Dieu et mes sous

Première partie : POUR RÉFLÉCHIR

LE BILLET DE CINQ CENTS FRANCS

Que votre conduite ne soit pas inspirée par l’amour de l’argent ; contentez-vous de vos biens actuels car Dieu lui-même a dit : Je ne te délaisserai pas ni ne t’abandonnerai.

Hébreux 13.5

Des confessions ?

J’en ai entendu des centaines et de tout acabit, parfois compromettantes au plus haut chef : Le vol, le crime, l’adultère… Et pourtant, durant quarante années d’itinérance, je n’ai pas trouvé sur ma route un seul chrétien qui ait osé me dire : « Je suis attaché aux richesses et dois reconnaître mon avarice. Après tout, j’aime les sous… »

Pourquoi donc cet aveu est-il quasiment inconnu dans l’Eglise de Jésus-Christ ? Parce qu’il doit nécessairement s’accompagner d’actes de générosité. Qui s’humilie d’avoir aimé l’argent est tenu de délier sa bourse ou de distribuer certains biens qu’il chérit, s’il ne veut être accusé d’hypocrisie. Là est l’obstacle majeur qui retient quiconque découvre sa cupidité. Hélas ! On ne s’avoue pas volontiers adorateur de Mamon (1) sur notre planète. Faudrait-il, déjà, être enclin à la générosité pour s’accuser d’en manquer ? Justement !

(1) Puissance démoniaque dont l’homme cupide se fait l’esclave et dont le service est incompatible avec le service de Dieu (Luc 16.13 ; Matthieu 6.24). Dict. Encyclopédique de la Bible.

Un paysan reconnu pour ses largesses me raconta le fait suivant. Lors d’une journée missionnaire, il décida de glisser un gros billet dans la collecte. Peu avant l’offrande, il ouvrit son porte-feuille et en exhuma les 500 francs qu’il avait préparés (une somme rondelette à l’époque). Or, en dépliant le billet, il en trouva un de cent francs :

– Bah ! dit-il, cent francs suffiront bien.

Avec un certain soulagement, il rangea les 500 francs sauvés in extremis et, ce faisant, il découvrit dans les plis du porte-feuille un billet de … 50 francs.

— 50 francs, c’est déjà pas si mal ! Que chacun en donne autant et l’offrande sera bonne.

Et d’introduire son billet dans le tronc, la conscience à l’aise. En généreux donateur, il rentra à la maison et s’endormit du « sommeil du juste ».

Le lendemain, tôt levé, il se rendit à l’étable comme à l’accoutumée et trouva sa plus belle vache étendue sur le sol, morte certainement depuis la veille. peut être à l’instant précis où il rangeait son billet de 500 francs ! Interloqué, muet, ce bon chrétien ne tarda pas à comprendre. Dieu le rappelait à l’ordre. Brutalement, car le langage était on ne peut plus clair. Repris dans sa conscience et convaincu d’avoir volé son Seigneur, il s’humilia et, sur le champ, remplit un chèque de 500 francs à l’ordre de la mission.

Dieu serait-il contraint de frapper si fort pour alerter les siens et démasquer à leurs yeux l’idole qu’ils feignent d’ignorer ? Comme nous sommes peu enclins à donner ou, selon l’Ecclésiaste, à « jeter notre pain sur la face des eaux » (chap. 11, v.1) !


♦   ♦

A la décharge de nombreux croyants, force est d’admettre qu’ils ne sont guère incités à vider leur bas de laine pour l’avancement du règne de Dieu. On se plaît, semble-t-il, à les laisser dans l’ignorance, la question financière étant jugée par d’aucuns si peu importante et surtout, si peu spirituelle. Parler de « sous » dans l’église est presque déshonorant, en tout cas peu digne d’un chrétien. Aussi s’abstient-on d’y faire allusion la plupart du temps. Or Jésus était loin d’être de cet avis, lui qui a parlé abondamment des richesses, bien plus que du ciel ou de l’enfer ! Une parabole sur deux a trait à l’argent ou aux biens matériels et le Sauveur traite sans la moindre gêne de l’acquisition, de la gestion ou du mauvais emploi de ces richesses.

