Histoire de l'Église - Théodoret de Cyr

LIVRE IV

CHAPITRE VIII
LETTRE ÉCRITE PAR LES EMPEREURS VALENTINIEN ET VALENS AU DIOCÈSE D'ASIE, TOUCHANT LA CONSUBSTANTIALITÉ DU FILS DE DIEU

Les empereurs très-grands, toujours Augustes, Vainqueurs Valentinien, Valens et Gratien Aux évêques du Diocèse d'Asie, de Phrygie, de Carie, de la Phrygie Pacatienne ; Salut en notre Seigneur.

« Plusieurs Évêques s'étant assemblés en Illyrie, ils ont déclaré après un examen fort long, et fort exact que le Père, le Fils, et le saint Esprit ont une même substance. Ils tiennent tous cette doctrine, s'acquittant avec soin des fonctions de leur charge Pastorale, et rendant au Souverain Seigneur de l'Univers le culte qu'ils lui doivent. Nous avons ordonné que cette doctrine serait prêchée. Notre intention n'est pas néanmoins qu'aucun dise qu'il a suivi la Religion du Prince, sans garder les commandements qui nous sont donnés pour notre salut : car il est dit dans l'Évangile Rendez à César, ce qui appartient à César, et à Dieu, ce qui appartient à Dieu. Que dites-vous à cela vous autres Évêques, qui êtes dépositaires de la parole du salut. Si votre doctrine est conforme à celle-là, aimez-vous les uns les autres et n'abusez point de l'autorité du Prince. Ne persécutez plus ceux qui servent Dieu fidèlement, qui apaisent par leurs prières le bruit de la guerre, et qui arrêtent l'insolence des Anges rebelles. Ils chassent ces esprits malfaisants par la force de leurs oraisons, ils payent les impositions qui sont établies par les lois, et bien loin de s'opposer à notre puissance, ils obéissent aux ordres de Dieu qui est le Souverain de l'Univers et ne contreviennent point aux nôtres. Pour vous vous y avez contrevenu. Nous avons tâché de vous gouverner depuis le premier jusques au dernier, mais vous vous êtes livrés vous-mêmes. Nous devrons être innocents de vos fautes, et comme Pilate, lorsqu'il interrogeait le Sauveur, et qu'il ne voulait pas le faire mourir, ni le livrer aux Juifs, qui le demandaient, se tourna vers l'Orient, et ayant pris de l'eau, lava ses mains, en disant : Je suis innocent du sang de ce juste-là ; ainsi nous avons défendu de troubler, d'opprimer, ni de persécuter ceux qui travaillent dans le champ du Seigneur, de chasser les Procureurs du Souverain Maître, de peur que votre malice croissant sous notre règne, vous ne foulez aux pieds son Testament, avec celui qui ne porte qu'au mal, comme il arriva lorsque le sang de Zacharie fut répandu. Mais ses compagnons et ses complices ont été détruits par Jésus-Christ notre Roi, au temps de son avènement, et livrés au jugement de mort, avec le pernicieux démon qui les assiste. Cet acte a été expédié en présence de Megece, de Cicéron, de Damase, de Dailampon, et de Vetraise.

Nous vous envoyons les actes du Concile, afin que vous sachiez comment les choses s'y sont passées et nous y avons attaché la profession de foi dont voici les termes :

« Nous confessons, selon le grand et Orthodoxe Concile, que le Fils de Dieu est consubstantiel à son Père. Nous n'entendons point le terme de consubstantiel, au sens auquel quelques-uns, qui ne signèrent point sincèrement le formulaire, l'entendirent autrefois, ni auquel l'entendent encore aujourd'hui ceux qui appellent ces autres-là leurs pères, qui ruinent la force de ce terme, et qui marchent sur les pas de ceux qui ont écrit que consubstantiel signifie semblable, en tant que le fils est semblable à son Père, et n'est semblable à aucune des créatures, qui ont été faites par lui, car ceux qui expliquent ce terme de la sorte, enseignent par une horrible impiété, que le Fils de Dieu est une créature, bien qu'ils avouent que c'est une créature excellente. Nous croyons avec les Conciles, qui ont été tenus depuis peu, tant à Rome, que dans les Gaules, que le Père, le Fils, et le saint Esprit n'ont qu'une même substance en trois personnes, c'est-à-dire, en trois hypostases parfaites. Nous confessons aussi, conformément à la profession de foi composée dans le Concile de Nicée, que le Fils unique de Dieu consubstantiel à son Père, a pris chair de la sainte Vierge Marie, qu'il a conversé parmi les hommes ; que pour notre salut il a accompli tous les mystères de sa Nativité, de sa Passion, de sa Résurrection, et de son Ascension. Qu'il viendra d'une manière visible au jour du Jugement, pour rendre à chacun selon ses œuvres, et qu'il fera voir alors sa puissance divine ; parce que c'est la divinité qui a pris l'humanité, et non l'humanité qui a pris la divinité. Nous condamnons ceux qui sont dans un autre sentiment. Nous condamnons aussi ceux qui ne prononcent point de bonne foi anathème contre celui qui a dit, que le Fils n'était point avant que d'avoir été engendré, mais qu'avant que d'être actuellement engendré, il était dans le Père en puissance, car cela est commun à toutes les créatures, qui ne sont pas toujours avec Dieu, comme le Fils est toujours avec son Père, parce qu'il est engendré de toute éternité. »

Voilà ce que l'Empereur dit en abrégé dans sa lettre, touchant la doctrine. J'y ajouterai celle du Concile.

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant