Histoire de l'Église - Théodoret de Cyr

LIVRE II

CHAPITRE XXVIII
LETTRE DU CONCILE CONTRE AËCE

Le saint Concile assemblé à Constantinople : A George Évêque d'Alexandrie, très-honoré Seigneur, salut.

« Les Évêques ont agi conformément aux règles de l'Église quand ils ont condamné les livres scandaleux, et impies d'Aëce. Ils lui ont aussi défendu d'exercer les fonctions de son ordre de Diacre, et l'ont retranché de l'Église. Ils ont encore ajouté des remontrances pour détourner les Fidèles de la lecture de ses lettres, et pour les exhorter à s'en défaire, comme d'ouvrages inutiles, et dangereux. Que s'il demeure opiniâtrement dans son sentiment, il sera frappé d'anathème, avec tous ceux qui suivront ses erreurs. Il aurait été à souhaiter que tous les Évêques qui ont assisté à ce Concile eussent détesté l'auteur des scandales, des disputes, et des tumultes qui ont troublé la paix de l'Église, et qu'ils eussent approuvé tout d'une voix la condamnation qui a été prononcée contre lui. Mais il est arrivé, contre notre espérance, autant que contre notre intention, que Serras, Étienne, Héliodore, et Théophile, et quelques autres n'ont point voulu approuver notre avis, ni signer la sentence qui a été rendue. Serras accusait cependant Aëce de s'être porté à cet excès d'extravagance, et de témérité de se vanter que Dieu lui avait révélé des secrets, qu'il avait cachés aux Apôtres. Mais bien que Serras eût témoigné qu'Aëce avait tenu des discours remplis d'une si étrange folie, et d'une si horrible insolence, ils n'ont jamais voulu approuver la condamnation, que nous avions prononcée contre lui, de quelques prières dont nous avions usé pour les fléchir, ou quelques raisons que nous ayons employées pour les convaincre.

Nous les avons supportés avec une patience toute extraordinaire, tantôt les exhortant avec douceur, tantôt les reprenant avec indignation, tantôt les priant avec instance de s'accorder avec nous. Nous avons longtemps attendu, pour voir s'ils se rendraient à la raison. Mais lorsque nous avons vu, qu'ils étaient résolus de ne point condamner Aëce, nous avons préféré les règles de l'Église, à leur amitié, et les avons déclarés retranchés de la Communion, si dans six mois ils ne changent de sentiment. Que si dans ce terme, qui leur a été accordé ils se repentent sérieusement de leur faute, qu'ils s'accordent avec leurs frères, et qu'ils consentent à la condamnation qui a été prononcée contre Aëce, ils seront reçus à la communion de l'Église, et ils jouiront dans ses assemblées de la même autorité qu'auparavant. Mais s'ils demeurent opiniâtres dans leur faute, et qu'ils préfèrent l'amitié des hommes, à l'obéissance qu'ils doivent aux Canons au soin qu'ils sont obligés d'avoir d'entretenir avec nous l'union, et la paix, nous les tiendrons alors privés de la dignité Épiscopale. Quand ils seront déposés, on en établira d'autres en leur place, afin que l'Église soit unie dans le même sentiment, que les Évêques conservent entre eux le lien de la charité, et qu'ils tiennent tous, et souhaitent les mêmes choses. Voilà ce que nous avions à vous mander, touchant ce qui a été résolu dans le Concile, priant Dieu qu'il vous fasse la grâce de l'observer, et de gouverner en paix, et selon les Canons les Églises qui vous sont soumises. »

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