Histoire de l'Église - Théodoret de Cyr

LIVRE I

CHAPITRE XXV
LETTRE DE CONSTANTIN À SAPOR

« EN gardant la foi, je suis éclairé de la lumière de la vérité, et en suivant cette lumière, je pénètre de plus en plus la sainte obscurité de la foi. Je fais profession de la Religion qui m'enseigne à adorer un seul Dieu, à la faveur duquel je suis parti des hors de l'Océan, et j'ai donné espérance à l'Empire, de se voir bientôt délivré de ses disgrâces. Les Provinces qui gémissaient sous la domination des tyrans ont trouvé un libérateur. Je publie la grandeur de ce Dieu qui les a secourues. Je fais porter son Étendard par mes soldats qui l'adorent, et qui par son moyen remportent des victoires très-signalées. J'avoue que j'ai toujours sa grandeur présente à l'esprit, que je le regarde dans l'élévation de sa gloire avec les yeux de l'âme, que je l'invoque à genoux. Je déteste l'effusion du sang, la mauvaise odeur qui sort des entrailles des victimes, la lumière qui est entretenue par des matières tirées de la terre, et toutes les choses dont l'erreur, et la superstition se servent pour perdre les Païens. Dieu ne saurait souffrir que les hommes abusent des biens, qu'il leur a accordés pour leur usage. Il ne demande qu'une âme pure, et une conscience irrépréhensible, dont il pèse les actions. Il se plaît à la modestie, et à la douceur. Il aime les personnes paisibles, au lieu qu'il déteste ceux qui excitent des troubles. Il chérit la foi, et punit l'infidélité. Il réprime l'orgueil, abaisse ceux qui s'élèvent, et élève ceux qui s'abaissent. Il protège les Princes qui gouvernent avec justice, affermit leur puissance, et leur donne la paix. Je ne me trompe point, mon frère, quand je reconnais que ce Dieu est le Seigneur, et le Père de tous les hommes. Plusieurs de ceux qui m'ont précédé, ont été si aveugles que de le nier. Mais leur fin a été si malheureuse, qu'elle a été proposée depuis comme un exemple funeste, qui devait détourner les autres de l'impiété. Celui que la justice Divine a poursuivi d'ici, comme un foudre jusques dans votre pays, et qui a érigé le trophée de son infamie, a été l'un d'eux. Le châtiment public, que les autres ont souffert, fait une partie de la gloire de notre siècle. J'ai été témoin de la mort déplorable de ceux qui avaient publié des lois injustes contre les peuples qui font profession du culte de Dieu. C'est pourquoi je le remercie d'avoir par un ordre particulier de sa Providence, rendu la paix à ceux qui observent sa Loi. La bonté qu'il a de réunir tous les peuples dans l'exercice de la même religion me fait espérer que notre siècle sera comblé de prospérité, et de bonheur. Quelle joie croyez-vous que je sente, quand j'apprends que les plus belles Provinces de la Perse font remplies de Chrétiens ? Je souhaite que leurs affaires, et les vôtres soient dans un état florissant, et que le Seigneur souverain de l'Univers vous soit favorable. Je mets les Chrétiens sous la protection de votre clémence, je vous les laisse entre les mains, et vous supplie de leur faire sentir les effets de votre douceur, et de votre bonté ; qui ne vous seront pas moins glorieux qu'ils nous seront utiles. »

L'Empereur estimait si fort toutes les personnes qui faisaient profession de piété, qu'il étendait ses soins jusques aux pays Étrangers, où il les allait chercher pour les délivrer de l'oppression. Sa piété fut récompensée par la protection dont Dieu le favorisa en rendant ses sujets fournis à son obéissance, et affectionnés à son service, bien qu'il en eût par toute l'Europe, et dans une grande partie de l'Afrique, et de l'Asie. Les Étrangers mêmes reconnaissaient sa puissance : les uns par un pur effet de leur liberté, et les autres après avoir été réduits par la force de ses armes. On le proclamait en tous lieux, Vainqueur, et on lui érigeait partout des trophées. Ses louanges ont été publiées plus au long par d'autres Écrivains. Pour nous continuons notre sujet.

Ce Prince qu'on ne saurait jamais assez louer, prenait des soins dignes du zèle d'un Apôtre, pendant que ceux qui avaient l'honneur d'être élevés à la dignité du Sacerdoce, bien loin de travailler à l'édification de l'Église, s'efforçaient d'en ébranler la fermeté. Ils déposèrent sur des accusations calomnieuses, ceux qui soutenaient avec plus de vigueur que les autres, la vérité de la doctrine que les Disciples du Sauveur nous ont laissée. Leur jalousie ne fut pas satisfaite de la fable monstrueuse qu'ils avaient inventée contre Eustate, ils remuèrent toute sorte de machines pour attaquer Athanase, cet autre rempart de la piété. Je décrirai cette attaque en aussi peu de paroles que je pourrai.

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