du Christ contenait une très profonde sagesse. Il ne fallait donc pas le communiquer à la multitude imparfaite.

3. C'est pareil, de cacher une vérité en la taisant, ou en l'enveloppant de mots obscurs. Mais, pour les foules, le Christ dissimulait la vérité qu'il prêchait sous l'obscurité de ses paroles, car « il ne leur parlait pas sans paraboles » (Matthieu 13.34). Donc, au même titre, il pouvait cacher la vérité par le silence.

En sens contraire, il y a cette parole du Christ lui-même (Jean 18.20) : « je n'ai rien dit en secret. »

Réponse

Un enseignement peut être dissimulé de trois façons.

1° Par la volonté de l'enseignant qui ne désire pas manifester son enseignement à beaucoup, mais plutôt le cacher. Cela se produit de deux façons.

Parfois cela vient de ce que l'enseignant est envieux : parce qu'il veut dominer par sa science, il ne veut pas la communiquer à d'autres. Ce qui était impossible chez le Christ, car c'est en son nom que la Sagesse parle ainsi (Sagesse 7.13) : « je l'ai apprise sans arrière-pensée ; je la communique sans envie ; et je ne cache pas sa dignité. » Mais parfois cela se produit à cause de l'immoralité de l'enseignement, dont S. Augustin nous dit : « Il y a certains maux que la pudeur humaine ne peut aucunement supporter. C'est pourquoi il est dit de la doctrine des hérétiques (Proverbes 9.17) : “Les eaux dérobées sont les plus douces.” Et c'est pourquoi le Seigneur demande (Marc 4.21) : “Est-ce que la lampe”, l'enseignement véritable et honorable, vient pour être mise sous le boisseau ?" »

Une deuxième façon d'être caché, pour un enseignement, c'est qu'on le propose à un petit nombre. Et de cette façon non plus, le Christ n'a rien enseigné en secret, parce qu'il a proposé sa doctrine ou bien à toute la foule, ou bien à tous ses disciples rassemblés. Aussi, S. Augustin remarque-t-il : « Parle-t-il dans le secret, celui qui parle devant tant de gens ? Surtout s'il parle à un petit nombre parce qu'il veut, par ceux-ci, instruire beaucoup de gens ? »

Il y a une troisième façon pour un enseignement d'être caché, qui tient à la manière d'enseigner. Et c'est ainsi que le Christ parlait aux foules de façon secrète, en employant des paraboles pour leur enseigner des mystères spirituels dont elles étaient incapables ou indignes. Et cependant il valait mieux pour elles d'entendre cette doctrine spirituelle ainsi, sous l'écorce des paraboles, que d'en être totalement privés. Cependant le Seigneur en expliquait la vérité claire et nue à ses disciples, qui la transmettraient à ceux qui en seraient capables, selon l'invitation de S. Paul (2 Timothée 2.2) : « Les enseignements que tu as entendus de moi en présence de nombreux témoins, confie-les à des hommes sûrs, capables de les transmettre à d'autres. » Et cette conduite est symbolisée par l'ordre donnée aux fils d'Aaron d'envelopper les vases du sanctuaire, que les lévites porteraient enveloppés (Nombres 4.5).

Solutions

1. Comme dit S. Hilaire en commentant la parole citée dans l'objection : « Nous ne lisons pas que le Seigneur avait l'habitude de faire des déclarations la nuit et de donner son enseignement dans les ténèbres, mais il parle ainsi parce que tout propos de lui est ténèbres pour les hommes charnels, que sa parole est obscurité pour les incroyants. C'est pourquoi ce qu'il a dit doit être annoncé parmi les incroyants avec la liberté de professer la foi. »

Ou bien, selon S. Jérôme, il faut entendre cette proposition en ce que le Christ enseignait dans un petit coin de Judée, comparativement au monde entier où la prédication des Apôtres devait répandre son enseignement.

2. Dans son enseignement, le Seigneur n'a pas manifesté aux foules toutes les profondeurs de sa sagesse, ni même à ses disciples, auxquels il a dit (Jean 16.12) : « J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant. » Cependant, tout ce que sa Sagesse a jugé digne d'être communiqué aux autres, il l'a proposé non en secret mais ouvertement, bien que tous n'en aient pas eu l'intelligence. Ce qui fait dire à S. Augustin : « Quand le Seigneur dit “J'ai parlé ouvertement”, cela veut dire Beaucoup m'ont entendu... Et d'ailleurs, ce n'était pas ouvertement car ils ne comprenaient pas. »

3. Comme nous l'avons dit à l'instant, le Seigneur parlait en paraboles aux foules parce qu'elles n'étaient ni dignes ni capables de saisir la vérité nue qu'il exposait aux disciples. Quant à l'affirmation qu'il ne leur parlait pas sans paraboles, il faut la comprendre selon S. Jean Chrysostome : cela ne concerne que ce discours précis car, d'autres fois, Jésus à enseigné beaucoup de choses sans paraboles.

Ou bien, selon S. Augustin, on dit cela « non parce qu'il n'a jamais parlé en termes propres, mais parce qu'il n'a développé presque aucun discours sans y avoir employé de paraboles, bien qu'il y ait aussi donné certains enseignements en termes clairs ».


4. Le Christ devait-il enseigner seulement par la parole, ou aussi par l'écrit ?

Objections

1. L'écriture a été inventée pour permettre de confier une doctrine à la mémoire en vue de l'avenir. Or la doctrine du Christ doit durer pour toujours, comme il l'a dit (Luc 21.33) : « Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. » Il semble donc que le Christ aurait dû confier sa doctrine à l'écriture.