En gardant le silence sur ces questions on en a fait un sujet tabou. Qu’on ne s’étonne pas alors si les chrétiens sont si peu motivés lorsqu’il s’agit de donner. Ils versent leur obole sans enthousiasme comme dans un gouffre obscur, sans réfléchir davantage puisqu’on leur laisse croire, en ne les informant pas, qu’ils n’ont pas le droit de savoir. Qui, par exemple, a une idée du montant de l’offrande recueillie le dimanche matin ? De la somme versée à un visiteur de passage, évangéliste ou missionnaire ? De l’importance du don consacré à l’œuvre que soutient l’église ? … (Vous qui lisez ces lignes, seriez-vous en mesure de répondre à de telles questions ?). Pourquoi donc laisser planer le mystère sur des éléments que chacun gagnerait à Connaître ?

Certes, rien n’empêche tel membre de la communauté d’aller tirer la sonnette du pasteur ou d’un ancien pour être éclairé sur ce point. Gêné, il s’en abstient car la démarche est délicate. Interroger le trésorier, n’est-ce pas le suspecter ?

– C’est faux, me rétorquera-t-on. Les chrétiens sont informés et il leur est loisible de connaître avec précision la marche financière de l’église locale.

– C’est vrai !

En effet, chaque année, les finances sont évoquées lors de l’Assemblée générale. En cette occasion exceptionnelle, le trésorier est invité à produire ses comptes après une série de longs rapports plus ou moins fastidieux. Il le fait généralement au triple galop comme s’il était coupable de dévoiler sa gestion ou d’utiliser un langage quelque peu technique, hermétique pour certains. Alors, il jette une pluie de chiffres sur un auditoire somnolent lequel patauge entre les « débits » et les « crédits ». Toutefois, si le moindre déficit est signalé, l’occasion sera fournie à l’assemblée de faire « encore un petit effort » pour le combler. Culpabilisés un court instant, les membres présents accompliront volontiers le geste demandé pour apaiser le trésorier aux abois. Chacun sera remercié avec chaleur et l’on se séparera convaincu d’avoir fait tout son devoir ; il n’y a pas lieu de débourser un sou de plus !

Curieuse éducation !

Ne devrait-on pas veiller à ce que chacun soit très au clair sur les questions d’argent dans l’église ? Surtout, ne faudrait-il pas éduquer avec soin les membres encore jeunes dans la foi afin qu’ils prennent très tôt de bonnes habitudes et se montrent généreux pour le Seigneur et son œuvre ? Leur vie spirituelle en serait affermie. J’ai connu une communauté où l’on précisait chaque dimanche le montant de l’offrande précédente. Ainsi, sans invitation ou pression particulière, les fidèles étaient-ils rappelés à l’ordre s’il le fallait, simplement en constatant un fléchissement de la libéralité au sein de l’assemblée. Le pasteur et son trésorier ne peuvent être seuls à porter le poids des finances de l’église. La communauté tout entière doit être concernée sans que l’on soit obligé, périodiquement, de la supplier par des appels au porte-monnaie. Une église qui mendie c’est toujours pitoyable. Le croyant trouverait plus de joie à donner en se conformant aux enseignements de l’Ecriture qu’en répondant sous le coup de l’émotion aux appels financiers.

QUESTIONS

  1. Etes-vous au courant de la marche financière de votre église ou de telle œuvre qui vous tient à cœur ? Avez-vous une idée du montant de l’offrande dominicale dans votre paroisse ?
  2. Ne pourriez-vous pas suggérer à votre pasteur d’aborder clairement les responsabilités financières du croyant en fournissant un enseignement basé sur l’Ecriture ?
    Reconnaissez que Dieu ne s’est jamais montré mesquin à votre égard.

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