Matthieu Lelièvre

Danger du cœur indécis

Nul ne peut servir deux maîtres ; car, ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre : vous ne pouvez servir Dieu et Mammon.

Matthieu 6.24

Je me suis demandé devant Dieu comment je pouvais le mieux employer ces trois prédications du dimanche matin, que je dois faire au milieu de vous avant de vous quitter pour longtemps, peut-être pour toujours… J’ai essayé de me placer dans cette situation solennelle où nous mettent les séparations qui ont un caractère définitif : un mourant à des vivants, ou un vivant à des mourants… Que vous, dirais-je, si vous ou moi nous allions mourir ? Aux inconvertis, je dirais : « Convertissez-vous ! » ; aux convertis : « Soyez des chrétiens plus conséquents et meilleurs ! … » C’est ce que je veux vous dire !

Aujourd’hui, je veux parler à cette classe si nombreuse, je le crains, parmi mes auditeurs de Nîmes, des indécis… Gens honnêtes, religieux, mais qui n’ont pas encore fait ce choix décisif en deçà duquel on n’est pas encore chrétien. Ils accepteront la franchise de mon langage : c’est celle d’un ami qui s’en va et qui veut décharger sa conscience.

L’indécision est une maladie dont je voudrais dire les symptômes, la gravité, les causes et le remède… On dit qu’il faut parler bas dans la chambre des malades ; j’estime qu’avec ceux-ci il faut oser parler fort…

I. — Symptômes. Cette maladie affecte et paralyse toutes nos facultés…

1) Incertitude de l’esprit entre la vérité et l’erreur… La critique à la place de la certitude… Qu’est-ce que la vérité ?

2) Infirmité de la volonté… Incapable de faire un choix et d’y persévérer… Le bon sens est d’accord avec Jésus pour dire que « nul ne peut servir deux maîtres »… Tentative vaine… Je voudrais ! au lieu de Je veux ! Ne savoir ni acquiescer ni résister, ni dire oui à Dieu, ni dire non au monde…

3) Hésitations du cœur qui essaye de se partager… Ses vrais besoins réclament Dieu, ses passions appellent Mammon… Dieu est digne d’être aimé, mais Mammon est si séduisant et si complaisant…

Pauvre âme indécise ! te voilà bien, tiraillée et écartelée entre tes deux maîtres : ténèbres et humanité, bien et mal, amour et égoïsme, Dieu et Mammon, tu voudrais tout concilier… Mais Jésus l’a dit : « Nul ne le peut ! »

II — Gravité.

1) Cette indécision est une infidélité… Vous reconnaissez les droits de Dieu, et vous les sacrifiez. Balancer entre Dieu et Mammon est coupable : femme qui hésiterait entre son mari légitime et un séducteur… Adultère.

2) Elle est un acte d’hypocrisie… Cette hésitation est l’indice d’un abandon secret de Dieu… On lui donne les apparences et à Mammon le cœur… « Ce peuple m’honore de ses lèvres, mais son cœur est éloigné de moi. »

3) Condamnation de l’indécision… Dieu ne sera pas dupe de sa faiblesse ou de ses calculs : a) Il repousse son culte : « Celui qui hésite est semblable aux flots… Qu’un tel homme ne s’attende pas à recevoir. » b) Il l’exclut de son royaume : « Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n’est point propre pour le Royaume de Dieu. »

III. — Causes. Comment expliquer cette irrésolution ? Influence du milieu, débilité des caractères…

1) L’amour du monde, le désir d’être approuvé de lui, l’amour du bien-être et de la fortune… Mammon, le dieu de la richesse… « Ceux qui veulent devenir riches tombent dans le piège… » La femme de Lot…

2) Le péché, celui qui « nous enveloppe aisément »… Le péché d’Agrippa, le presque-chrétien, c’était la volupté… Ce péché, vous seul le connaissez… C’est l’interdit qui doit disparaître, c’est Isaac à immoler…

3) La répugnance à accepter les sacrifices et l’opprobre de Christ…

IV. — Remèdes.

1) Un choix à faire… Rien ne peut nous en dispenser… Plutôt Mammon que l’indécision, plutôt froid que tiède… Josué ; « Choisissez qui vous voulez servir »… Elie : « Jusques à quand »… Moïse : « J’ai mis devant toi la vie et la mort : choisis la vie… » Moïse lui-même choisit « d’être affligé avec le peuple de Dieu… » Marie « choisit la bonne part… »

Ce choix implique : un renoncement à soi-même…, un don de soi-même…

2) Une grâce à recevoir : « Il lui enseignera le chemin qu’il doit choisir… »

3) Une route à tenir : « Si l’Éternel est Dieu, suivez-le… »

… Mes amis, vous avez une ambition pour votre vie. Vous la voulez heureuse, utile, vous voulez qu’elle finisse bien… Cette ambition ne peut être réalisée avec un cœur partagé : ni bonheur, ni utilité, ni fin paisible…

… Prenez Jésus-Christ pour Maître : c’est un bon Maître… L’unité rendue à votre existence… Le but atteint : les hauteurs sereines et glorieuses de la vie. Dieu tout en tous.

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