2. La loi ancienne a précédé le Christ pour le préfigurer selon l'épître aux Hébreux (Hébreux 10.1) : « La loi n'avait que l'ombre des biens à venir. » Mais la loi ancienne fut écrite par Dieu, selon l'Exode (Exode 24.12) : « je te donnerai deux tables de pierre, avec la loi et les commandements que j'ai écrits. » Il semble donc que le Christ aurait dû écrire sa doctrine.

3. Puisque le Christ était venu « éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et l'ombre de la mort » (Luc 1.79), il lui appartenait d'exclure les occasions d'erreur et d'ouvrir le chemin de la foi. Mais il l'aurait fait en écrivant son enseignement. En effet, selon S. Augustin, « souvent certains s'étonnent de ce que le Christ lui-même n'ait rien écrit, si bien qu'on est obligé de croire ceux qui ont écrit sur lui. Ces gens-là et surtout les païens se le demandent sans oser inculper le Christ ou blasphémer contre lui, et ils lui attribuent une sagesse très profonde, mais en le considérant comme un homme. Ils disent que ses disciples ont accordé à leur maître plus qu'il n'était, pour déclarer qu'il est le Fils de Dieu et le Verbe de Dieu par qui tout a été fait ». Et il ajoute plus loin : « Ils semblent avoir été prêts à croire de lui ce qu'il aurait écrit de lui-même, non ce que d'autres en ont prêché à leur manière. » Il semble donc que le Christ en personne aurait dû confier par écrit son enseignement.

En sens contraire, le canon des Écritures ne contient aucun livre qui aurait été écrit par le Christ.

Réponse

Il convenait que le Christ n'ait pas mis par écrit son enseignement.

1° A cause de sa dignité. Plus un docteur est éminent, et plus le mode de son enseignement doit l'être. Et c'est pourquoi il convenait au Christ, comme au plus éminent des docteurs, de graver sa doctrine dans le cœur de ses auditeurs. C'est pourquoi il est dit en S. Matthieu (Matthieu 7.29) : « Il les enseignait comme ayant autorité. » Aussi, même chez les païens, Pythagore et Socrate, qui furent les plus éminents docteurs, ne voulurent rien écrire. En effet l'écriture n'est qu'un moyen ordonné, comme à sa fin, à graver la doctrine dans le cœur des auditeurs.

2° À cause de la supériorité de la doctrine du Christ, qui ne pouvait s'enfermer dans un texte comme il est dit en S. Jean (Jean 21.25) « Jésus a fait encore beaucoup d'autres choses si on les rapportait en détail, je ne crois pas que le monde entier pourrait contenir les livres qu'il faudrait écrire. » S. Augustin nous demande de « ne pas l'entendre en ce sens que le monde ne pourrait les loger, mais qu'ils dépassent la capacité des lecteurs ». Mais si le Christ avait consigné par écrit sa doctrine, on penserait qu'on n'y trouve rien de plus profond que ce qui est dans la formulation écrite.

3° Le Christ n'a rien écrit afin que son enseignement parvienne à tous, à partir de lui, dans un certain ordre, c'est-à-dire que lui-même instruisait immédiatement ses disciples, qui ensuite ont instruit les autres par leur parole et par leurs écrits. Tandis que, si lui-même avait écrit, son enseignement serait parvenu immédiatement à tous. Il est dit de la Sagesse de Dieu (Proverbes 9.3) « qu'elle a envoyé ses servantes inviter vers les hauteurs de la ville » à son festin.

Cependant il faut savoir, à la suite de S. Augustin que certains païens ont cru le Christ auteur de certains livres contenant des formules magiques pour ses miracles, alors que la discipline chrétienne condamne la magie. « Et cependant, ceux qui affirment avoir lu de tels livres n'opèrent rien de ce qui, dans ces livres, fait leur admiration. Par le jugement de Dieu, ils poussent si loin leur erreur qu'ils affirment que ces livres portent une dédicace à Pierre et à Paul... parce qu'en plusieurs endroits ils ont vu des peintures qui les représentaient avec le Christ... il n'est pas surprenant qu'ils aient été induits en erreur par ces peintures mêmes. Car tout le temps que le Christ a vécu avec ses disciples dans sa chair mortelle, Paul n'était pas encore son disciple. »

Solutions

1. Comme le dit S. Augustin : « Par rapport à tous les disciples qui sont ses membres, le Christ est comme la tête. Aussi, puisque c'est eux qui ont écrit ce qu'il avait montré et déclaré, on ne doit pas dire que ce n'est pas lui qui a écrit, puisque ses membres ont consigné ce qu'ils ont appris sous la dictée de la tête. Tout ce qu'il a voulu nous faire lire, au sujet de ses actions et de ses paroles, il leur a commandé de l'écrire comme s'ils étaient ses mains. »

2. Puisque la loi ancienne était donnée sous des figures sensibles, il convenait aussi qu'elle soit écrite avec des caractères visibles. Mais l'enseignement du Christ, qui est la loi de l'Esprit de vie devait être écrit « non avec de l'encre, mais par l'Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur les tables de chair du cœur », dit S. Paul (2 Corinthiens 3.3).

3. Ceux qui n'ont pas voulu croire les écrits des Apôtres sur le Christ n'auraient pas cru davantage au Christ écrivain, car ils pensaient que ses miracles étaient accomplis par des procédés magiques.


LES MIRACLES DU CHRIST

Nous étudierons : I. Leur ensemble (Q. 43). — II. Le détail des diverses catégories de miracles (Q. 44). — III. Le cas particulier de la Transfiguration (Q. 45).

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